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Décisions

Conseil Conc., 25 février 2008, n° 08-D-04

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à des pratiques mises en œuvre par les Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne (NMPP)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de Mme de Mallmann, par M. Nasse, vice-président, président de séance, Mme Pinot, MM. Bidaud, Combe, Honorat, membres.

Conseil Conc. n° 08-D-04

25 février 2008

Le Conseil de la concurrence (section I),

Vu la lettre enregistrée le 08 août 2003, sous le numéro 03/0051 F, par laquelle la société Messageries Lyonnaises de Presse, a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Nouvelles Messageries de Presse Parisienne ; Vu la décision du 31 janvier 2007, par laquelle le rapporteur général a procédé à la disjonction de la saisine susvisée et à l'enregistrement des faits traités dans la présente décision sous le numéro 07/0005 F ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu les engagements proposés par la société NMPP ; Vu les observations présentées par le commissaire du Gouvernement et les sociétés Messageries Lyonnaises de Presse, Mondadori France, Editions Nuit et Jour, le Syndicat National des Dépositaires de Presse et la Fédération nationale de la presse d'information spécialisée ; Vu les autres pièces du dossier ; La rapporteure, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement, et les représentants des sociétés Nouvelles Messageries de Presse Parisienne et Messageries Lyonnaises de Presse entendus lors de la séance du 23 janvier 2008 ; Le Syndicat National des Dépositaires de Presse, entendu sur le fondement des dispositions de l'article L. 463-7 du Code de commerce ; Adopte la décision suivante :

I. Constatations

A. LA SAISINE

1. Le 8 août 2003, les Messageries Lyonnaises de presse (MLP) ont, sur le fondement de l'article L. 462-5 du Code de commerce, saisi le Conseil de la concurrence d'un dossier relatif à diverses pratiques mises en œuvre par les Nouvelles Messageries de Presse Parisienne (NMPP) et la Société Auxiliaire pour l'Exploitation de Messageries Transport Presse (SAEM-TP), enregistré sous le numéro 03/0051 F. Elles faisaient valoir que le groupe NMPP, en position dominante sur le marché de la distribution de la presse au numéro, tenterait de les évincer de ce marché, notamment en leur refusant un accès direct au tronc commun du système informatique Presse 2000.

2. Par une décision du 31 janvier 2007, le rapporteur général a disjoint la partie de la saisine relative aux pratiques liées à l'accès au logiciel Presse 2000 de l'affaire 03/0051 F. Il a été procédé, pour cette partie, à l'ouverture d'un numéro d'enregistrement distinct, intitulé 07/0005 F.

3. Accessoirement à leur saisine au fond, les MLP ont demandé, sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, le prononcé de mesures conservatoires.

B. LE SECTEUR D'ACTIVITE

4. Une réglementation spécifique mise en place par la loi n° 47-585 du 2 avril 1947, relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite "loi Bichet", organise la vente des produits de presse autour des principes de coopération, de liberté de distribution pour l'éditeur et de neutralité de la distribution. On distingue trois niveaux intermédiaires dans la chaîne reliant les éditeurs et les consommateurs : les messageries de presse (niveau 1), les dépositaires (niveau 2) et les diffuseurs (niveau 3).

a) Le premier niveau : les messageries de presse

5. En vertu du principe coopératif, un éditeur peut soit assurer lui-même la distribution de ses titres, soit se grouper avec d'autres éditeurs au sein d'une coopérative de distribution, appelée messagerie de presse.

6. La société NMPP, créée en 1947, est une société à responsabilité limitée dont le capital est détenu à 49 % par le groupe Hachette et à 51 % par cinq coopératives d'éditeurs dans lesquelles le groupe Hachette est également présent. Les NMPP participent à la distribution des quotidiens, activité fortement déficitaire, et bénéficient, à ce titre, d'une subvention. Au total, elles distribuent plus de 3 700 titres de presse (quotidiens et magazines) dont, début 2005, 28 quotidiens et 2 700 magazines français, 80 quotidiens et 900 magazines étrangers. Il s'y ajoute 5 000 parutions de produits multimédias et encyclopédies. En 2006, les NMPP ont réalisé 1 milliard 739 millions d'euro de ventes 51°, dont 328 millions d'euro pour les quotidiens et 1 milliard 18 millions d'euro pour les publications.

7. La société SAEM-TP est une société à responsabilité limitée dont le capital est détenu à hauteur de 51 % par des éditeurs, eux-mêmes constitués en trois coopératives, et à hauteur de 49 % par la société Sopredis, filiale de Hachette. Ne disposant pas de centre de traitement logistique, elle confie la sous-traitance de ses opérations aux NMPP. En 2006, la SAEM-TP a réalisé 1 milliard 037 millions d'euro de ventes, dont 209 millions d'euro pour les quotidiens et 824 millions d'euro pour les publications.

8. La société MLP, créée en août 1945, est une société anonyme coopérative dont le capital est détenu par les éditeurs adhérents. Jusqu'en 1993, les MLP sous-traitaient la distribution de leurs titres aux NMPP. Depuis 1994, elles assurent elles-mêmes la distribution. Elles ne distribuent pas de quotidiens mais uniquement des magazines, essentiellement des hebdomadaires et des mensuels, soit près de 2 200 titres début 2005. En 2006, les MLP ont réalisé 533 millions d'euro de ventes, dont 413 millions d'euro pour les publications.

b) Le deuxième niveau : les dépositaires

9. Les dépositaires sont chargés de distribuer aux diffuseurs la presse qui leur est confiée par les messageries de presse (et par certains éditeurs qui s'adressent à eux directement). Ils bénéficient d'une exclusivité de distribution des titres qui leur sont confiés sur une zone géographique donnée. Selon le site Internet du SNDP, en 2006 le réseau comprenait 187 dépositaires. A Paris, l'organisation de ce niveau est spécifique, les MLP livrant directement les diffuseurs.

10. La Société Presse Paris Service (SPPS) est une filiale des NMPP qui n'assure que la distribution des titres gérés par cette dernière.

11. En province on compte trois grandes catégories de dépôts :

- les agences de la Société d'Agences et de Diffusion (SAD), filiale des NMPP ; au nombre de vingt, elles sont pour la plupart situées dans des grandes villes ;

- les dépôts gérés par les NMPP ;

- les dépositaires centraux de presse qui sont situés dans les villes de petite et moyenne importance. Au 1er janvier 2006, le nombre des dépositaires de presse indépendants s'élevait à 134. Parmi les dépositaires centraux de presse, les NMPP ont mis en place des dépôts détenus par une holding, SOPROCOM ; ces dépôts, au nombre de vingt-neuf, sont situés dans des villes moyennes.

Les dépositaires jouent un rôle central dans la transmission de l'information entre les éditeurs et les diffuseurs de presse. Ils utilisent pour le suivi de la distribution de la presse les fonctionnalités " tronc commun " du logiciel Presse 2000, qui leur permettent d'exercer les fonctions essentielles de leur mission : réceptionner les produits, les répartir, reprendre les invendus et procéder à la comptabilisation de ces opérations.

c) Le troisième niveau : les diffuseurs

12. Environ 32 000 points de vente de la presse au public sont dénombrés, selon des configurations très variées (magasins spécialisés, presse-tabac, librairies-papeteries, rayons presse en grande et moyenne surface alimentaire, vendeurs en terrasse ou kiosques et vendeurs ambulants). Ce sont pour la plupart des commerçants indépendants, 77 % d'entre eux exploitant leur affaire sous forme d'entreprise individuelle.

C. LA PRATIQUE DENONCEE : LE REFUS D'ACCES DIRECT AUTOMATISE AU TRONC COMMUN DU SYSTEME PRESSE 2000

13. Les MLP ont fait valoir dans leur saisine que les NMPP refusaient qu'un accès direct soit installé entre leur propre système informatique, TID, que les MLP ont fourni aux dépositaires pour gérer leurs relations avec elles, et le logiciel Presse 2000 mis en place par les NMPP chez les dépositaires, dont le tronc commun est utilisé par ces derniers pour gérer les flux d'informations avec les diffuseurs, pour tous les titres, quelle que soit la messagerie qui en assure la distribution.

14. Elles indiquent que les problèmes d'informatisation avaient fait l'objet, entre elles-mêmes, les NMPP et la SAD, d'un protocole d'accord conclu le 24 avril 1998, dans lequel les NMPP avaient accepté de mettre en place un transfert automatique des fichiers entre leur système informatique et celui des MLP. Cet accord avait toutefois été dénoncé par la SAD et les NMPP en juillet 1999. Selon la partie saisissante, c'est le succès commercial qu'elle avait obtenu en concluant un accord de distribution avec l'hebdomadaire " Point de Vue ", qui a motivé le revirement des NMPP.

15. Les MLP exposent dans leur saisine que, faute de disposer de cet accès direct, les dépositaires sont contraints de ressaisir les informations données par le système TID sur des disquettes et de les charger ensuite sur Presse 2000. Ces manipulations nécessitent au moins une heure par jour, multiplient les risques d'erreur et provoquent des perturbations, notamment dans la gestion du retour des invendus. Elles soutiennent que ces contraintes constituent un handicap concurrentiel de nature à compromettre leur activité. En premier lieu, elles les empêcheraient de développer leur propre système de fonctionnalités à valeur ajoutée, en amont du tronc commun de Presse 2000. Elles produisent à l'appui de ces affirmations un courrier en date du 7 juillet 2003 dans lequel le président du SNDP écrit : " au-delà de cet objectif, vos messageries ont souhaité commencer un autre travail qui concerne, en particulier, les modules implantation-réimplantations et réglages des titres MLP. Sur ce point précis, les membres de notre commission exécutive ont tenu à réaffirmer à nouveau notre position : dans l'hypothèse où le déploiement à terme de ces modules nécessiterait une quelconque ressaisie du poste MLP vers Presse 2000, nous ne saurions l'accepter ". En deuxième lieu, les MLP font valoir que les NMPP elles-mêmes font de ce défaut d'accès direct un argument d'ordre concurrentiel et produisent à l'appui de leur saisine un courrier, adressé par les NMPP, le 25 août 2003, à un éditeur et rédigé en ces termes : " nos outils sont les seuls capables de transmettre les répartitions diffuseurs directement dans l'outil informatique des dépositaires. Ces derniers n'ont pas de ressaisie à faire, contrairement à ce qui se passe pour les titres MLP, où rien n'est automatique. Avec le système NMPP, les dépôts ont juste à contrôler la répartition en fonction de leur connaissance locale des spécificités de leur réseau ". De même, un rapport du président du Conseil Supérieur des Messageries de Presse constatait en décembre 2001 que " de leur côté, les éditeurs ayant confié leurs titres aux NMPP ont fait valoir que par-delà la question du confort réalisé par les dépositaires, cette automaticité représentait aujourd'hui une plus-value commerciale en soi ".

16. Les MLP admettent qu'elles sont en mesure matériellement et financièrement de concevoir un logiciel équivalent à Presse 2000 et ont d'ailleurs développé des outils propres pour gérer les flux d'information entre elles-mêmes et les dépositaires. Toutefois, elles objectent que les réticences des dépositaires indépendants font obstacle à la mise en place d'un système informatique parallèle à Presse 2000. Elles produisent à l'appui de leur saisine un courrier du Syndicat National des Dépositaires de Presse, en date du 7 juillet 2003, dans lequel celui-ci avertit : " ... de la même façon, nous ne pourrions accepter que soit mise en œuvre une informatique dédiée sauf à ce que les surcoûts d'un tel schéma soient pris en charge. ". Selon les MLP, les dépositaires tiennent à n'éditer qu'une seule facture par diffuseur, qui englobe les titres NMPP-TP et les titres MLP, ce qui imposerait l'usage d'un système unique. Les MLP exposent encore que le contrôle exercé par les NMPP sur plus de la moitié des dépositaires rend également peu probable l'acceptation par ceux-ci d'un deuxième système informatique parallèle à Presse 2000 pour gérer les informations données par les diffuseurs et relatives à la distribution des titres MLP, comme le montrerait une lettre du 9 septembre 2003 dans laquelle le SNDP demande aux NMPP l'autorisation d'implanter une ligne ADSL reliant les dépositaires aux MLP. Dans un communiqué, en date du 18 septembre 2003, le SNDP a ensuite demandé aux dépositaires de suspendre l'implantation de cette ligne jusqu'à nouvel ordre.

D. RAPPEL DE LA PROCEDURE ANTERIEURE

17. Des mesures conservatoires ont, dans un premier temps, été ordonnées par le Conseil dans sa décision 03-MC-04 du 22 décembre 2003. Le Conseil avait considéré dans cette décision qu'il n'était pas exclu que la reproductibilité du système informatique soit contrainte non seulement par ses caractéristiques techniques et financières, mais aussi par des particularités du contexte concurrentiel comme, en l'espèce, les réticences des dépositaires à gérer deux systèmes parallèles. Il estimait par ailleurs que le défaut d'accès direct au tronc commun de Presse 2000 pouvait constituer un handicap concurrentiel pour les MLP, de nature à compromettre leur activité, notamment en raison du fait que les NMPP elles-mêmes faisaient valoir aux éditeurs que leur concurrent offrait un service dégradé du fait de l'absence d'accès direct.

18. Dans l'attente d'une décision au fond et à tire conservatoire, le Conseil avait enjoint aux NMPP d'accorder aux MLP, dans un délai de quatre mois, un accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000, dans des conditions économiques équitables, en mettant en place pour les dépôts qui le souhaiteraient, un transfert automatique de fichiers entre le système informatique des MLP, TID ou équivalent, et Presse 2000.

19. La Cour d'appel de Paris a rejeté par un arrêt du 12 février 2004 le recours formé par les sociétés SAEM-TP et NMPP contre cette décision, en justifiant l'injonction par le fait que le tronc commun du logiciel Presse 2000 constituait pour la distribution de la presse au numéro une infrastructure essentielle dont la reproduction à des conditions économiques raisonnables n'était pas envisageable. Sur pourvoi formé par la société NMPP, la Cour de cassation, dans un arrêt du 12 juillet 2005, a censuré cette motivation au motif que la cour d'appel n'avait pas démontré que les caractéristiques des infrastructures essentielles étaient réunies et que notamment des solutions alternatives économiquement raisonnables, fussent-elles moins avantageuses que celles dont bénéficient les NMPP, ne pouvaient être mises en œuvre par les MLP. L'affaire a été renvoyée devant la Cour d'appel de Paris autrement composée. Dans un arrêt du 31 janvier 2006, cette dernière a annulé la décision 03-MC-04 en ce qu'elle a accordé aux MLP dans les conditions susvisées, un accès direct au logiciel Presse 2000. Finalement, la Cour de cassation par arrêt du 20 février 2007 a rejeté le pourvoi formé par les MLP contre ce dernier arrêt. Selon la haute juridiction, la cour d'appel a, " à juste titre tenu compte de l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient soumis, fussent-ils postérieurs à la décision du Conseil, et qui fait ressortir qu'en l'absence actuelle d'un logiciel dédié aux MLP, le refus d'accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000 opposé par les NMPP aux MLP n'était pas à l'origine directe et certaine d'une atteinte grave et immédiate à l'intérêt des MLP ou au secteur intéressé (...)".

20. Pour se conformer à la décision du Conseil 03-MC-04, les NMPP avaient conclu avec les MLP un contrat ayant pour objet " de définir les modalités techniques, financières et juridiques relatives au droit d'accès direct des MLP aux fonctionnalités concernées et aux Données Tronc Commun du Système Presse 2000, c'est-à-dire aux modalités de transfert, d'intégration et d'usage des Données Tronc Commun en provenance ou à destination du Logiciel MLP par, dans et à partir du Système Presse 2000, dans le cadre de l'exercice par les Dépositaires des fonctions essentielles de leur mission s'agissant des Editeurs MLP et/ou des Titres MLP ". Ce contrat a été signé le 19 janvier 2005, par les MLP et le 26 janvier 2005 par les NMPP. A la suite de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 31 janvier 2006, les NMPP ont informé les MLP de la résiliation de ce contrat, rendue effective le 27 mars 2006. Seule la remontée vers les MLP des informations relatives aux invendus est restée automatique.

E. LA MISE EN OEUVRE DE LA PROCEDURE D'ENGAGEMENTS

1. L'EVALUATION DES PREOCCUPATIONS DE CONCURRENCE

21. Les dépositaires disposent actuellement d'un système informatique leur permettant de gérer de façon automatisée les informations nécessaires à leurs relations avec les diffuseurs : référencement des diffuseurs et des titres, préparation de la distribution, gestion des invendus et des réassortiments. Ce système, dénommé " tronc commun de Presse 2000 ", leur a été fourni par les NMPP en 1992-1993. Les dépositaires assurent ainsi le traitement des informations relatives à l'ensemble des publications quelle que soit la messagerie qui les distribue. Toutefois, si les logiciels développés par les NMPP pour gérer les flux d'information entre elles-mêmes et les dépositaires sont directement interopérables avec le tronc commun de Presse 2000, ce n'est pas le cas de ceux mis en place par les MLP, cette interopérabilité leur ayant été refusée par les NMPP depuis le 27 mars 2006. De ce fait, les données fournies par les éditeurs et les MLP via ces outils informatiques, relatives notamment aux caractéristiques des publications concernées, doivent être ressaisies manuellement par les dépositaires pour être intégrées dans le tronc commun de Presse 2000.

22. Au vu de cette situation, des préoccupations de concurrence ont été transmises aux NMPP le 31 mai 2007. Il y était relevé les éléments suivants.

23. En premier lieu, dans une autre affaire traitée peu de temps auparavant par le Conseil, mettant en cause les conditions dans lesquelles l'informatisation des dépositaires avait été mise en place, au milieu des années 90, par les NMPP, celles-ci ont exposé l'état d'esprit qui avait présidé à la mise en place de Presse 2000 : " selon les NMPP, la mise en place de Presse 2000 relève "d'une initiative commune des dépositaires et des messageries", le tronc commun ayant pour avantage de permettre "aux dépositaires de mettre en œuvre le réglage des titres quelle que soit la messagerie qui les distribue" (...), et qu'ainsi l'architecture du projet est supposée assurer une stricte neutralité du logiciel par rapport aux acteurs du secteur, alors même que l'interface Soliman n'est pas neutre puisqu'elle n'est utilisable que pour la gestion des titres distribués par les NMPP " (décision 06-D-16 du 20 juin 2006. A l'époque, l'interface Soliman assurait la communication des informations issues de Presse 2000 entre les dépositaires et le système informatique des NMPP.

24. Le Conseil notait encore dans cette décision que les NMPP ont tiré " (...) argument de cet objectif collectif du projet "Presse 2000" pour soutenir que la concertation de tous les acteurs du secteur, dont certains sont en concurrence horizontale, comme par exemple les messageries, devrait bénéficier de l'exemption au titre de la contribution au progrès économique prévue au 2° de l'article L. 420-4 du Code de commerce, dès lors qu'elle remplit toutes les conditions de son attribution.(...) ". Sur ce point, le Conseil remarquait " qu'il n'y avait pas lieu de se prononcer sur une éventuelle exemption puisque aucun grief d'entente n'a été notifié aux NMPP et aux autres entreprises qui ont pris l'initiative commune de lancer le projet Presse 2000, puis ont assuré collectivement sa promotion et sa diffusion auprès des dépositaires ". Il a cependant relevé " une incohérence entre la neutralité affichée du projet commun Presse 2000 vis-à-vis de la concurrence, notamment entre les messageries et l'affirmation selon laquelle Soliman, interface dédiée aux seules NMPP et non aux autres messageries, aurait pu être intégré à Presse 2000 ".

25. En deuxième lieu, s'agissant des opérations de réglage éditeurs, c'est-à-dire de la modification par l'éditeur des décisions prises par le dépositaire quant à la répartition dans les différents points de vente des publications réceptionnées au dépôt, les NMPP ont intégré dans leur système informatique Presse 2000 un logiciel d'interface dépositaire-éditeurs, intitulé SP2.

26. Pendant la période où l'accès direct à Presse 2000 leur était accordé, les MLP ont bénéficié de ce service. Or, depuis la suppression de l'accès direct à Presse 2000, le SNDP a donné à ses adhérents la consigne de ne plus procéder aux réglages d'origine éditeurs pour le compte des MLP. Cette décision dégrade encore le service que les MLP sont en mesure d'offrir à leurs clients.

27. En troisième lieu, si le président du Syndicat National des Dépositaires de Presse (SNDP) a écrit le 8 janvier 2004 que " les dépositaires ne sont pas opposés à la mise en place d'un nouvel outil informatique par les MLP ", le SNDP a, depuis, publié le 7 février 2006 un communiqué indiquant : " Le SNDP a pris acte de la décision du Conseil de Gérance des NMPP de supprimer l'accès direct des MLP au tronc commun de Presse à compter du 6 mars 2006.

Cette décision est conforme à l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris en date du 31 janvier 2006 annulant les mesures conservatoires prises par le Conseil de la concurrence.

Cependant, le SNDP tient à alerter l'ensemble des acteurs professionnels, sur les conséquences de cette décision qui, une fois de plus, va alourdir les charges d'exploitation du niveau 2, dans un contexte économique déjà plus que morose.

En effet, la fermeture de Presse 2000 aux MLP risque de ralentir et de compliquer le travail dans les dépôts.

Le SNDP demande donc qu'une solution soit trouvée rapidement afin que les dépositaires puissent assurer leur mission dans des conditions d'exploitation non dégradées ".

28. En quatrième lieu, la vente de la presse au numéro est en difficulté, en raison notamment de l'essor de nouvelles pratiques culturelles comme la presse gratuite ou Internet. De plus, la distribution de la presse rencontre des difficultés propres du fait de la multiplication du nombre de titres de presse, des contraintes liées à l'immobilier en centre ville et de la faible progression de la rémunération des diffuseurs et des dépositaires. Dès lors, les acteurs intervenant sur le marché sont peu disposés à engager des frais d'équipement coûteux, ou à supporter de nouvelles charges de gestion. Or, les saisies manuelles qui doivent être effectuées par les dépositaires pour la prise en compte des titres MLP sur Presse 2000, pèsent sur leurs coûts et affectent la qualité et la performance des prestations offertes par les MLP.

29. Les préoccupations de concurrence concluaient que l'accès direct des MLP au tronc commun de Presse 2000 serait conforme à la vocation même de ce tronc commun. En effet, comme le montrent les déclarations des NMPP relevées dans la décision 06-D-16, citées ci-dessus, l'accès direct des MLP au tronc commun de Presse 2000 répondait à la vocation initiale du projet, vocation qui lui a valu la dénomination de " tronc commun " et était en conformité avec le principe coopératif énoncé dans la loi Bichet du 2 avril 1947. En revanche, la mise à disposition des dépositaires d'un outil dédié aux titres diffusés par les MLP serait de nature à entraîner pour l'ensemble du secteur des pertes d'efficacité, particulièrement préjudiciables dans le contexte économique difficile du secteur de la presse. Il en serait de même de la solution qui consisterait pour les MLP à créer sur l'ensemble du territoire national un réseau de dépositaires parallèle à celui existant.

2. LES ENGAGEMENTS PROPOSES PAR LES NMPP

30. Afin de répondre à ces préoccupations de concurrence, les NMPP ont proposé des engagements. Par un communiqué de procédure en date du 28 novembre 2007, le Conseil a publié les propositions d'engagements des NMPP sur son site Internet à l'attention des tiers potentiellement intéressés, susceptibles de présenter des observations. Le Conseil a fixé au 7 janvier 2008 la date limite de réception desdites observations. Dans cette proposition d'engagements, les NMPP précisent en 16 points les conditions techniques, financières et juridiques dans lesquelles, elles proposent aux MLP un accès direct au tronc commun du logiciel et à la base de données Presse 2000 dans les dépôts de presse qui le demanderont, afin d'éviter la saisie ou la ressaisie par les dépositaires des données nécessaires à l'exercice de leur activité pour le compte des MLP (points 1, 2 et 3).

31. Les données du tronc commun qui feront l'objet d'échanges par la voie de transfert de fichiers sont listées dans une annexe 1. Les tâches et obligations incombant aux MLP sont listées dans une annexe 2. L'obligation des NMPP est subordonnée à l'exécution par les MLP, des tâches et obligations qui lui incomberont au vu du cahier des charges et du contrat qui leur sera proposé par les NMPP (point 4).

32. L'accès direct accordé aux MLP donnera lieu (points 5, 6 et 7) au paiement d'une charge d'accès par les MLP aux NMPP. Cette charge comprendra : d'une part, une contribution initiale à l'ensemble des coûts supportés par les NMPP dans le cadre ou à l'occasion du développement, de l'évolution et des projets d'évolution du système Presse 2000 et de sa maintenance, y compris les charges financières liées à l'immobilisation de l'investissement, jusqu'à la date de prise d'effet du contrat qui sera conclu entre les NMPP et les MLP ; d'autre part, une contribution annuelle, aux coûts d'exploitation et de gestion du système Presse 2000 et de l'accès direct qui sera accordé aux MLP, y compris les coûts de maintenance et les coûts afférents aux équipements périphériques et à leur remplacement (coûts récurrents annuels).

33. Les bases de calcul du coût de remplacement de Presse 2000 sont prévues au point 8.

34. L'obligation d'accorder et de maintenir l'accès direct au " tronc commun " du logiciel Presse 2000 est subordonné à la poursuite par les MLP des tests de plafonnement des quantités et de l'assortiment et de tout autre test conduit dans l'intérêt de la profession (point 9). Au point 10, il est spécifié que l'accès direct accordé aux MLP ne leur conférera aucun droit de propriété intellectuelle sur le système Presse 2000, sur les bases de données qui en font partie ou les données qui y sont stockées. Les NMPP ne s'engagent pas à faire évoluer le système Presse 2000 ou à l'adapter à quelque besoin, spécifique ou non, des MLP que ce soit, ou à l'alimenter en données tout en se réservant le droit de le faire évoluer selon leurs propres besoins (points 11 et 12).

35. Dans l'hypothèse de l'entrée d'une nouvelle messagerie sur le marché, les NMPP examineront la possibilité d'aménager à son profit un accès direct comparable (point 13). En l'absence d'accord des MLP sur les modifications susceptibles d'être apportées aux conditions convenues dans le cadre du présent engagement, il sera mis fin à l'accès direct. Il en sera de même si le système Presse 2000 ne dispose pas de la capacité nécessaire.

36. Les NMPP précisent encore, au point 14, que leur engagement deviendra caduc si, pour quelque raison que ce soit le système Presse 2000 est mis hors service, et, plus généralement (point 15), si l'un des faits sur lesquels repose la décision du Conseil subit un changement important. Enfin, le point 16 rappelle la portée des engagements qui n'impliquent pas une quelconque reconnaissance du bien-fondé des dénonciations soumises au Conseil ou des préoccupations de concurrence formulées dans l'évaluation préliminaire, ni a fortiori, de la commission d'une infraction.

F. LES OBSERVATIONS DES MLP

37. Dans le cadre du débat contradictoire, les MLP ont exprimé de sérieuses réserves sur les engagements proposés.

38. En particulier, s'agissant de l'accord des dépositaires, visé au point 1, elles estiment que l'accès direct automatisé ne peut être subordonné à l'accord des dépositaires SAD, filiales des NMPP, ou des dépôts contrôlés par les NMPP, la possibilité étant ainsi laissée aux NMPP elles-mêmes de s'opposer à l'exécution des engagements. Elles font également valoir qu'un accord pour l'installation d'une version interopérable de Presse 2000 a déjà été donné en 2005 par tous les dépositaires, seuls un ou deux d'entre eux ayant refusé, et qu'il n'est donc pas nécessaire de refaire cette démarche, alors qu'il est vraisemblable qu'une simple manipulation de la part du dépositaire est nécessaire pour remettre en place la connexion supprimée en mars 2006.

39. Sur le point 3, prévoyant que les données du tronc commun qui feront l'objet d'échange par voie de fichiers pourront évoluer en fonction des besoins des NMPP, elles s'opposent à ce que les NMPP puissent ainsi unilatéralement modifier le périmètre de données auxquelles elles auront accès, alors qu'une rémunération importante est exigée pour la mise à disposition de celles-ci, et demandent que cette possibilité soit subordonnée à la condition que les MLP se soient pas privées des informations qui leur sont nécessaires et qu'un préavis d'au moins six mois soit donné avant toute modification.

40. S'agissant du point 4, elles font valoir que la négociation entre elles-mêmes et les NMPP du contrat permettant l'accès direct a été très difficile en 2005 et qu'il risque d'en être de même dans le cadre de ces engagements, compte tenu de l'absence de toute précision relative à ce contrat. Elles demandent que le contrat conclu les 19 et 26 janvier 2006 soit visé comme le point de départ des nouvelles négociations.

41. S'agissant des conditions financières de l'accès direct, les MLP estiment, à titre principal, que l'absence d'éléments chiffrés sur ce point rend les engagements des NMPP inacceptables. Elles attirent néanmoins l'attention du Conseil sur les problèmes soulevés par la description qualitative faite aux points 5 à 8 des engagements proposés, en s'appuyant sur une étude du cabinet CRA qui expose les différentes méthodes de valorisation couramment utilisées. Cette étude rappelle le principe selon lequel seuls les coûts pertinents, c'est-à-dire pouvant être rattachés au tronc commun de Presse 2000, doivent être pris en compte. Or, selon les MLP, tous les coûts exposés ne répondent pas à cette condition, notamment ceux du projet Arpège qui visait à créer un outil spécifique répondant aux besoins informatiques des NMPP.

42. L'étude précitée expose ensuite que doit être résolue la question de l'allocation des coûts communs à plusieurs activités. Le choix peut être fait de ne retenir que les coûts spécifiquement engagés pour cette activité et donc aucun des coûts qui seraient communs à d'autres activités, ce qui conduirait en l'espèce à ne retenir que les coûts de la mise en place de l'interopérabilité. Il est toutefois rappelé que lorsque le Conseil s'est précédemment prononcé sur la valorisation de l'accès direct à Presse 2000 accordé aux MLP en 2005, dans sa décision 04-D-34 du 22 juillet 2004, il avait exclu cette solution : " la charge d'accès au système Presse 2000 ne doit cependant pas être estimée à un niveau tel qu'il réduirait l'incitation des NMPP à investir et à améliorer les performances du système informatique installé chez les dépositaires. La participation des MLP au financement de l'investissement nécessaire à la collecte dans le tronc commun du système des données qui leur sont nécessaires et à la maintenance de l'outil mis en place à cet effet, et non pas seulement des coûts liés à la mise en place de l'interopérabilité entre leur système et le tronc commun de Presse 2000, est de nature à garantir que ces incitations seront préservées, notamment dans la perspective du développement d'un nouveau système destiné à remplacer Presse 2000, à l'horizon de l'année 2006 ".

43. La deuxième question soulevée par l'étude du cabinet CRA est celle de la valorisation de l'investissement effectué par les NMPP dans Presse 2000 qui peut être faite soit à la valeur de renouvellement, soit aux coûts historiques ou courants. La première solution consisterait à calculer ce que coûterait à l'heure actuelle la mise en place du tronc commun de Presse 2000. Dans la seconde seraient additionnés les coûts historiques figurant dans la comptabilité des NMPP, éventuellement actualisés pour tenir compte de l'inflation et du progrès technique (coûts courants).

44. La troisième question posée, selon l'étude précitée, par les propositions d'engagements des NMMP est celle de la forme du tarif. Selon les MLP, le système d'une contribution initiale, à hauteur de leur part de marché, à l'investissement fait par les NMPP, serait inéquitable en l'espèce dans la mesure où il s'agit d'un logiciel déjà ancien, appelé à être renouvelé dans un avenir proche. Or, une contribution initiale à la totalité de l'investissement aboutit à faire supporter aux MLP une charge équivalente, proportionnellement à leur part de marché, pour les quelques années de vie de Presse 2000 qui restent, à celle qu'ont supportée les NMPP qui d'une part, bénéficient d'un accès direct au tronc commun depuis 1993 et d'autre part, ont touché jusqu'en 2001 une redevance des dépositaires pour la mise à disposition de Presse 2000. Les MLP rappellent qu'en 2005, le coût estimé du re-développement de Presse 2000 avait été annualisé par huitièmes, les NMPP ayant indiqué à l'époque que l'âge moyen des lignes de Code du logiciel était de huit ans.

45. Enfin, les MLP estiment que le versement d'une contribution annuelle aux coûts d'investissement supportés par les NMPP pour le développement d'un système comme Presse 2000 exclut qu'y soit ajoutée une contribution aux coûts de développement d'un nouveau logiciel, comme prévu au point 8.

46. S'agissant du point 9, prévoyant que l'accès est subordonné à la poursuite par les MLP des tests de plafonnement des quantités et de l'assortiment et de tout autre test conduit dans l'intérêt de la profession, les MLP soutiennent que ces tests sont sans rapport avec la mise en place de l'accès direct automatisé à Presse 2000 et que ce paragraphe qui contraint l'ensemble du secteur à des tests qui seraient décidés unilatéralement par les NMPP, doit être supprimé de la proposition d'engagement. Il en est de même de la référence à ces tests dans l'annexe 2.

47. Sur le point 10, les MLP signalent qu'elles ne reconnaissent pas l'existence de droits de propriété intellectuelle dont les NMPP se prévalent sur le système Presse 2000 ou sur les bases de données qui en font partie et les données qui y transitent.

48. S'agissant des points 11 à 12, les MLP considèrent qu'ils devraient être supprimés dans la mesure où ils pourraient permettre aux NMPP de se délier à leur gré de leurs engagements. A tout le moins, ils suggèrent que les conditions en soient plus précisément encadrées.

49. Les MLP estiment encore que la liberté des NMPP, reconnue au point 14, de mettre hors service le système Presse 2000, est particulièrement dangereuse, et proposent d'encadrer cette liberté par des conditions plus précises. Elles expriment le même type de réserve sur la possibilité de mettre fin aux engagements, en cas de changement important de l'un des faits sur lequel repose la décision du Conseil qui les aura acceptés, laissée aux NMPP au point 15.

50. De façon générale, les MLP proposent que les engagements visent l'accès direct " automatisé " à Presse 2000. Enfin, compte tenu des difficultés rencontrées dans le passé, les MLP estiment qu'une procédure de suivi des engagements, prévoyant un nouvel examen de la situation par le Conseil, est nécessaire.

G. LES OBSERVATIONS AU TEST DE MARCHE

1. LES EDITEURS

51. La société Mondadori France confie la distribution de ses magazines aux NMPP-TP et aux MLP. Elle souligne l'intérêt pour toute la filière de la distribution (de l'éditeur vers le réseau, via sa messagerie et ses systèmes, et du réseau vers l'éditeur) de disposer d'une informatisation ouverte et évolutive et met en garde contre les risques d'un encadrement trop contraignant des conditions d'accès, pour les MLP comme pour tout acteur, éditeur ou coopérative d'éditeurs, qui voudrait assurer sa propre distribution.

52. Plus précisément, elle fait valoir que la participation des MLP à différents tests menés par les NMPP n'a pas de rapport avec les conditions techniques ou financières qui doivent permettre aux MLP d'accéder au tronc commun de Presse 2000 (point 9) et s'inquiète des droits de propriété intellectuelle revendiqués par les NMPP au point 10. Sur le point 11, elle estime que les NMPP devraient s'engager à informer les intéressés à l'avance des modifications qu'elle entend apporter.

53. La société Editions Nuit et Jour est également favorable à l'ouverture du tronc commun de Presse 2000. Il lui semble utile d'avoir un standard unique, ouvert et évolutif, qui facilite le travail des messageries, du réseau de vente et des éditeurs. Elle s'inquiète aussi de la restriction relative aux droits de propriété intellectuelle (point 10) et, sur plusieurs autres points (11, 12 et 14), estime que les réserves exprimées par les NMPP sont de nature à rendre les engagements qu'elles prendraient trop peu contraignants. Ainsi elle trouve anormal que les NMPP n'aient aucune obligation d'évolution ou d'adaptation de Presse 2000, qu'elles aient seules le droit, sans aucune restriction, de faire évoluer Presse 2000 en fonction de leurs propres besoins, qu'elles n'aient aucune obligation d'alimenter Presse 2000 ni de traiter les données, ni aucun engagement d'exactitude, de mise à jour, ou de performance et qu'elles puissent mettre hors service Presse 2000, pour quelque raison que ce soit, sans engager leur responsabilité.

54. La Fédération nationale de la presse d'information spécialisée fait valoir que les modalités de calcul du montant de la contribution initiale et de la contribution annuelle de la charge d'accès doivent être définies dans la plus parfaite transparence financière et comptable. Par ailleurs, ces montants devront rester " raisonnables ", et le principe du libre accès au tronc commun ne devra pas être contredit, dans la pratique, par le coût économique de cet accès. De plus, une estimation de l'ensemble des coûts sur lesquels seraient calculées ces contributions devrait être ajoutée à la proposition actuelle. En cas de désaccord, une disposition devrait permettre le recours à un auditeur indépendant des messageries, sous l'autorité du Conseil Supérieur des Messageries de Presse (CSMP).

2. LE SNDP

55. Le Syndicat National des Dépositaires de Presse relève à titre liminaire que les dépositaires sont les premiers concernés par l'accès direct automatisé au tronc commun de Presse 2000 qu'il leur appartiendra de mettre concrètement en œuvre. Or, il rappelle que les dépositaires connaissent depuis quelques années une situation de crise profonde qui s'est notamment traduite par une réduction progressive de leur nombre à la suite des plans de restructuration mis en œuvre par les NMPP et qu'ils doivent faire face à des coûts de plus en plus importants (explosion des coûts logistiques, réduction de la rémunération versée par les NMPP). La maîtrise du système d'information est dans ces conditions un enjeu important pour l'avenir de la profession.

56. Dans ce contexte, les dépositaires refusent l'installation de deux systèmes informatiques qui impliquerait pour eux des coûts additionnels et alourdirait leur tâche et sont donc favorables à l'ouverture du système Presse 2000 que permettraient les engagements. Cependant le SNDP observe que les modalités d'ouverture de l'accès direct à Presse 2000 doivent être les moins contraignantes possibles pour les dépositaires. Il est surpris que les engagements des NMPP ne contiennent aucune proposition chiffrée. Enfin, il estime que l'ouverture de Presse 2000 n'est pas suffisante. Elle devrait amorcer la mise en place d'un système commun à toute la profession, dans la configuration duquel les dépositaires devraient tenir un rôle actif et central.

57. S'agissant plus précisément du point 1, il relève que la proposition d'engagements ne contient aucune précision sur la teneur du contrat que devraient signer les dépositaires et s'interroge sur la marge de manœuvre qui leur sera laissée. Il s'étonne par ailleurs qu'il revienne aux dépositaires de demander la signature de ce contrat.

58. Le SNDP note également que le point 3 comme le point 11 prévoient que les NMPP n'envisagent de modifier Presse 2000 à l'avenir qu'en fonction " des besoins des NMPP et de l'évolution du système Presse 2000 et des autres systèmes d'information des NMPP ". Il fait valoir que ces dispositions sont contraires à la philosophie qui devait présider au développement du système d'information de la distribution de la presse et qui impliquait de prendre en compte les intérêts de l'ensemble des acteurs de la profession. De même, il est d'avis que l'abandon de Presse 2000 ou le renouvellement de Presse 2000 envisagés aux points 8 et 14 ne pourraient prendre place qu'avec l'accord de tous les acteurs de la profession.

59. La rédaction du point 4 et du point 12 inquiète également le SNDP dans la mesure où, les NMPP ayant l'entière maîtrise du logiciel Presse 2000, il estime qu'il leur appartient de mettre en place tous les mécanismes et de prendre les précautions nécessaires à la prévention des défaillances et anomalies, et qu'elles doivent être responsables de la continuité du service.

60. S'agissant des conditions financières de l'accès, le SNDP rappelle qu'avant 2001, la licence du logiciel Presse 2000 que les NMPP accordaient aux dépositaires était payante. La gratuité de ce service a été obtenue en contrepartie de la réduction de la rémunération des dépositaires prévue par le protocole conclu entre les NMPP et le SNDP en mai 2001. Dès lors, le fait d'imposer aux MLP une charge d'accès qui rémunère l'ensemble des coûts de développement de Presse 2000 conduirait, selon lui, à faire payer deux fois le développement du système.

61. Enfin, sur la question des tests en cours évoqués au point 9, le SNDP précise que ce type de tests doit relever d'accords interprofessionnels, et qu'il est préoccupant que les MLP soient contraintes de les accepter et de s'y soumettre en contrepartie de l'accès direct à Presse 2000. Il est également étonné par les précautions exprimées par les NMPP en matière de droits de propriété intellectuelle. Selon lui, les éléments d'identification des points de vente font partie intégrante de la signalétique du diffuseur et doivent être partagés pour assurer la cohérence du système et permettre le suivi des mises à jour.

II. Discussion

62. Selon les dispositions du I de l'article L. 464-2 du Code de commerce dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 4 novembre 2004, le Conseil de la concurrence " peut accepter des engagements proposés par les entreprises ou organismes et de nature à mettre un terme aux pratiques anticoncurrentielles ".

63. Au vu des observations reçues dans le cadre du test de marché, les NMPP ont présenté en séance des modifications substantielles à leurs engagements. De plus, afin de permettre aux engagements proposés de mieux répondre aux préoccupations de concurrence exprimées et pour tenir compte des observations reçues, ainsi que des débats en séance, le Conseil a demandé aux NMPP d'introduire des modifications supplémentaires.

Sur la mise en place de l'accès direct automatisé au tronc commun du système Presse 2000

64. Les NMPP s'engagent à proposer de bonne foi aux MLP, dans les deux mois suivant la date à laquelle la décision du Conseil acceptant leur engagement leur sera notifiée, les conditions techniques, financières et juridiques dans lesquelles les MLP, si elles le souhaitent, disposeront d'un accès direct automatisé au tronc commun du logiciel et des bases de données du Système Presse 2000 dans les dépôts, étant entendu :

• qu'il appartiendra aux MLP de faire le nécessaire auprès des dépositaires pour qu'ils acceptent et organisent à leur niveau les connexions et échanges de fichiers ;

• et que l'obligation des NMPP d'accorder et de maintenir l'accès direct automatisé visé ci-dessus dans un dépôt donné est subordonnée à la signature et au respect par le dépositaire concerné de l'avenant à son contrat de licence du Système Presse 2000 qui lui sera proposé par les NMPP aux fins de la mise en œuvre de l'accès direct automatisé, étant entendu que les NMPP feront en sorte que les dépôts SAD et les dépôts gérés acceptent la mise en place de l'accès direct automatisé (point 1).

65. Afin d'éviter la saisie ou la ressaisie par les dépositaires des données nécessaires à l'exercice de leur activité pour le compte des MLP, l'accès direct automatisé qui sera accordé aux MLP permettra l'échange de certaines données (les "Données Tronc Commun ") entre le système informatique des MLP et le Système Presse 2000 par transfert automatisé de fichiers (point 2).

66. Les données tronc commun qui feront l'objet d'échanges par voie de transfert automatisé de fichiers sont listées en annexe 1, laquelle pourra faire l'objet de modifications à l'avenir en fonction notamment de l'évolution des besoins des NMPP et de l'évolution du Système Presse 2000 et des autres systèmes d'information des NMPP. Les modifications substantielles seront mises en œuvre sous réserve d'un préavis de trois mois aux MLP (point 3).

67. En cas d'entrée sur le marché d'une nouvelle messagerie, les NMPP examineront la possibilité de mettre en place à son profit un accès direct automatisé comparable à celui accordé aux MLP. Les éventuelles modifications qui pourraient être apportées à l'accès direct automatisé accordé aux MLP devront être strictement nécessaires et ne présenter aucun caractère discriminatoire (point 10).

68. Les NMPP s'engagent à mettre en place l'accès direct automatisé dans chaque dépôt dans un délai maximum de 4 semaines à compter de la date à laquelle le contrat avec les MLP et l'avenant au contrat de licence du système Presse 2000 du dépositaire concerné auront été tous deux signés (point 12).

69. Le Conseil constate que l'accès direct automatisé des MLP au tronc commun de Presse 2000 mettra fin à la situation, préjudiciable à l'ensemble du secteur de la distribution de la presse au numéro, dans laquelle les dépositaires sont contraints de ressaisir manuellement les informations relatives aux publications diffusées par les MLP. Cette situation est d'autant moins justifiable que Presse 2000 a été installé chez les dépositaires pour assurer l'informatisation de leur activité et donne lieu de leur part à un paiement, la circonstance que la redevance initiale ait été remplacée depuis 2001 par une baisse de leur rémunération étant sans effet. Le Conseil considère donc que ces engagements sont de nature à supprimer les problèmes d'erreurs de saisie et de perturbations dont étaient susceptibles de pâtir les publications diffusées par les MLP, que ces problèmes aient été réels ou aient simplement été allégués par les NMPP auprès des éditeurs à titre d'argument commercial. Ils sont également de nature à supprimer les incitations des dépositaires à un traitement discriminatoire des titres MLP, qui pouvaient être créées par cette situation déséquilibrée.

70. Le Conseil note que les dépositaires sont les principaux bénéficiaires des engagements proposés et qu'à ce titre, leur adhésion à l'évolution prévue est fortement probable, ainsi que cela avait d'ailleurs déjà été constaté en 2005. Toutefois, compte tenu du contrôle exercé par les NMPP sur une partie des dépositaires, la précision concernant la SAD et les dépôts gérés par les NMPP est en effet, comme l'ont fait valoir les MLP dans leurs observations, de nature à préserver le caractère obligatoire des engagements pour les NMPP. Les NMPP ont accepté, en séance, de l'insérer dans leur proposition.

Sur les obligations et réserves encadrant l'accès direct automatisé au tronc commun du système Presse 2000

71. L'obligation des NMPP d'accorder et de maintenir l'accès direct automatisé visé ci-dessus est subordonnée à l'exécution par les MLP des tâches et obligations qui lui incomberont selon les termes du cahier des charges et plus généralement du contrat qui leur sera proposé par les NMPP, qui s'inspirera de celui des 19 et 26 janvier 2005, notamment, à titre non exhaustif, les tâches et obligations listées en Annexe 2. Les NMPP se réservent le droit d'inclure dans le contrat des clauses d'exonération ou de limitation de la responsabilité des NMPP en cas d'inexécution de leurs obligations qui n'excéderont pas ce qui est habituel dans des contrats de ce type conclus entre professionnels qualifiés et informés des contraintes et des risques qui leur sont inhérents. Le contrat inclura également d'autres stipulations usuelles en la matière (point 4).

72. L'article L. 464-2 prévoit que le Conseil peut accepter des engagements de nature à mettre un terme aux pratiques anticoncurrentielles. A priori, comme cela a été relevé ci-dessus, tel est le cas en l'espèce dès lors que les engagements prévoient la mise en place d'un accès direct informatisé des MLP au tronc commun de Presse 2000. Toutefois, s'il n'est pas nécessaire que l'appréciation du Conseil s'étende aux stipulations précises du contrat qui sera conclu entre les deux parties pour la mise en place de cet accès, il convient toutefois que les NMPP s'engagent à ce que ce contrat ne contienne aucune clause de nature à priver d'effet utile les engagements pris. De ce point de vue, le Conseil considère que la référence aux clauses habituelles ou usuelles dans des contrats de ce type conclus entre professionnels laisse ouvert un champ de possibilités trop large de nature à empêcher la signature de ce contrat dans les meilleurs délais. En conséquence, il a demandé aux NMPP de se référer explicitement au contrat précédemment conclu entre les deux parties pour le même objet, en janvier 2005, ce qui a été accepté par les NMPP.

73. De même, les réserves apportées par les NMPP aux obligations découlant pour elles des engagements pris ne doivent pas être de nature à vider ces engagements de leur substance. Le Conseil a donc demandé qu'il soit précisé que ces réserves ne doivent pas remettre en cause, dans sa substance, l'engagement de mise en place d'un accès direct automatisé au tronc commun de Presse 2000.

74. Dans ce but, les engagements définitifs sont rédigés comme suit :

• le présent engagement des NMPP n'emporte aucune obligation de leur part de faire évoluer le Système Presse 2000 ni de l'adapter à quelque besoin spécifique ou non des MLP ; il n'emporte aucune restriction au droit des NMPP de le faire évoluer selon ses propres besoins, sous réserve que de telles évolutions ne restreignent pas l'accès des MLP aux fonctionnalités et données du tronc commun de Presse 2000 auxquelles il leur sera donné accès en vertu du présent engagement et que la substance des réponses aux préoccupations de concurrence exprimées dans la présente affaire soit clairement préservée (point 8).

• Le présent engagement des NMPP n'emporte aucune obligation de leur part d'alimenter le Système Presse 2000 en données ni d'assurer le traitement de ces données et ne comporte aucune garantie de leur exactitude, aucun engagement de mise à jour ni aucune garantie de performance. Toutefois, les NMPP s'engagent à ne procéder à aucune modification de nature à supprimer l'interopérabilité de Presse 2000 avec les logiciels des MLP homologués aux fins de la mise en place de l'accès direct automatisé objet du présent engagement.

• Le présent engagement deviendra caduc de plein droit en cas de mise hors service du Système Presse 2000 par les NMPP pour quelque raison que ce soit, sous réserve d'un préavis d'une durée d'un an, et ne comporte aucun engagement de maintenir en service le Système Presse 2000. (point 11).

75. En revanche, la disposition contestée dans l'ensemble des observations reçues, prévoyant (point 9) que l'accès direct automatisé au tronc commun du logiciel Presse 2000 était subordonné " à la poursuite par les MLP des tests de plafonnement des quantités et de l'assortiment et de tout autre test conduit dans l'intérêt de la profession ", a été retirée de leur engagement par les NMPP.

Sur la question des droits de propriété intellectuelle

76. L'accès direct automatisé accordé aux MLP ne conférera à ces dernières aucun autre droit que ceux qui leur seront expressément consentis pour les besoins des échanges de fichiers, notamment aucun droit de propriété intellectuelle sur le Système Presse 2000 et sur les bases évolutives de données qui en font partie. S'agissant du contenu des bases de données, compte tenu des divergences entre les NMPP, qui estiment détenir les droits conférés au producteur d'une base de données par les articles L. 341-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, et les MLP, qui déclarent ne pas être disposées à les leur reconnaître, le contrat entre les deux sociétés ne prévoira pas de disposition établissant l'existence ou la titularité des droits de propriété intellectuelle sur le contenu des bases de données du Système Presse 2000, sans que cela ne constitue une renonciation des NMPP aux droits qu'elles estiment détenir, les NMPP se réservant expressément la faculté de faire valoir leurs droits et recours à cet égard en tant que de besoin. Le contrat entre les NMPP et les MLP prévoira une obligation d'identification de l'origine " Presse 2000 " du contenu des bases de données qui seront communiquées aux tiers (point 7).

77. Le conflit qui oppose les NMPP et les MLP, en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle qui pourraient être revendiqués sur la base de données issue de Presse 2000, ne relève pas du champ de compétence du Conseil de la concurrence pour autant qu'il n'est pas soutenu qu'il soulève une préoccupation de concurrence. Toutefois, comme pour les autres conditions relatives aux engagements des NMPP, il importe que les clauses relatives à l'exercice des droits de propriété intellectuelle ne soient pas de nature à remettre en cause le principe de l'accès direct automatisé. Cet effet serait d'autant moins justifiable que l'automatisation de l'accès direct ne fera que remplacer l'accès manuel et n'aboutira pas à mettre à la disposition des MLP des données dont elles ne disposent pas actuellement en l'absence d'accès direct. La rédaction définitive du point 7, agréée par les deux parties en séance, n'appelle de ce point de vue pas de commentaire de la part du Conseil. Sur les conditions financières de l'accès direct automatisé au tronc commun de Presse 2000

78. S'agissant du mode de calcul de la charge d'accès annuelle qui sera due par les MLP en contrepartie de la mise en place de l'accès direct automatisé à Presse 2000, les NMPP ont proposé en séance des modifications substantielles par rapport à la version des engagements publiés sur le site du Conseil. En particulier, elles proposent d'annualiser par huitièmes la contribution aux coûts de développement du logiciel et des bases de données, comme suggéré par les MLP dans leurs observations. Elles ont également proposé de valoriser l'actif sur la base du montant précédemment retenu dans le contrat signé entre les deux parties en janvier 2005, majoré des coûts du projet d'évolution du système dénommé " NIN23 ", ce que les MLP ont accepté à titre compromissoire. En revanche, les NMPP ont reconnu que les coûts du projet " Arpège " devaient concourir au développement d'un nouveau système et non de Presse 2000. Il est rappelé qu'en 2005, l'estimation des coûts de redéveloppement à l'identique du tronc commun s'élevait à 9 336 000 euro HT.

79. Il sera appliqué au total des coûts pris en compte au titre de cette contribution un coefficient égal à la part de marché des MLP sur le marché de la distribution de la presse vendue au numéro (quotidiens compris) sur la base des ventes en montants forts réalisées au cours de l'année précédente.

80. Cette contribution sera majorée d'une rémunération des capitaux investis calculée par application d'un taux annuel de 6 %, le taux de 8 % initialement proposé par les NMPP ayant été considéré par le Conseil comme correspondant à une rémunération d'investissement à risques, ce qui ne peut être considéré comme étant le cas du système Presse 2000.

81. A cette contribution aux coûts de développement du système sera ajoutée une contribution aux coûts d'exploitation et de gestion du tronc commun de Presse 2000 et de l'accès direct automatisé, estimés représenter 75 % des coûts totaux du Système Presse 2000 pour chacun des postes de coûts visés ci-dessous, comprenant une quote-part correspondant à la part de marché des MLP sur le marché de la distribution de la presse vendue au numéro (quotidiens compris) sur la base des ventes en montants forts réalisées au cours de l'année précédente, des postes de coûts suivants :

- les coûts de l'équipe de support et d'assistance aux dépôts, majorée d'une quote-part de frais généraux de 13,4 % ;

- les coûts de maintenance et de fonctionnement du réseau VPN ;

- la charge annuelle d'amortissement des serveurs installés chez les dépositaires ;

- les coûts de l'équipe d'administration des échanges entre Presse 2000 et les diffuseurs informatisés, majorée d'une quote-part de frais généraux de 13,4 % ;

- les coûts du réseau VPN pour les diffuseurs.

82. Les MLP ont fait valoir en séance qu'elles contestaient l'évaluation faite par les NMPP de la part des coûts du tronc commun de Presse 2000 dans le total des coûts du système Presse 2000, soit 75 %. Le Conseil considère que leur propre évaluation, soit 60 %, n'est appuyée par aucun élément probant. Par ailleurs il estime que la prise en compte, à ce stade, des coûts de maintenance et de développement de Presse 2000 n'est pas justifiée, dans la mesure où ces coûts sont déjà nécessairement couverts par la contribution aux coûts de développement dont le mode de calcul implique que tous les coûts de développement engagés annuellement sont couverts. Enfin, alors que les MLP faisaient valoir que le réseau VPN installé chez les diffuseurs n'alimentait pas le tronc commun de Presse 2000, les explications données en séance par les NMPP ont convaincu le Conseil qu'il s'agissait de coûts pertinents pour le tronc commun de Presse 2000.

83. Comme pour les autres conditions auxquelles est subordonné l'accès direct automatisé donné aux MLP, la charge d'accès ne doit pas être fixée à un niveau dissuasif qui enlève aux engagements tout effet utile. Selon une jurisprudence constante, tant nationale que communautaire (décisions n° 00-D-27 du 13 juin 2000, Prison d'Osny, et n° 05-D-15 du 13 avril 2005, société Regal Pat contre Electricité de Strasbourg, CJCE General Motors 13 novembre 1975 et CJCE 11 novembre 1986 British Leyland) le caractère non excessif d'un prix doit au premier abord s'apprécier au regard des coûts de la prestation. Une disproportion manifeste entre ce prix et la valeur du service correspondant, qui ne s'appuie sur aucune justification économique, est ainsi susceptible de fausser le jeu de la concurrence si ce prix est fixé par une entreprise en position dominante et est de nature à produire des effets d'exclusion sur un marché. S'il n'est pas possible d'établir cette disproportion par examen des coûts, la jurisprudence permet de recourir à une évaluation par comparaison avec les prix pratiqués par des entreprises placées dans des situations équivalentes.

84. Sur la base de ce guide d'analyse, le mode de calcul décrit ci-dessus est jugé par le Conseil comme prenant en compte les coûts pertinents pour la prestation concernée et devant conduire à une rémunération équitable. Afin de réduire les délais de négociation du contrat visé au § 71 ci-dessus, les NMPP indiquent que la charge d'accès facturable au titre de l'année 2008 devrait se situer dans une fourchette de 600 000 à 700 000 euro hors taxes. Le Conseil en prend acte.

85. En cas de remplacement de Presse 2000, les NMPP soumettront aux MLP une formule de calcul de la charge d'accès qui leur sera demandée. En ce qui concerne l'assiette des coûts à prendre en compte, dont une quote-part constituera la base de la charge d'accès, les NMPP ont accepté en séance, pour répondre aux préoccupations de concurrence du Conseil, de préciser que cette assiette comprendra tous les coûts pertinents et justifiés de développement et que, en cas de remplacement de Presse 2000, les MLP seraient informées un an au moins avant le déploiement du nouveau système (point 6).

Sur le suivi de la mise en œuvre de l'engagement

86. L'accès direct automatisé sera mis en place dans chaque dépôt dans les 4 semaines suivant la date de signature du contrat avec les MLP et de l'avenant au contrat de licence du dépositaire concerné (point 12). Enfin, les NMPP s'engagent (point 3) à tenir le Conseil informé de l'exécution de leur engagement. Ces dispositions n'appellent pas de remarque.

87. En conséquence, le Conseil considère que l'engagement proposé répond aux préoccupations de concurrence soulevées dans cette affaire et présente un caractère crédible et vérifiable. L'engagement et ses deux annexes sont annexés à la présente décision dont ils font partie intégrante.

DÉCISION

Article 1er : Le Conseil accepte l'engagement pris par les NMPP, qui fait partie intégrante de la présente décision à laquelle il est annexé. Cet engagement est rendu obligatoire à compter de la date de notification de la décision.

Article 2 : La saisine de la société Messageries Lyonnaises de Presse, enregistrée sous le numéro 07/0005 F, est close.

Note

1 Il s'agit des ventes au prix public des publications.

ANNEXES

Saisine n° 07/0005 F

Presse 2000

Engagement des NMPP

1. Les NMPP s'engagent à proposer de bonne foi aux MLP, dans les deux mois suivant la date à laquelle la décision du Conseil acceptant leur engagement leur sera notifiée, les conditions techniques, financières et juridiques dans lesquelles les MLP, si elles le souhaitent, disposeront d'un accès direct automatisé au tronc commun du logiciel et des bases de données du Système Presse 2000 dans les dépôts, étant entendu :

* qu'il appartiendra aux MLP de faire le nécessaire auprès des dépositaires pour qu'ils acceptent et organisent à leur niveau les connexions et échanges de fichiers ; et

* que l'obligation des NMPP d'accorder et de maintenir l'accès direct automatisé visé ci-dessus dans un dépôt donné est subordonnée à la signature et au respect par le dépositaire concerné de l'avenant à son contrat de licence du Système Presse 2000 qui lui sera proposé par les NMPP aux fins de la mise en œuvre de l'accès direct automatisé, étant entendu que les NMPP feront en sorte que les dépôts SAD et les dépôts gérés acceptent la mise en place de l'accès direct automatisé.

2. Afin d'éviter la saisie ou la ressaisie par les dépositaires des données nécessaires à l'exercice de leur activité pour le compte des MLP, l'accès direct automatisé qui sera accordé aux MLP permettra l'échange de certaines données (les " Données Tronc Commun ") entre le système informatique des MLP et le Système Presse 2000 par transfert automatisé de fichiers.

3. Les Données Tronc Commun qui feront l'objet d'échanges par voie de transfert automatisé de fichiers sont listées en Annexe 1, laquelle pourra faire l'objet de modifications à l'avenir en fonction notamment de l'évolution des besoins des NMPP et de l'évolution du Système Presse 2000 et des autres systèmes d'information des NMPP. Les modifications substantielles seront mises en œuvre sous réserve d'un préavis de trois mois aux MLP.

4. L'obligation des NMPP d'accorder et de maintenir l'accès direct automatisé visé ci-dessus est subordonnée à l'exécution par les MLP des tâches et obligations qui lui incomberont aux termes du cahier des charges et plus généralement du contrat qui leur sera proposé par les NMPP, qui s'inspirera de celui des 19 et 26 janvier 2005, notamment, à titre non exhaustif, les tâches et obligations listées en Annexe 2. Les NMPP se réservent le droit d'inclure dans le contrat des clauses d'exonération ou de limitation de la responsabilité des NMPP en cas d'inexécution de leurs obligations qui n'excéderont pas ce qui est habituel dans des contrats de ce type conclus entre professionnels qualifiés et informés des contraintes et des risques qui leur sont inhérents. Le contrat inclura également d'autres stipulations usuelles en la matière.

5. L'accès direct automatisé accordé aux MLP donnera lieu au paiement d'une charge d'accès annuelle que les MLP devront régler aux NMPP. La charge d'accès comprendra :

(i) une contribution aux coûts de développement du tronc commun du logiciel et des bases de données du Système Presse 2000 supportés par les NMPP jusqu'à la date de prise d'effet du contrat qui sera conclu entre les NMPP et les MLP aux fins d'assurer à ces dernières l'accès direct automatisé visé au présent engagement, dont le montant sera celui qui avait été retenu dans le contrat signé entre les NMPP et les MLP au mois de janvier 2005 aux fins de l'exécution de la mesure conservatoire ordonnée par le Conseil dans sa décision du 22 décembre 2003, majoré des coûts du projet d'évolution du Système Presse 2000 dénommé " NIN2 ", considérés comme rattachables à la maintenance du Système Presse 2000, à l'exclusion des autres coûts encourus postérieurement à l'abandon du projet "NIN2", notamment ceux du projet " Arpège ", considérés comme rattachables au développement d'une solution de remplacement du Système Presse 2000. Les MLP contribueront à hauteur d'un 1/8ème de ces coûts par année ou fraction d'année d'utilisation de l'accès direct automatisé au tronc commun du logiciel et des bases de données du Système Presse 2000. Il sera appliqué au total des coûts pris en compte au titre de cette contribution un coefficient égal à la part de marché des MLP sur le marché de la distribution de la presse vendue au numéro (quotidiens compris) sur la base des ventes en montants forts réalisées au cours de l'année précédente. Cette contribution sera majorée d'une rémunération des capitaux investis calculée par application d'un taux annuel de 6 % ;

(ii) une contribution aux coûts d'exploitation et de gestion du tronc commun de Presse 2000 et de l'accès direct automatisé qui sera accordé aux MLP, estimés représenter 75 % des coûts totaux du Système Presse 2000 pour chacun des postes de coûts visés ci-dessous, comprenant une quote-part correspondant à la part de marché des MLP sur le marché de la distribution de la presse vendue au numéro (quotidiens compris) sur la base des ventes en montants forts réalisées au cours de l'année précédente, des postes de coûts suivants :

- les coûts de l'équipe de support et d'assistance aux dépôts, majorée d'une quote-part de frais généraux de 13,4 % ;

- les coûts de maintenance et de fonctionnement du réseau VPN ;

- la charge annuelle d'amortissement des serveurs installés chez les dépositaires ;

- les coûts de l'équipe d'administration des échanges entre Presse 2000 et les diffuseurs informatisés, majorée d'une quote-part de frais généraux de 13,4 % ;

- les coûts du réseau VPN pour les diffuseurs.

En l'état, les NMPP estiment que la charge d'accès facturable au titre de l'année 2008 se situera dans une fourchette de 600 000 à 700 000 euro hors taxes et demandent au Conseil d'en prendre acte.

6. En cas de remplacement de Presse 2000 par un autre logiciel ou système, les NMPP soumettront aux MLP, lorsque le projet de remplacement sera suffisamment abouti mais avant qu'il ne soit définitivement approuvé ou réalisé et, en tout état de cause, un an au moins avant le déploiement du logiciel ou système appelé à remplacer Presse 2000, une formule de calcul de la charge d'accès qui leur serait demandée si elles souhaitaient maintenir un accès direct automatisé comparable à celui qui fait l'objet du présent engagement. L'assiette des coûts, dont une quotepart constituera la base de la charge d'accès comprendra tous les coûts pertinents (c'est-à-dire portant sur la partie du logiciel ou système accessible aux MLP) et justifiés de développement, de maintenance et de fonctionnement du nouveau système, y compris les coûts du projet " Arpège ".

7. L'accès direct automatisé accordé aux MLP ne leur conférera aucun autre droit que ceux qui leur seront expressément consentis pour les besoins des échanges de fichiers, notamment aucun droit de propriété intellectuelle sur le Système Presse 2000 et sur les bases de données qui en font partie et leurs évolutions. S'agissant du contenu des bases de données, compte tenu des divergences entre les NMPP, qui estiment détenir les droits conférés au producteur d'une base de données par les articles L. 341-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, et les MLP, qui déclarent ne pas être disposées à les leur reconnaître, le contrat entre les deux sociétés ne prévoira pas de disposition établissant l'existence ou la titularité des droits de propriété intellectuelle sur le contenu des bases de données du Système Presse 2000, sans que cela ne constitue une renonciation des NMPP aux droits qu'elles estiment détenir, les NMPP se réservant expressément la faculté de faire valoir leurs droits et recours à cet égard en tant que de besoin. Le contrat entre les NMPP et les MLP prévoira une obligation d'identification de l'origine " Presse 2000 " du contenu des bases de données qui seront communiquées aux tiers.

8. Le présent engagement des NMPP n'emporte aucune obligation de leur part de faire évoluer le Système Presse 2000 ni de l'adapter à quelque besoin spécifique ou non des MLP ; il n'emporte aucune restriction au droit des NMPP de le faire évoluer selon ses propres besoins, sous réserve que de telles évolutions ne restreignent pas l'accès des MLP aux fonctionnalités et données du tronc commun de Presse 2000 auxquels il leur sera donné accès en vertu du présent engagement et que la substance des réponses aux préoccupations de concurrence exprimées dans la présente affaire soit clairement préservée.

9. Le présent engagement des NMPP n'emporte aucune obligation de leur part d'alimenter le Système Presse 2000 en données ni d'assurer le traitement de ces données et ne comporte aucune garantie de leur exactitude, aucun engagement de mise à jour ni aucune garantie de performance. Toutefois, les NMPP s'engagent à ne procéder à aucune modification de nature à supprimer l'interopérabilité de Presse 2000 avec les logiciels des MLP homologués aux fins de la mise en place de l'accès direct automatisé objet du présent engagement.

10. En cas d'entrée sur le marché d'une nouvelle messagerie, les NMPP examineront de bonne foi la possibilité d'aménager à son profit un accès direct automatisé comparable à celui qui fait l'objet du présent engagement tout en maintenant en service l'accès direct automatisé accordé aux MLP en fonction de la capacité du Système Presse 2000 de les supporter et de tous autres facteurs pertinents. Les NMPP s'engagent à ce que les modifications qui devront être éventuellement apportées à l'accès direct automatisé accordé aux MLP soient strictement nécessaires à l'accueil de la nouvelle messagerie et ne présentent aucun caractère discriminatoire.

11. Le présent engagement deviendra caduc de plein droit en cas de mise hors service du Système Presse 2000 par les NMPP pour quelque raison que ce soit, sous réserve d'un préavis d'une durée d'un an, et ne comporte aucun engagement de maintenir en service le Système Presse 2000.

12. Les NMPP s'engagent à mettre en place l'accès direct automatisé dans chaque dépôt dans les 4 semaines de la date à laquelle le contrat avec les MLP et l'avenant au contrat de licence du système Presse 2000 du dépositaire concerné auront été tous deux signés.

13. Les NMPP informeront le Conseil de la remise aux MLP du projet de contrat visé à l'article 1 du présent engagement. Elles informeront également le Conseil de la mise en place de l'accès direct automatisé dans les dépôts visée à l'article 12 du présent engagement.

14. Le présent engagement cessera de lier les NMPP si l'un des faits sur lesquels repose la décision du Conseil qui les aura acceptés subit un changement important.

15. Le présent engagement ne vaut ni n'implique de la part des NMPP une quelconque reconnaissance du bien fondé des dénonciations soumises au Conseil par la saisissante ni de celui des préoccupations de concurrence formulées dans l'évaluation préliminaire. A fortiori, il ne constitue aucune reconnaissance par les NMPP de la commission de quelque infraction de concurrence que ce soit.

Annexe 1

Données Tronc Commun

Les Données Tronc Commun sont, au jour du présent engagement :

• Pour ce qui concerne les données en provenance du système des MLP à destination du Système Presse 2000 :

* La signalétique des titres, annonces de parution et bordereaux d'invendus ;

* Les prévisions de distribution J-2 ;

* Les bordereaux d'échanges journaliers ;

* Les accusés de réception des états de chargement ;

* La répartition des services diffuseurs ;

* Le pilotage des transmissions des statistiques de ventes.

• Pour ce qui concerne les données en provenance du Système Presse 2000 à destination du système des MLP :

* Les chiffres d'affaires ;

* Les demandes de réassort et " écarts commettant " ;

* La signalétique diffuseur ;

* Les statistiques de ventes ;

* Les tables de réglage ;

* Les tables informationnelles.

Tels que ces termes seront définis dans le cahier des charges établi par les NMPP.

Il est entendu que les MLP n'auront accès qu'aux données concernant les titres qu'elles distribuent pour le compte de leurs propres éditeurs, à l'exclusion de toute donnée concernant les titres distribués pour le compte d'éditeurs d'autres messageries.

Annexe 2

Tâches et obligations incombant aux MLP en vertu du contrat avec les NMPP

Disposer et maintenir en état tous les équipements et logiciels compatibles avec ceux des NMPP et homologués par ces dernières selon des procédures convenues, afin d'assurer le respect de l'intégrité du système Presse 2000 et le bon fonctionnement des échanges ;

Disposer des moyens de transport des données à partir ou à destination du système Presse 2000;

Disposer de personnel qualifié au regard de la nature des tâches à accomplir ;

Disposer de moyens de prévention et de résolution des perturbations et incidents techniques conformes aux règles de l'art ;

Assurer à ses frais et sous sa responsabilité exclusive tous les travaux qui lui incombent, notamment les tests et les tâches de déploiement de d'exploitation ainsi que les interventions auprès des dépositaires intéressés pour la mise en œuvre de l'accès direct automatisé à leur niveau ;

S'engager à indemniser les NMPP de tout dommage subi par ces dernières du fait des MLP, notamment en cas de perturbation du fonctionnement ou d'atteinte à l'intégrité du système Presse 2000 ;

S'engager à défendre et mettre à couvert les NMPP contre toute réclamation d'éditeurs, de dépositaires, de diffuseurs et de tous autres tiers du fait de dysfonctionnements ou de dommages qui relèvent de la responsabilité des MLP ;

Respecter les droits de propriété intellectuelle des NMPP et respecter l'obligation d'identification de l'origine du contenu des bases de données visée au point 7 du présent engagement ;

Respecter toute réglementation applicable, notamment celle relative au traitement des données à caractère personnel et au respect de la vie privée ;

Régler ponctuellement toutes sommes dues aux NMPP au titre de l'accès direct automatisé accordé.