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Décisions

CA Rennes, 3e ch. corr., 13 septembre 2007, n° 06-02741

RENNES

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Thierry

Conseillers :

Mmes Letourneur-Baffert, Tardy-Joubert

Avocat :

Me Roy

TGI Brest, ch. corr., du 7 avr. 2006

7 avril 2006

Rappel de la procédure:

Le Tribunal correctionnel de Brest par jugement en date du 7 avril 2006, pour :

Non-communication par écrit des conditions de rémunération du distributeur ou prestataire, Natinf 011851

vente ou achat, par personne morale, de produit ou prestation de service pour une activité professionnelle sans facturation conforme, Natinf 021924

a condamné X prise en la personne de son représentant légal Noël Y à la peine d'amende de trois mille euro

Les appels:

Appel a été interjeté par:

X, le 6 octobre 2006 à titre principal, M. le Procureur de la République, le 6 octobre 2006 à titre incident

La prévention :

Considérant qu'il est fait grief à X:

- d'avoir à Brest, en tout cas sur le territoire national courant 2003 et depuis temps non prescrit omis de communiquer par écrit les conditions de rémunération du distributeur ou du prestataire, en l'espace absence de contrat de coopération commerciale écrit en dépit d'une rémunération perçue auprès de 24 fournisseurs (par exemple : les fournisseurs Hénaff, Biscuiterie des Iles, Even, Sill, Compagnie Arctique et les Quatre Saisons) et établissement de sept contrats de coopération commerciale non-conformes souscrits auprès des fournisseurs de pâtisseries Gourmandes Solaire, traiteurs Cournouaille Coralis, Maralliance, Jacques Menou et Salaisons du Jet.

Infraction prévue par l'article L. 441-6 alinéa 5 du Code de commerce et réprimée par l'article L. 441-6 alinéa 8 du Code de commerce.

- d'avoir à Brest, en tout cas sur le territoire national courant 2003 et depuis temps non prescrit étant vendeur de produits ou prestations de services, établi une facture ne comportant pas le nom des parties, leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, le prix unitaire hors TVA des produits ou des services vendus, tous rabais remises ou ristournes chiffrables, les conditions d'escompte applicables ou le taux des pénalités exigibles, en l'espèce six factures établies pour les prestations réalisées en exécution des contrats de coopération commerciale comportant une date de réalisation des services erronée ainsi qu'une date d'établissement postérieure à la date de réalisation de ces services avec les fournisseurs Solaire, Traiteurs de Cornouaille, Coralis, Meralliance, Jacques Menou et Salaisons du Jet.

Infraction prévue par les articles L. 441-3 alinéa 3, L. 441-5 du Code de commerce, 121-2 du Code pénal et réprimée par les articles L. 441-4, L. 441-5 du Code de commerce, 131-38, 131-39 5° du Code pénal

Les 24 juillet et 7 octobre 2003, les contrôleurs de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, en résidence administrative à Brest, se sont présentés dans les locaux de l'hypermarché X situé <adresse> Brest, magasin dirigé par Thierry Z et exploité par X SAS située <adresse>, dont Noël Y était le représentant légal.

Cette intervention avait pour objet de vérifier la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques (NRE) visant à moraliser les pratiques commerciales, entrée en vigueur depuis le 17 mai 2001 dont le dispositif permet d'appréhender les pratiques abusives de fausse coopération commerciale ou de coopération commerciale fictive pouvant être mises en œuvre par la grande distribution.

Le contrôle portait donc sur la vérification des règles de facturation prescrites par l'article L. 441-3 du Code de commerce et des règles des contrats de coopération commerciale prévus par l'article 441-6 du Code de commerce.

Il résulte de ces dispositions que les conditions dans lesquelles un distributeur ou prestataire de services se fait rémunérer par ses fournisseurs, en contrepartie de services spécifiques, doivent faire l'objet d'un contrat écrit en double exemplaire détenu par chacune des deux parties et que la rémunération de ce service doit correspondre à de réelles contreparties et faire l'objet d'une facturation conforme aux prescriptions de l'article L. 441-3 du Code de commerce.

Il résultait des constations les faits suivants :

Du mercredi 23 juillet au samedi 2 août 2003, les magasins de l'enseigne "X" de la région Bretagne, dont celui de Brest précité, ont mis sur pied une campagne promotionnelle relayée par un catalogue intitulé "Tradition en Bretagne" diffusé dans le public contenant plus d'une centaine de produits alimentaires et non alimentaires achetés auprès d'une quarantaine de fournisseurs bretons, dont la liste est reprise in extenso dans le procès-verbal du 28 novembre 2003.

Ce catalogue, outre la propre publicité de la société distributrice, assurait ainsi la promotion des produits de ces fournisseurs, qui pour beaucoup d'entre eux sont regroupés au sein de l'association "Produit en Bretagne", destinée à promouvoir les productions fabriquées ou assemblées en Bretagne à des fins de développement de l'emploi local, dont le logo y figure d'ailleurs au regard des produits concernés.

Le distributeur X, en élaborant ainsi et en diffusant ce dépliant publicitaire, rendait pour le compte de ces fournisseurs un service spécifique, relevant par conséquent de la coopération commerciale (en tant qu'obligation particulière, exorbitante des relations contractuelles habituelles) en contrepartie duquel il était susceptible de se faire rémunérer par ces derniers.

Le catalogue "Tradition en Bretagne" concernait ainsi 40 fournisseurs (dont la liste figure dans le procès-verbal d'infraction) et 123 produits.

La vérification des contrats et factures émis dans le cadre de cette opération permettait de constater:

- une absence de justification de contrat de coopération commerciale, pour 33 fournisseurs sur 40.

- et l'établissement, pour 7 fournisseurs de contrats de coopération commerciale, signés postérieurement à la réalisation du service et/ou visant une date de réalisation de la prestation, inexacte.

Le tribunal par le jugement déféré, est entré en voie de condamnation contre la SAS X, personne morale.

Devant la cour, la SAS X, conclut à la nullité de la citation délivrée à son encontre le 6 mars 2006 et du jugement et n'oppose sur le fond, aucun moyen de contestation.

Sur la nullité de la citation et du jugement:

L'indication des nom et prénom de Monsieur Noël Y, en qualité de représentant légal de la personne morale, dans l'exploit de la citation du 16 mars 2006, alors qu'à la date du mandement de citation, celui-ci avait démissionné de sa fonction de Président de la SAS X, ne fait aucunement grief à la société personne morale, dès lors que la citation a été remise, par l'huissier conformément à l'article 555 du Code de procédure pénale, à une personne habilitée à cet effet, Martine A, juriste, qui a accepté de recevoir copie et a visé l'original de l'exploit.

Il importe donc peu que l'exploit ait repris par erreur, dans la désignation du représentant légal, le nom de Monsieur Noël Y, qui était le représentant légal de la société à la date des infractions et auquel le procès-verbal d'infraction avait été régulièrement notifié, en cette qualité, par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le moyen de nullité tiré de l'application des articles 555 et 706-43 du Code de procédure pénale sera donc rejeté.

Sur le fond, il est établi par le procès verbal du 28 novembre 2003 que la SAS X n'a pas, été en mesure de justifier pour 33 fournisseurs de produits promus par le catalogue publicitaire, de contrats de coopération commerciale, alors que la publication et la diffusion par le distributeur d'un catalogue organisant la production de ces produits constituait, pour les fournisseurs de ces produits, un service spécifique donnant lieu à une rémunération dont la mention figure sur le document récapitulatif de l'ensemble des produits du catalogue.

Il est part ailleurs avéré que les 7 contrats de coopération commerciale produits lors du contrôle, comportaient une date de réalisation de la prestation et une date d'établissement du contrat postérieure de près de trois mois après le début de la période publicitaire alors que les contrats de coopération commerciale doivent être antérieurs à la réalisation du service.

De même, six des factures produites, se rapportant à ces contrats non conformes, comportaient une date de réalisation du service, inexacte, comme mentionné dans l'acte de poursuites.

S'agissant d'infractions commises à l'occasion de la publication et diffusion par la SAS X d'un catalogue diffusé dans l'ensemble de ses magasins de la région Bretagne, elles engagent la responsabilité morale de la personne morale dans les termes de l'article L. 441-5 du Code de commerce.

Le jugement sera donc confirmé sur la qualification et la culpabilité.

Sur la peine, l'amende encourue sera autrement appréciée et fixée à 10 000 euro.

Par ces motifs, LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de X, Rejette les moyens de nullité, Confirme le jugement sur la qualification et la culpabilité; Le réformant sur la peine, Condamne la SAS X à une amende de 10 000 euro, Le Président donne au condamné l'avis prévu à l'article 707-3 du Code de procédure pénale; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euro dont est redevable le condamné, en vertu de l'article 800-1 du Code de procédure pénale et de l'article 1018 A du Code général des impôts.