CJCE, 6e ch., 20 mai 1992, n° C-106/91
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ramrath
Défendeur :
Ministre de la Justice, Institut des réviseurs d'entreprises
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Schockweiler
Avocat général :
M. Jacobs
Juges :
MM. Mancini, Kakouris, Díez de Velasco, Murray
Avocats :
Mes Delaporte, Kremer, Kinsch Wagner
LA COUR (sixième chambre),
1 Par arrêt du 12 mars 1991, parvenu à la Cour le 3 avril suivant, le Conseil d'État du Luxembourg a posé, en vertu de l'article 177 du traité CEE, deux questions préjudicielles concernant l'interprétation des dispositions du traité CEE relatives à la libre circulation des personnes.
2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant M. Ramrath au ministre de la Justice luxembourgeois (ci-après "ministre"), en présence de l'Institut des réviseurs d'entreprises.
3 Le litige porte sur le retrait, ordonné en 1989 par le ministre, de l'agrément de réviseur d'entreprises dont bénéficiait M. Ramrath.
4 La profession de réviseur d'entreprises est organisée au Luxembourg par la loi du 28 juin 1984 (publiée au Mémorial 1984, p. 1346). L'article 3 de cette loi dispose que
"Le contrôle légal des documents visés à l'article 1er ne peut être effectué que par des personnes agréées par le ministre de la Justice.
1) les personnes physiques doivent, pour obtenir l'agrément, satisfaire aux conditions suivantes:
a) être ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne ...
b) fournir les preuves de qualification et d'honorabilité professionnelles ...
c) avoir au Luxembourg un établissement professionnel.
2) Les personnes morales doivent, pour obtenir l'agrément, satisfaire aux conditions visées au paragraphe 1, sous a) et c), et à celles qui suivent:
a) les personnes physiques qui effectuent le contrôle légal des documents visés à l'article 1er au nom de la personne morale doivent satisfaire aux conditions prévues au paragraphe 1 ci-avant et avoir pouvoir pour engager la personne morale;
...
3) Le ministre de la Justice retire l'agrément aux personnes qui ne remplissent plus l'une des conditions énumérées ci-avant ..."
5 Aux termes de l'article 6 de la loi précitée,
"La profession de réviseur d'entreprises est incompatible avec toute activité de nature à porter atteinte à l'indépendance professionnelle de son titulaire. Celui-ci ne peut occuper un emploi salarié, si ce n'est auprès d'une personne agréée en vertu de l'article 3."
6 Sur le plan communautaire, l'agrément des réviseurs d'entreprises fait l'objet de la huitième directive 84-253-CEE du Conseil, du 10 avril 1984, fondée sur l'article 54, paragraphe 3, sous g), du traité CEE, concernant l'agrément des personnes chargées du contrôle légal des documents comptables (JO L 126, p. 20, ci-après "huitième directive").
7 L'article 3 de cette directive a la teneur suivante:
"Les autorités d'un État membre n'accordent leur agrément qu'à des personnes honorables et n'exerçant aucune activité incompatible, en vertu du droit de cet État membre, avec le contrôle légal des documents visés ..."
8 Les articles 23, 24, 25 et 26 de la section III, intitulée "Conscience professionnelle et indépendance", de la huitième directive ont la teneur suivante:
"Article 23
Les États membres prescrivent que les personnes agréées pour le contrôle légal des documents visés à l'article 1er, paragraphe 1, exécutent ce contrôle avec conscience, professionnelle.
Article 24
Les États membres prescrivent que ces personnes ne peuvent effectuer un contrôle légal lorsqu'elles ne sont pas indépendantes selon le droit de l'État membre qui l'impose.
Article 25
Les articles 23 et 24 s'appliquent également aux personnes physiques qui satisfont aux conditions fixées aux articles 3 et 19 et effectuent le contrôle légal des documents visés à l'article 1er, paragraphe 1, au nom d'une société de contrôle.
Article 26
Les États membres s'assurent que les personnes agréées sont passibles de sanctions appropriées lorsqu'elles n'effectuent pas le contrôle conformément aux articles 23, 24 et 25."
9 Le 11 février 1985, le ministre a accordé à M. Ramrath l'agrément permettant d'exercer l'activité de réviseur d'entreprise. A l'époque, M. Ramrath était salarié de la société civile Treuarbeit établie à Luxembourg (ci-après "Treuarbeit Luxembourg"), qui, en tant que personne morale, bénéficiait également d'un tel agrément pour le Luxembourg.
10 En 1988, M. Ramrath a déclaré qu'il était désormais salarié de la société Treuarbeit établie à Düsseldorf (ci-après "Treuarbeit Düsseldorf") en Allemagne et que son établissement professionnel était situé dans cette ville. Tout en précisant que tant lui-même que Treuarbeit Düsseldorf étaient agréés comme réviseurs d'entreprises par les autorités allemandes, M. Ramrath ajoutait que Treuarbeit Düsseldorf avait renoncé à exercer une quelconque influence sur lui lorsque Treuarbeit Luxembourg lui demandait de faire des révisions au Luxembourg. Treuarbeit Luxembourg a précisé par la suite que lors des travaux effectués par M. Ramrath au Luxembourg et pour la durée de ceux-ci il était en fait employé par elle.
11 Le 19 mai 1989, le ministre a retiré à M. Ramrath son agrément au motif, d'une part, qu'il aurait implicitement admis, en indiquant que son adresse professionnelle était à Düsseldorf, ne plus disposer d'un établissement professionnel au Luxembourg, au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous c), de la loi du 28 juin 1984, et, d'autre part, qu'en étant salarié de Treuarbeit Düsseldorf il ne remplirait plus la condition d'indépendance professionnelle posée par l'article 6 de cette loi.
12 A l'appui de son recours contre cette décision du ministre, M. Ramrath fait notamment valoir devant le Conseil d'État luxembourgeois qu'il est victime d'une discrimination. En effet, la loi du 28 juin 1984 admettrait comme compatible avec l'indépendance professionnelle le fait qu'un réviseur d'entreprises soit salarié d'une personne morale agréée comme telle par les autorités luxembourgeoises, alors qu'elle ne permettrait pas qu'un réviseur soit salarié d'une personne morale agréée comme réviseur d'entreprises par les autorités d'un autre État membre, quand bien même la législation de cet État prévoirait des exigences similaires d'indépendance à l'égard des agents économiques.
13 Le Conseil d'État luxembourgeois a, par arrêt du 12 mars 1991, sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice se soit prononcée, à titre préjudiciel, sur les questions suivantes :
"1) a) Est-ce que les articles 52 et suivants, ou toute autre disposition du traité et des textes édictés pour leur exécution, autorisent les autorités compétentes d'un État membre à considérer comme incompatible avec l'exercice, par une personne physique, de la profession de réviseur d'entreprises dans cet État membre l'établissement de la même personne en qualité de réviseur d'entreprises dans un autre État membre ?
et en cas de réponse négative,
b) est-ce qu'un État membre peut exiger d'une personne qui est habilitée à exercer la profession de réviseur d'entreprises dans un autre État membre, où elle a également un établissement professionnel, des conditions relatives à la permanence d'une infrastructure pour l'accomplissement de ses travaux, des conditions minimales relatives à la présence effective dans cet État membre et des conditions nécessaires au contrôle de l'observation des règles déontologiques ?
2) Est-ce que les articles 52 et suivants du traité de Rome, ou toute autre disposition du traité et des textes édictés pour leur exécution, autorisent les autorités compétentes d'un État membre à n'agréer comme réviseur d'entreprises que les salariés d'une personne agréée conformément à leur législation nationale, à l'exclusion des salariés d'une personne agréée conformément à la législation d'un autre État membre ?"
14 Pour un plus ample exposé des faits du litige au principal, du déroulement de la procédure ainsi que des observations écrites présentées devant la Cour, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.
15 Il convient de relever, à titre liminaire, que, au stade actuel de la procédure, la juridiction nationale n'a pas qualifié définitivement la situation de M. Ramrath au regard des dispositions du droit communautaire qui lui sont applicables. Les faits retenus par cette juridiction et le choix des textes de droit communautaire mentionnés par les questions préjudicielles permettent d'envisager à ce sujet différentes hypothèses, selon que M. Ramrath relève des dispositions du droit communautaire en raison d'une activité professionnelle qu'il exercerait lui-même, ou d'un emploi qu'il aurait lui-même recherché, ou encore comme salarié d'une personne bénéficiant des dispositions du droit communautaire en raison de son activité professionnelle.
16 Dès lors, sa situation pourrait relever soit du chapitre du traité relatif aux travailleurs, et plus particulièrement de l'article 48, soit des chapitres relatifs au droit d'établissement et aux services, et notamment des articles 52, 56 et 59.
17 Il y a lieu de souligner encore que la comparaison entre ces différentes dispositions fait apparaître que celles-ci sont fondées sur les mêmes principes en ce qui concerne tant l'entrée et le séjour sur le territoire des États membres des personnes relevant du droit communautaire que l'interdiction de toute discrimination exercée à leur égard en raison de la nationalité.
18 C'est à la lumière de ces considérations qu'il convient de répondre aux questions posées par le Conseil d'État du Luxembourg.
Sur la première question
19 Par cette question, la juridiction nationale vise en substance à savoir si les dispositions du traité relatives au droit d'établissement s'opposent à ce qu'un État membre interdise à une personne de s'établir sur son territoire et d'y exercer la profession de réviseur d'entreprises au motif que cette personne est établie et agréée comme telle dans un autre État membre.
20 A cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante de la Cour (voir, par exemple, arrêts du 12 juillet 1984, Klopp, point 19, 107-83, Rec. p. 2971; du 7 juillet 1988, Stanton et L'Étoile 1905, point 11, 143-87, Rec. p. 3877, et du 7 juillet 1988, Wolf et Microtherm Europe, point 11, 154-87 et 155-87, Rec. p. 3897), selon laquelle le droit d'établissement comporte également la faculté de créer et de maintenir, dans le respect des règles professionnelles, plus d'un centre d'activité sur le territoire de la Communauté.
21 Il en résulte que le droit d'établissement fait obstacle à ce qu'un État membre exige qu'une personne exerçant une profession n'ait qu'un seul établissement sur le territoire de la Communauté.
22 Par conséquent, il y a lieu de répondre à la première question que les dispositions du traité relatives au droit d'établissement s'opposent à ce qu'un État membre interdise à une personne de s'établir sur son territoire et d'y exercer la profession de réviseur d'entreprises au motif que cette personne est établie et agréée comme telle dans un autre État membre.
Sur les deuxième et troisième questions
23 Ces questions visent, en substance, à savoir si les dispositions du traité relatives à la libre circulation des personnes s'opposent à ce qu'un État membre subordonne, sur son territoire, l'exercice de la profession de réviseur d'entreprises, par une personne déjà habilitée à exercer cette profession dans un autre État membre, à des conditions concernant l'exigence d'une infrastructure professionnelle permanente, la présence effective dans cet État membre, le contrôle de l'observation de règles déontologiques ou, lorsqu'il s'agit d'une personne salariée, au fait que son employeur principal ait la qualité de réviseur d'entreprises agréé sur son territoire.
24 Sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur le point de savoir si le réviseur d'entreprises qui entend exercer des révisions d'entreprises dans un autre État membre a le statut de salarié, de travailleur indépendant ou de prestataire de services, tâche qui incombe le cas échéant au juge national, il y a lieu de passer en revue l'ensemble des dispositions du traité relatives à la libre circulation des personnes pour déterminer si elles s'opposent à l'exigence de conditions telles que celles prévues par la loi du 28 juin 1984.
25 Le principe de la libre circulation des travailleurs, énoncé à l'article 48 du traité, garantit à tout ressortissant d'un État membre le droit d'entrer sur le territoire d'un autre État membre et d'y séjourner aux fins voulues par cet article. Le même principe garantit également à tout salarié l'accès à un emploi temporaire dans un autre État membre. Cet accès ne peut lui être refusé au motif qu'il exerce déjà une activité salariée dans son État d'origine ou encore que le travail effectué dans l'autre État membre l'est à temps partiel.
26 Il y a lieu de relever encore que la Cour a déclaré dans les arrêts du 7 juillet 1988, Stanton et Wolf, précités, points 12, que les considérations développées ci-avant dans le cadre de la réponse à la première question à propos du droit d'établissement sont tout aussi valables pour un salarié, établi dans un État membre, qui désire accomplir, en outre, un travail indépendant dans un autre État membre.
27 Enfin, il convient de rappeler que la libre prestation des services, au sens des articles 59 et suivants du traité, comporte l'élimination de toutes discriminations à l'encontre du prestataire de services en raison, notamment, de la circonstance qu'il est établi dans un État membre autre que celui où la prestation doit être fournie (voir arrêt du 17 décembre 1981, Webb, point 14, 279-80, Rec. p. 3305).
28 Il découle de ces développements que les articles 48 et 59 du traité visent à faciliter, pour les ressortissants communautaires, l'exercice d'activités professionnelles de toute nature sur l'ensemble du territoire de la Communauté et s'opposent à une réglementation nationale qui pourrait défavoriser ces ressortissants lorsqu'ils souhaitent étendre leurs activités hors du territoire d'un seul État membre (voir en ce sens les arrêts du 7 juillet 1988, Stanton et Wolf, précités, points 13).
29 Il y a lieu cependant de constater que, compte tenu de la nature particulière de certaines activités professionnelles, on ne saurait considérer comme incompatible avec le traité l'imposition d'exigences spécifiques motivées par l'application des règles régissant ces types d'activités. Toutefois, la libre circulation des personnes, en tant que principe fondamental du traité, ne peut être limitée que par des réglementations justifiées par l'intérêt général et s'appliquant à toute personne ou entreprise exerçant lesdites activités sur le territoire de l'État en question, dans la mesure où cet intérêt n'est pas déjà sauvegardé par des règles auxquelles le ressortissant communautaire est soumis dans l'État membre où il est établi (voir en ce sens l'arrêt du 26 février 1991, Commission/Italie, point 17, C-180-89, Rec. p. I-709).
30 En outre, lesdites exigences doivent être objectivement nécessaires en vue de garantir l'observation des règles professionnelles et d'assurer la protection des intérêts qui constitue l'objectif de celles-ci (arrêt du 26 février 1991, Commission/Italie, précité, point 17).
31 Il s'ensuit que ces exigences ne peuvent être considérées comme compatibles avec les dispositions relatives à la libre circulation des personnes que s'il est établi qu'il existe, dans le domaine de l'activité considérée, des raisons impérieuses liées à l'intérêt général qui justifient des restrictions à la libre circulation, que cet intérêt n'est pas déjà assuré par des règles de l'État où le ressortissant communautaire est établi et que le même résultat ne peut être obtenu par des règles moins contraignantes.
32 Il convient, par conséquent, de vérifier si les conditions imposées par l'État membre où le contrôle légal des documents comptables est opéré, et tenant à une infrastructure professionnelle permanente, à une présence effective sur le territoire de cet État membre, à l'observation des règles régissant la profession de réviseur d'entreprises ou à la qualité de salarié d'un tel réviseur agréé par les autorités de cet État, sont objectivement nécessaires.
33 De l'avis du ministre, il résulterait des considérants de la huitième directive ainsi que de ses articles 3, 23, 24, 25 et 26 qu'il appartient à chaque État membre de fixer les critères d'indépendance et d'honorabilité des réviseurs d'entreprises. A cet égard, le contrôle de l'observation, sur son territoire, des règles professionnelles par le réviseur d'entreprises impliquerait pour ce dernier l'obligation de disposer d'une infrastructure stable et d'assurer une présence minimale dans cet État membre. Par ailleurs, le respect de ces règles par un réviseur d'entreprises salarié ne pourrait être garanti qu'à travers son employeur. Le contrôle par les autorités du respect de telles règles ne pourrait se faire qu'au niveau de ce dernier, qui, dès lors, devrait être agréé par ces autorités.
34 A cet égard, il convient de relever que les dispositions de la huitième directive laissent notamment aux États membres le soin d'évaluer, selon le droit national, l'honorabilité et l'indépendance des réviseurs d'entreprises opérant sur leur territoire.
35 Il y a lieu de reconnaître que l'État membre peut pourvoir à cette tâche en imposant le respect de règles professionnelles justifiées par l'intérêt général, concernant l'honorabilité et l'indépendance des réviseurs d'entreprises et applicables à toute personne exerçant, sur le territoire de cet État, la profession de réviseur d'entreprises. A cet égard, des exigences tenant à l'existence d'une infrastructure sur le territoire et à une certaine présence effective du réviseur apparaissent justifiées pour assurer la protection de cet intérêt.
36 De telles exigences ne s'avèrent cependant plus objectivement nécessaires lorsque le contrôle légal des documents comptables est effectué par un réviseur d'entreprises qui, tout en étant établi et agréé comme tel dans un autre État membre, se trouve temporairement au service d'une personne physique ou morale agréée pour l'exercice de la profession de réviseur d'entreprises par les autorités de l'État membre où ledit contrôle est effectué. En effet, dans de pareilles circonstances, c'est dans le chef de cette personne que l'État membre peut s'assurer du respect des règles par le réviseur effectuant périodiquement des révisions sur son territoire.
37 Il résulte de l'ensemble de ces considérations qu'il y a lieu de répondre aux deuxième et troisième questions posées par le Conseil d'État luxembourgeois que les articles 48 et 59 du traité ne s'opposent pas à ce qu'un État membre subordonne, sur son territoire, l'exercice de la profession de réviseur d'entreprises par une personne déjà habilitée à exercer cette profession dans un autre État membre à des conditions objectivement nécessaires pour garantir l'observation des règles professionnelles et concernant la permanence d'une infrastructure pour l'accomplissement des travaux, la présence effective dans cet État membre et le contrôle de l'observation des règles déontologiques, à moins que le respect de telles règles et conditions ne soit déjà garanti à travers un réviseur d'entreprises, personne physique ou morale, établi et agréé sur ce territoire et au service duquel est placé, pour la durée des travaux, celui qui entend exercer la profession de réviseur d'entreprises.
Sur les dépens
38 Les frais exposés par le Gouvernement luxembourgeois et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs,
LA COUR (sixième chambre),
Statuant sur les questions à elle soumises par le Conseil d'État du Luxembourg, par arrêt du 12 mars 1991, dit pour droit:
1) Les dispositions du traité relatives au droit d'établissement s'opposent à ce qu'un État membre interdise à une personne de s'établir sur son territoire et d'y exercer la profession de réviseur d'entreprises au motif que cette personne est établie et agréée comme telle dans un autre État membre.
2) Les articles 48 et 59 du traité ne s'opposent pas à ce qu'un État membre subordonne, sur son territoire, l'exercice de la profession de réviseur d'entreprises par une personne déjà habilitée à exercer cette profession dans un autre État membre à des conditions objectivement nécessaires pour garantir l'observation des règles professionnelles et concernant la permanence d'une infrastructure pour l'accomplissement des travaux, la présence effective dans cet État membre et le contrôle de l'observation des règles déontologiques, à moins que le respect de telles règles et conditions ne soit déjà garanti à travers un réviseur d'entreprises, personne physique ou morale, établi et agréé sur ce territoire et au service duquel est placé, pour la durée des travaux, celui qui entend exercer la profession de réviseur d'entreprises.