CA Paris, 4e ch. A, 20 septembre 2006, n° 05-10072
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Christian Dior Couture (SA)
Défendeur :
Victoria Casal (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Carre-Pierrat
Conseillers :
Mmes Magueur, Rosenthal-Rolland
Avoués :
SCP Hardouin, SCP Baskal Chalut-Natal
Avocats :
Mes Escande, Hoffman Attias
Vu l'appel interjeté, le 2 mai 2005, par la société Christian Dior Couture, ci-après la société Dior, d'un jugement rendu le 10 décembre 2004 par le Tribunal de commerce de Paris qui:
* l'a déclarée mal fondée et déboutée de l'ensemble de ses demandes,
* a débouté la société Victoria Casal de ses demandes reconventionnelles,
* l'a condamnée à verser à la société Victoria Casal la somme de 5 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens;
Vu les dernières conclusions signifiées le 14 mai 2006, aux termes desquelles la société Christian Dior Couture, poursuivant l'infirmation du jugement déféré demande à la cour de:
* juger que la société Victoria Casal, en adoptant un nom proche de celui de Victoire de Castellane sous lequel elle communique massivement et des mêmes thèmes de collection, en commercialisant des bijoux qui évoquent ceux créés par Victoire de Castellane, en leur donnant des noms qui s'inspirent de ceux donnés par Victoire de Castellane à ses bagues, en communiquant selon un visuel proche de celui qu'elle exploite et en adoptant un discours dans la presse similaire à celui tenu par Victoire de Castellane, a détourné à son profit et donc dilué la notoriété qu'elle a acquise dans ce secteur d'activité et s'est ainsi rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire à son encontre sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil,
* interdire à la société Victoria Casal la poursuite de ces actes de concurrence déloyale et parasitaire et ceci sous astreinte de 2 000 euro par infraction constatée, dès la signification de l'arrêt à intervenir,
* juger qu'en application de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991, les astreintes prononcées seront liquidées, s'il y a lieu, par la cour,
* condamner la société Victoria Casal à lui verser, en réparation du préjudice qu'elle lui a causé, la somme de 100 000 euro,
* ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou revues, de son choix et aux frais de la société Victoria Casal à raison de 5 000 euro par insertion et ce, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires,
* condamner la société Victoria Casal à lui payer la somme de 30 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;
Vu les ultimes conclusions, en date du 15 mai 2006, par lesquelles la société Victoria Casal, poursuivant la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle, demande, par la voie d'un appel incident, à la cour de:
* condamner la société Christian Dior Couture à lui payer la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* ordonner l'insertion du jugement à intervenir dans cinq journaux de son choix et aux frais avancés de la société Christian Dior Couture, sans que le coût total de ces insertions ne puisse excéder la somme de 8 000 euro HT,
* condamner la société Christian Dior Couture à lui payer la somme de 30 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;
Sur ce, LA COUR
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il suffit de rappeler que:
* la société Christian Dior Couture a, en mai 1999, lancé la première collection Dior Joaillerie en même temps que l'ouverture de la première boutique Dior Joaillerie, située avenue Montaigne à Paris.
* la société Christian Dior Couture a choisi d'associer à ses services création, Victoire de Castellane créatrice de bijoux qui se caractérisent par leur excentricité, leur caractère ludique et démesuré, tout en restant dans la tradition du patrimoine et de l'histoire de la maison Dior,
* au cours de l'année 2002, la société Christian Dior Couture a constaté que Tamara Barrier créait des bijoux de haute joaillerie et de fantaisie, sous le pseudonyme de Victoria Casal, pour le compte d'une société éponyme, constituée en octobre 2000, ayant, le 19 septembre 2000, déposé la marque Victoria Casal en puisant, selon la société appelante, systématiquement et de manière subtile dans les créations, thèmes et discours constituant l'univers des collections créées par Victoire de Castellane,
* la société Christian Dior Couture, considérant qu'une conjonction d'éléments démontre la volonté de la société Victoria Casal de se placer dans son sillage afin de détourner à son profit sa notoriété et son succès, a engagé la présente instance en concurrence déloyale et parasitaire;
Considérant, en droit, que constitue, d'une part, un acte de concurrence déloyale tout acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle et commerciale et que, notamment, doivent être interdits tous faits quelconques de nature à créer une confusion par n'importe quel moyen avec les produits ou l'activité commerciale de concurrents, et, d'autre part, un acte de concurrence parasitaire la circonstance selon laquelle une personne, à titre lucratif et de façon injustifiée, s'inspire ou copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fait d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements;
Considérant que pour apprécier l'existence des faits argués de concurrence déloyale et parasitaire, il convient d'analyser les différents griefs formés à l'encontre de la société Victoria Casal, par la société Dior, dans une approche globale et non en les examinant, ainsi que le tribunal a, à tort, procédé, de manière individuelle et sans les mettre en perspective les uns avec les autres;
Considérant, en l'espèce, que, en premier lieu, la société Victoria Casal est, contrairement au moyen par elle soulevé, en situation de concurrence avec la société Dior;
Qu'en effet, elles exercent toutes deux, ainsi qu'il en est justifié aux débats, leur activité dans le domaine de la haute joaillerie, même si la société Victoria Casal propose certaines de ses créations à des prix plus "accessibles", étant, en outre, relevé que chaque société dispose d'une boutique Place Vendôme, à Paris;
Que c'est tout aussi vainement que la société intimée entend démontrer que les clientèles visées seraient différentes au motif qu'elle s'adresserait à la femme romantique et douce, tandis que la société Dior viserait la femme combative et affirmée, une telle affirmation qui ressort du domaine de la communication, n'étant étayée par aucune donnée sociologique ou économique;
Considérant, en deuxième lieu, que la société Dior justifie, par la production de catalogues et d'articles de presse, qu'elle a très largement communiqué, en consacrant un budget promotionnel important tant en direction des consommateurs que de la sphère plus spécifique du milieu de la mode, sur le nom de Victoire de Castellane pour lancer ses lignes de bijoux; qu'en effet, une telle personnalisation ne peut être sérieusement contestée comme en attestent les nombreux articles de la presse féminine mais également économiques versés aux débats et au nombre desquels il est fait état dans l'hebdomadaire Elle (avril 1999) : "Fait rarissime, c'est une jeune femme, Victoire de Castellane, qui crée ce mois-ci le département haute joaillerie de la maison Dior. Son parti pris: des formes originales et anticonformistes";
Considérant, en troisième lieu, que la société Dior fait grief à la société Victoria Casal d'avoir, d'abord, fait le choix d'un nom volontairement proche de celui de la créatrice Victoire de Castellane, sous le nom de laquelle sont présentés, ainsi qu'il l'a été précédemment relevé, les bijoux de haute joaillerie qu'elle commercialise, aussi bien dans la presse spécialisée que grand public ou encore dans les catalogues présentant ses collections, de sorte que la société intimée n'est pas fondée à soutenir que la créatrice de la maison Dior ne serait pas connue dans le milieu de la mode;
Que, par ailleurs, la circonstance selon laquelle une personne dénommée Victoire de Taillac travaille dans le domaine de la mode ou qu'une bijouterie ait pour nom Castellane, n'est pas de nature à banaliser le nom de Victoire de Castellane qui, à la différence de ces deux dénominations, jouit d'une renommée avérée liée à sa personne et à sa qualité de créatrice;
Que, en revanche, le nom litigieux Victoria Casal qui n'est pas seulement utilisé comme nom commercial ou dénomination sociale, mais également comme nom de la créatrice au sein de la société, Tamara Barrier, qui en a fait son pseudonyme, procède d'une démarche purement intellectuelle dont il n'est pas justifiée qu'elle trouve son fondement ou se rattache, contrairement aux allégations de la société intimée, à une situation familiale, historique ou culturelle préexistante;
Que la création de cette dénomination et de ce pseudonyme, intervenue deux ans après la création de la collection de bijoux Dior Joaillerie, par Victoire de Castellane et concomitamment à l'époque où cette collection rencontre le succès, ne parait donc pas le fruit du hasard d'autant qu'il est établi que Tamara Barrier a fait en sorte d'assurer la promotion des bijoux de la société Victoria Casal, dont elle n'est que la créatrice, sous son pseudonyme, adoptant ainsi un parallélisme de comportement avec la société Dior et sa créatrice Victoire de Castellane;
Qu'en effet, le prénom choisi est quasiment identique à celui de la créatrice des bijoux de la société appelante,
Victoire
Victoria,
associé à un pseudonyme très proche composé de cinq lettres toutes comprises dans le patronyme Castellane et dont les trois premières "cas" sont placées dans le même ordre que les trois premières lettres de ce patronyme;
Qu'il convient de relever que cette proximité, entre le pseudonyme Victoria Casal et le patronyme de Victoire de Castellane, a été une cause de confusion, notamment, pour les journalistes ainsi qu'en atteste un article paru dans le journal Fashion Daily News, daté du 24 juin 2005, qui fait référence à la créatrice Victoria Casal, utilisant le chat fétiche pour Dior ou encore le site de vente aux enchères en ligne ebay qui propose des colliers, bracelets et boucles d'oreille Hello Kitty Girly Dior, alors que c'est la société Victoria Casal qui est titulaire de la licence Hello Kitty pour des bijoux et, encore, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de constat dressé, le 15 février 2005 par Me Legrain, huissier de justice, de la mention faite, sur le moteur de recherche internet Google, d'un article du site France 5 intitulé, L'atelier de la mode Victoire de Castellane suivi du résumé C'est Victoria Casal, une jeune créatrice de bijou qui... ;
Considérant que la société Dior fait, ensuite, grief à la société Victoria Casal d'avoir repris les thèmes développés par Victoire de Castellane pour la collection Dior Joaillerie, à savoir le nœud et le jardin de M. Dior ainsi que le bal des excentriques;
Qu'il est justifié, par les nombreux documents versés aux débats, que:
* le thème du nœud est présent de façon récurrente sur les robes créées par Christian Dior, mais également sur le flacon d'origine du parfum Miss Dior ou encore sur des accessoires de haute-couture, de la société Dior, de même que les bijoux Nœud portés lors des défilés collection Dior de 1947 à 1957;
* le thème du jardin appartient également à la tradition de la maison Dior (cf extraits de l'ouvrage Les signes de reconnaissance de la maison Christian Dior);
Or, considérant qu'il est établi que ces thèmes ont été très largement repris par la société Victoria Casal à l'occasion de sa première collection à travers les bagues Mamzelle, Me Croirez-Vous et Ô Mon Amour pour le thème du nœud et les bagues Tant Aimé, Poudre de Rose, Demoiselles Qui Jardinent, Poupée de Chine et Joli Coquelicot pour celui du jardin;
Que si l'exploitation de ces thèmes ne saurait être réservée à la société Dior, leur reprise par la société Victoria Casal n'en demeure pas moins un des éléments qui doit être pris en considération dans la caractérisation des pratiques imputées à la société Victoria Casal;
Considérant que la société Dior fait, encore, grief à la société Victoria Casal d'avoir commercialisé des bagues évoquant celles créées par Victoire de Castellane pour Dior joaillerie et l'exploitation d'un visuel proche:
Que, force est de constater qu'il résulte de l'examen comparatif des bagues auquel la cour s'est livrée, que sur 17 bagues présentées dans le catalogue de la première collection de la société Victoria Casal, sept s'inspirent à l'évidence de bagues créées antérieurement par Victoire de Castellane pour la maison Dior, à savoir:
* la bague Gwendoline de Dior/Poudre de Rose de Victoria Casal, composée d'un anneau surmonté de plusieurs roses,
* la bague Précieuse de Dior/Sirena de Victoria Casal, constituée d'une améthyste à facettes, de forme rectangulaire, s'insérant dans un large anneau en or blanc composé de volutes pavées de diamants et d'améthystes, procurant un même effet de contraste,
* la bague Belle de Nuit de Dior/Beauté de Toujours de Victoria Casal, composée d'une pierre ovale montée sur griffes avec deux petites pierres taillées en poire sur les côtés,
* la bague Capricieuse de Dior/Me Croirez-Vous de Victoria Casal, combine une pierre centrale de forme carrée à quatre petits nœuds à chacun des angles de la pierre centrale,
* la bague Premier Bal de Dior/Mamzelle de Victoria Casal, composée d'un gros nœud plein central pavé de diamants surmontant un anneau,
* la bague Tralala de Dior/O Mon Amour de Victoria Casal, composée d'un nœud fin, pavé de diamants, surmontant un anneau,
* la bague Gourmande de Dior/Gourmandise de Victoria Casal, composée d'un cabochon en pierre de couleur et d'un anneau en or et déclinée en trois couleurs;
Que, en outre, le visuel choisi par la société Victoria Casal pour présenter ses trois bagnes Gourmandise reprend celui adopté antérieurement par la société Dior pour assurer la promotion en France et à l'étranger de ses bagues Gourmande, à savoir une déclinaison en trois couleurs, nombre résultant d'un choix arbitraire, présentées en arc de cercle sur un fond de décor uni; que les deux pièces versées aux débats par la société Victoria Casal sont insuffisantes à justifier que ce visuel ne constituerait qu'une reprise d'une présentation classique en joaillerie, étant précisé que la société appelante invoque, de manière inopérante, la circonstance selon laquelle elle aurait retenu une présentation différente de celle du visuel de la société Dior, alors qu'elle s'est bornée à inverser le sens du demi-cercle constitué par les trois bagues;
Que, au surplus, contrairement à l'appréciation des premiers juges, les pièces versées aux débats démontrent que les bijoux de la maison Dior ont été créés par Victoire de Castellane et mis sur le marché avant ceux de la société Victoria Casal;
Que la société intimée conteste, tout aussi vainement, l'originalité des bijoux de la société Dior dès lors que, d'une part, l'action en concurrence déloyale et parasitaire engagée par cette société étant fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil, est indépendante de la notion d'originalité et que, d'autre part, la société appelante ne prétend pas que les bijoux de la société Victoria Casal constitueraient des copies serviles des bijoux créés antérieurement par Victoire de Castellane;
Considérant que la société Dior fait, également, grief à la société intimée d'avoir donné à certains de ses bijoux des dénominations proches de celles qu'elle avait, antérieurement, retenues;
Qu'il convient effectivement de relever la proximité des dénominations suivantes:
* Belle de Nuit pour Dior et Belle de Jour pour la société Victoria Casal,
* Gourmande pour Dior et Gourmandise pour la société Victoria Casal;
Que la société intimée ne démontre pas que ces noms désignaient d'autres bijoux sur le marché à l'époque des collections en cause; que, en effet, la circonstance, invoquée par la société intimée, selon laquelle le magazine Elle ait intitulé l'un de ses articles Belle de Jour est inopérant dès lors que cette publication de mai 2002 est postérieure à l'adoption de cette dénomination par la société Victoria Casal, de même que la référence à la marque Belle de Nuit, déposée en 1985 par La Parfumerie Fragonard, pour désigner des parfums et non des bijoux;
Considérant que la société Dior relève, enfin, de nombreuses similitudes dans les discours tenus dans la presse par Victoria Casal avec ceux, antérieurs, de Victoire de Castellane, notamment les références faites à leurs grand-mères comme source d'inspiration, aux pierres fines, à la gourmandise, aux bijoux cachés, à la haute couture, au style Girly, aux bijoux qui racontent des histoires ou encore aux maxi-mini bijoux;
Que si la similitude de certains des sujets abordés par l'une et l'autre des créatrices et la façon de les traiter ressortissent naturellement par leur généralité de l'ordre des préoccupations et réflexions de tout professionnel de la mode, il convient toutefois de noter qu'il n'en est pas de même de:
* la référence à l'univers familial, ainsi Victoire de Castellane présente sa grand-mère comme la source de son inspiration : "Cette fascination pour les beaux cailloux, elle la tient - avec beaucoup de traits de caractère - de sa grand-mère" (Madame Figaro avril 1999) ; "Sa grand-mère qui l'a élevée, assortissait chaque jour ses bijoux à ses vêtements" (Citizen K hiver 2001) ; " Elevée par une grand-mère "très femme aux bijoux" " (Atmosphère mai 2001) et, s'agissant de Victoria Casal : "Victoria Casal a grandi auprès de sa grand-mère qui lui a fait découvrir l'univers des pierres précieuses. Depuis sa plus tendre enfance Victoria Casal dessine, invente et griffonne ses bijoux" (vogueparis.com/A World of Dreams juin 2001), alors qu'il résulte des propres écritures de la société intimée que Victoria Casal tiendrait sa "légitimité familiale" de son mari, petit-fils de la maison Barrier, dont la grand-mère aurait été la fondatrice de la maison Barrier & Fils notoirement connue en matière de joaillerie, avec lequel elle a créé la société Victoria Casal, de sorte que la grand-mère de Victoria Casal parait bien étrangère à la vocation de celle-ci,
* la référence à la gourmandise, Victoire de Castellane y fait une mention très explicite depuis le lancement, en 1999, de la collection des bijoux de la maison Dior (cf pièces n° 26, 59, 68, 71, 73, 70, 79 et 85) alors que Victoria Casal a placé ses créations sous le slogan La gourmandise n'est plus un péché (catalogue 2002 de la société Victoria Casal),
* la référence aux bijoux cachés, Victoire de Castellane : "J'ai caché des petites surprises dans mes bijoux : derrière le collier Diorissimo, j'ai ainsi dissimulé une petite abeille en or et en diamant" (Luxe and Co janvier/février 2000) et concernant Victoria Casal : "Sa marque de fabrique est d'ailleurs un petit diamant caché dans chacune de ses bagues" (CB news décembre 2001),
* la référence à l'univers Girly, la société Dior justifie exploiter depuis le printemps 2004 une ligne Girly (pièces n° 50 à 53, 102 à 105) de la même façon Victoria Casal dit aimer les univers très girly (L'Officiel novembre 2004) ; que la société Victoria Casal ne produit aucun document de nature à justifier de ses allégations selon lesquelles elle serait à l'origine de la mode girly, le procès-verbal de constat, dressé le 8 février 2006, étant, au regard de cette date, inopérant à combattre les éléments précités qui ont été justifiés par la société Dior;
Considérant qu'il résulte de l'appréciation globale de l'ensemble de ces éléments, ressemblances existant entre les noms des créatrices et ceux de certains bijoux, entre les thèmes développés et les différentes bagues, similarités dans les discours tenus par les créatrices que, d'une part, le comportement de la société Victoria Casal est susceptible de créer un risque de confusion dans l'esprit d'un consommateur moyen qui peut accroire que cette société appartient au même groupe ou est une filiale de la société Dior et que, d'autre part, indépendamment de tout risque de confusion, la société intimée s'est immiscée dans le sillage de cette société en profitant indûment des efforts créatifs, du succès et des investissements réalisés par la société Dior pour les collections Dior Joaillerie;
Qu'il s'ensuit que la société Victoria Casal a commis à l'encontre de la société Dior des actes de concurrence déloyale et parasitaire, de sorte que le jugement déféré sera infirmé;
* Sur les mesures réparatrices
Considérant que les agissements déloyaux et parasitaires de la société Victoria Casal ont nécessairement causé un préjudice à la société Dior en détournant la notoriété attachée à l'activité de Victoire de Castellane et en entraînant une dilution de l'identité de la société appelante; que, en outre, ces agissements ont permis à la société Victoria Casal de réaliser des économies substantielles de conception, création et promotion, et de bénéficier du courant d'achat établi en faveur des bijoux créés par Victoire de Castellane pour la société Dior;
Que c'est donc vainement que la société intimée entend se placer uniquement sur le terrain du chiffre d'affaires généré par la commercialisation des bijoux de la société Dior;
Qu'il s'ensuit que la somme de 75 000 euro sera allouée à titre de dommages et intérêts à la société Dior en réparation du préjudice qu'elle a subi en raison des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société Victoria Casal à son encontre;
Qu'il convient, en outre, d'autoriser la société Dior à faire publier le présent arrêt suivant les modalités prévues à son dispositif;
Considérant que, en revanche, il ne sera pas fait droit à la mesure d'interdiction sollicitée par la société appelante en raison de la formulation en termes généraux de cette demande ; qu'il appartiendra éventuellement à la société Dior de mettre en œuvre toute procédure qu'elle estimera utile si de nouveaux actes illicites devaient être commis;
* Sur les autres demandes
Considérant qu'il résulte du sens du présent arrêt que la société Victoria Casal doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes;
Considérant que, l'équité commande de condamner la société Victoria Casal à verser à la société Dior une indemnité de 30 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Par ces motifs, Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté la société Victoria Casal de ses demandes reconventionnelles, Et, statuant à nouveau, Dit que la société Victoria Casal a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre de la société Christian Dior Couture, Condamne la société Victoria Casal à payer à la société Christian Dior Couture la somme de 75 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice par elle subi, Condamne la société Victoria Casal à verser à la société Christian Dior Couture une indemnité de 30 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Victoria Casal aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.