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Décisions

Cass. soc., 4 octobre 2007, n° 06-41.269

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Afi Europe (SAS)

Défendeur :

Allebourg

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mazars (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Chollet

Avocat général :

M. Salvat

Avocats :

Me Blondel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin

Dijon, ch. soc., du 12 janv. 2006

12 janvier 2006

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 12 janvier 2006), que M. Allebourg, engagé le 12 février 1996 par la société Afi Europe, en qualité d'attaché commercial, a, le 13 avril 2004, été déclaré, par le médecin du travail, inapte au poste de magasinier-cariste, avec mention d'un danger immédiat ; que le salarié, licencié le 17 mai 2004, a demandé la condamnation de son employeur à lui payer des sommes notamment à titre de dommages-intérêts et de contrepartie financière à la clause de non-concurrence ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen : 1°) que nonobstant les termes du contrat de travail et de ses éventuels avenants, ce qui doit être pris en compte s'agissant des fonctions exercées par le salarié, c'est ce qu'il exécutait effectivement au moment de la rupture du contrat de travail ; qu'il résulte des écritures circonstanciées de la société appelante que M. Allebourg n'a pratiquement pas exercé la fonction d'attaché commercial puisqu'il a en fait exercé la fonction de magasinier-cariste sans jamais émettre la moindre protestation que le salarié avait reçu une formation de conduite en sécurité des chariots de manutention ; que lors des visites à la médecine du travail, les fiches indiquent clairement la fonction de magasinier-cariste et que son accident du travail était en relation avec l'exercice de cette fonction, si bien que tout convergeait du côté d'une acceptation par M. Allebourg d'une modification de ses fonctions par rapport à son contrat initial et à un avenant étant souligné que M. Allebourg était également employé en qualité de technicien, ce qu'il était à hauteur de 50 % de son travail ; qu'en ne tenant pas compte de ces données objectives régulièrement entrées dans le débat au sens des articles 6 et 7 du nouveau Code de procédure civile et en affirmant qu'il n'est pas possible à l'employeur de licencier un salarié pour une inaptitude ne concernant pas les fonctions définies au contrat de travail cependant qu'il s'agissait de se prononcer par rapport aux fonctions effectivement exercées par le salarié, la cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ; 2°) que l'employeur insistait sur le fait qu'à l'époque du licenciement de M. Stevignon, commercial, M. Allebourg était occupé à plein-temps à son poste de technicien magasinier ; que l'employeur faisait également valoir que si M. Coudurier Curveur a été engagé en qualité d'employé au service technique, c'était à temps partiel quant à M. Ritter, il a été engagé par un contrat à durée déterminée, le contrat mentionnant qu'il s'agissait de remplacer M. Allebourg au poste de technicien si bien que c'était à tort que le susnommé affirmait que M. Ritter et M. Coudurier Curveur auraient été embauchés au même poste et qu'en conséquence un poste de technicien à temps plein aurait pu lui être proposé, étant encore souligné que M. Ritter n'a travaillé qu'une journée dans le cadre de son contrat à durée indéterminée ; qu'en affirmant que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement pour avoir procédé le 23 et le 26 mai 2004 à l'embauche de M. Coudurier Curveur et de M. Ritter en qualité d'employés au service technique, par contrats à durée indéterminée à temps partiel, sans s'expliquer sur les données sus-évoquées dûment avancées par l'employeur qui avait proposé un emploi à temps partiel au service technique à M. Allebourg qui l'avait refusé, d'où les embauches dans le contexte sus-évoqué, la cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ; 3°) que l'employeur faisait encore valoir que la société Afi Europe était une très petite structure qui emploie, outre un secrétaire commercial, trois agents commerciaux ; que tous les secteurs d'activité étaient déjà pourvus et qu'à l'époque du licenciement de M. Stevignon, M. Allebourg était occupé à plein temps, à son poste de technicien-magasinier et que la société Afi Europe ne faisant partie d'aucun groupe, a bien rempli dans un tel contexte son obligation de reclassement ayant proposé à M. Allebourg un reclassement qu'il a refusé ; qu'en ne tenant pas compte de ces données pertinentes également régulièrement entrées dans les débats au sens de l'article 6 et 7 du nouveau Code de procédure civile, la cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, violé ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Afi Europe, à laquelle il n'appartenait pas d'anticiper un refus pour se dispenser de proposer un poste permettant son possible reclassement, n'avait pas offert un poste disponible d'un autre salarié, la cour d'appel, qui a caractérisé la violation par l'employeur de son obligation de reclassement du salarié inapte, a, sans avoir à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident : - Vu l'article L. 135-2 du Code du travail, ensemble l'article 8 bis de la convention collective nationale des entreprises de commerce et de commission importation-exportation de France métropolitaine ; - Attendu que pour limiter le montant de la condamnation de l'employeur au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient qu'il n'est pas possible au salarié d'invoquer l'article 8 bis de la convention collective dès lors que ces dispositions ajoutées par accord du 18 mars 2003 étaient inapplicables lors de la conclusion du contrat de travail et de l'avenant ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'à défaut de dispositions particulières excluant leur application aux salariés antérieurement soumis à une clause de non-concurrence, les dispositions plus favorables de la convention collective relatives au montant de la contrepartie financière, dont le paiement ne peut intervenir avant la rupture du contrat de travail, devaient recevoir application, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi principal ; Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a limité à 2 754,48 euro la condamnation de l'employeur à payer au salarié une contrepartie financière de non-concurrence et à 275,44 euro celle à titre de congés payés, l'arrêt rendu le 12 janvier 2006, entre les parties, par la Cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Besançon.