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Décisions

CA Paris, 5e ch. A, 17 octobre 2007, n° 05-20173

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Life Company (SARL), Diot

Défendeur :

Ergoline France (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cabat

Conseillers :

MM. Roche, Byk

Avoués :

Me Teytaud, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocats :

Mes Gilles, Nay, Chauvin

T. com. Créteil, du 20 sept. 2005

20 septembre 2005

Vu le jugement du 20 septembre 2005 par lequel le Tribunal de commerce de Créteil a débouté la société Life Company et M. Jean-Louis Diot de leurs demandes, dirigées à l'encontre de la société Ergoline France, en paiement de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et usage abusif du nom patronymique;

Vu les conclusions signifiées le 10 février 2006 par la société Life Company et par M. Jean-Louis Diot, appelants;

Vu les conclusions signifiées le 24 mai 2006 par la société Ergoline France, intimée;

Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 3 juillet 2007;

Sur ce, LA COUR,

Sur la demande indemnitaire présentée par la société Life Company

Considérant que la société Life Company, dont le gérant est M. Jean-Louis Diot, reproche à la société Ergoline France d'avoir créé un lien Internet " jldiot.com " arrivant directement sur le site de cette dernière et d'avoir ainsi provoqué une confusion dans l'esprit de la clientèle avec une diminution de son chiffre d'affaires ; qu'à ce titre, elle sollicite des dommages et intérêts s'élevant à la somme de 150 000 euro;

Considérant que ces deux sociétés exercent une activité similaire d'importation et de commercialisation de matériel de bronzage, pour les professionnels de l'esthétique et ne peuvent être regardées que comme s'inscrivant dans un rapport concurrentiel que la création du lien Internet utilisant le nom de M. Jean-Louis Diot et dirigeant le client potentiel non pas vers la société Life Company mais vers celle de la société Ergoline France n'est pas contestée par cette dernière et ne saurait valablement être qualifiée de fortuite dès lors qu'elle nécessite une démarche volontaire de la part du concepteur du site Ergoline France ; que par suite, en utilisant le nom du gérant de la société Life Company pour promouvoir ses propres produits, la société Ergoline France a nécessairement généré une confusion dans l'esprit des internautes et a ainsi commis un acte de concurrence déloyale susceptible de générer un détournement de clientèle et, par là même, une distorsion dans le jeu normal du marché considéré, lesdits sites offrant des produits analogues;

Que si le principe du préjudice s'infère nécessairement de l'acte de concurrence déloyale ainsi retenu à l'encontre de la société Ergoline France, il n'en demeure pas moins qu'il appartient à la société Life Company de rapporter la preuve de l'étendue même du préjudice allégué; qu'à cet effet, celle-ci se borne à exciper d'une baisse importante de son chiffre d'affaires et invoque un préjudice commercial qu'elle évalue à 150 000 euro; que toutefois, en l'absence de toute démonstration utile concernant l'imputabilité exacte de la baisse d'activité invoquée pendant l'année 2002, laquelle, au demeurant, n'est justifiée par aucune pièce comptable, mais attestée par de simples courriers émanant d'une société tiers, il convient, au regard des éléments d'appréciation dont la cour dispose, notamment le fait pour Monsieur Piot d'avoir une certaine notoriété dans le domaine du matériel de bronzage, ce qui était très incitatif à la consultation du site litigieux, de condamner la société Ergoline France à verser à la société Life Company la somme de 15 000 euro à titre de dommages et intérêts assortie des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision; que dès lors le jugement déféré sera réformé sur ce point;

Sur la demande indemnitaire présentée par M. Jean-Louis Diot

Considérant que M. Jean-Louis Diot sollicite 20 000 euro à titre de dommages et intérêts pour usage abusif de son nom à des fins commerciales;

Considérant que les dispositions combinées des articles 57 et 1382 du Code civil permettent d'engager la responsabilité quasi-délictuelle de celui qui a utilisé de manière illicite, à des fins commerciales, le nom patronymique d'une famille; qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été ci-dessus démontré, le lien Internet "jldiot.com créé par la société Ergoline France doit être regardé comme une utilisation abusive du nom patronymique du gérant de la société Ergoline France, et ce, à des fins purement commerciales étant donné le rapport concurrentiel existant entre ces deux sociétés et la réputation de M. Jean-Louis Diot dans le secteur commercial considéré ; que le préjudice subi par ce dernier du fait d'avoir eu son nom patronymique associé à une société fiers, autre que celle dont il était le gérant, sera évalué en fonction des éléments disponibles au dossier, à la juste somme de 10 000 euro majorée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt; que le jugement sera également infirmé sur ce point;

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Considérant qu'il est équitable d'allouer à chacun des appelants le plein de leurs demandes respectives formées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que la société Ergoline France, succombant dans ses prétentions, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Infirme le jugement en toutes ses dispositions; Et statuant à nouveau, Condamne la société Ergoline France à verser à la société Life Company la somme de 15 000 euro majorée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision; Condamne la société Ergoline France à payer à M. Jean-Louis Diot la somme de 10 000 euro majorée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision; Condamne la société Ergoline France, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, à verser 4 000 euro tant à la société Life Company qu'à M. Jean-Louis Diot; Condamne la société Ergoline France aux dépens de première instance et d'appel avec, pour ces derniers, droit de recouvrement direct au profit de Maître Teytaud, titulaire d'un office d'avoué.