Cass. soc., 27 mars 2008, n° 06-43.991
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Richard
Défendeur :
Etablissements Jean Kossmann (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mazars (faisant fonction)
Rapporteur :
Mme Bouvier
Avocat général :
M. Petit
Avocats :
SCP Boutet, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 18 mai 2006) que M. Richard a été engagé le 1er janvier 1983, en qualité de VRP, par la société Etablissements Jean Kossmann, entreprise spécialisée dans la restauration et la reliure des archives des mairies ; qu'il a été licencié pour faute lourde le 22 novembre 1996 pour avoir détourné des clients de son employeur afin de les présenter à la société Reliure de France créée fin 1995 par sa compagne, Mme Philippeau ; qu'une action en concurrence déloyale a été dirigée contre Mme Philippeau devant la juridiction civile ; que parallèlement M. Richard, contestant son licenciement, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à la société Kossmann la somme de 191 437,56 euro en réparation de son préjudice économique consécutif aux agissements de concurrence déloyale de son salarié, alors, selon le moyen que : 1°) que la chambre sociale de la cour d'appel qui, constatant que par un arrêt du 7 juin 2005 devenu définitif, la deuxième chambre civile de la cour avait d'ores et déjà condamné in solidum Mme Philippeau et M. Richard à réparer le dommage causé à la société Kossmann dont ils avaient tous deux été reconnus responsables et qu'elle avait souverainement évalué à la somme de 141 777,59 euro, a néanmoins cru pouvoir apprécier de nouveau le préjudice financier né de la concurrence déloyale de M. Richard et le condamner à verser la somme de 191 437,56 euro à ce titre, quand ce préjudice avait d'ores et déjà été réparé, a violé les articles 1147 et 1382 du Code civil ; 2°) par un premier arrêt en date du 18 décembre 2000, la deuxième chambre civile de la cour d'appel a confirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il avait retenu que Mme Philippeau s'était rendue coupable avec M. Richard d'actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Etablissements Jean Kossmann, qu'elle était tenue de réparer in solidum avec ce dernier ; que par un second arrêt en date du 7 juin 2005, statuant sur le montant du préjudice subi par la société, elle a ensuite homologué le rapport d'expertise et a condamné Mme Philippeau à verser à la société Kossmann la somme de 141 777,59 euro ; que par ces deux arrêts définitifs, ont donc été tranchées la question de la responsabilité de Mme Philippeau et de M. Richard dans le dommage causé à la société Kossmann ainsi que celle de l'indemnisation de ce préjudice ; qu'en se prononçant à nouveau sur la responsabilité de M. Richard et en le condamnant au titre d'un préjudice déjà réparé, la chambre sociale de la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée de ces décisions et a violé en conséquence les articles 1351 du Code civil et 480 du Code de procédure civile ; 3°) le créancier ne pouvant, aux termes de l'article 1229, alinéa 2 du Code civil, demander en même temps le principal et la peine, l'indemnité forfaitaire allouée, en vertu d'une clause pénale, en raison de la violation de l'obligation de non-concurrence et les dommages-intérêts pour le préjudice résultant de la concurrence déloyale sont exclusifs l'un de l'autre, à moins que les parties n'en aient décidé autrement en stipulant expressément dans la clause de non-concurrence que "toute infraction à l'interdiction de concurrence serait sanctionnée par une indemnité journalière forfaitaire, sans préjudice du droit de l'entreprise de poursuivre en justice le remboursement du préjudice effectivement causé" ; qu'en croyant dès lors, pouvoir condamner en l'espèce M. Richard à verser à la société Kossmann la somme de 191 437,56 euro à titre de dommages-intérêts pour le préjudice financier né de la concurrence déloyale qu'elle aurait subi alors que, par arrêt en date du 31 janvier 2003, il avait déjà été condamné à verser à son employeur la somme de 66 237,72 euro en application de la clause pénale figurant dans son contrat et alors que la clause de non-concurrence figurant dans ledit contrat ne prévoyait nullement la possibilité d'un cumul de cette clause pénale et des dommages-intérêts, la cour d'appel a violé l'article 1229 du Code civil ;
Mais attendu que, la clause contractuelle stipule qu'en cas d'infraction à l'interdiction de concurrence, l'employeur peut non seulement obtenir le paiement de l'indemnité forfaitaire mais aussi poursuivre le remboursement du préjudice qu'il a effectivement subi ; que Mme Philippeau ayant été condamnée, dans une instance séparée, par la juridiction commerciale pour ses actes de concurrence déloyale à indemniser la société Kossmann, la chambre sociale de la cour d'appel a condamné M. Richard in solidum à réparer le même préjudice financier ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.