Cass. soc., 27 mars 2008, n° 06-45.752
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Delhomme
Défendeur :
Trinome (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mazars (faisant fonction)
Rapporteur :
M. Chollet
Avocat général :
M. Petit
Avocats :
SCP Gatineau, SCP Masse-Dessen, Thouvenin
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 27 septembre 2006), que Mme Delhomme a, le 10 janvier 2002, été engagée, par la société Trinome en qualité de négociateur immobilier VRP ; que la salariée a, le 24 janvier 2002, pris acte de la rupture de son contrat de travail avec effet au 10 février 2002 ;
Sur le pourvoi principal de Mme Delhomme : - Sur le premier moyen : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen : - Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la rupture du contrat de travail lui était imputable et de l'avoir déboutée de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnités de rupture, alors, selon le moyen, que le retard dans le paiement du salaire caractérise à lui seul un manquement de l'employeur à une obligation essentielle du contrat de travail justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié aux torts exclusifs de l'employeur, peu important que ce manquement soit justifié ou non par des raisons légitimes ;qu'une telle règle s'applique a fortiori pour un salarié VRP, exclusivement payé à la commission, à qui l'employeur ne paye pas ses commissions dues à échéance trimestrielle ;qu'en relevant que s'il était exact que les comptes devaient être effectués entre les parties à la fin de l'année 2001 et que le règlement des commissions devait être normalement effectué à cette date, tout en considérant que le retard de paiement des commissions était explicable en partie par des circonstances indépendantes de la volonté de l'employeur et ne pouvait donc justifier un manquement suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat à ses torts et, qu'en conséquence, la prise d'acte émanant de Mme Delhomme devait produire les effets d'une démission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et, partant, a violé ensemble les articles L. 121-1, L. 122-4, L. 122-14-4, L. 143-2 et L. 751-12 du Code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait qui lui étaient soumis, les juges du fond ont constaté qu'en la circonstance, le retard dans l'établissement des comptes et le paiement des commissions ne constituait pas un manquement suffisamment grave pour justifier la prise d'acte de la rupture ;que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le pourvoi incident de la société Trinome : - Sur le premier moyen : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à Mme Delhomme la somme de 3 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'obligation de non-concurrence, alors, selon le moyen : 1°) que le juge ne saurait dénaturer les termes du litige, tels qu'ils résultent des prétentions respectives des parties ;qu'il résultait tant des écritures d'appel de Mme Delhomme que de ses prétentions émises à l'audience et rappelées par l'arrêt attaqué que la salariée revendiquait l'application de l'accord national interprofessionnel des VRP en date du 3 octobre 1975 avec toutes conséquences de droit quant à la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et, à titre subsidiaire, qu'elle demandait le remboursement de l'abattement de 30 % intitulé "abattement VRP" appliqué par l'employeur sur sa rémunération ;que la cour d'appel a jugé que ledit accord n'était pas applicable à la salariée et que celle-ci ne pouvait se prévaloir de l'abattement invoqué ;qu'en accordant cependant à Mme Delhomme une indemnité d'un montant de 3 000 euro au titre du respect de la clause de non-concurrence, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une demande en ce sens, a dénaturé les termes du litige, violant par là même les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;2°) qu'en tout état de cause, que la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence peut prendre la forme d'une majoration de salaire, dès lors qu'elle assure au salarié une rémunération supérieure aux minima légaux ou conventionnels qui s'imposent à l'employeur;qu'en l'espèce, il était constant que la salariée était employée en qualité de négociateur immobilier - VRP et rémunérée à la commission, avec un minimum conventionnel annuel garanti ;qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat de travail stipulait que la rémunération de la salariée tenait compte de l'application de la clause de non-concurrence ;qu'en énonçant que si la contrepartie financière pouvait prendre la forme d'une majoration de salaire versée en cours de contrat, encore fallait-il que cette majoration soit déterminable et que les bulletins de salaire en portent mention, et que tel n'était pas le cas en l'occurrence, de sorte que l'employeur devait être condamné à verser des dommages-intérêts à la salariée en raison du respect par celle-ci de cette clause, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition que celle-ci ne comporte pas, a violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que le montant de la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence ne peut dépendre uniquement de la durée d'exécution du contrat de travail, ni son paiement intervenir avant la rupture ;
Et attendu qu'ayant constaté que la salariée, qui prétendait à tort que le montant de la contrepartie devait être celui fixé par l'accord national interprofessionnel des VRP, avait respecté l'obligation de non-concurrence sans recevoir d'indemnisation, la cour d'appel lui a alloué une somme inférieure à celle qu'elle réclamait à ce titre ;d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Par ces motifs : Rejette les pourvois tant principaux qu'incidents.