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Décisions

Cass. soc., 16 janvier 2008, n° 07-40.055

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

HCGMVP (Sté)

Défendeur :

Simoes (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Avocats :

SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

Aix-en-Provence, du 2 nov. 2006

2 novembre 2006

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 novembre 2006), que M. et Mme Simoes ont constitué en 1992 une société Simatel, dont il étaient les cogérants, et qui a assuré la gestion d'hôtels exploités en franchise ; que le 30 mai 1997, la société Simatel a conclu avec la société Hôtel de la capitainerie des galères de Marseille Vieux-Port (HCGMVP) un contrat de "mandat" qui la chargeait de la gestion à Marseille d'un hôtel exploité en franchise par cette dernière société, sous l'enseigne Etap Hôtel ; que, soutenant qu'ils se trouvaient personnellement placés dans un état de subordination à l'égard de la société HCGMVP, dans l'exécution de leur travail, M. et Mme Simoes ont saisi le juge prud'homal de demandes en paiement de salaires et de dommages-intérêts ;

Attendu que la société HCGMVP fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la compétence du juge prud'homal pour statuer sur ces demandes et de l'avoir condamnée au paiement d'indemnités alors, selon le moyen : 1°) que l'exécution par une personne physique, ès qualité de gérant d'une société, des obligations nées d'un contrat de gérance-mandat conclu par cette société, ne peut caractériser un rapport de subordination juridique entre son gérant et le mandant qu'à la condition que la société mandataire soit fictive ; qu'en jugeant qu'un contrat de travail liait les époux Simoes, cogérants de la société Simatel, à la société HCGMVP, mandant de la société Simatel du fait de leur exécution du contrat de gérance-mandat conclu entre les sociétés HCGMVP et Simatel, sans constater préalablement que la société Simatel était fictive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 511-1 du Code du travail ; 2°) que l'existence d'un contrat de travail suppose que soit caractérisé un lien de subordination entre les parties ; qu'en l'espèce, pour dire qu'un contrat de travail liait les époux Simoes, cogérants de la société Simatel, à la société HCGMVP, la cour d'appel s'est bornée à relever des éléments relatifs aux relations contractuelles entre la société HCGMVP et la société Simatel tenant au fait que le contrat de gérance-mandat conclu entre l'exposante et la société Simatel faisait obligation à cette dernière de faire diriger et exploiter l'établissement hôtelier par ces deux cogérants, que la société Simatel n'exerçait pas son mandat en toute autonomie et devait appliquer strictement l'organisation du travail résultant des accords passés entre la société mandante et son franchiseur et qu'en cas de non-respect des directives par les cogérants ès qualité, la société mandante s'était réservée la possibilité de mettre fin au contrat de gérance-mandat ; qu'en omettant ainsi de caractériser l'existence d'un lien de subordination entre la société HCGMVP et les époux Simoes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 511-1 du Code du travail ; 3°) que ne caractérise pas l'existence d'un contrat de travail la mise en œuvre d'un contrat de gérance-mandat dans les conditions de l'article L. 146-1 du Code de commerce selon lequel "les personnes physiques ou morales qui gèrent un fonds de commerce ou un fonds artisanal, moyennant le versement d'une commission proportionnelle au chiffre d'affaires, sont qualifiées de "gérants-mandataires" lorsque le contrat conclu avec le mandant, pour le compte duquel, le cas échéant dans le cadre d'un réseau, elles gèrent ce fonds, qui en reste propriétaire et supporte les risques liés à son exploitation, leur fixe une mission, en leur laissant toute latitude, dans le cadre ainsi tracé, de déterminer leurs conditions de travail, d'embaucher du personnel et de se substituer des remplaçants dans leur activité à leurs frais et sous leur entière responsabilité" ; qu'en l'espèce, l'exposante soutenait que le contrat de gérance-mandat répondait à la définition posée à l'article L. 146-1 du Code de commerce ; que pour dire que les époux Simoes étaient liés par un contrat de travail avec l'exposante, la cour d'appel s'est bornée à retenir que la société Simatel n'exerçait pas son mandat de gestion en toute autonomie, les cogérants devant obtenir l'accord préalable écrit de la société HCGMVP avant tout engagement ou règlement pour le compte de cette société qui gardait le contrôle de la gestion de l'hôtel, que la société Simatel devait appliquer strictement l'organisation du travail résultant des accords passés entre la société HCGMVP et son franchiseur, notamment en ce qui concerne la politique des prix, le recours aux fournisseurs référencés ACCOR et les prestations hôtelières à appliquer, que les époux Simoes étaient alors amenés à appliquer ces règles et à rendre compte au mandant de leur bonne exécution ; qu'en se fondant ainsi de manière inopérante sur la limitation de la liberté de gestion du gérant-mandataire dans l'exploitation de l'hôtel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1, L. 511-1 du Code du travail et L. 146-1 du Code de commerce ; 4°) que si l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le prétendu employeur, tel n'est pas le cas de l'intégration du gérant d'une société dans un simple "schéma d'organisation mis en place au sein du groupe" pour l'exploitation d'établissements hôteliers au moyen de contrats de gérance-mandat ; qu'en retenant le contraire la cour d'appel a violé l'article L. 121-1 et L. 511-1 du Code du travail ; 5°) que les juges du fond sont tenus de motiver leur décision ; qu'en l'espèce, la société HCGMVP soutenait que les époux Simoes disposaient d'une autonomie dans l'organisation de leur travail, notamment concernant leurs horaires, qu'ils procédaient librement aux embauches du personnel de la société qu'ils dirigeaient et qu'aucune obligation de formation ne leur était imposée par l'exposante, les formations étant effectuées à leur demande et sur proposition du franchiseur ; qu'en se bornant à affirmer, par motifs adoptés des premiers juges, que seul un contrat de travail permet l'exacte qualification des relations contractuelles entre les époux Simoes et l'exposante "compte-tenu de l'existence d'un travail et son exécution, formations, respect des procédures de travail imposé par le franchisé, dates de congés, horaire de travail", sans préciser les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait et sans procéder à leur analyse sommaire, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés et dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que les cogérants de la société Simatel ne disposaient d'aucune autonomie réelle dans la gestion de l'hôtel, qu'ils étaient personnellement tenus d'assurer en permanence son exploitation, qu'ils devaient recueillir l'accord de la société HCGMVP pour tout engagement ou paiement, que cette société contrôlait la gestion de l'hôtel en adressant des directives dont elle contrôlait l'exécution, en effectuant des visites mensuelles, et en leur imposant de rendre compte de leur bonne exécution, et qu'en cas d'inobservation de ces directives, elle disposait d'un pouvoir de sanction ; qu'elle a pu en déduire que M. et Mme Simoes se trouvaient placés dans un état de subordination à l'égard de la société HCGMVP et qu'ils étaient ainsi liés à celle-ci par un contrat de travail, sans qu'il soit nécessaire d'établir que la société Simatel avait un caractère fictif ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.