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Décisions

CA Paris, 5e ch. A, 30 janvier 2008, n° 06-11810

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Laboratoires Filorga (SAS)

Défendeur :

Chartier-Desmarest

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

M. Byk, Mme Patte

Avoués :

Me Pamart, SCP Bommart-Forster-Fromantin

Avocats :

Mes Berreby, Crespin

T. com. Paris, du 2 juin 2006

2 juin 2006

Vu le jugement du 2 juin 2006 par lequel le Tribunal de commerce de Paris, a notamment :

- dit forclose la demande de Madame Chartier-Desmarest au titre de l'indemnité de rupture,

- condamné la société Laboratoires-Filorga à payer à cette dernière les sommes de 3 309,65 euro au titre de l'indemnité de préavis, de 20 000 euro en réparation de son préjudice moral et de 814,57 euro au titre des commissions;

Vu l'appel interjeté par la société Laboratoires-Filorga et ses conclusions enregistrées le 15 octobre 2007;

Vu, enregistrées le 25 septembre 2007, les conclusions présentées par Madame Chartier-Desmarest;

Sur ce

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par contrat à durée déterminée en date du 1er avril 1995, Madame Chartier-Desmarest a été engagée par la société Laboratoires-Filorga en qualité d'agent commercial ; qu'après un premier renouvellement pour une même durée d'un an le contrat s'était, par la suite, poursuivi pour une période indéterminée ; que, toutefois, à compter du mois de mai 2001 la société Laboratoires-Filorga a cessé de verser ses commissions à Madame Chartier-Desmarest avant de lui signifier, par lettre du 22 octobre 2001, la fin de leurs relations d'affaires ; que, contestant les conditions de cessation de son engagement, cette dernière a, par acte du 1er décembre 2004, assigné devant le Tribunal de commerce de Paris, la société Laboratoires-Filorga en paiement de diverses indemnités ainsi que d'un solde de commissions ; que c'est dans ces conditions de fait et de droit qu'est intervenu le jugement présentement déféré;

Sur les demandes formées au titre des indemnités de rupture et de préavis

Considérant qu'en application de l'article L. 134-12 alinéa 2 du Code de commerce l'agent commercial perd son droit à réparation s'il n'a pas notifié à son mandant dans un délai d'un an à compter de la cessation du mandat qu'il entend faire valoir ses droits à indemnité à ce titre; qu'en l'occurrence, Madame Chartier-Desmarest n'a nullement informé la société Laboratoires-Filorga de sa volonté de bénéficier de l'indemnité de rupture dans le délai d'un an imparti à cet effet à compter de la notification de la résiliation de son engagement ; que si l'intimée excipe, néanmoins, de prétendus pourparlers qui auraient en lieu entre les parties, ceux-ci, à les supposer même établis, ne sauraient être regardés comme constitutifs d'une notification de demande d'indemnité compensatrice interruptive de la prescription telle que prévue à l'article L. 134-12 susvisé ; que, par suite, Madame Chartier-Desmarest ne peut qu'être déclarée forclose en sa demande indemnitaire de ce chef;

Considérant, par ailleurs, que l'article L. 134-11 du Code de commerce énonce que lorsque le contrat d'agent commercial est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant le respect d'un préavis, la durée de celui-ci étant de "trois mois pour la troisième année d'activité commencée et les années suivantes...";

Considérant, en l'espèce et ainsi qu'il a été ci-dessus rappelé, que Madame Chartier-Desmarest était liée à la société Filorga par un contrat à durée déterminée en date du 1er avril 1995, renouvelé pour une nouvelle durée déterminée d'un an le 11 juillet 1996, puis ultérieurement poursuivi pour une durée indéterminée ; que la rupture des relations entre les parties est intervenue du seul fait de la société Laboratoires-Filorga sans que la lettre de celle-ci en date du 22 octobre 2001 et formalisant la rupture des liens contractuels ne prévoit un quelconque préavis ; que, dès lors et conformément aux exigences de l'article L. 134-11 précité, l'intimée est en droit de solliciter le bénéfice d'une indemnité compensatrice de préavis calculée selon la moyenne des commissions perçues entre février 2000 et février 2001, dernière période d'activité effective de l'intéressée, soit de 3 309,65 euro (la moyenne mensuelle de 103,22 euro x 3 mois);

Sur l'indemnisation du préjudice moral de l'intimée

Considérant que l'appelante a mis un terme aux relations qu'elle entretenait avec Madame Chartier-Desmarest de façon brutale et sans que cette dernière ait même pu s'expliquer sur l'absence de résultats qui lui était imputée et les causes de celle-ci ; que ces circonstances de fait prennent un relief particulier au regard de la longueur des relations qu'avaient jusqu'alors entretenues les parties; que l'intimée n'a pu qu'en subir un préjudice moral certain dont la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour l'évaluer à la somme de 3 000 euro;

Sur le solde de commissions sollicité

Considérant, enfin, que si Madame Chartier-Desmarest réclame également le versement de la somme de 7 908 euro au titre des commissions qui lui seraient dues pour la période du 1er mai au 31 octobre 2001, elle ne justifie, cependant, en aucune façon de la réalisation de quelconque diligence pendant les mois considérés ; que, bien au contraire, les relevés de commissions dont elle fait état s'arrêtent au mois d'avril 2001 ; que, dans ces conditions et en l'absence de tout autre élément probatoire versé aux débats, l'intimée ne peut qu'être déboutée de tonte demande afférente à un prétendu solde de commissions restées impayées;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement sauf à réduire à 3 000 euro le montant des dommages-intérêts alloués à Madame Chartier-Desmarest en réparation de son préjudice moral et à rejeter la demande formée par cette dernière au titre d'un solde de commissions lui restant dues;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement sauf à réduire à 3 000 euro le montant des dommages-intérêts alloués à Madame Chartier-Desmarest en réparation de son préjudice moral et à rejeter la demande formée par cette dernière au titre d'un solde de commissions lui restant dues; Déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives; Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties; Laisse à chacune de celles-ci la charge des dépens exposés en cause d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de chacun des avoués.