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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 19 janvier 2007, n° 05-20457

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Luxor (SARL)

Défendeur :

Chapelier, Bush Holding (SARL), Lovat (SA), Ayr (SARL), Glencoe (SARL), Nevis (SARL), Dané & Galiay (SNC), Dané, Galiay, Cortina NV (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pezard

Conseillers :

Mme Regniez, M. Marcus

Avoués :

Me Fanet, SCP Baskal-Chalut-Natal, SCP Bommart-Forster-Fromantin, SCP Garnier

Avocats :

Mes Ore-Diaz, Soudri, Zazzo, Minne

TGI Paris, du 31 janv. 2001

31 janvier 2001

LA COUR est saisie de l'appel interjeté par la société à responsabilité limitée Luxor (ci-après la société Luxor) à l'encontre du jugement contradictoire de la première section de la troisième chambre du Tribunal de grande instance de Paris en date du 31 janvier 2001 qui a:

- dit n'y avoir lieu à disjonction;

- déclaré parfait le désistement d'instance et d'action à l'égard de la société Cortina NV;

- constaté l'extinction de l'instance la concernant et le dessaisissement du tribunal de ce chef;

- constaté la validité des opérations de saisie-contrefaçon des 21 et 22 avril 1999;

- dit que la société Luxor, en commercialisant le modèle de cartable Cortina SB810, la société Luxor et la société en nom collectif Dané & Galiay (ci-après la société Dané & Galiay), en commercialisant le modèle Dangal B 1709, la société Dané & Galiay, en reproduisant et en offrant à la vente le modèle B 1598, ont porté atteinte au droit moral d'auteur de Monsieur Hervé Chapelier sur le modèle de cartable n° 88.5466 ainsi qu'aux droits patrimoniaux de la société à responsabilité limitée Bush Holding (ci-après de la société Bush Holding) sur le dit modèle et commis des actes de contrefaçon à leur préjudice au sens des dispositions tant des livres I et III que du livre V du Code de la propriété intellectuelle;

- dit qu'elles ont, en outre, commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société anonyme Lovat (ci-après la société Lovat), la société à responsabilité limitée Glencoe (ci-après la société Glencoe), la société à responsabilité limitée Ayr (ci-après la société Ayr) et la société à responsabilité limitée Nevis (ci-après la société Nevis);

- dit qu'en déposant avec réquisition de publicité le modèle n° 98.6931, Messieurs Guy Dané et Alain Galiay ont porté atteinte au droit moral d'auteur de Hervé Chapelier sur le modèle n° 88.5466;

- déclaré nul ledit modèle n° 98.6931 déposé le 30 novembre 1998 par Guy Dané et Alain Galiay;

- dit qu'en ce qui concerne cette nullité, le jugement déféré passé en force de chose jugée sera transmis à l'INPI pour inscription au Registre national des dessins et modèles sur réquisition du greffier ou d'une des parties;

- interdit aux sociétés Dané & Galiay et Luxor de poursuivre leurs agissements sous astreinte de 3 000 F par infraction constatée passé le délai d'un mois à compter de la signification du jugement entrepris;

- réservé au tribunal le pouvoir de liquider ladite astreinte;

- condamné la société Luxor à payer à titre de dommages et intérêts les sommes de:

- 30 000 F à Monsieur Hervé Chapelier,

- 40 000 F à la société Bush Holding,

- 25 000 F à chacune des sociétés Lovat, Glencoe, Ayr et Nevis;

- condamné in solidum la société Luxor et la société Dané & Galiay à payer à titre de dommages et intérêts les sommes de:

- 20 000 F à Monsieur Hervé Chapelier,

- 20 000 F à la société Bush Holding,

- 10 000 F à chacune des sociétés Lovat, Glencoe, Ayr et Nevis ;

- condamné la société Dané & Galiay à payer à titre de dommages et intérêts les sommes de:

- 30 000 F à Monsieur Hervé Chapelier,

- 100 000 F à la société Bush Holding,

- 40 000 F à chacune des sociétés Lovat, Glencoe, Ayr et Nevis,

- condamné in solidum Messieurs Guy Dané et Alain Galiay à payer à Hervé Chapelier la somme de 10 000 F à titre de dommages et intérêts;

- autorisé les demandeurs à faire publier le dispositif du jugement déféré, par extraits ou en entier, dans trois journaux ou revues de leur choix, aux frais de la société Dané & Galiay, Monsieur Guy Dané, Monsieur Alain Galiay et de la société Luxor tenus in solidum, le coût total de ces insertions ne pouvant excéder à leur charge la somme hors taxes de 60 000 F;

- ordonné l'exécution provisoire pour les mesures d'interdiction seulement;

- débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires;

- Laissé à la charge des demandeurs, sauf convention contraire, les dépens afférents à la mise en cause de la société Cortina NV;

- condamné in solidum la société Dané & Galiay, Messieurs Dané & Galiay et la société Luxor au surplus des dépens ainsi qu'à payer aux demandeurs la somme de 40 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- admis le cabinet Jacques Zazoo SELARL au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile;

- rejeté toutes autres demandes;

Il convient de rappeler que:

Hervé Chapelier a déposé à l'INPI le 2 septembre 1988 un modèle de sac cartable qui a été enregistré sous le n° 88.5466 et publié le 22 septembre 1994; il a cédé ses droits sur ce modèle par acte du 12 juillet 1996 inscrit au Registre national des dessins et modèles le 6 septembre suivant sous le n° 008139, à la société Bush Holding.

Cette dernière a concédé, le même jour, l'exploitation exclusive dudit modèle à la société Lovat laquelle, intervenant comme grossiste, le fait distribuer par les sociétés Glencoe, Ayr et Nevis dont la seule activité est la vente au détail de produits de maroquinerie, bagages ou prêt-à-porter revêtus de la marque Hervé Chapelier.

Après y avoir été régulièrement autorisés, Hervé Chapelier et la société Bush Holding ont fait procéder, les 21 et 22 avril 1999:

- dans les locaux de la société Luxor, à Paris à la saisie-contrefaçon de deux modèles de sac cartable, le premier fourni par la société Cortina et référencé SB810, le second fourni par la société Dané & Galiay sous l'appellation Dangal et la référence B1709,

- dans les locaux de la société Dané & Galiay, à Paris, à la saisie-contrefaçon du modèle de sac cartable Dangal référencé B 1709 ainsi que d'un autre modèle de sac cartable référencé 9915.

A l'occasion de ces saisies, il est apparu que le modèle de sac cartable Dangal avait été déposé à l'INPI, le 30 novembre 1998, par les dirigeants de la société Dané & Galiay : Guy Dané et Alain Galiay. Ce modèle, enregistré sous le n° 98.6931, a été publié le 2 avril 1999.

Outre les modèles fournis respectivement par la société Cortina et la société Dané & Galiay sous la référence SB810 et B1709 à la société Luxor, Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr ont également mentionné, dans leur assignation en date du 5 mai 1999, un autre sac cartable référencé B 1598 figurant au catalogue de la société Dané & Galiay de 1999.

Suite au jugement déféré, la société Dané & Galiay ainsi que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay ont interjeté appel le 23 avril 2001, précédé par celui de la société Luxor en date du 2 avril 2001.

Dans ce contexte, ont été conclus deux accords:

- le 19 juillet 2001 entre Monsieur Hervé Chapelier, les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr et la société Dané & Galiay, Monsieur Guy Dané et Monsieur Alain Galiay,

- et le 21 juillet 1999 entre Monsieur Hervé Chapelier, les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr et La société Cortina NV.

Il convient également de souligner que par un jugement en date du 20 décembre 2002, le Tribunal de commerce de Pontoise a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Dané & Galiay et que Monsieur Guy Dané serait décédé.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 29 novembre 2006, la société Luxor, appelante et intimée, demande à la cour de:

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

A titre principal,

- débouter Monsieur Hervé Chapelier, la société Bush Holding, la société Lovat, la société Glencoe, la société Ayr et la société Nevis de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner ces derniers in solidum à payer la somme de 4 600 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamner les mêmes in solidum aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

- débouter ces mêmes parties de leurs demandes fondées sur la concurrence déloyale,

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner in solidum la société Cortina, la société Dané & Galiay, Monsieur Guy Dané et Monsieur Alain Galiay à relever indemne la société concluante de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

- condamner ces derniers in solidum à payer la somme de 4 600 euro au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

En tout état de cause,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la mise hors de cause de la société Cortina;

Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr, intimés, prient la cour, dans leurs dernières conclusions signifiées le 6 décembre 2006, de:

- débouter la société Luxor de son appel,

- constater le désistement partiel de l'instance et d'action de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr vis-à-vis de la société Dané & Galiay et de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay pour les faits visés dans la présente procédure en raison de la pleine exécution du protocole d'accord du 19 juillet 2001 à savoir le paiement de la dernière échéance au 6 décembre 2001,

- ordonner la disjonction de l'instance concernant la demande en garantie de la société Luxor à l'égard Messieurs Guy Dané et Main Galiay,

- dire que Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr ont intérêt à agir contre la société Luxor nonobstant le protocole d'accord conclu avec Cortina et les consorts Guy Dané et Alain Galiay,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Luxor pour contrefaçon et concurrence déloyale au profil de Monsieur Hervé Chapelier et de ses sociétés sauf en ce qui concerne le quantum des condamnations prononcées à l'encontre de la société Luxor,

- recevoir Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Ayr et Nevis en leur appel incident de ce chef,

- les dire bien fondés et y faisant droit,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Luxor à payer à Monsieur Hervé Chapelier la somme de 30 500 euro avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 2001 en réparation de l'atteinte portée à son droit moral du fait de la reproduction, de la commercialisation des modèles contrefaisants,

- condamner la société Luxor à verser à la société Bush Holding la somme de 23 000 euro avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 2001 en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux,

- condamner la société Luxor à verser la somme de 9 409 euro avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 2001 à la société Lovat SA et la somme de 5 104 euro avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 2001 à chacune des sociétés Glencoe, Ayr et Nevis,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux au choix des demandeurs et aux frais de la société Luxor,

- condamner la société Luxor à supporter les frais de la saisie contrefaçon des 21 et 22 avril 1999,

- condamner la société Luxor à verser aux intimés la somme de 7 500 euro en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel et admettre pour les seconds, la SCP Baskal Chalut-Natal, avoués associés, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile;

La société Dané & Galiay et Messieurs Guy Dané et Alain Galiay, intimés et appelants, sollicitent de la cour dans leurs dernières conclusions de procédure aux fins d'interruption de l'instance signifiées la 9 mai 2006, de:

- constater l'interruption de l'instance;

Dans ses dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2006, la société de droit belge Cortina NV, intimée, invite la cour à:

- débouter la société Luxor de sa demande en garantie dirigée à son encontre,

- déclarer la société Dané & Galiay ainsi que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay irrecevables en leur appel dirigé à l'encontre de la société Cortina NV,

- dire et juger que la société Cortina NV a été intimée de façon abusive au sens de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile et condamner la société Luxor, d'une part, la société Dané & Galiay ainsi que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay, d'autre part, outre l'amende civile qu'il plairait à la cour de prononcer, à payer chacun à la société Cortina NV la somme de 3 000 euro à titre de dommages-intérêts,

- condamner la société Luxor, d'une part, la société Dané & Galiay ainsi que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay, d'autre part, à payer chacun à la société Cortina NV une indemnité de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamner in solidum les sociétés Luxor et Dané & Galiay ainsi que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay aux entiers dépens de première instance et d'appel;

Cela étant exposé

Sur la disjonction

Considérant, que contrairement à ce que sollicitent Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr et Nevis et en l'absence d'argumentation de leur part sur ce point, il est dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice de ne pas disjoindre la demande d'appel en garantie formulée par la société Luxor;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point;

Sur l'interruption de l'instance

Considérant que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et la société Dané & Galiay sollicitent l'interruption de l'instance au motif que le tribunal de commerce a ordonné l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire par un jugement en date du 20 décembre 2002 à l'encontre de la société Dané & Galiay;

Considérant que la société Luxor s'y oppose en considérant que Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et la société Dané & Galiay demeurent partie à la présente instance;

Considérant qu'il importe peu que la société Luxor ait demandé, par conclusions du 4 novembre 1999, la condamnation des sociétés Dané & Galiay à la garantir en leur qualité de fabricants et distributeurs dès lors qu'en vertu de l'article 369 du nouveau Code de procédure civile, le jugement prononçant l'ouverture d'une liquidation judiciaire interrompt l'instance;

Que par ailleurs, par lettre en date du 21 juin 2006, l'avoué de Monsieur Guy Dané fait état du décès de ce dernier ; que cette information n'est contestée par aucune des parties présentes à l'instance; que dès lors, il sera pris acte du décès de Monsieur Guy Dané;

Qu'il est également d'une bonne administration de la justice d'interrompre l'instance envers Monsieur Alain Galiay en raison de sa qualité d'associé de la société Dané & Galiay;

Qu'en conséquence, il convient de dire que l'instance est interrompue à l'égard de ladite société et de Monsieur Alain Galiay et des éventuels ayants-droit de Monsieur Guy Dané en ce qui concerne la demande d'appel en garantie de la société Luxor;

Sur le désistement de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr à l'égard de la société Cortina

Considérant que la société Luxor demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré parfait le désistement à l'égard de la société Cortina alors que, d'une part, l'accord intervenu avec Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr en date du 21 juillet 1999, lequel n'a pas été versé aux débats, lui est inopposable, et que d'autre part, un appel en garantie a été formulé en première instance dans l'hypothèse où un préjudice non-inclus dans ledit contrat serait constaté;

Considérant que la société Cortina s'y oppose au motif que l'appel en garantie de la société Luxor ne serait pas fondé;

Considérant que le tribunal a uniquement déclaré parfait le désistement de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr à l'égard de la société Cortina ; qu'en effet, il n'a jamais fait état d'un désistement de la société Luxor au sujet de sa demande en garantie à l'encontre de la société Cortina dans la mesure où le rejet de cette dernière a été prononcée en première instance;

Que les premiers juges ne pouvaient donc constater l'extinction de l'instance concernant la société Cortina dans le dispositif de leur décision dès lors qu'elle restait bien en la cause en ce qui concerne la demande d'appel en garantie de la société Luxor;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté le désistement parfait de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr à l'égard de la société Cortina et sera infirmé en ce qu'il a constaté l'extinction de l'instance à l'égard de la société Luxor;

Sur le désistement de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr à l'égard de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et de la société Dané & Galiay

Considérant qu'en vertu de l'accord transactionnel en date du 19 juillet 2001, il sera pris acte du désistement partiel d'instance et d'action de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr à l'égard de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et de la société Dané & Galiay pour les faits visés dans la présente procédure dans la mesure où la transaction a été pleinement exécutée suite au paiement de la dernière échéance le 6 décembre 2001 ;

Sur l'intérêt à agir de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr

Considérant que la société Luxor prétend que les intimées n'aurait aucun intérêt à agir dans la mesure où ces dernières ont transigé d'une part, avec la société Cortina et, d'autre part avec la société Dané & Galiay et Messieurs Guy Dané et Alain Galiay, respectivement par actes en date du 19 juillet 2001 et du 21 juillet 1999 ; que par voie de conséquence, elles ont été indemnisées de l'intégralité de leur préjudice subi dès lors que la masse contrefaisante détenue par la société Luxor était produite et mise sur le marché par les sociétés Cortina et Dané & Galiay;

Considérant que les intimées opposent que les sociétés Cortina, Dané & Galiay et Luxor ont été condamnées à réparer des préjudices distincts ; qu'en conséquence, les accords transactionnels en date du 19 juillet 2001 et 21 juillet 1999 sont sans incidence sur la responsabilité incombant à la société Luxor ; que de même sa bonne foi ne saurait l'exonérer de sa responsabilité;

Considérant que l'absence de faute ou, à tout le moins, la bonne foi ne s'apprécie pas au stade de l'intérêt à agir;

Considérant que même si Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr et Nevis ont conclu des accords en date du 19 juillet 2001 et du 21 juillet 1999 respectivement avec Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et la société Dané & Galiay, puis avec la société Cortina, il n'en demeure pas moins que la société Luxor n'est pas partie à ces transactions et ne peut dès lors se prévaloir d'une réparation intégrale du préjudice subi issu des actes susceptibles de contrefaçon des sociétés Cortina et Dané & Galiay;

Qu'en tout état de cause, ces dites sociétés conservent un intérêt à agir dès lors qu'elles agissent pour la défense de leur droits ; qu'en conséquence, la simple détention de modèles de sac cartable saisis dans les locaux de la société Luxor en date du 21 avril 1999 constitue un acte distinct, de ceux qui ont fait l'objet d'une transaction antérieurement à la présente instance ; que ce dernier est susceptible d'être qualifiée de contrefaçon et justifie ainsi l'intérêt à agir de Monsieur Hervé Chapelier et des sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr;

Qu'en conséquence, Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr seront déclarés recevables en leur action;

Sur la contrefaçon du modèle n° 88.5466

Considérant que la société Luxor, appelante, fait valoir que le modèle n° 88.5456 ne se distingue des modèles antérieurement créés (Gardin de 1971, Vania de 1983, GET 27 de 1984 et Boltex) que sur des détails esthétiques et ornementaux constitués par des piqûres blanches et des clous dorés sur la poignée du sac ; qu'en aucun cas, ces caractéristiques ne sont reproduites sur les articles litigieux ; qu'au surplus, ces dernières ne résultent que de techniques de fabrication antérieures au dépôt de Monsieur Hervé Chapelier ; que dès lors, la contrefaçon ne saurait être avérée;

Considérant que les intimés, suite aux opérations de saisie-contrefaçon en date du 21 et 22 avril 1999 auprès des sociétés Dané & Galiay et Luxor, arguent du fait que cette dernière distribuait des sacs cartable constituant la copie servile ou quasi-servile du modèle n° 88.5466;

Considérant que la société Luxor ne conteste pas en cause d'appel le caractère propre et l'originalité du modèle n° 88.5466 ; que même si elle invoque à l'appui de ses prétentions en contrefaçon des modèles de sac cartable antérieurs au dépôt dudit modèle de Monsieur Hervé Chapelier ou fait valoir qu'il existait des techniques de fabrication antérieurement audit dépôt, elle ne développe aucun moyen à l'appui de ses prétentions et ne verse aux débats aucune pièce y correspondant ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point;

Que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a pris acte de la nullité du modèle n° 98.6931 de Monsieur Guy Dané et Alain Galiay ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point;

Qu'il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon en date du 21 avril 1999 et du procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 avril 1999 dont il convient également de constater la validité, qu'il importe peu que les modèles contrefaisants saisis au sein de la société Luxor ne reproduisent pas les détails esthétiques et ornementaux constitués par des piqûres blanches et des clous dorés sur la poignée du sac dès lors qu'ils en reprennent les caractéristiques essentielles;

Qu'en effet, le sac cartable Cortina distribué par la société Luxor sous la référence SP810 est un cartable rectangulaire en toile constitué d'une poignée souple rivetée, d'une fermeture à glissière située vers le haut de la face avant débordant sur les côtés latéraux et d'un passepoil passant de l'arrière à l'avant suivant ainsi le montage en "U", contribuant par là-même à l'effacement de la ligne avant des côtés en faisant le tour complet du sac; que dès lors, en combinant les caractéristiques essentielles du modèle n° 88.5466 constituées par une forme de type rectangulaire (les grands angles formant base et sommets du modèle), une fermeture à glissière située sur l'une des faces au 1/6e de la hauteur dont les extrémités débordent sur les côtés latéraux du modèle, la glissière étant retenue par deux pièces en cuir à chacune de ses extrémités, un passepoil faisant le tour complet du sac, une toile enduite et une poignée souple fixée par deux rivets métalliques ronds, le modèle litigieux en constitue la reproduction quasi servile ainsi que l'a jugé le tribunal;

Qu'il en est de même en ce qui concerne le sac cartable Dangal référencé B1709 dans la mesure où ce modèle caractérisé par une forme rectangulaire et comportant une poignée souple rivetée de chaque côté sur la face supérieure du cartable ainsi qu'une fermeture à glissière située vers le haut de sa face avant, sensiblement au 1/6e de sa hauteur, débordant sur les côtés latéraux et un passepoil passant de l'arrière à l'avant ce qui contribue à l'effacement de la ligne avant des côtés avant de s'interrompre en limite de la face latérale avant confère à l'article litigieux une physionomie d'ensemble identique au modèle n° 88.5466;

Qu'en effet, dans ledit modèle Dangal est reproduit la forme rectangulaire ainsi que la poignée souple rivetée et la fermeture à glissière dont la caractéristique, commun aux deux articles, est d'une part, d'être située vers le haut de la face avant, et d'autre part, de déborder sur les côtés latéraux ; qu'enfin la reprise du passepoil lequel passe de l'arrière à l'avant, permettant ainsi, l'effacement de la ligne avant des côtés, conforte la contrefaçon par imitation d'autant plus que cette caractéristique a contribué à la notoriété du modèle de Monsieur Hervé Chapelier;

Que par ailleurs en vertu de l'accord conclu entre les appelantes et la société Dané & Galiay et Messieurs Guy Dané et Alain Galiay en date du 19 juillet 2001, la cour n'a pas à apprécier les actes de contrefaçon pouvant résulter du modèle référencé B1598;

Que la bonne foi étant indifférente en matière de contrefaçon, la société Luxor ne peut exciper de l'absence de responsabilité en arguant du fait que les produits qu'elle achetait étaient mis sur le marché par les sociétés Cortina et Dané & Galiay lesquelles disposaient à l'époque des faits litigieux du modèle n° 98.6931 déposé le 30 novembre 1998 par Guy Dané et Alain Galiay et annulé;

Que dès lors, la détention ainsi que la mise à la vente par la société Luxor de sacs cartable reproduisant les caractéristiques essentielles du modèle n° 88.5466 constituent des actes de contrefaçon;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef;

Sur la concurrence déloyale

Considérant que les sociétés Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu l'existence d'actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Luxor;

Considérant qu'en l'espèce, la servilité de la copie fait apparaître la volonté de créer une confusion dans l'esprit de la clientèle et que les produits commercialisés le sont à des prix très inférieurs aux articles conformes au modèle protégé n° 88.5466 et comportent des finitions de moins bonne qualité, ce qui a pour effet de porter atteinte à l'image du produit original ; qu'au surplus, ce modèle faisait l'objet d'une grande diffusion partout en France tel que le démontre les pièces versées aux débats;

Que dès lors, le fait pour la société Luxor de vendre à vil prix et dans une moindre qualité les modèles contrefaisant le modèle n° 88.5466 constituent d'actes fautifs qui portent préjudice à la société Lovat, licenciée exclusive, et les sociétés distributrices Glencoe, Nevis et Ayr;

Que dans ces conditions, la société Luxor, s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale à l'encontre des sociétés Lovat, Glencoe, Nevis et Ayr;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef;

Sur le droit moral de Monsieur Hervé Chapelier

Considérant que Monsieur Hervé Chapelier demande la confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu une atteinte à son droit moral et que la société Luxor s'y oppose sans soutenir une quelconque argumentation;

Qu'en l'espèce, la commercialisation d'articles de moindre qualité porte indéniablement atteinte à la réputation du sac de Monsieur Hervé Chapelier ; que dès lors, l'atteinte à son droit moral est avérée;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point;

Sur l'appel en garantie de la société Luxor

Considérant qu'en l'absence de garantie contractuelle, la société Luxor rappelle qu'elle a pris toutes les précautions nécessaires qui incombent à un professionnel lors de la commande des produits litigieux à ses fournisseurs ; qu'en l'absence de faute, la seule qualité de professionnel ne saurait suffire à constituer une faute privative de tout recours à l'encontre de la société Cortina ; qu'en tout état de cause, la bonne foi se présume et qu'il n'est pas justifié par la société Cortina du moindre indice de mauvaise foi de la part de la société Luxor;

Considérant que, c'est avec raison, que la société Cortina oppose que la qualité de professionnel issu d'un même secteur fait naître une présomption selon laquelle le professionnel est présumé avoir pris toutes les précautions utiles que l'on peut attendre raisonnablement de lui;

Qu'au vu de l'espèce, en ne procédant pas à toutes les vérifications utiles sur le modèle vendu par la société Cortina, l'appel en garantie de la société Luxor à l'encontre de ladite société ne peut aboutir et ce, d'autant plus que le modèle n° 88.5466 a fait l'objet d'une importante publicité;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'appel en garantie de la société Luxor à l'encontre de la société Cortina;

Sur le préjudice

Considérant que Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr et Nevis estiment que la réparation accordée par les premiers juges ne correspond pas à la réalité des préjudices subis;

Considérant que la société Luxor s'y oppose sans autres arguments que celui de considérer que le préjudice subi issu de la masse contrefaisante a déjà été réparée dès lors que ses fournisseurs, la société Cortina et la société Dané & Galiay, ont conclu des transactions avec Monsieur Hervé Chapelier et les sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr et Nevis ;

Considérant qu'il a déjà été répondu sur ce point;

Considérant qu'il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon en date du 21 avril 1999 et du procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 avril 1999 que la société Luxor a acquis de la société Cortina 900 cartables contrefaisants au prix unitaire de 13 F et de la société Dané & Galiay 160 cartables Dangal B1709 au prix unitaire de 11 F ; qu'il en résulte également que la société Luxor offrait à la vente lesdits sacs pour un prix unitaire de 29 F chacun alors que la société Lovat vendait l'original au prix unitaire de 113 F à ses distributeurs, les sociétés Glenco, Ayr et Nevis lesquels procédaient à leur revente pour un prix de 209 F;

Considérant que d'une part, en ce qui concerne les actes de concurrence déloyale, le préjudice sera apprécié tel qu'il résulte des attestations en date du 5 janvier 1999 de Monsieur Gueret, expert-comptable de la société Lovat, lesquelles n'ont pas été contestées par la société Luxor ; qu'il en résulte que ladite société a dégagé une marge bénéficiaire de 59,30 F, soit 9,04 euro, sur le modèle n° 88.5466 de Monsieur Hervé Chapelier et que les sociétés distributrices ont quant à elle réussi à obtenir une marge de 96,59 F, soit 14,72 euro;

Qu'en conséquence, dans la mesure où lesdites sociétés se prévalent de la vente de 1 040 modèles reproduisant le modèle n° 88.5466 de Monsieur Hervé Chapelier, il convient de condamner la société Luxor à payer, au titre des actes de concurrence déloyale, respectivement la somme de 9 409 euro à la société Lovat et la somme de 15 314 euro répartie par tiers pour chacune des sociétés distributrices Glenco, Ayr et Nevis;

Que le jugement sera infirmé sur ce point;

Que d'autre part, en l'absence de pièces versées aux débats relatives aux redevances perçues par la société Bush Holding, il est justifié au regard des faits de l'espèce de diminuer la réparation accordée par les premiers juges à la somme de 4 500 euro au titre de la contrefaçon;

Que le jugement sera également infirmé sur ce point;

Qu'enfin, le préjudice relatif à l'atteinte portée au droit moral de Monsieur Hervé Chapelier, sera justement évalué à la somme de 5 000 euro compte tenu des faits de l'espèce ; que dès lors, il convient de condamner la société Luxor à payer à Monsieur Hervé Chapelier ladite somme;

Qu'en conséquence, le jugement sera infirmé sur ce point;

Sur les autres mesures réparatrices

Publication et interdiction

Considérant que les faits de l'espèce commandent d'ordonner des mesures de publication et d'interdiction dans les conditions du dispositif;

Sur la procédure abusive

Considérant que l'instance est interrompue à l'égard de la société Dané & Galiay et de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay, la demande de la société Cortina l'est également;

Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de statuer en l'état sur la demande en procédure abusive;

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Considérant que l'équité commande de condamner la société Luxor à verser la somme 1 500 euro chacun au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à Monsieur Hervé Chapelier et aux sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr, Nevis et Cortina;

Par ces motifs, Confirme partiellement le jugement déféré; Statuant à nouveau, Dit que la société Cortina est toujours en la cause en ce qui concerne la demande d'appel en garantie; Dit n'y avoir lieu à disjonction; Dit n'y avoir lieu à extinction de l'instance à l'égard de la société Cortina; Constate le désistement partiel d'instance et d'action de Monsieur Hervé Chapelier et des SARL Bush Holding, Glencoe, Nevis et Ayr et de la SA Lovat à l'égard de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et de la SNC Dané & Galiay pour les faits visés dans la présente procédure; Constate la validité des saisies-contrefaçon; Rejette la demande d'appel en garantie de la société Luxor uniquement à l'encontre de la société Cortina; Condamne la SARL Luxor à payer, au titre de la contrefaçon du modèle 88.5466, la somme de 4 500 euro à la société Bush Holding; Annule le modèle n° 98.6931 ; Dit que l'arrêt sera transmis par le greffier à l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Marques; La condamne à payer, au titre des actes de concurrence déloyale, respectivement la somme de 9 409 euro à la société Lovat et la somme de 15 314 euro répartie par tiers pour chacune des sociétés distributrices Glencoe, Ayr et Nevis ; La condamne à payer à Monsieur Hervé Chapelier la somme de 5 000 euro en ce qui concerne l'atteinte au droit moral subi par ce dernier; Interdit à la société Luxor de poursuivre ses agissements sous astreinte de 300 euro par infraction constatée à compter de la signification du présent arrêt; Autorise la publication du présent arrêt par extraits ou en entier dans trois revues ou journaux au choix de Monsieur Hervé Chapelier et des SARL Bush Holding, Glencoe, Nevis et Ayr et de la SA Lovat, aux frais de la société Luxor et dans la limite globale de 4 500 euro; Condamne la société Luxor à verser la somme 1 500 euro chacun au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à Monsieur Hervé Chapelier et aux sociétés Bush Holding, Lovat, Glenco, Ayr, Nevis et Cortina ; Dit que l'instance est interrompue à l'égard de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay et de la société Dané & Galiay; Dit qu'il n'y a pas lieu de statuer en l'état sur la demande en procédure abusive formulé par la société Cortina à l'encontre de la société Dané & Galiay et de Messieurs Guy Dané et Alain Galiay; Rejette toute autre demande ; Condamne la société Luxor aux entiers dépens y compris ceux de la saisie-contrefaçon, et admet les avoués concernés au bénéfice de l'article 699 du NCPC.