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Décisions

CA Versailles, 12e ch. sect. 1, 21 février 2008, n° 06-07780

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

Défendeur :

Genedis (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mandel

Conseillers :

Mmes Valantin, Lonne

Avoué :

Me Treynet

Avocat :

Me Parleani

CA Versailles n° 06-07780

21 février 2008

La société Genedis SA qui exploite un supermarché à l'enseigne E. Leclerc à Gennevilliers (92) a deux fournisseurs de fruits et de légumes la société Prim'Anord et la société Les Halles Saint-Jean.

Au cours de l'année 2004, les services de la Direction Départementale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) du département des Hauts-de-Seine ont relevé des faits à l'occasion de la facturation des services de coopération commerciale entre la société Genedis et ses fournisseurs de fruits et légumes, qu'ils ont estimés contraires aux dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce.

Concernant la société Prim'Anord, il a été relevé que cette société avait conclu avec la société Genedis quatre contrats entre le 30 décembre 2002 et le 4 novembre 2003 pour la période du 1er janvier 2003 au 29 février 2004 d'un montant total de 5 753 euro, intitulés "Dynamique commerciale maintien de la gamme de produits exclusivité d'approvisionnement (pommes de terre)".

Que cependant en dépit de la mention d'une exclusivité des achats de pommes de terre, des achats avaient été régulièrement faits auprès de la société Les Halles Saint-Jean au cours de la même période (douze achats pour un montant de 915 euro).

Concernant la société Les Halles Saint-Jean, la DGCCRF a constaté que le contrat "de coopération commerciale" passé par la SA Genedis le 26 décembre 2002 avec cette société, indiquait "enveloppe de coopération régionale" fruits et légumes période de réalisation du 2 janvier 2003 au 31 mars 2003, montant : 1 180 euro HT ; qu'il n'a cependant pas été présenté de contrat de coopération passé avec la centrale d'achats régionale du groupement Scapnor à laquelle la société Genedis est affiliée et que le responsable des produits frais au sein de la société Genedis a déclaré que le contrat comportait par erreur la mention de la référence régionale mais que la facture se référait à l'accord magasin du 10 juillet 2002 en ce qui concerne la ristourne trimestrielle inconditionnelle de 5 %.

Estimant que ces faits relevaient de l'application de l'article L. 442-6 du Code de commerce, en ce qu'il n'y avait aucune contrepartie réelle à l'avantage accordé par les sociétés, le ministre de l'Economie des Finances et de l'Industrie, a assigné, par acte du 19 mai 2005, la SA Genedis pour entendre dire que cette société avait conclu avec ses fournisseurs de fruits frais et légumes (Prim'Anord et Les Halles Saint-Jean) des contrats dit de "coopération commerciale" sans objet et qu'elle avait obtenu des avantages financiers qui ne correspondaient pas à des services commerciaux effectivement rendus;

Il concluait à ce que ces pratiques soient déclarées fautives, que leur cessation soit ordonnée, que soit prononcée la nullité des contrats et ordonné le remboursement des sommes versées par les fournisseurs ; enfin il réclamait le prononcé d'une amende civile de 5 000 euro à l'encontre de la SA Genedis.

La SA Genedis a opposé l'irrecevabilité de l'action en nullité ainsi engagée par le ministre de l'Economie.

Elle a soutenu que le ministre entendait intervenir dans des rapports de droit privé en se substituant aux intéressés au nom de l'ordre public économique, ce qui aboutissait à les priver de leurs droits alors que l'article 6 de la CEDH pose le principe du droit de recourir à justice. La société Genedis a conclu que le ministre ne pouvait pas agir sans leur consentement et dans la mesure où les sociétés n'entendaient pas renoncer à agir, elle lui a contesté le pouvoir d'agir de façon autonome.

A titre subsidiaire, la SA Genedis a conclu au caractère mal fondé de cette demande et au rejet intégral des prétentions du ministre. Elle a fait valoir que les pouvoirs détenus par le ministre en vertu de l'article L. 442-6 du Code de commerce (en particulier celui de demander la nullité), sont strictement limités par le texte et que les situations en cause ne sont pas prévues.

S'agissant du contrat signé avec la société Prim'Anord elle a soutenu qu'en toute hypothèse il y avait seulement inexécution par une des parties de ses obligations contractuelles ce qui ne pouvait entraîner la nullité du contrat ; que le manquement à l'exclusivité n'était pas constitué puisque seules des commandes d'appoint avaient été passées avec la société Les Halles Saint-Jean.

La SA Genedis a soutenu que la nullité du contrat ne pouvait de toute façon être prononcée, la situation visée ne rentrant pas dans les cas de nullité limités à l'article L. 442-6-II ; qu'enfin, en ce qui concerne l'action en responsabilité, la preuve d'un préjudice n'était pas apportée et qu'une amende civile qui dépend du préjudice ne pouvait pas être prononcée en l'absence des parties au contrat considéré comme illicite.

Concernant le contrat litigieux signé avec la société Les Halles Saint-Jean, la SA Genedis a contesté l'existence d'une faute alors que les parties étaient d'accord pour considérer que les sommes versées correspondaient à une ristourne ; elle a soutenu qu'il y avait seulement lieu à requalification du contrat intitulé "de coopération commerciale" et que le fait pouvant donner lieu à nullité n'existant pas, la demande du ministre de l'Economie ne pouvait de toute façon prospérer.

Par jugement rendu le 20 juillet 2006 le Tribunal de commerce de Nanterre n'a pas retenu les demandes du ministre de l'Economie concernant les contrats d'exclusivité signés entre la société Genedis et la société Prim'Anord. Il a ordonné à la société Genedis la cessation de ses pratiques fautives à l'encontre de la société Les Halles Saint-Jean. Il a condamné la société Genedis à payer au ministre de l'Economie une amende civile de 2 000 euro, a débouté les parties de toute autre demande et a condamné la SA Genedis aux dépens.

Le tribunal a considéré que les contrats d'exclusivité signés par la SA Genedis avec la société Prim'Anord portaient sur une exclusivité d'approvisionnement en pommes de terre par la société Genedis auprès de la société Prim'Anord et que la signature des contrats avec la société Les Halles Saint-Jean qui portait également sur des pommes de terre ne représentaient que 0,8 % du total des achats à un prix supérieur ce qui ne portait pas atteinte à l'accord d'exclusivité.

Pour le contrat de "coopération commerciale" signé le 26 décembre 2002 entre la SA Genedis et la société Les Halles Saint-Jean, le tribunal a dit que la SA Genedis ne prouvait pas avoir rendu un service au titre du contrat invoqué; que l'action engagée étant une action en réparation et non en annulation et la société Les Halles Saint-Jean n'étant pas dans la cause, le ministre de l'Economie ne pouvait demander la restitution des sommes versées. Toutefois, le tribunal considérant que la SA Genedis avait commis une faute au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce, il lui a ordonné la cessation des pratiques et a condamné cette société à une amende civile.

Le ministre de l'Economie a interjeté appel. Il demande (conclusions du 12 octobre 2007) à la cour de dire que son action est recevable et que les sommes facturées par la société Genedis à la société Prim'Anord et à la société Les Halles Saint-Jean au titre de contrats de coopération commerciale ne sont la contrepartie d'aucun service commercial effectivement rendu ; que cette pratique est contraire à l'article L. 442-6 du Code de commerce et d'ordonner à la société Genedis de cesser ces pratiques.

Il demande également à la cour de dire que les contrats sont nuls et d'ordonner la répétition par la SA Genedis aux deux fournisseurs, des sommes qu'elle a indûment perçues d'eux soit 5 753 euro à la société Prim'Anord et 1 180 euro à la société Les Halles Saint-Jean, enfin de prononcer une amende civile de 5 000 euro à l'encontre de la société Genedis et de la condamner aux dépens.

Le ministre de l'Economie soutient que son action est recevable et qu'elle n'est pas contraire à l'article 6-1 de la CEDH. Il fait valoir qu'en vertu de l'article L. 442-6 du Code de commerce, il possède une action autonome ; que cette action répond à une finalité propre de défense de l'ordre public économique et non à la restauration de droits patrimoniaux ; qu'il s'agit d'un ordre public de direction pour la défense duquel il a des pouvoirs propres (demande de nullité des contrats illicites, amende civile ...).

Il affirme qu'il n'agit pas au nom et pour le compte de fournisseurs ou ne se substitue pas à eux et qu'il peut agir indépendamment de l'avis des personnes lésées, que son action ne prive pas les fournisseurs de la possibilité d'agir et que l'atteinte pouvant résulter de ses pouvoirs est proportionnée au but recherché.

Au fond, le ministre fait valoir que la société Genedis qui s'était engagée à réserver une exclusivité de fourniture à la société Prim'Anord et qui prétend que les contrats de coopération ont été émis à ce titre, a cependant acheté des pommes de terre à la société Les Halles Saint-Jean ; que même si les quantités sont minimes, elles sont régulières tout au long de la période des contrats de coopération ; qu'en raison de cette violation de la clause d'exclusivité, les contrats de coopération signés avec la société Prim'Anord ont un caractère fautif; que l'absence de protestation de la société Prim'Anord ne lui fait pas perdre ce caractère.

Le ministre s'estime fondé à demander outre la cessation de cette pratique, la nullité des contrats de coopération conclus entre la société Genedis et la société Prim'Anord, le prononcé d'une amende civile et la restitution des versements effectués.

Le ministre de l'Economie fait également valoir que le contrat de coopération commerciale conclu le 26 décembre 2002 entre la société Genedis et la société Les Halles Saint-Jean qui porte sur une prestation libellée "enveloppe de coopération régionale" correspond à une "facture de coopération" d'un montant de 1 180 euro qui ne correspond à aucun service rendu.

Que la société Les Halles Saint-Jean est en effet référencée par la société Genedis directement et non par la centrale d'achat régionale et que le rattachement effectué finalement par le responsable des achats à la ristourne trimestrielle inconditionnelle, démontre que la somme facturée au titre de la coopération commerciale ne correspond à aucun service rendu.

Qu'en conséquence la signature du contrat conclu par la SA Genedis avec la société Les Halles Saint-Jean qui fait référence à une enveloppe de coopération régionale qui n'existe pas et qui porte sur une remise dépourvue de contrepartie est bien une pratique fautive qui ne peut être ignorée au motif que les parties sont d'accord pour requalifier l'avantage perçu.

La société Genedis demande dans ses dernières conclusions (29 octobre 2007) au vu des articles 6-1 de la CEDH et de l'article 122 du Code de procédure civile, de dire le ministre de l'Economie irrecevable en ses demandes.

A titre subsidiaire, elle conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le ministre de ses demandes concernant le contrat Genedis/Prim'Anord et en ce qu'il a considéré que l'action engagée par le ministre concernant le contrat Genedis/Les Halles Saint-Jean était une action en responsabilité et non en nullité et que le préjudice ne pouvait être évalué tant que la société Les Halles Saint-Jean n'était pas dans la cause.

Formant appel incident, la société Genedis demande d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé une amende civile.

Enfin, elle demande de condamner le ministre au paiement d'une somme de 4 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et de le condamner aux dépens.

La société Genedis conteste avoir violé son obligation d'exclusivité à l'égard de la société Prim'Anord et fait valoir que la société Prim'Anord n'a élevé aucune protestation. Pour le contrat avec la société Les Halles Saint-Jean, elle est en désaccord avec l'argumentation du ministre selon laquelle, elle aurait établi des contrats de coopération commerciale qui ne correspondaient pas à une prestation de service. Elle soutient qu'il n'y a aucune faute, ni nullité du contrat avec la société Les Halles Saint-Jean ; qu'il y a seulement lieu de procéder à une requalification puisqu'il a été fait état à tort d'un rattachement régional mais qu'il existait une lettre de juillet 2002 qui prévoyait l'octroi inconditionnel de remises trimestrielles.

Elle soutient par ailleurs que l'action engagée est une action en responsabilité mais qu'il n'existe aucun préjudice ; en l'absence de trouble à l'ordre public, elle fait valoir qu'aucune amende ne doit être prononcée.

Le Ministère public soutient que l'action du ministre est recevable, que ce dernier dispose d'une action autonome et que compte tenu de la mission de rétablissement de l'ordre public économique en vue duquel cette action lui a été conférée, il n'y a pas atteinte à la liberté des parties de faire entendre leur cause.

Il considère que l'accord passé avec la société Prim'Anord qui comporte une remise de 8 % du chiffre d'affaires en contrepartie de l'exclusivité d'approvisionnement n'a pas été respectée.

Le ministère public estime que la SA Genedis a conclu un contrat de coopération commerciale avec la société Les Halles Saint-Jean alors qu'il n'y a eu aucun service rendu.

Il demande de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré qu'il y avait une faute au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce et a ordonné la cessation des pratiques et prononcé une amende de 2 000 euro mais requiert qu'il soit infirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de nullité et de répétition des sommes indûment perçues au titre du contrat. Il fonde sa demande sur le paragraphe III en affirmant que cette demande ne peut être confondue avec la réparation d'un préjudice en ce qu'elle n'a pour objet que le rétablissement de la situation antérieure au trouble à l'ordre public causé par le contrat illicite.

Sur ce

Sur la recevabilité de l'action du ministre de l'Economie

Considérant que selon l'article L. 442-6 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001:

I "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant ou industriel ou personne immatriculée au registre du commerce...

... 2° a) d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu.

II Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, commerçant...

* a) la possibilité de bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale

III L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre de l'Economie ou par le président du Conseil de la concurrence

Lors de cette action, le ministre de l'Economie, le Ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi pour toutes ces pratiques mentionnées faire constater la nullité des clause ou contrats illicites, demander la répétition de l'indu et le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 millions d'euro...",

Considérant que ce texte confère au ministre de l'Economie un droit d'action propre ; que ce droit lui a été donné dans le but de la défense d'un intérêt général, l'ordre public économique, dans le but d'assurer un caractère loyal et équilibré aux échanges entre les acteurs économiques que par l'exercice de ce droit, il ne se substitue pas aux divers partenaires à l'origine de la situation, lesquels conservent le droit d'agir pour la défense de leurs intérêts ;

Considérant que le ministre dispose d'un droit parfaitement indépendant qui ne s'apparente pas à l'action collective que peut exercer un syndicat, dans la mesure où il ne vise que la défense d'un intérêt d'ordre public et qui lui donne une entière liberté d'initiative dans l'engagement de l'action;

Considérant toutefois que dans la mesure où l'action du ministre tend à la remise en cause de la validité d'un contrat, l'information des parties qui ont concouru à la formation de cet acte est nécessaire ; qu'elle implique leur mise en cause sans toutefois que leur accord doive être obtenu, ni même sollicité pour engager l'action;

Considérant en effet, que le ministre de l'Economie, à peine de porter atteinte à l'article 6-1 de la CEDH et plus précisément au droit pour toute personne de présenter des contestations sur ses droits et obligations à un tribunal, ne peut agir en nullité sur le fondement de l'article L. 442-6-II du Code de commerce, même si la nullité est encourue de plein droit, sans appeler dans la cause toutes les parties au contrat critiqué et cette mise en cause est une condition de recevabilité de son action;

Considérant en revanche que, lorsque l'action du ministre est exercée dans le seul but de mettre fin à des pratiques illicites et de voir prononcer une amende civile qui n'en est que l'accessoire, et est dirigée contre l'auteur estimé responsable, cette action est recevable sans qu'il soit nécessaire d'informer la victime, que dans ce cas en effet, la validité du contrat n'est pas directement mise en cause et la réparation de l'atteinte à l'ordre public économique se trouve assurée par la condamnation de l'auteur à mettre fin aux pratiques;

Sur le fond:

Considérant qu'en l'espèce, le ministre de l'Economie a assigné la SA Genedis pour avoir passé avec les sociétés Prim'Anord et Les Halles Saint-Jean des contrats de coopération commerciale sans objet et obtenu des avantages ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu;

* Considérant que la SA Genedis a signé quatre contrats successifs de coopération commerciale avec la société Prim'Anord entre le 1er janvier 2003 et le 29 février 2004 dont l'objet était de réserver l'exclusivité de l'approvisionnement en direct de pommes de terre ; qu'au cours de la même période, elle a acheté à plusieurs reprises des pommes de terre à son autre fournisseur direct la société Les Halles Saint-Jean (12 factures comportant la livraison de pommes de terre);

Considérant que même si la quantité commandée au second fournisseur est modeste par rapport à la quantité fournie par la société Prim'Anord, il demeure que celle-ci n'a pas bénéficié d'une exclusivité d'achat de la part de la SA Genedis ; qu'il y a eu en conséquence un avantage accordé à la SA Genedis alors que le service d'exclusivité n'a pas été respecté ;

Que le ministre est recevable et bien fondé en sa demande tendant à ce que soit ordonnée la cessation de la pratique illicite et à demander une amende civile qui tend à la réparation du trouble à l'ordre public économique dont la gravité en donne la mesure ;

Qu'en revanche, la société Prim'Anord, fournisseur cosignataire des contrats de coopération commerciale n'ayant pas été avisée de la procédure, la demande en nullité du contrat est irrecevable pour les motifs ci-dessus énoncés, qu'il en est de même de la demande en répétition de l'indu;

* Considérant que le ministre stigmatise également la signature entre la SA Genedis et la société Les Halles Saint-Jean d'un contrat de coopération commerciale sur lequel il est noté "enveloppe de coopération régionale";

Considérant que l'enquête a permis d'établir que la société Les Halles Saint-Jean n'était pas référencée au niveau régional ; qu'il a été indiqué par Monsieur Monchovet, responsable des produits frais de la SA Genedis, que la facture se référait en réalité à un accord magasin qui prévoit une ristourne de 5 % trimestrielle inconditionnelle et qu'il y avait eu une erreur d'intitulé de la facture;

Considérant toutefois qu'en raison de sa fonction, Monsieur Monchovet connaissait le référencement en direct de la société Les Halles Saint-Jean ; qu'en outre, le régime des ristournes est différent de celui des contrats de coopération commerciale, puisque les ristournes apparaissent sur les factures du fournisseur alors que dans le cas de coopération commerciale, le distributeur envoie une facture mentionnant un montant défini;

Qu'en définitive, il n'a pas été justifié de ce que le versement de l'avantage accordé dans le cadre du contrat de coopération commerciale signé le 26 décembre 2002 correspondait à un service particulier de la SA Genedis à l'égard de la société Les Halles Saint-Jean, alors que la caractéristique d'un tel contrat est de définir la prestation particulière accordée par le fournisseur au distributeur en dehors des obligations d'achat et de vente;

Qu'en conséquence, le ministre de l'Economie est recevable et fondé à demander la cessation d'une telle pratique ainsi que le versement d'une amende civile mais, en l'absence de mise en cause de la société Les Halles Saint-Jean, fournisseur cosignataire du contrat de coopération commerciale litigieux, il n'est pas recevable à solliciter la nullité du contrat, ni la répétition de l'indu;

Qu'en raison du trouble causé à l'ordre public économique par son comportement fautif marqué à l'égard des deux fournisseurs, la SA Genedis devra verser au ministre de l'Economie une amende civile de 5 000 euro;

Considérant que chaque partie succombant partiellement en ses prétentions, il sera fait masse des dépens de première instance et d'appel;

Considérant que les parties conserveront à leur charge les frais qu'elles ont exposés à l'occasion de la procédure ;

Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement et contradictoirement, - Déclare irrecevables les demandes du ministre de l'Economie des Finances et de l'Industrie en nullité des contrats de coopération signés par la société Genedis et la société Prim'Anord entre le 1er janvier 2003 et le 29 février 2004 et en nullité du contrat de coopération commerciale signé entre la société Genedis et la société Les Halles Saint-Jean le 26 décembre 2002. - Déclare irrecevables les demandes du ministre de l'Economie des Finances et de l'Industrie en répétition de l'indu afférentes à ces mêmes contrats de coopération commerciale. - Confirme le jugement en ce qu'il a ordonné à la société Genedis la cessation de ses pratiques fautives au sens de l'article L. 442-6-I du Code de commerce à l'encontre de la société Les Halles Saint-Jean. - Le reformant pour le surplus, - Ordonne à la SA Genedis la cessation de ses pratiques fautives au sens de l'article L. 442-6 I du Code de commerce à l'encontre de la société Prim'Anord. - La condamne pour le trouble apporté par ses pratiques fautives envers la société Prim'Anord et la société Les Halles Saint-Jean au paiement d'une amende de 5 000 euro (cinq mille euro). - Dit que chaque partie conservera à sa charge ses frais. - Fait masse des dépens de première instance et d'appel et les partage par moitié avec droit pour Maître Treynet, avoué, de recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans recevoir provision.