Conseil Conc., 6 mai 2008, n° 08-D-09
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Décision
Relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur le rapport de Mme Arcelin, M. Avignon par Mme Aubert, vice-présidente, présidant la séance, MM. Flichy, Piot, Ripotot, membres.
Le Conseil de la concurrence (section IV),
Vu la lettre du 26 juillet 2002, enregistrée sous le numéro 02/0069 F, par laquelle la SARL Pompes funèbres Viollet a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu les observations présentées par la ville de Lyon pour la régie municipale des pompes funèbres, la société OGF, le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique mutualiste Eugène André, la clinique de la Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand Large, la clinique La Roseraie, la polyclinique des Minguettes, le centre hospitalier Le Vinatier, ainsi que par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, les sociétés Viollet et OGF, la ville de Lyon, le Syndicat intercommunal des pompes funèbres de l'agglomération lyonnaise, le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique de la Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, entendus lors de la séance du 19 février 2008, la clinique mutualiste DE Lyon - Clinique Eugène André, la clinique du Grand Large, la clinique La Roseraie, la polyclinique des Minguettes et le centre hospitalier Le Vinatier ayant été régulièrement convoqués ; Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LA PROCÉDURE
1. Dans sa saisine, la société Viollet estime que la société OGF et la régie municipale des pompes funèbres de Lyon ont mis en œuvre des pratiques susceptibles de fausser le jeu de la concurrence dans le secteur des pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération.
2. Elle soupçonne en particulier la mairie de Lyon, gestionnaire du centre funéraire municipal, et la société OGF de se partager le marché des pompes funèbres de la communauté urbaine. Selon elle, OGF ne vient pas attaquer la position dominante de la régie municipale à Lyon intra muros. En contrepartie, cette entreprise aurait bénéficié de facilités administratives pour implanter des chambres funéraires dans toute l'agglomération et aurait, par l'intermédiaire de sa filiale de transport la CGPF, reçu de la ville l'exclusivité du transport des corps avant mise en bière en provenance des hôpitaux situés à Lyon et dans la proche banlieue. Elle estime enfin que tant la régie municipale que la société OGF ont mis en place des conditions de transport et d'accueil des défunts dans leurs chambres funéraires qui captent la demande des familles pour l'organisation des obsèques.
3. Le 5 juin 2003, une demande d'enquête dont les orientations ont été définies par le rapporteur a été envoyée au Directeur Général de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes. Le rapport d'enquête de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes du Rhône a été adressé au Conseil le 27 février 2004.
4. Au vu des éléments recueillis, une notification de griefs a été envoyée le 5 avril 2007 à la régie municipale des pompes funèbres de la ville de Lyon, à la société OGF ainsi qu'au centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, à la clinique mutualiste Eugène André, à la clinique de la Sauvegarde, à la polyclinique Pasteur, à la clinique de Grand Large, à la clinique La Roseraie, à la polyclinique des Minguettes et au centre hospitalier Le Vinatier.
5. Dans son mémoire adressé le 15 novembre 2007 en réponse au rapport communiqué à toutes les parties le 17 septembre 2007, la société Viollet a produit des témoignages de familles attestant que les établissements de santé concernés par la présente procédure ont procédé sans leur autorisation au transfert des corps de leurs proches décédés dans la chambre funéraire de la régie municipale ou d'OGF. Ces témoignages portent sur trois décès en 2001 à la clinique mutualiste Eugène André, un décès en 2004 au centre hospitalier Saint Joseph Saint Luc, deux décès en 2001 et 2004 à l'hôpital Le Vinatier, un décès en 2004 à la clinique du Grand Large. Elle a cité le cas de la fille d'une personne décédée dans ce dernier établissement en septembre 2007 à laquelle le personnel soignant n'a pas été en mesure de donner les coordonnées d'une société de pompes funèbres autre qu'OGF. Elle a présenté également des photographies prises en décembre 2005 par un huissier de justice montrant, selon elle, un agencement extérieur des locaux des chambres funéraires de Lyon, Saint Priest et Vénissieux destiné à capter le choix des familles pour l'organisation des obsèques. Enfin, elle a reproché à la ville de Lyon d'avoir organisé le transport systématique à la chambre funéraire de la régie municipale des personnes décédées sur la voie publique ou pour une cause inconnue et qui font l'objet d'une autopsie à l'Institut médico-légal.
B. LE SECTEUR ET LES ENTREPRISES EN CAUSE
1. LE SERVICE DES POMPES FUNÈBRES
6. Le service des pompes funèbres comprend le service intérieur, le service extérieur et les services des prestations libres.
7. Le service intérieur est rendu à l'intérieur des édifices religieux et relève du service des cultes.
8. Le service extérieur des pompes funèbres était une mission de service public qui, en application de la loi du 28 décembre 1904, relevait de la compétence exclusive des communes. L'article L. 362-6 du Code des communes dressait la liste limitative des prestations comprises dans la mission : le transport des corps après la mise en bière, la fourniture des corbillards, des cercueils, des tentures extérieures des maisons mortuaires, les voitures de deuil ainsi que les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations. Depuis la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, le service extérieur des pompes funèbres constitue un service public industriel et commercial. Il comporte diverses prestations limitativement énumérées à l'article L. 2223-19 du Code général des collectivités territoriales (CGCT). Relèvent ainsi du service extérieur : " le transport des corps avant et après la mise en bière ; l'organisation des obsèques, les soins de conservation ; la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs ainsi que des urnes cinéraires ; la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires (disposition abrogée par l'ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005) ; la gestion et l'utilisation des chambres funéraires ; la fourniture des corbillards et des voitures de deuil ; la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l'exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d'imprimerie et de la marbrerie funéraire. " La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a par ailleurs mis fin au monopole conféré aux communes dans le domaine funéraire. Désormais, le service extérieur des pompes funèbres peut être assuré non seulement par les communes ou leurs délégataires mais aussi par toute entreprise ou association bénéficiaire d'une habilitation délivrée par le représentant de l'État dans le département en application des dispositions de l'article L. 2223-23 du CGCT.
9. Les prestations libres dépendent de la seule initiative des familles des défunts. Elles correspondent, par exemple, à la mise en bière, à la fourniture de fleurs, aux travaux de marbrerie ou encore à l'entretien des tombes.
2. LE RÉGIME JURIDIQUE DES CHAMBRES FUNÉRAIRES
a) La création des chambres funéraires
10. Les chambres funéraires sont des locaux composés en général de casiers réfrigérés de dépôt, de salles de soins aux corps et de salons accessibles aux proches des défunts pour se recueillir. Elles ont commencé à se développer en France à partir des années 60 et ont été régies dans un premier temps par un décret du 2 janvier 1968 qui disposait que toute personne décédée hors de son domicile pouvait être transportée à la chambre funéraire la plus proche, à la demande de celui chez qui le décès a eu lieu.
11. L'article L. 2223-38 dispose aujourd'hui que " les chambres funéraires ont pour objet de recevoir, avant l'inhumation ou la crémation, le corps des personnes décédées ". La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a inclus la gestion et l'utilisation des chambres funéraires dans le service extérieur des pompes funèbres (article L. 2223-19 CGCT). Elles peuvent donc être gérées aussi bien par une collectivité publique que par une entité de droit privé dûment habilitée.
12. Selon l'article R. 2223-74 du CGCT, " la création ou l'extension d'une chambre funéraire est autorisée par le préfet (...). L'autorisation ne peut être refusée qu'en cas d'atteinte à l'ordre public ou de danger pour la salubrité publique ".
13. La chambre funéraire doit répondre à un certain nombre de prescriptions techniques fixées aux articles R. 2223-80 et suivants du CGCT.
14. Les chambres funéraires se distinguent des chambres mortuaires. Ces dernières sont des équipements hospitaliers permettant le dépôt et le séjour du corps d'une personne décédée dans l'établissement. Elles ne font pas partie du service extérieur des pompes funèbres. Les établissements de santé publics ou privés qui enregistrent au moins 200 décès par an doivent disposer d'une chambre mortuaire (articles L. 2223-39 et R. 2223-90 CGCT).
b) Le transport des défunts dans les chambres funéraires
15. Aux termes de l'article R. 2223-76 du CGCT, " l'admission en chambre funéraire intervient dans un délai de 24 heures à compter du décès. Le délai est porté à 48 heures lorsque le corps a subi les soins de conservation prévus à l'article R. 2213-2. Elle a lieu sur demande écrite : - soit de toute personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles et justifie de son état civil et de son domicile ; - soit de la personne chez qui le décès a eu lieu, à condition qu'elle atteste par écrit qu'il lui a été impossible de joindre ou de trouver l'une des personnes ayant qualité pour pourvoir aux funérailles ; - soit du directeur de l'établissement, dans le cas de décès dans un établissement de santé public ou privé qui n'entre pas dans la catégorie de ceux devant disposer obligatoirement d'une chambre mortuaire conformément à l'article L. 2223-39, sous la condition qu'il atteste par écrit qu'il lui a été impossible de joindre ou de retrouver dans un délai de 10 heures à compter du décès l'une des personnes ayant qualité pour pourvoir aux funérailles ".
16. L'article R. 2223-79 du CGCT indique que " lorsque le transfert à une chambre funéraire du corps d'une personne décédée dans un établissement de santé public ou privé, qui n'entre pas dans la catégorie de ceux devant disposer obligatoirement d'une chambre mortuaire conformément à l'article L. 2223-39, a été opéré à la demande du directeur de l'établissement, les frais résultant du transport à la chambre funéraire sont à la charge de l'établissement ainsi que les frais de séjour durant les trois premiers jours suivant l'admission ".
17. Enfin, l'article L. 2223-43 du même Code précise que : " Les établissements publics et privés qui assurent le transport de corps avant mise en bière et le transfert de corps vers une chambre funéraire doivent être titulaires de l'habilitation prévue à l'article L. 2223-23. "
18. Le Conseil d'État, dans un avis n° 357 297 du 24 mars 1995, a estimé que l'article L. 363-2 du Code des communes qui autorise les établissements de santé publics ou privés à assurer le transport des corps avant mise en bière dans une chambre funéraire, devait être interprété strictement, c'est-à-dire comme permettant seulement à ces établissements d'assurer un tel transport mais non de conclure des conventions pour les faire effectuer par des opérateurs funéraires. Il a ajouté qu'une telle convention était possible dans le seul cas où le directeur de l'établissement n'a pas pu joindre la famille dans un délai de 10 heures après le décès : " Toutefois une telle convention, passée avec un ou plusieurs opérateurs, est possible pour assurer le transport du corps dans les cas, et seulement dans les cas, où l'admission en chambre funéraire est demandée par le directeur d'un établissement dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 361-37 du Code des communes ".
c) La gestion des chambres funéraires
19. Un opérateur de pompes funèbres possédant une chambre funéraire détient par rapport aux autres opérateurs un atout concurrentiel qui résulte notamment de la proximité immédiate de la chambre funéraire de ses locaux commerciaux. Il est en effet le premier à rencontrer les familles des défunts et ainsi à pouvoir leur proposer ses services pour l'organisation des obsèques.
20. Pour éviter que la concurrence ne soit faussée par la détention de cette structure, la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 a mis à la charge du gestionnaire de la chambre funéraire une série d'obligations. L'article L. 2223-38 du CGCT prévoit ainsi que les chambres funéraires doivent se situer dans des locaux distincts de ceux où le gestionnaire offre éventuellement les autres prestations énumérées par l'article L. 2223-19 du CGCT. Dans le même sens, l'article R. 2223-71 du CGCT indique que " la liste des régies, entreprises et associations et de leurs établissements, doit être affichée dans les locaux d'accueil des chambres funéraires, des chambres mortuaires et des crématoriums et y être disponible. Elle est établie par le préfet du département où sont situées ces installations (...). Elle est mise à jour chaque année ". Le législateur a clairement affiché sa volonté que les personnes devant pourvoir aux obsèques puissent librement choisir l'opérateur chargé d'effectuer les prestations autres que le séjour en chambre funéraire.
3. LE SECTEUR DES POMPES À LYON ET DANS LA " COURLY " (COMMUNAUTÉ URBAINE DE LYON)
a) Les opérateurs sur le marché
21. La liste préfectorale des établissements agréés à la date du 22 août 2003 pour l'organisation des funérailles figurant ci-après concerne l'arrondissement de Lyon, soit la ville de Lyon et la moitié sud du département du Rhône.
<emplacement tableau>
22. Le secteur comporte dix chambres funéraires : une à Lyon et une à Villeurbanne gérées à l'époque des faits par des régies municipales, six appartenant à OGF situées à Caluire-et-Cuire, Ecully, Neuville-sur-Saône, Saint-Genis Laval, Vénissieux et Saint-Priest et deux gérées par la SAUR à Bron et à Rilleux-la-Pape.
La régie municipale des pompes funèbres de Lyon
23. Les pompes funèbres municipales de Lyon comptent deux établissements, dont le principal est situé dans le 8ème arrondissement de Lyon.
24. La régie gère la seule chambre funéraire de Lyon située 177, avenue Berthelot.
25. Le chiffre d'affaires de la régie a progressé entre 2000 et 2002 : de 5,7 millions d'euro en 2000 et 2001 à 6,6 millions d'euro en 2002.
26. Par délibérations du conseil municipal des 27 octobre et 15 novembre 2005, la ville de Lyon a décidé d'adhérer avec la ville de Villeurbanne à un syndicat intercommunal créé aux fins de gérer leurs services funéraires. Dénommé Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise (PFIAL), ce syndicat, qui a son siège dans les locaux de l'ancienne régie de la ville de Lyon, a débuté son activité le 1er janvier 2006 et assure la continuité économique et fonctionnelle de cette dernière au nom de laquelle il a produit un mémoire en réponse au rapport.
La SA OGF
27. Après avoir appartenu à la Lyonnaise des eaux, les sociétés du groupe OGF sont passées en 1995 sous le contrôle de la SCI (Services Corporation International), leader mondial des services funéraires. En 1998, toutes les sociétés régionales du groupe ont fusionné pour constituer la SA OGF. Un accord a été conclu en 2004 par le fonds d'investissement américain Vestar capital partners pour l'acquisition du capital d'OGF.
28. La SA OGF exploite son activité de pompes funèbres sous la dénomination commerciale de Pompes Funèbres Générales ou PFG. Dans la suite de la présente décision, pour la clarté de l'exposé, il sera fait référence à " OGF-PFG "
29. Le groupe OGF-PFG exploite les marques nationales PFG (533 agences), Roblot (48 agences), Henri de Borniol, Funespace et plus de 180 enseignes régionales. Il gère sur le territoire national 340 chambres funéraires. En 2002, il a réalisé près de 135 000 obsèques et un chiffre d'affaires supérieur à 500 millions d'euro. Au regard du nombre total de décès (500 000), la part de marché du groupe au niveau national avoisine les 25 %.
30. Sur le territoire de La Courly, OGF-PFG compte 17 établissements et deux chambres funéraires : l'une située à Saint-Priest, l'autre à Vénissieux. Elle détient également des clefs de la chambre funéraire de Lyon, dont elle disposait d'abord par l'intermédiaire de sa filiale CGPF qui assurait le transport de défunts jusqu'au site, puis directement lorsqu'elle a repris les activités de sa filiale. Dans cette zone, son chiffre d'affaires a progressé de 8,8 millions d'euro en 2000 à 10,8 millions d'euro en 2002.
Les autres opérateurs
31. Parmi les autres opérateurs présents dans la Courly, on compte :
- la SA pompes funèbres Roc'Eclerc, entreprise franchisée de Michel Leclerc. Elle est implantée à Bron, Pierre-Bénite et Lyon depuis février 2003. Son chiffre d'affaires a progressé entre 2000 et 2002, passant de 2,5 millions d'euro en 2000 à 2,6 millions d'euro en 2001 et 2,9 millions d'euro en 2002.
- Les pompes funèbres Rozier qui disposent de deux établissements situés, l'un à proximité de l'hôpital Édouard Herriot, l'autre en face du bâtiment des pompes funèbres municipales. Le chiffre d'affaires, après avoir baissé de 9 % en 2002 (passant de 1,55 à 1,41 millions d'euro) est remonté à 1,52 millions d'euro en 2003.
- Les pompes funèbres Pinault qui exploitent deux bureaux commerciaux, l'un dans le Rhône à Rillieux-la-Pape, l'autre à Miribel dans l'Ain, commune limitrophe. Le chiffre d'affaires de ses deux bureaux est en progression régulière depuis 2000.
- Les pompes funèbres Viollet qui ont deux établissements, l'un à Meyzieu, l'autre à Saint-Priest. Le chiffre d'affaires global est en légère baisse entre 2000 et 2002, passant de 502 630 euro pour 15 mois (octobre 2000 à décembre 2001) à 473 915 euro pour 2002.
- Les pompes funèbres du Rhône qui sont situées au centre ville de Villeurbanne. Leur chiffre d'affaires de 2001 et 2002 a baissé par rapport à celui de 2000 (0,85 contre 0,92 million d'euro).
b) Le nombre de décès enregistrés dans les communes de Lyon, Vénissieux et Saint-Priest
Décès enregistrés à Lyon
32. Le tableau suivant recense les décès survenus sur la commune de Lyon et enregistrés à l'état civil :
<emplacement tableau>
Décès enregistrés à Vénissieux
33. Le tableau suivant recense les décès enregistrées à Vénissieux :
<emplacement tableau>
Les décès au domicile comprennent les décès survenus dans les maisons de retraite si le défunt y résidait depuis plus de trois mois. Le registre des entrées de la chambre funéraire de Vénissieux permet de localiser les lieux de décès des défunts en établissement de soins ou de séjour :
<emplacement tableau>
Décès enregistrés à Saint Priest
34. Le tableau suivant recense les décès enregistrés à Saint-Priest :
<emplacement tableau>
Le registre des entrées de la chambre funéraire de Saint-Priest indique que les origines des décès sont partagées entre les domiciles et le principal établissement de soins, à savoir la polyclinique Pasteur.
Part des personnes décédées à Vénissieux et Saint-Priest transportées dans les chambres funéraires des deux villes
<emplacement tableau>
c) Part de marché des principaux opérateurs
Parts de marché concernant l'organisation des obsèques sur la Courly
35. A partir des informations recueillies par les enquêteurs auprès des opérateurs de pompes funèbres (cote 120), il a été possible de dresser le tableau suivant qui indique la part des principaux opérateurs dans l'organisation des obsèques des personnes décédées sur l'ensemble de la Courly :
<emplacement tableau>
Parts de marché concernant l'organisation des obsèques à Lyon
36. Pour les personnes décédées à Lyon, la part des principaux opérateurs dans l'organisation des obsèques calculée en pourcentage des décès, a évolué selon les chiffres présentés dans le tableau suivant :
<emplacement tableau>
Part d'OGF-PFG dans le transport des corps des personnes décédées dans les hôpitaux de la Courly
37. Le tableau suivant montre que la CGPF, filiale du groupe OGF-PFG, réalise entre 63 et 100 % selon les cas des enlèvements des corps des personnes décédées dans les établissements de santé de Lyon et de son agglomération et qui sont transportées au funérarium municipal ou dans les chambres funéraires d'OGF-PFG.
<emplacement tableau>
Parts de marché concernant l'organisation des obsèques des personnes transportées au funérarium de la ville de Lyon
38. Le tableau suivant présente le nombre d'obsèques réalisées par la régie municipale et par les principales entreprises pour les défunts qui ont séjourné au funérarium et dont les obsèques ont été organisées à partir de ce même lieu :
<emplacement tableau>
La part de la régie municipale est de l'ordre de 70 % et celle d'OGF-PFG de l'ordre de 15 %.
Part de marché d'OGF-PFG dans l'organisation des obsèques des habitants de Vénissieux et de Saint-Priest
39. OGF-PFG est le seul opérateur de pompes funèbres installé à Vénissieux. Le tableau suivant montre que l'entreprise détient une part dominante dans l'organisation des obsèques des personnes dont le décès y est enregistré.
<emplacement tableau>
40. Deux opérateurs de pompes funèbres sont implantés à Saint-Priest : OGF-PFG et Viollet.
<emplacement tableau>
Part de marché d'OGF-PFG dans l'organisation des obsèques des personnes transportées dans les chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest
41. Le tableau suivant présente le pourcentage des convois pris en charge par le groupe OGF- PFG pour les défunts qui ont été transportées au funérarium de Vénissieux (cote 159).
<emplacement tableau>
42. Le dépouillement du registre des entrées au funérarium de Saint-Priest (cotes 1224-1282) ne permet pas de chiffrer la part des entreprises dans les convois des personnes qui y ont été déposées. Toutefois, l'agence OGF-PFG de Saint-Priest organise sur cette période 139 convois funéraires en moyenne pour un nombre d'admissions à la chambre funéraire de 42,5 % en moyenne.
C. LES PRATIQUES EXAMINÉES
43. Trois séries de faits ont été analysés :
- la mise en œuvre d'accords entre, d'une part, la régie municipale des pompes funèbres de Lyon ou OGF-PFG et, d'autre part, certains établissements de santé pour organiser le transfert de personnes décédées en leur sein vers les chambres funéraires gérées par ces entreprises ;
- des pratiques susceptibles d'engendrer la confusion entre l'activité de gestionnaire de chambre funéraire et l'activité d'opérateur d'obsèques à Lyon, Vénissieux et Saint-Priest ;
- enfin, l'existence d'un partage général du marché des obsèques à Lyon et dans l'agglomération entre la régie municipale des pompes funèbres de Lyon et OGF-PFG.
1. LES CONDITIONS DE TRANSFERT DES DÉFUNTS DANS LES CHAMBRES FUNÉRAIRES
<emplacement tableau>
44. Sont concernés les établissements ne disposant pas de chambre mortuaire dans leurs locaux.
a) Transfert en chambre funéraire des corps des personnes décédées dans les établissements de santé de la ville de Lyon
45. Les documents recueillis auprès des établissements de santé comprennent d'une part des conventions signées avec des sociétés de pompes funèbres et des règlements d'admission pour le transfert des corps au funérarium, d'autre part des notices remises aux familles des défunts ou à destination des services hospitaliers pour expliquer la procédure à suivre, notamment en vue du transfert des corps organisé en application de ces conventions.
Le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc
46. Cet établissement est né de la fusion des hôpitaux Saint-Joseph et Saint-Luc. Depuis 1993, la chambre mortuaire de l'ancien hôpital Saint-Joseph n'était plus utilisée. Le nouvel établissement utilisait alors la chambre funéraire municipale bien qu'il dénombre plus de 200 décès par an.
Le règlement d'admission au centre funéraire municipal
47. Une note des services municipaux de pompes funèbres du 1er avril 1994, rédigée à l'intention du centre hospitalier (cotes 2248-2250), précise les conditions d'admission des corps au funérarium municipal et indique qu'elles sont " opposables aux personnes décédées ". Elle indique aussi : " Sont également mentionnées les précisions indispensables à une bonne information des familles et au meilleur accueil dans nos services. "
48. Dans la partie consacrée au transfert au centre funéraire, ce règlement d'admission indique : " Lorsque le dépôt d'un corps est demandé par la famille, elle supporte l'intégralité des frais afférents au transfert et au séjour au centre funéraire. Ils sont normalement intégrés à la facture des funérailles.
Dans les autres cas, l'hôpital prend au minimum en charge les frais de transport du corps ainsi que la première journée du dépôt au centre funéraire. "
49. Le dispositif prévu a été appliqué au moins jusqu'au 14 avril 2003, date à laquelle le centre hospitalier a mis en service sa nouvelle chambre mortuaire.
50. Son directeur adjoint a déclaré le 5 septembre 2003 : " Lorsqu'un décès survenait dans notre établissement avant le 14 avril 2003, le corps restait entre deux et dix heures dans la chambre avant d'être transféré au funérarium de la ville de Lyon par la CGPF. En dehors des formalités administratives, les familles n'avaient aucun document à signer relatif à un quelconque accord de transfert de corps vers la chambre funéraire de la ville de Lyon. "
L'information des familles
51. Dans une note à destination des familles, le directeur général de l'hôpital explique dans une phrase en caractères gras que l'établissement a passé une convention avec le funérarium de la ville de Lyon et l'explique par l'obligation pour l'établissement d'y faire transférer les défunts les nuits, dimanches et jours fériés. Il précise que, sauf souhait particulier, ce sont les services du funérarium de la ville de Lyon qui sont sollicités (cote 2244).
La part des obsèques réalisées par la régie
52. A partir des dossiers de mise en bière au funérarium (cotes 349-416), l'enquêteur a calculé la part de la régie municipale dans l'organisation des obsèques des personnes transportées de cet établissement vers la chambre funéraire municipale.
53. Il a été constaté que la régie municipale a organisé entre 1999 et 2003 plus de 75 % des obsèques de ces défunts alors que cette part est de 17 % pour l'hôpital Édouard Herriot et 17 % pour l'hôpital de la Croix Rousse, qui disposent d'une chambre mortuaire.
La clinique Eugène André dite aussi clinique Trarieux ou clinique mutualiste
Les circonstances du recours à la chambre funéraire et de l'intervention la société CGPF
54. Le dépôt mortuaire de cet établissement a fermé en mai 2001. Dans la mesure où ne pesait pas sur lui d'obligation d'avoir une telle installation, l'établissement a cherché une solution extérieure. Le directeur de la clinique a ainsi justifié son choix de la chambre funéraire municipale : " Nous sommes allés nous renseigner auprès de la chambre funéraire de Lyon afin d'offrir aux familles une prestation équivalente. La chambre funéraire de Lyon a été choisie par rapport à d'autres parce que nous sommes sur la ville de Lyon. En terme de formalité administrative, c'était ce qui était le plus facile. "
55. Aucune convention ne figure dans le dossier. On trouve cependant des fiches précisant les conditions de transfert des corps associant la seule société CGFP à cette procédure. Le directeur de la clinique a déclaré : " Nous avons traité avec le funérarium et de facto nous avons reçu communication des numéros de téléphone de la société CGPF pour faire le transfert avant inhumation. "
La procédure de transfert en cas de décès
56. Une procédure écrite de prise en charge des décès a été définie pour les services de la clinique (cotes 2253-2256). Au chapitre " Prise en charge administrative et accueil et information des proches ", il est prévu :
" Pages 3/4 - Chapitre 2 - Prise en charge administrative : (...) Lorsque les documents administratifs sont renseignés et remplis, le bureau des décès appelle la C.G.P.F. (Compagnie générale des pompes funèbres) - Service des transferts - (annexe 6). Le transfert interviendra dans l'heure qui suit l'appel. (...) Un document attestant du transfert est remis par l'agent des C.G.P.F. à l'infirmière du service. La nuit, le défunt est maintenu dans sa chambre, fenêtres et radiateurs fermés, sur une table réfrigérée pendant 2 à 10 heures, sauf si le certificat de décès est signé. Dans ce cas, le corps peut être transféré au funérarium quelle que soit l'heure.
Page 4/4 - Chapitre 4 - Accueil et information des proches (cf. annexes 1 - 1bis) : A l'arrivée, le soignant du secteur
- accueille et accompagne les proches auprès du défunt s'ils le désirent
- informe ceux-ci :
* du fonctionnement du funérarium (cf. annexe 6),
* de la possibilité :
¤ d'appeler un ministre du culte
¤ d'obtenir un rendez-vous avec le médecin référant. "
57. Dans la fiche de gestion des décès (cote 2258) est indiqué que : " L'agent du bureau des décès signe l'autorisation d'admission en chambre funéraire et le remet à la CGPF. "
La préparation de ce document
58. Dans une lettre au directeur de la clinique (cote 2273), l'adjoint délégué au maire de Lyon a expliqué les conditions dans lesquelles a été préparé l'accueil des personnes décédées :
" Madame le Directeur,
La réorganisation de vos services vous conduit à envisager de confier au Centre funéraire de la ville de Lyon l'accueil des malades décédés dans votre établissement.
Dans cette perspective, vous avez évoqué avec M. X..., directeur des Services funéraires municipaux et Mme Y..., chef du Service municipal des Pompes funèbres, les conditions dans lesquelles les familles ou vous-mêmes pourriez faire déposer les corps avant mise en bière. "
59. Le directeur de la clinique a pour sa part déclaré : " A la question de savoir pourquoi nous avons établi une fourchette de deux à dix heures pour la garde du corps des défunts, Madame Z... ne peut m'apporter une réponse précise. Madame Z... a travaillé avec Madame Y... du funérarium de la ville de Lyon, elle a obtenu des informations réglementaires de sa part concernant cet objet. " (cote 2283).
60. Il a par ailleurs reconnu lui-même le manque de neutralité de la procédure en vigueur dans son établissement en disant à l'enquêteur " A l'éclairage des éléments que vous me communiquez, il me paraît indispensable de revoir notre procédure formalisée".
La clinique de la Sauvegarde
61. La clinique n'a pas de chambre mortuaire.
62. Aucune convention écrite avec un opérateur n'a été fournie, mais la clinique propose systématiquement aux familles, à la suite d'un accord au moins tacite avec la régie municipale confirmée par la déclaration d'une responsable le 3 décembre 2003 (cotes 2315-2317), de faire transférer les défunts au funérarium municipal. Entre 1999 et 2002, la régie municipale a organisé 71 % des obsèques des personnes qui ont séjourné au funérarium en provenance de la clinique.
63. Des factures de la CGPF recueillies dans cet établissement (cotes 2324-2343) montrent que cette société assurait l'essentiel du transport des personnes décédées dans l'établissement.
64. La notice interne à la clinique (cotes 2285-2289) explique les formalités administratives à accomplir en cas de décès et présente le transfert au funérarium municipal comme la solution la plus naturelle :
" 1. Le plus simple et le plus rapide pour tous :
- le médecin remplit, signe et tamponne le certificat de décès et la demande d'admission en chambre funéraire.
- Prévenir la société de thanatopraxie pour le transport du corps au :
04 78 01 98 05, 24h/24, en priorité
06 87 72 63 14, si pas d'interlocuteur au 1er numéro
- le corps sera transporté au :
Centre funéraire municipal
177 avenue Berthelot
69007 Lyon
Tél. : 04 72 76 08 18
Ouvert aux familles : du lundi au vendredi 8h/17h30
samedi 9h/14h
dimanche 10h : 12h
Il faut expliquer à la famille que la clinique ne dispose pas de chambre funéraire sur place, et que le défunt sera transporté aux frais de la clinique et durant 24 h gratuitement. Il faut leur dire que toutes les démarches (de rapatriement à domicile, de funérailles, ...) peuvent se faire depuis la chambre funéraire (cf. formulaire pour connaître les prestations). "
" 2. Si la famille veut absolument rapatrier le corps directement sans passer par la chambre funéraire :
- le médecin + un membre de la famille + le directeur ou cadre infirmier doivent remplir la demande d'autorisation de transport de corps avant mise en bière (les trois signatures sont nécessaires) ;
- toujours remplir le certificat de décès ;
- contacter le service de pompes funèbres désiré par la famille. Celui-ci se mettra en rapport avec le commissariat afin de poser les scellés qui permettront de transporter le corps ;
- la famille doit se munir du livret de famille et aller faire la déclaration de décès à :
mairie du 9ème arrondissement
9 place du marché
69009 Lyon
Tél. : 04 72 19 81 81
De 8h30 à 16h30
Dans certains cas, les services de pompes funèbres choisis par la famille s'en occupent. "
65. La clinique met par ailleurs à la disposition des familles un dépliant des services funéraires municipaux présentant sans les distinguer les prestations commerciales offertes au centre funéraire municipal et les activités règlementaires de ces services (cotes 2297-2300).
Le témoignage des familles
66. Le responsable des pompes funèbres Rozier a évoqué le cas d'une personne décédée à l'hôpital Saint Joseph : " J'ai à vous communiquer le cas personnel de l'enlèvement de ma belle-mère décédée à l'hôpital Saint-Joseph le 10 décembre 2002 au service de réanimation. J'avais programmé de l'emmener à la chambre funéraire de Bron parce que nous voulions y faire une crémation avec une cérémonie religieuse là-bas. Je suis allé voir l'infirmière pour obtenir le certificat de décès. Elle n'a pas voulu me confier un des trois exemplaires du certificat de décès. Elle a appelé son chef de service, la surveillante générale, qui a dit que cela n'était pas la procédure habituelle, que le corps devait aller obligatoirement au 177 avenue Berthelot et que le certificat de décès devait suivre dans son intégralité. Je suis descendu dans le nouveau bureau des entrées et une dame m'a expliqué que le corps était amené au 177 avenue Berthelot et que j'aille là-bas et qu'ils s'occuperaient de tout. " (Cote 516).
67. La société Viollet, dans son mémoire du 15 novembre 2007 en réponse au rapport, avance plusieurs attestations de familles rédigées entre 2001 et 2006, à savoir celles de M. A..., Mme B... et Mme C... pour des proches décédés à la clinique mutualiste, de Mme D... pour un proche décédé à la clinique Eugène André, de Mme E... pour un proche décédé à l'hôpital Saint-Joseph-Saint Luc, de Mme F... et M. G... pour des proches décédés à la clinique de la Sauvegarde, qui attestent que ces défunts ont été transportés à la chambre funéraire de la ville de Lyon sans l'accord des familles pourtant présentes au moment du décès.
b) Le transfert en chambre funéraire des personnes décédées dans les établissements de santé de Saint-Priest
La polyclinique Pasteur
La convention d'admission des défunts au funérarium de Saint-Priest
68. La polyclinique Pasteur a signé une convention le 13 novembre 2000 avec OGF-PFG (cotes 2390-2391) pour le transfert des défunts au funérarium de Saint-Priest. Dans une lettre du 8 novembre 2000 au président directeur général de la polyclinique, les PFG précisent : " notre offre ne concerne pas le transfert exécuté à la demande des familles qui demeurent entièrement libres de demander le transport de leur défunt, à leurs frais, vers une chambre funéraire de leur choix par l'entreprise de leur choix. " (cote 2392).
69. Concernant la demande d'autorisation de transport et la demande d'admission en chambre funéraire, la directrice-adjointe de la polyclinique Pasteur a déclaré : " Bien que ces documents soient à l'en-tête des PFG, la demande d'autorisation de transfert avant mise en bière est utilisée également par ceux qui demandent un transfert ailleurs et par un autre opérateur de pompes funèbres. Je m'engage, dans un souci de neutralité, à refaire ces documents et supprimer les références à un opérateur.
Je vous remets, à votre demande, la copie d'une facture émanant des PFG relative au paiement des frais de transfert de corps et d'admission en chambre funéraire. J'ignorais, jusqu'à votre première venue, que nous payions de telles prestations. " (cotes 2348-2350).
70. L'analyse des factures de transport des corps établies par les PFG en 2002 pour la clinique Pasteur (cotes 1303-1306) montre que les 22 personnes décédées cette année là ont été transportées au funérarium de Saint-Priest. Les mêmes constatations peuvent être faites pour les années antérieures au vu des fiches d'admission remises aux enquêteurs par OGF (cotes 1314-1414).
Les réunions de janvier et février 1996 entre OGF-PFG et la clinique Pasteur
71. Un compte-rendu d'entretiens qui ont eu lieu entre le responsable OGF-PFG de Saint-Priest et la clinique Pasteur pour la préparation de la convention, rédigé par un employé de la clinique, a été remis aux enquêteurs par cet établissement. Il se présente ainsi :
Informer la famille
Les PFG n'appellent jamais la famille pendant les 3 jours de garde car cette pratique pourrait être qualifiée de racolage. C'est à la clinique de donner les coordonnées des PFG. Nous avons donc intérêt à faire le plus rapidement possible.
Transfert du corps
Les PFG demandent à la famille ou à la clinique de signer une demande d'admission en chambre funéraire ... Les PFG nous conseillent donc de signer systématiquement nous même ce document sans en parler à la famille, en expliquant que nous n'avons pas de morgue et que donc tous les corps vont aux PFG de Saint-Priest. Quelques exemplaires de cet imprimé seront laissés dans chaque service concerné ...
Prix
Convenu le 30 janvier 1996
" Monsieur H... souligne que nous sommes dans l'illégalité si les membres du personnel de la clinique conseillent aux familles de faire transporter le corps aux PFG de Saint-Priest à leur charge.
Monsieur H... est d'accord pour que rien ne soit facturé à la clinique si la famille poursuit avec les PFG de Saint-Priest. Mais pour la forme, elles devront nous facturer quelque chose pour la totalité des opérations. Le montant global de la facturation sera négocié semestriellement en fonction du nombre de familles ayant poursuivi avec eux.
Monsieur H... attend de connaître votre position et nous fera parvenir un projet de convention. Il me remet d'ores et déjà un modèle (ci-joint).
Convenu le 21 février 1996 :
Essai de 3 mois (ou 5 décès) pendant lesquels rien ne sera facturé, ni aux familles, ni à la clinique. Un point sera alors fait.
Si environ 75 % des familles poursuivent avec les PFG, la facturation sera fictive " (cote 2381).
72. Il ressort de ces négociations que, dans le cadre de la convention signée entre les PFG et la clinique Pasteur, la société PFG proposait de ne pas facturer à la clinique le prix du transport et de séjour au funérarium si un nombre suffisant de familles la chargeaient par la suite d'organiser les obsèques.
L'information des familles
73. La procédure à suivre en cas de décès à la polyclinique Pasteur (cotes 2354-2355) souligne à plusieurs reprises que les familles sont libres de contacter l'opérateur de pompes funèbres de leur choix. Néanmoins, il ressort de ce document que les formalités à suivre par les familles sont beaucoup plus lourdes que si elles recourent directement aux PFG :
" Si la famille choisit de transporter le corps avant mise en bière, il faut y joindre le BON DE TRANSPORT avant mise en bière. Il doit être signé par le médecin.
Bon de transport avant mise en bière (fourni par les PFG)
- Il est signé par la Direction (PDG), le médecin et la famille.
- Il autorise le transport du corps par un transporteur agréé.
- Le médecin doit cocher 'Autorisation de transport sans mise en bière'
6. Les choix possibles des familles
Dans chaque service, le cadre infirmier tient la liste des chambres funéraires et les numéros de téléphone des Pompes Funèbres à la disposition des familles (Voir Annexe 1 - pages 12 à 19).
Expliquer à la famille que la Polyclinique ne possède pas de chambre funéraire.
Ils ont le choix entre la morgue dans la chambre funéraire de Pompes Funèbres de Saint-Priest, des Pompes Funèbres de leur choix ou le transport à domicile.
Si le choix est Pompes Funèbres de Saint-Priest (ils sont joignables à tout moment) :
- Heures de bureau : 8h30/ 12h00 et 14h00 / 17h15
Fax : 04 78 20 10 88 - Mme I...
- En dehors des heures d'ouverture : 24h/24
nuits et jours fériés
au 06 82 83 52 49
- En cas de problèmes importants : domicile de M. J...
Directeur du secteur du Grand Lyon
04 72 90 95 25 "
La clinique du Grand Large
La convention signée avec OGF-PFG
74. La clinique du Grand Large, située à Décines-Charpieu, ne gère plus de chambre mortuaire depuis avril 2003. Une convention a été signée avec PFG le 31 mars 2003 (2494-2495). La clinique remet aux familles des défunts un document sur lequel il est indiqué : " La direction de la clinique du Grand Large vous informe qu'elle ne dispose pas de chambre mortuaire dans l'établissement. Elle a confié à la société des pompes funèbres générales de Décines, 87, avenue Jean Jaurès, le transfert du corps et son dépôt à la maison funéraire de Saint-Priest, 26, rue de l'Égalité pendant trois jours à la charge financière de la clinique. Vous restez totalement libre de choisir l'entreprise funéraire qui vous convient pour les modalités des obsèques. Nous tenons à votre disposition une liste des entreprises habilitées dans le domaine funéraire (Préfecture du Rhône, Direction de la Réglementation, 1er bureau, Règlement général) " (cote 2490).
L'information des familles
75. La notice de la clinique du Grand Large présente ainsi la rubrique - Informations des proches- : " Si la famille opte pour le transfert à la charge de la clinique :
Contacter PFG : 04 78 49 11 41
PFG se charge de toute l'organisation des démarches nécessaires pour le transfert du corps. Le corps de la personne défunte est transféré à la Chambre Funéraire de Saint-Priest 26, rue de l'égalité pendant trois jours à la charge financière de la clinique ...
3.1.2. LA FAMILLE NE DÉSIRE PAS UNE PRISE EN CHARGE PAR LA CLINIQUE :
- En plus des documents cités en chapitre 2. Faire remplir par le plus proche parent le document Mairie " Demande de transport de corps avant mise en bière ". La famille s'engage alors à prendre en charge les frais de transfert, l'admission et le séjour du défunt dans la chambre funéraire de leur choix. Exemple Annexe 5 " (cote 2484).
c) Le transfert en chambre funéraire des corps des personnes décédées dans les établissements de santé de Vénissieux
La clinique de la Roseraie
La convention signée avec la SRT
76. La clinique de la Roseraie a signé le 11 septembre 1992 une convention avec la Société rhodanienne de thanatopraxie (SRT), entreprise de laquelle OGF-PFG détenait alors 31 % du capital (cotes 2402-2405). Celle-ci stipule que la clinique s'engage à assurer le transfert de toute personne décédée à la clinique de la Roseraie vers le funérarium de Vénissieux. Pour cela, la clinique doit prévenir la famille du défunt par téléphone et convenir, soit de l'heure d'arrivée à la clinique dans les 2 heures, soit de l'heure de la visite au funérarium de Vénissieux et appeler la SRT qui s'engage à transférer le corps au funérarium de Vénissieux dans l'heure qui suit l'appel. Cette convention était renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation trois mois avant l'échéance. En 1998, la CGPF a succédé pour cette prestation à la SRT, sans que la convention signée avec la clinique de la Roseraie ne soit dénoncée.
L'information des familles
77. Dans cette convention, il est convenu que :
" A) La famille doit être prévenue du décès par téléphone, il est alors convenu :
- soit de son arrivée à la Clinique Mutualiste de la Roseraie dans les 2 heures,
- soit de l'heure de sa visite au Funérarium de Vénissieux.
B) Lorsque les proches du défunt souhaitent venir à la Clinique Mutualiste de la Roseraie, il convient de leur laisser au maximum le laps de temps de deux heures, puis d'avertir le transporteur dès leur départ de l'établissement. "
78. S'agissant du transport de corps sans cercueil hors la chambre funéraire de Vénissieux, il est toutefois précisé :
" M) Du fait que le Funérarium devient la morgue de la Clinique Mutualiste de la Roseraie, les familles auront la possibilité, si elles le souhaitent, de faire transporter le corps au domicile du défunt ou vers la Chambre Funéraire de leur choix, par le transporteur de leur choix.
N) Dans ce cas, la demande d'autorisation de transport réglementaire sera établie comme par le passé par le Directeur de la Clinique et le Médecin Chef, sur le modèle d'imprimé utilisé jusqu'à présent.
O) Ce second transport sera à la charge de la famille.
P) Les transports de corps avant mise en bière pour un domicile ou une chambre funéraire se feront après admission au Funérarium. Dans ce cas, les frais sont à la charge de la famille. "
79. Cette rédaction laisse penser qu'un premier transport doit nécessairement être dirigé vers le funérarium de Vénissieux et ce n'est que si les familles souhaitent s'adresser à une autre chambre funéraire qu'elles pourront, à leur frais, exercer leur choix.
Les conditions d'application de la convention
80. L'examen de sept demandes d'enlèvement de corps émanant de la clinique de la Roseraie montre que les délais entre l'heure du décès et l'heure d'enlèvement varient entre 1 heure et 5 h. Les informations communiquées par la clinique montrent aussi que la quasi totalité des 61 personnes décédées à la clinique entre 1999 et 2002 ont été transportées au funérarium.
81. Par ailleurs, la société Viollet a produit le témoignage de M. K... qui a déclaré : " Ma maman est décédée le 7 avril à 21 h 35 à la clinique La Roseraie de Vénissieux. Sans mon autorisation, son corps a été transféré à la CF de Vénissieux alors que nous avions décidé avec ma famille de nous retrouver à la CF de Bron. (...) Ensuite, ma famille et moi-même avons souhaité voir notre maman et les pompes funèbres générales nous ont forcé à signer un bon de commande pour nous facturer les frais ... nous avons refusé. Suite à ce refus, la veille du décès, les pompes funèbres Viollet que nous avons mandatées pour l'organisation des obsèques de notre mère, nous ont prévenus que les pompes funèbres générales refuseraient l'ouverture de la chambre funéraire sans le bon signé par nos soins. Le commissariat de Vénissieux a été prévenu de cette tentative par les PFG de nous forcer la main pour que l'on réserve un salon et grâce à leur intervention nous avons quand même pu à l'heure prévue quitter la chambre funéraire de Vénissieux pour nous rendre à l'Eglise de St-Priest " (cotes 560-561).
La clinique des Minguettes
La convention signée avec la SRT
82. La clinique des Minguettes a signé une convention le 7 septembre 1992 avec la SRT (cotes 2433-2436) semblable à celle signée par la clinique de la Roseraie. Figure aussi dans les pièces du dossier une autre convention d'admission des corps à la chambre funéraire avec l'entête des PFG datée du 25 septembre 2003 (cotes 2429-2430).
83. En 1998, la CGPF a aussi succédé à la SRT pour la prestation, sans que la convention signée avec la clinique des Minguettes soit devenue caduque.
84. Aucun transfert relatif aux trente-trois dossiers examinés n'a eu lieu dans un délai supérieur à 6 heures et deux ont eu lieu avant le délai des deux heures rappelé dans le protocole. Deux tableaux présentés dans le rapport administratif d'enquête sur la base des demandes d'enlèvement des corps de la part de cette clinique et de la clinique de la Roseraie montrent que les délais d'enlèvement des corps sont toujours inférieurs à 10 heures (cotes 165-166).
85. La clinique des Minguettes a enregistré 222 décès entre 1999 et 2002. Le dépouillement des factures de la CGPF adressées à la polyclinique fait apparaître que 194 corps ont été transportés au funérarium de Vénissieux représentant 87 % des personnes décédées. En 2002, la clinique a enregistré 59 décès et tous les corps ont été transportés au funérarium de Vénissieux.
L'information des familles
86. Dans la procédure à suivre en cas de décès, diffusée le 3 juin 2002 (cotes 2410-2413), l'établissement indique que " la société Rhodanienne de thanatopraxie a signé une convention avec la Polyclinique des Minguettes, le 7 septembre 1992, convention renouvelable par tacite reconduction. Cette convention est déposée dans le bureau du directeur de la clinique ".
87. Le titre du chapitre consacré au transport porte explicitement la mention : " POMPES FUNEBRES GENERALES. "
88. Il est précisé que les familles qui n'auraient pu se rendre au chevet du défunt dans les locaux de l'établissement de santé pourront se rendre à la chambre funéraire de Vénissieux :
" I) Les familles qui n'auraient pas pu se présenter à la Polyclinique des Minguettes avant le transport pourront se rendre au Funérarium de Vénissieux selon les horaires d'ouverture.
HEURES D'OUVERTURE DES SALONS FUNÉRAIRES
Du lundi au Vendredi de 7 heures à 19 heures
Le Samedi de 9 heures à 14 heures
Dimanche et Jours fériés S'adresser à l'Agent de Permanence. "
89. Le document insiste sur le fait que les frais de transport sont assurés par la polyclinique : " Les frais de transport sans cercueil vers le Funérarium sont pris en charge par la Polyclinique. "
90. La seule alternative est présentée comme suit :
" Transport au domicile
La famille a la possibilité de choisir le transporteur de son choix, les frais seront à sa charge.
En cas de transfert immédiat sur une autre commune ou un autre département, la famille doit impérativement remplir le formulaire " demande d'autorisation de transport de corps avant la mise en bière ", joint en annexe.
Elle devra se munir de " la demande de transport réglementaire ", signée par le Directeur de la Clinique et par le médecin ".
Le centre hospitalier Le Vinatier
Le marché passé avec les PFG
91. Le centre hospitalier Le Vinatier possédait jusqu'en 1998 une chambre mortuaire. Le terrain sur lequel elle se trouvait a été vendu aux hospices civils de Lyon pour la construction d'un nouvel hôpital. Le directeur adjoint du Vinatier a indiqué " la suppression de ce service nous a conduit à poursuivre le service rendu aux familles en recherchant après mise en concurrence un prestataire de services susceptible de se substituer à la chambre mortuaire " (cotes 2467-2468).
92. La centre hospitalier Le Vinatier a lancé un appel d'offres et a retenu l'offre des PFG tout en exprimant son regret de n'avoir pu choisir le GIE Rozier :
" 3. Enfin, la capacité de pression du Centre Le Vinatier sera certainement plus grande en cas de complication vis-à-vis d'une structure locale comme le GIE Rozier plutôt que vis-à- vis d'une structure multinationale comme le CISE puisque cette dernière va prochainement passer sous le contrôle des PFG eux-mêmes appartenant au géant américain des Pompes Funèbres " (cotes 2473-2475).
Les modalités de transfert des corps
93. La note de procédure interne relative aux décès indique que " le Centre hospitalier Le Vinatier ne disposant plus de funérarium à partir du 1er novembre 1998, les Pompes Funèbres Générales interviendront deux heures après le décès sur le site du CH Le Vinatier et assureront le transport des corps vers la chambre funéraire de Vénissieux, 45 chemin de Feyzin. Si les familles en font la demande, les corps peuvent être transportés par les Pompes Funèbres Générales vers une autre chambre à condition que le départ ait lieu impérativement deux heures après le décès. " (Cotes 2449-2465).
L'information des familles sur le rôle des PFG
94. La note précitée destinée au service des soins de l'établissement précise ainsi les conditions d'intervention de cette société dans un dispositif dont la mise en œuvre relève pourtant de sa responsabilité :
" L'UNITÉ DE SOINS
- (...)
- informe la direction des services de soins infirmiers
- informe les Pompes funèbres générale, au n° 04 78 54 68 31 (24 h/24) (7 j/7) pour le transport du corps vers la chambre funéraire (voir pages 8 et 9) annonce : le service médical où a eu lieu le décès
le nom de la personne décédée
l'heure du décès
l'heure à laquelle le corps pourra être transporté (2 H après le décès)
- applique la procédure de transport du corps sans mise en bière vers la chambre funéraire de Vénissieux (voir page 8)
- si la famille le demande, applique la procédure du transport de corps vers une chambre funéraire autre que celle de Vénissieux (voir page 9)
- remet le certificat de décès signé par le médecin qui constate le décès aux Pompes funèbres générales
- transmet une copie du certificat de décès au bureau des entrées
- Prend contact avec la famille
* l'informe du décès
* l'informe du transport du défunt vers la chambre funéraire de Vénissieux, 45 chemin de Feyzin
* lui demande la filiation du défunt
* lui communique l'heure prévue du transport
* si nécessaire lui demande des vêtements
* lui conseille de prendre contact avec le bureau des entrées
* lui indique les conditions financières : frais de transport + 3 jours en chambre funéraire à la charge du CH Vinatier. Au-delà de 3 jours, la chambre funéraire est à la charge de la famille). "
95. Elle explicite le rôle d'OGF-PFG de la manière suivante :
POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES
Les pompes funèbres générales :
- interviennent dans les 2 heures après le décès
- font procéder au CH Vinatier à la mise en place d'un bracelet d'identification par un officier de police judiciaire
- contactent la mairie pour obtenir l'autorisation du transport de corps sans mise en bière au moyen de l'imprimé prévu à cet effet
- placent le corps dans une housse biodégradable spéciale qu'ils fournissent. En cas de contagion, procèdent à la mise en bière immédiate soit en cercueil simple, soit en cercueil hermétique selon le type de maladie. Les Pompes funèbres générales n'ont pas le droit en cas de contagion de transporter le corps sans cercueil.
- transportent le corps vers la chambre funéraire de Vénissieux
ou
- transportent le corps vers une autre chambre funéraire si la famille le souhaite, à condition que le transport ait lieu impérativement 2 heures après le décès.
- Si le transport a lieu plus de 2 heures après le décès, il faut envisager un 2ème transport de corps sans mise en bière. Dans ce cas, les Pompes funèbres générales s'occupent des démarches administratives auprès de la mairie et tous les frais incombent à la famille.
CHAMBRE FUNERAIRE
A la chambre funéraire, les Pompes funèbres générales assurent :
- la présentation des corps aux familles 24 H/24, 7 j/7
- le respect de toutes les religions. "
96. Par ailleurs, dans la notice d'information élaborée par le centre hospitalier le 7 février 2000, on peut lire :
" Quel que soit le jour du décès et quelle que soit l'heure, dans tous les cas appeler les PFG au 04 78 54 68 31 qui contacteront eux-mêmes :
la Maison funéraire
45 chemin de Feyzin
69200 Vénissieux
ou le Parc cimetière communautaire [chambre funéraire à Bron]
161 boulevard de l'université
69500 Bron " (cotes 2477-2478).
L'effet de ces dispositions
97. Le dépouillement des listes des personnes décédées dans l'établissement montre que 97 corps ont été transportés par la CGPF sur les 124 décès intervenus en 2001 et 2002. Le directeur de la SRT a déclaré aux enquêteurs : " La CGPF a pris toute la clientèle des établissements de santé comme les cliniques et les hôpitaux qui ne disposent pas de chambres mortuaires. Si auparavant, nous faisions des transports à partir de ces établissements, c'était uniquement en tant que sous-traitant des PFG ou de CGPF " (cotes 2605-2607).
98. Le dirigeant de la société Lao à enseigne Roc'Eclerc a déclaré aux enquêteurs : " Les conventions tacites ou écrites entre les établissements de santé et indirectement PFG font que malgré ma position géographique, je n'organise plus aucun convoi pour des décès ayant eu lieu à la clinique Eugène André et au Vinatier. A l'inverse, depuis l'ouverture de la chambre mortuaire de la clinique Saint-Joseph et Saint-Luc, j'organise des funérailles de façon régulière " (cotes 205-207).
d) Les conditions d'admission des corps dans les chambres funéraires de Saint-Priest et Vénissieux
L'absence de signature des demandes de transfert
99. L'examen des dossiers d'admission aux funérariums de Saint-Priest et Vénissieux montre que les établissements sanitaires signent préalablement au décès les imprimés demandant le transport du corps vers la chambre funéraire détenue par PFG ou signent les demandes d'admission en chambre funéraire postérieurement à l'admission effective. C'est le cas pour la clinique du Grand Large et la clinique Pasteur pour lesquelles le rapport d'enquête, confirmant cette pratique, fait état de 17 dossiers d'admission entre 1999 et 2002 qui, soit ne sont pas signés, soit ont été signés à l'avance par les directeurs d'établissement.
100. Par ailleurs, un document fourni par la CGPF relatif aux établissements de santé de Vénissieux et intitulé " Demande de transfert de corps à chambre funéraire " ne prévoit que la signature du directeur de l'établissement et non de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles.
101. Enfin, les dossiers d'admission des corps des défunts provenant du Vinatier ne sont signés ni par un responsable d'établissement ni par une personne ayant qualité pour pourvoir aux obsèques.
Le témoignage des familles
102. La société saisissante a produit, dans son mémoire en réponse au rapport, plusieurs témoignages de familles qui s'échelonnent de 2001 à 2007, à savoir ceux de Mme L... et Mme M... pour des proches décédés au Vinatier, de Mme N..., Mme O... et Mme P... pour des proche décédés à la clinique du Grand Large, qui montrent les difficultés rencontrées dans les services de ces établissements pour faire transporter leurs défunts dans des chambres funéraires autres que celles de Vénissieux et Saint-Priest.
2. L'ORGANISATION DES SERVICES FUNÉRAIRES
a) À Lyon
103. Lyon ne dispose que d'une chambre funéraire gérée par la régie municipale.
L'accès des opérateurs de pompes funèbres à la chambre funéraire municipale de Lyon
104. Le directeur de la régie municipale a déclaré : " Actuellement, l'entreprise CGPF dispose d'une clé lui permettant d'accéder à la chambre funéraire quand le funérarium est fermé. CGPF dispose d'une clé depuis 1992, date de la création de la chambre funéraire. Lorsqu'il m'a été demandé de délivrer une clé [à d'autres opérateurs], j'ai refusé car j'estime qu'il y a trop de risques à laisser plusieurs personnes avoir accès à la chambre funéraire. Il n'est d'ailleurs pas possible d'imaginer faire une permanence de nuit pour une raison de charges " (cotes 342-346).
105. Dans le même sens, le dirigeant de la société Rozier a indiqué : " les clés de la chambre funéraire sont confiées essentiellement à leur prestataire CGPF. J'ai également une clé qui nous avait été confiée à l'époque par Mme Q... responsable des services funéraires avant M. X.... Je m'en sers une à deux fois par an. Je ne fais pas de transport de nuit car la législation relative au transfert avant mise en bière des corps est complexe dans les démarches. Je constate que le fait pour la CGPF de posséder toutes les clés de toutes les chambres funéraires fausse le marché des réquisitions de nuit ou de décès sur la voie publique. Cela interdit l'arrivée de nouveaux entrants. " (cotes 515-519). Les pompes funèbres Viollet ont confirmé cet état de fait : " Par exemple, j'ai eu à plusieurs reprises l'occasion de demander en vain l'accès à la chambre funéraire Berthelot de nuit alors que CGPF a cette possibilité. " (Cotes 534-535).
106. Deux autres opérateurs de pompes funèbres ont également déploré cette situation. Le gérant de la Sarl Pompes Funèbres du Rhône, a déclaré : " En dehors des heures ouvrables, il est impossible d'accéder à la chambre funéraire de Lyon sauf à posséder une clé que seules CGPF et Pompes Funèbres Rozier possèdent. La nuit, nous sommes obligés de faire sous-traiter le transfert des corps par CGPF. En dehors du fait que cela peut nous faciliter le service, je conteste le fait d'être obligé de sous-traiter avec un concurrent alors qu'il serait possible d'imaginer une rotation avec d'autres confrères. " (Cotes 660-662.) Le gérant de la Sarl Pinault, a ajouté : " Nous rencontrons des difficultés d'accès la nuit au centre funéraire de la ville de Lyon, avenue Berthelot. Dans ces cas, comme il ne nous est pas possible de transférer les corps hors de la commune la nuit, nous sommes dans l'impossibilité de faire le transfert. Les familles se retournent alors vers le seul autre opérateur qui peut assurer le transport du corps : la CGPF. Cette pratique nous fait passer pour une entreprise incapable d'assurer un début de prestation et tend à nous exclure du marché des obsèques aux yeux des familles. " (Cotes 529-531).
La présentation des services funéraires par la ville de Lyon
107. La régie municipale de Lyon se présente selon les cas sous plusieurs appellations : services funéraires municipaux, centre funéraire, centre funéraire de la ville de Lyon ou pompes funèbres municipales.
108. L'appellation " services funéraires municipaux-centre funéraire " est utilisée dans les dépliants présentés dans les locaux d'accueil de la régie avenue Berthelot (cotes 496-507). L'appellation " pompes funèbres municipales " se trouve dans les annuaires de France Télécom, les publicités des pages jaunes reprenant la mention " service municipal des pompes funèbres " (cotes 2651 et 2680).
109. Il a été vu au paragraphe 65 que les établissements de soins diffusent les dépliants publicitaires du service municipal des pompes funèbres qui présentent sans les distinguer les activités administratives relatives à la réglementation funéraire, à la gestion des cimetières, à la délivrance des autorisations nécessaires aux obsèques et les activités industrielles et commerciales relatives à l'organisation des funérailles.
110. Par ailleurs, le modèle de mandat signé par les familles qui veulent confier à la régie municipale l'organisation des obsèques de leur proche est présenté sous le titre " Services Funéraires Municipaux " et donne comme adresse " Ville de Lyon. Centre Funéraire Municipal." (cotes 320-321).
La configuration des locaux
111. Les locaux sont décrits dans un procès-verbal de visite dressé par l'enquêteur (cotes 2712-2718).
112. S'agissant d'une part du côté du bâtiment accessible en voiture, il observe : " Un premier panneau affiché de façon très visible sur le côté de l'aile du bâtiment principal porte les indications suivantes :
<emplacement tableau>
Il est fait une distinction entre les salons funéraires, la salle de cérémonies et les services des pompes funèbres ainsi que les services administratifs. Si le visiteur veut accéder aux salons funéraires, il emprunte un tunnel piétonnier sous l'aile du bâtiment principal qui aboutit dans la cour au niveau du 177 de l'avenue Berthelot. Si le visiteur veut aller au service de la réglementation, il suit un circuit sur la gauche qui longe l'arrière du bâtiment principal. Un hall d'accueil avec trois entrées porte, au-dessus de chacune d'elles, les mentions suivantes :
Accueil
Pompes funèbres
Cimetière - Concession
Règlementation
Dans ce hall, une table basse et dix fauteuils sont les mobiliers présents avec quelques plantes d'ornements. Un fléchage au-dessus de l'ascenseur, seule possibilité d'accès à partir du hall, reprend les mentions du dessus des trois portes. Sur la table basse, un écriteau en carton mentionne :
'Service funéraire municipal - 177 avenue Berthelot - 69007 Lyon
Chambre et salons funéraires
Accès par le parking côté avenue Berthelot' " (cote 2715).
113. S'agissant d'autre part de l'accès direct par le boulevard Berthelot, celui-ci ne peut s'effectuer que par un passage dans le local de la chambre funéraire située aux numéros 177 et 179 de ce boulevard. Cet accès est présenté de la façon suivante :
" Un premier panneau, visible sur la gauche, qui ne porte pas les armoiries de la ville de Lyon, indique les mentions suivantes :
<emplacement tableau>
Ce panneau est placé juste à la sortie du tunnel piétonnier qui passe sous le bâtiment. Dès l'entrée dans la cour, on visualise aisément l'entrée vers les salons funéraires qui sont bien identifiés par un panneau au-dessus de la porte centrale du bâtiment principal :
Accueil
Salons funéraires
Salle de cérémonies " (cote 2716).
114. L'enquêteur décrit également l'intérieur du local affecté à la chambre funéraire :
" La cour possède également un bâtiment sur la droite (qui sert de salon de détente) qui porte encore d'anciens panneaux d'indication qui n'ont pas été enlevés et qui peuvent faire naître une certaine ambiguïté puisqu'ils orientent le visiteur vers le centre de la cour avec les mentions suivantes :
L'accueil de la chambre funéraire se présente de la façon suivante :
- Dans un hall, l'accueil est matérialisé par un bureau avec un téléphone et un chevalet sur lequel est mentionné le nom du défunt et le numéro du salon où il peut être visité. Sur le bureau, un écriteau indique : " Durant l'absence momentanée de notre hôtesse, nous vous remercions de bien vouloir sonner. Un assistant viendra vous conseiller. La sonnette est située à votre gauche.
- Sur la droite et sur la gauche, deux portes donnent accès à des couloirs qui desservent les salons funéraires.
- Un escalier sur la droite mène à l'accueil du premier étage. Un écriteau suspendu indique : " services administratifs ".
- Un ascenseur, à droite de l'entrée, permet de se rendre à l'étage.
- Enfin, face à l'entrée, une porte, au fond du hall d'accueil, mène à un couloir de service réservé aux employés de l'établissement. " (cote 2717).
115. Cette description fait apparaître d'une part que la chambre funéraire ne dispose pas d'une entrée séparée, d'autre part que la chambre communique avec les services commerciaux de la régie et qu'enfin cette activité commerciale et la partie administrative des services municipaux relative aux cimetières et aux concessions ne sont pas clairement distinguées à l'étage du bâtiment. Les plans du bâtiment (cotes 347-348) ainsi que la notice de présentation du centre remise par la régie (cotes 2297-2300) confirment que les activités commerciales et les activités purement administratives de la régie municipale ne sont pas clairement distinguées dans la signalisation externe et interne.
116. Cette configuration matérielle, source de confusion, est confirmée par plusieurs déclarations. La société Rozier a déclaré : " les certificats de décès sont systématiquement montés au service de la réglementation, obligeant les familles à monter à l'étage.
L'escalier et l'ascenseur à l'accueil de la chambre funéraire ne permettent pas de distinguer les entrées distinctes entre la chambre funéraire et les services commerciaux. " (cotes 515-519).
117. De même, la Sarl pompes funèbres Pinault a affirmé : " J'estime qu'il existe une confusion au centre funéraire Berthelot entre la chambre funéraire et les services de pompes funèbres. Elle naît de la pratique qui consiste à amener les documents à l'étage, au service réglementation. Une fois la famille dans la nécessité de récupérer les documents, elle est accueillie à l'étage par un conseiller funéraire. La captation est discrète mais efficace.
A Lyon, lorsque les familles font une déclaration de décès dans les mairies d'arrondissement, l'employé municipal remet aux familles un document à destination du service de la réglementation de la ville de Lyon afin d'aller y retirer le permis d'inhumer. Le service de la réglementation est naturellement centralisé avenue Berthelot. " (cotes 529-531).
118. Ces déclarations montrent également que toutes les familles ayant déclaré un décès à Lyon doivent venir au centre funéraire au moins pour retirer le permis d'inhumer auprès du service de la réglementation.
Les numéros de téléphone
119. Dans les pages jaunes de l'annuaire téléphonique (cote 2680), la rubrique chambre funéraire ou funérarium est englobée dans les autres activités de pompes funèbres avec un seul numéro d'appel le 04 72 76 08 18. Ce même numéro est repris dans les pages blanches de cet annuaire et dans la publicité qui l'accompagne (cote 2651).
120. Tous les autres supports d'information du public disponibles reprennent ce même numéro et notamment les sites internet de France Télécom (cotes 2699-2709).
121. Il n'est donc pas possible pour les familles d'avoir le numéro spécifique de la chambre funéraire alors que celui-ci - le 04 72 76 08 44 - existe mais n'est pas diffusé par la régie. Une notice adressée par la mairie de Lyon à une clinique pour l'informer des conditions d'accès à la chambre funéraire n'indique pas davantage ce numéro mais celui des pompes funèbres municipales (cote 2278).
122. Dans sa déclaration aux enquêteurs, le directeur de la régie municipale a pourtant confirmé que la chambre funéraire est dotée d'un numéro d'appel propre :
" Vous m'interrogez sur l'accueil téléphonique de la standardiste qui délivre le même message quel que soit l'origine de l'appel et qui est : " Servies funéraires municipaux - Bonjour ! ". Nous disposons d'une ligne téléphonique distincte pour la chambre funéraire. Au standard, la personne n'a pas de consigne particulière, elle délivre un message neutre qui associe tous les services du centre (réglementaire, pompes funèbres et chambre funéraire). Techniquement, je confirme qu'elle peut visualiser l'origine de l'appel. " (cote 344).
123. L'absence de communication du numéro de téléphone spécifique à la chambre funéraire, rapprochée de l'indication systématique sur tous les supports d'information d'un seul numéro couvrant les activités commerciales, administratives et de gestionnaire de la chambre funéraire, n'est pas de nature à éclairer les familles sur la distinction entre les prestations concurrentielles de la régie municipale et le service public administratif lié aux décès.
b) À Saint-Priest
L'organisation des locaux
124. L'enquête montre que la chambre funéraire et les locaux commerciaux sont bien séparés à l'intérieur du bâtiment (cotes 2723-2724). Dans un arrêt du 25 septembre 2003, la troisième chambre civile de la Cour d'appel de Lyon a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 18 mars 2002 sur la situation du funérarium, en jugeant :
" que le bâtiment construit en 1997 est pourvu de deux entrées séparées aménagées sur une façade rectiligne et distantes entre elles d'une dizaine de mètres ; que les deux entrées font l'objet d'une signalétique claire, d'une part, " maison funéraire " et d'autre part " pompes funèbres " ; que les deux locaux ne communiquant pas entre eux ainsi qu'il en résulte également du plan des locaux, (...) ; que l'agencement des locaux tant dans leur configuration physique que dans leur aspect et leur signalétique ne réalise pas l'amalgame entre les deux activités différenciées exercées par la SA OGF qui n'a pas eu en vue de créer une confusion pour capter la clientèle qui venait dans sa chambre funéraire ;
Attendu que l'annuaire téléphonique pour la commune considérée de Saint-Priest comporte logiquement à la rubrique pompes funèbres générales et au nom de la SA OGF les diverses lignes téléphoniques attribuées pour les activités distinctes exploitées : " pompes funèbres et marbrerie " et " maison funéraire " ; qu'aucun grief ne peut être fait à la société SA OGF dans la présentation de ses activités dans l'annuaire téléphonique ;
Attendu que les attestations versées au débat par la SARL Pompes funèbres VIOLLET ne révèlent pas la réalité d'agissement déloyaux imputables à la SA OGF mais dénoncent plutôt des dysfonctionnements : retard dans l'ouverture de la chambre funéraire de la SA OGF lors de la levée des corps, décisions de transferts de corps dans la chambre funéraire de la SA OGF prises par des établissements hospitaliers sans respecter la volonté des familles ou les consulter ..., sans que ces agissements soient directement imputables à la SA OGF ; ... " (cotes 548-552).
125. Le constat réalisé par l'enquêteur qui s'est rendu sur place le 9 septembre 2003 donne les précisions suivantes : " La façade qui donne sur la rue forme un angle qui crée un renfoncement ouvrant sur l'entrée du cimetière. L'arête de l'angle porte une enseigne commerciale drapeau avec le logo des FPG. " (cote 2723).
126. La société Viollet, dans son mémoire en réponse au rapport, apporte le témoignage d'une famille pour un proche décédé en 2002 qui fait apparaître qu'elle a dû aller chercher le Code d'accès de la chambre funéraire au bureau commercial d'OGF-PFG.
Les numéros de téléphone
127. Dans les pages blanches de l'annuaire du département du Rhône Édition 2000, le numéro de téléphone de la chambre funéraire apparaît à la lettre " P " de Pompes funèbres générales - PFG. L'indication est ainsi libellée :
" POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES (PFG)
Marbrerie-Déplacement à dom 24/24
26 r Égalité 04 78 20 10 88
Maison funéraire 04 78 20 99 41
POMPES FUNÈBRES GÉNÉRALES
26 r Égalité 04 78 20 10 88 " (cote 2663).
128. Les pages jaunes de l'annuaire de France Télécom Édition 2002 ne mentionnent pas l'existence d'une chambre funéraire sur la commune de Saint-Priest. Cependant, OGF publie une page entière de publicité présentant ses diverses prestations, au rang desquelles figure la maison funéraire.
c) À Vénissieux
L'organisation des locaux 129. La chambre funéraire de Vénissieux date de 1998. Elle se situe en face du nouveau cimetière communal, 45 chemin de Feyzin. Le procès-verbal de visite de l'enquêteur qui s'est rendu sur place le 9 septembre 2003 montre que la chambre funéraire se situe exactement à l'arrière du local commercial des PFG, lui-même séparé de la rue par un grand parc de stationnement. Le bâtiment est ainsi présenté (cotes 2726-2729) : " Le bâtiment dans lequel est construite la chambre funéraire est situé devant un important parking qui fait face au cimetière communal. La façade qui est visible de la place est celle du bâtiment commercial à l'enseigne des Pompes Funèbres Générales. La partie consacrée à la chambre funéraire n'est pas visible de la place, elle est placée derrière le local commercial et pour y accéder il faut passer un portillon métallique fermé avec un digicode. L'accès au parking de la chambre funéraire est également fermé aux heures d'ouverture. "
130. A l'entrée, si au-dessus du digicode une affiche indique que le Code d'accès peut être obtenu par l'entreprise de pompes funèbres de son choix, l'enquêteur a déclaré : " Le 9 septembre 2003, l'accès au parking était cependant ouvert et nous y avons stationné. Nous avons voulu accéder directement à la chambre funéraire mais celle-ci était fermée et nécessitait la connaissance d'un Code d'ouverture. Nous avons donc dû nous rendre au local commercial pour obtenir la possibilité de procéder à la visite des locaux. "
131. Le saisissant a produit le témoignage d'une famille qui, à l'occasion du décès d'un proche en 2004, a rencontré des difficultés pour obtenir l'ouverture du funérarium en début d'après-midi et n'a pas pu rester sur place après 17 heures alors que l'heure de fermeture est fixée à 17 heures 30.
Les numéros de téléphone
132. Les numéros de téléphone des PFG sur Vénissieux sont présentés dans les annuaires pages blanches et pages jaunes 2002 de la même façon que la commune de Saint-Priest.
3. LES RÔLES DE LA RÉGIE MUNICIPALE ET D'OGF-PFG DANS LES OPÉRATIONS FUNÉRAIRES À LYON ET DANS SON AGGLOMÉRATION
a) Les chambres funéraires
133. La régie municipale gère la seule chambre funéraire de Lyon et OGF- PFG gère la plupart des chambres funéraires de la banlieue lyonnaise, notamment celles de Vénissieux et de Saint-Priest mais aussi celles de Caluire-et-Cuire, Écully, Neuville-sur-Saône et Saint-Genis-Laval. Malgré la volonté affichée depuis 1998 d'OGF-PFG de créer une chambre funéraire à Lyon, ce projet n'a jamais abouti. Cette société a expliqué cette situation par des raisons administratives liées aux contraintes de l'enquête " commodo et in commodo " et aux exigences de la ville en matière de parking.
134. Il a été également constaté que l'hôpital Saint-Joseph Saint Luc ne respectait pas les dispositions réglementaires lui imposant d'avoir une chambre mortuaire et de ce fait se reportait sur la chambre funéraire du boulevard Berthelot à Lyon. Les services funéraires de la ville de Lyon n'ignoraient pas cet état de fait et ne sont apparemment pas intervenus pour faire appliquer l'article L. 2223-39 du CGCT qui impose l'existence d'une telle installation. Une lettre du directeur général de ce centre hospitalier du 21 décembre 1998 (cotes 2246-2247) montre que ce sont les services funéraires municipaux qui ont proposé à cet établissement comme à la clinique mutualiste d'utiliser les services de la CGPF.
b) L'attribution à la CGPF du marché du transport des corps avant mise en bière 135. La société CGPF a finalement été intégrée dans le groupe OGF-PFG. Le marché du transport vers le funérarium de la ville de Lyon pour le compte de la régie municipale lui a été attribué pour une longue période par la ville de Lyon. Il apparaît que la régie, en refusant la clé de cette installation aux autres opérateurs que la CGPF, interdisait en fait aux familles qui devaient faire transporter un corps à un moment où la chambre funéraire était fermée, à savoir la nuit ou les samedi et dimanche après-midi, de choisir un autre opérateur que la CGPF.
c) La stabilité des parts de marché
136. Il ressort du tableau présenté au paragraphe 36 que la part de marché des différents opérateurs sur la ville de Lyon ne connaît pas d'évolution très notable entre 1999 et 2002.
D. LES GRIEFS NOTIFIÉS
137. Au vu de l'ensemble des éléments présentés ci-dessus, les griefs suivants ont été notifiés sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce :
" - (...) à la régie municipale des pompes funèbres de la ville de Lyon d'avoir abusé de sa position de gestionnaire exclusif de la chambre funéraire municipale et d'organisateur du service public funéraire municipal pour conclure entre 1994 et 2002, avec les hôpitaux qui n'avaient pas de chambre mortuaire mais aussi avec ceux d'entre eux qui devaient légalement en posséder, des conventions ou accords destinés à faire transférer de manière systématique et dans des délais très brefs les corps des personnes décédées en leur sein. Assortie d'une clause de gratuité du transport et des trois premiers jours de séjour dans la chambre funéraire appliquée aux familles alors même que ces prestations n'étaient pas à la charge des établissements hospitaliers, cette pratique a eu pour objet et pour effet d'empêcher les familles de disposer du temps nécessaire à l'organisation des obsèques et de dissuader leur choix pour un autre opérateur de transport et pour une autre chambre funéraire. Elle a permis d'autre part à la régie d'organiser les 3/4 des obsèques des personnes ainsi transportées dans sa chambre funéraire (grief n° 1).
- (...) à la régie municipale des pompes funèbres de s'être concertée entre 1994 et 2002 avec l'hôpital Saint-Joseph Saint-Luc et les cliniques mutualistes Eugène André et la Sauvegarde pour passer des accords ou des conventions et mettre en place pour les appliquer des procédures internes de gestion des décès et d'information des familles qui ont systématiquement privilégié le funérarium municipal pour le transfert des défunts et empêché aussi bien sur le marché du transport que sur celui de l'organisation des funérailles dans la ville de Lyon le libre choix de ces familles pour un opérateur concurrent (grief n° 2).
- (...) à la régie municipale d'avoir, sur le marché des pompes funèbres à Lyon, abusé entre 1997 et 2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire existant à Lyon, d'une part, en donnant les clés de cette installation au seul opérateur choisi par elle et en la refusant aux autres opérateurs concurrents ; d'autre part, en organisant des conditions d'accueil du public à l'extérieur et à l'intérieur des locaux et en diffusant, notamment dans la presse et dans les annuaires téléphoniques, des informations propres à créer une confusion entre son activité commerciale, son activité de gestionnaire de la chambre funéraire et ses autres activités de service public. Ces pratiques ont eu pour objet ou pour effet d'écarter des entreprises de pompes funèbres de l'organisation des obsèques des personnes transportées dans la chambre funéraire et de rendre plus difficile pour les familles le choix d'un opérateur concurrent (grief n° 3).
- (...) à la société OGF-PFG d'avoir, sur le marché des pompes funèbres de Vénissieux, exploité au cours des années 1999, 2000, 2001, 2002 et 2003 de façon abusive sa position dominante sur le marché du transport des corps avant mise en bière et de gestionnaire exclusif de la chambre funéraire d'une part en signant avec les établissements de santé ne disposant pas de morgue des conventions contraires à l'article R. 2223-79 du Code général des collectivités territoriales qui les incitaient financièrement à faire transporter le plus rapidement possible les corps des défunts vers le funérarium détenu par la société, et d'autre part en conduisant les établissements ayant signé avec elle ces conventions à donner aux familles des informations contraires à leur devoir de neutralité. Cette pratique a eu pour objet et pour effet de capter la demande des familles endeuillées sur le marché des obsèques (grief n° 4).
- (...) à la société OGF-PFG d'avoir, sur le marché des pompes funèbres de Saint-Priest, exploité au cours des années 2000, 2001, 2002 et 2003 de façon abusive sa position dominante, d'une part, en signant avec les établissements de santé ne disposant pas de morgue des conventions contraires à l'article R. 2223-79 du Code général des collectivités territoriales qui les incitaient financièrement à faire transporter le plus rapidement possible les corps des défunts vers le funérarium détenu par la société, en proposant parfois la gratuité des trois premiers jours de séjour dans ces installations et, d'autre part, en conduisant les établissements ayant signé avec elle ces conventions à donner aux familles des informations contraires à leur devoir de neutralité. Cette pratique a eu pour objet et pour effet de capter la demande des familles endeuillées sur le marché des obsèques (grief n° 5).
- (...) à la société OGF-PFG d'avoir, sur le marché des pompes funèbres de Vénissieux, abusé au moins pour les années 2000 à 2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire de la commune et de sa position dominante sur le marché aval du transport des corps avant mise en bière en mettant en place, d'une part, des informations sur l'annuaire téléphonique, et d'autre part, une présentation des locaux susceptibles de créer une confusion entre l'activité de la chambre funéraire municipale et de rendre ainsi plus difficile le choix des familles pour un opérateur concurrent (grief n° 6).
- (...) à la société OGF-PFG d'avoir, sur le marché des pompes funèbres de Saint-Priest, abusé au moins pour les années 2000 à 2003 de sa position de gestionnaire exclusif de la seule chambre funéraire de la commune, en mettant notamment en place des informations sur l'annuaire téléphonique susceptibles de créer une confusion entre l'activité de la chambre funéraire municipale et son activité de prestataire de service en matière d'organisation des funérailles et de rendre ainsi plus difficile le choix des familles pour un opérateur concurrent (grief n° 7).
- (...) à la société OGF-PFG, d'une part, et à la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand Large, la clinique de La Roseraie, la clinique des Minguettes et le centre hospitalier du Vinatier d'autre part, de s'être entendus entre 1999 et 2003 pour favoriser la société PFG sur le marché du transport des corps des personnes décédées dans ces établissements vers la chambre funéraire dont elle est gestionnaire, privant les familles des défunts de leur liberté de choix de l'opérateur de pompes funèbres et permettant ainsi à la société PFG de capter la clientèle sur le marché de l'organisation des obsèques (grief n° 8).
- (...) à la régie municipale des pompes funèbres et à la société OGF-PFG de s'être concertées entre 1997 et 2003 pour organiser le transport et l'accueil dans leurs propres chambres funéraires des personnes décédées dans les établissements de santé de Lyon et de son agglomération afin d'écarter la concurrence des autres entreprises de pompes funèbres sur le marché de l'organisation des funérailles à Lyon et dans son agglomération et ainsi de maintenir le partage du marché sur la base de leur position dominante respective, d'une part, à Lyon pour la régie municipale et, d'autre part, dans l'agglomération lyonnaise pour les PFG (grief n° 9). "
II. Discussion
A. SUR LA PRESCRIPTION
138. Les pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise, qui ont répondu pour l'ancienne régie municipale, soutiennent que les faits décrits dans la notification de griefs, qui trouvent leur origine dans des conventions antérieures au 26 juillet 1999, soit plus de trois ans avant la saisine du 26 juillet 2002, sont prescrits. En outre, elles font valoir que plus de trois ans se sont écoulés entre la remise du rapport d'enquête en février 2004 et la notification des griefs en avril 2007, ce qui constituerait une autre cause de prescription.
139. Ces arguments doivent être écartés. D'abord, les pratiques en cause sont des pratiques continues visées par les griefs jusqu'en 2002 ou 2003. Or, la détermination du point de départ de l'écoulement du délai de prescription de pratiques anticoncurrentielles par rapport aux faits dépend de la manière dont ceux-ci se sont déroulés dans le temps, ainsi que l'a rappelé de manière détaillée le Conseil dans la décision n° 07-D-15 du 9 mai 2007 relative à des pratiques concernant les marchés publics relatifs aux lycées d'Île-de-France. La pratique à caractère instantané est réalisée en un trait de temps, dès la commission des faits qui la constituent. Le point de départ de la prescription se situe dans un tel cas le lendemain du jour où ces faits ont été commis. La pratique revêt au contraire un caractère continu lorsque l'état délictuel se prolonge dans le temps par la réitération constante ou la persistance de la volonté coupable de l'auteur après l'acte initial. Il s'agit de pratiques caractérisées par la continuité de la volonté anticoncurrentielle sans qu'un acte matériel ait nécessairement à renouveler la manifestation dans le temps, de telle sorte que le calcul du point de départ de la prescription ne commencera qu'à compter de la cessation des pratiques (rapport d'activité pour 2002, p. 91).
140. Dans plusieurs décisions, le Conseil a appliqué cette règle, qui permet de retenir des faits antérieurs de plus de trois ou de cinq ans au premier acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction lorsque la pratique en question est continue, puisque le délai de prescription ne commence alors à courir que lorsque la situation a pris fin : par exemple, des courriers faisant état du " maintien de la charte de respect de la 1ère monte " donnent à la pratique de mise en œuvre de la charte définie dans un courrier antérieur un caractère continu (décision n° 03-D-40) ou des pratiques discriminatoires consistant en une interdiction faite à des médecins d'accéder à un scanner privé, adoptée à l'issue d'une réunion organisée sous l'égide de l'ordre des médecins et poursuivie les années suivantes revêtent également un caractère continu (décision n° 06-D-36 ; sur le point de départ de la prescription voir également 02-D-63, 05-D-13). Dans la décision dite " Pont de Normandie " du 29 novembre 1995 (95-D-76), le Conseil a pris la position suivante : " Considérant en second lieu que, contrairement à ce qu'avancent les sociétés Dumez et GTM - Entrepose, l'accord qu'elles ont conclu le 25 juin 1986 peut être examiné par le Conseil puisqu'il est resté en vigueur et a conservé, de façon continue, son objet et ses effets, actuels et potentiels, jusqu'à la conclusion d'un second accord, le 10 mai 1989, intervenue pendant la période non prescrite à la suite d'un accroissement de la participation de la société Dumez dans le capital de la société GTM - Entrepose ... ". Cette analyse selon laquelle un accord pouvait être sanctionné bien qu'il soit intervenu plus de trois ans avant le 28 novembre 1989, date du premier acte interrompant la prescription (date de la première ordonnance de visites et saisies) n'a pas été remise en cause par les juridictions de contrôle (Cour d'appel de Paris, 6 mai 1997 et 14 janvier 2003 ; Cour de cassation, 5 octobre 1999 et 13 juillet 2004).
141. En l'espèce, le premier acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des faits objet des griefs a été le dépôt de la saisine des Pompes funèbres Viollet le 26 juillet 2002. Les faits décrits dans la notification de griefs - qui se rattachent à une pratique continue - n'étaient pas atteints par la prescription, qui à l'époque était de 3 ans, à cette date.
142. Ensuite, ainsi que l'a indiqué le Conseil notamment dans sa décision n° 06-D-08 du 24 mars 2006 relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre de marchés publics de construction de trois collèges dans le département de l'Hérault (points 38 à 45) : " l'article 6 de l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 a porté de trois à cinq ans le délai de prescription prévu à l'article L. 462-7 du Code de commerce. S'agissant d'un texte de procédure et non d'une loi instituant une peine plus sévère, il est applicable immédiatement, y compris à la poursuite et à la sanction des faits antérieurs à son entrée en vigueur, sous la seule réserve qu'il ne puisse permettre de poursuivre ou de sanctionner des faits pour lesquels la prescription a été définitivement acquise en vertu du texte applicable précédemment. "
143. La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt Toffolutti du 12 décembre 2006, a également jugé : " Considérant que, lorsque la prescription n'est pas acquise, les lois relatives à la prescription sont applicables immédiatement aux pratiques commises avant leur entrée en vigueur ; Considérant qu'en l'espèce, il est constant que le dernier acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des pratiques dénoncées par Toffolutti, qui en l'état, n'ont pas donné lieu à une notification de griefs, est constitué par le " soit transmis " du juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Rouen en date du 7 juillet 2002 et que la prescription triennale qui résultait des dispositions de l'article L. 462-7 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 n'était pas acquise le 6 novembre 2004, date d'entrée en vigueur de ce texte ; Considérant que la requérante est dès lors fondée à soutenir que les faits dénoncés au Conseil, désormais soumis à une prescription de cinq ans à compter du 7 juillet 2002, n'étaient par voie de conséquence pas prescrits à la date du 7 juillet 2005. "
144. En l'espèce, lorsque l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 est entrée en vigueur, la prescription de trois ans n'était pas acquise au regard de la date de dépôt du rapport d'enquête de février 2004 et c'est donc le délai de prescription de cinq ans qui s'est alors appliqué. Or, celui-ci n'était pas écoulé en avril 2007 lorsque les griefs ont été notifiés. Les faits ne sont donc pas prescrits et le Conseil peut les examiner.
B. SUR LES MARCHÉS PERTINENTS ET LA POSITION DES OPÉRATEURS EN CAUSE
145. Ainsi que le Conseil l'a estimé dans de nombreuses décisions (voir en particulier les décisions 93-D-14, 97-D-04, 03-D-33, 04-D-70), il existe en ce qui concerne les marchés de produits de services funéraires, un marché général des services funéraires proposés aux familles. Par exemple, dans la décision n° 07-D-04 relative à des pratiques mises en œuvre à Pontivy et dans les communes environnantes, le Conseil a à cet égard indiqué : " Considérant (...), que les prestations funéraires comportent les prestations du service intérieur, celles qui relèvent du service intérieur dans les édifices religieux et enfin des prestations dites libres ; qu'eu égard au comportement des familles et aux pratiques des opérateurs, l'ensemble des produits et services funéraires est indissociable ; qu'ainsi, les services assurés dans les chambres funéraires appartiennent au même marché que celui sur lequel sont proposées les autres prestations de pompes funèbres. " Cette appréciation a été confirmée par la Cour d'appel de Paris dans un arrêt du 27 octobre 1998, société Groupement d'entreprises de services et autres (BOCCRF du 20 novembre 1998, p. 647).
146. Toutefois, cette définition d'un marché, qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause, ne vaut que lorsque la demande est exprimée par les familles et que celles-ci maîtrisent l'ensemble des opérations funéraires à la suite du décès. D'autres caractéristiques de la demande peuvent conduire à identifier d'autres marchés où se rencontrent des demandes et des offres différentes. La présente affaire met à cet égard en évidence deux marchés de produits différents du marché général des services funéraires proposés aux familles.
147. D'une part, il existe celui qui répond à la demande des établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de chambre mortuaire et qui souhaitent organiser le départ des corps des personnes décédées en leur sein vers une chambre funéraire lorsque les familles ne prennent pas elles-mêmes à bref délai en mains les opérations funéraires. Sur ce marché l'offre, qui peut juridiquement prendre plusieurs formes et faire le cas échéant intervenir plus d'un opérateur, allie une prestation de transport du corps avant mise en bière et son séjour en chambre funéraire avant d'autres opérations.
148. D'autre part, peut être identifié un marché qui correspond à la demande d'organisation d'obsèques de la part des familles pour les défunts qui ont été transportés en chambre funéraire dans les conditions caractérisant le marché précédemment évoqué. Un tel marché a déjà en substance été identifié dans la décision du Conseil n° 04-D-37 du 24 juillet 2004 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes funèbres de Saint-Germain-en-Laye. L'existence de ce marché particulier n'est pas à exclure car les conditions de la demande des familles pour l'organisation des funérailles dans ces circonstances sont le plus souvent nettement différentes de celles dans lesquelles cette demande s'exprime lorsque le défunt s'est éteint à son domicile ou lorsque la famille a pris elle-même en mains à bref délai après le décès les opérations funéraires quand celui-ci est intervenu dans un établissement de soins ou de séjour. La concurrence entre les opérateurs est en effet généralement beaucoup moins intense vis-à-vis des familles lorsque le corps a déjà été transporté dans une chambre funéraire gérée par un opérateur sur demande d'un tiers que lorsque la famille exerce son choix dès le décès.
149. Cette situation se vérifie en l'espèce au vu des statistiques reproduites précédemment qui permettent de constater qu'environ 70 % des obsèques des personnes dont le corps a été transporté au funérarium de la ville de Lyon ont été organisées par la régie municipale au cours des années considérées alors que la part de marché de celle-ci est seulement de l'ordre de 35 à 40 % dans l'organisation des obsèques de l'ensemble des personnes décédées à Lyon. De même, à Vénissieux, OGF-PFG assure environ 90 % des obsèques des personnes dont le corps a été transporté au funérarium situé dans cette commune, alors que sa part de marché est moindre de près de 10 % en ce qui concerne l'organisation des obsèques de l'ensemble des personnes décédées habitant à Vénissieux, bien qu'elle soit le seul opérateur à y être implanté. En 1999, l'écart était proche de 17 %. Les éléments figurant au dossier sont moins précis en ce qui concerne Saint-Priest, mais alors qu'OGF- PFG détient entre 65 % et 48 % selon les années examinées de part de marché en ce qui concerne l'organisation des obsèques de l'ensemble des personnes décédées habitant à Saint-Priest, cette entreprise n'a pas indiqué qu'elle assurait une part non majeure des convois funéraires au départ du funérarium de cette ville, qu'elle gère, ce qui serait étonnant au vu des exemples précédents.
150. Or, ainsi que l'a rappelé le Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l'arrêt du 12 juin 1997, Tiercé Ladbroke/Commission (T-504-93, Rec. p. II-923, point 81) :
" Aux fins de l'application de l'article 86 du traité, le marché du produit ou du service en cause englobe les produits ou les services qui sont substituables ou suffisamment interchangeables avec celui-ci, en fonction non seulement de leurs caractéristiques objectives, en vertu desquelles ils sont particulièrement aptes à satisfaire les besoins constants des consommateurs, mais également en fonction des conditions de concurrence et de la structure de la demande et de l'offre sur le marché en cause. " (voir aussi l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 14 novembre 1996, Tetra Pack/Commission, C-333-94 P, Rec. p. I-5951, point 13).
C'est cette analyse qui a conduit le Conseil à retenir, dans les avis n° 96-A-09 et 98-A-09, s'agissant de boissons, des marchés différents selon le circuit de distribution, dans les commerces alimentaires ou dans les cafés, hôtels, restaurants et autres collectivités.
151. En ce qui concerne la dimension géographique des marchés de produits identifiés précédemment, s'agissant d'abord des marchés répondant à la demande des établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de chambre mortuaire, il y a lieu de constater que les établissements situés à Lyon, à savoir le centre hospitalier Saint-Joseph Saint Luc, la clinique Eugène André et la clinique de la Sauvegarde ont tous recouru aux services du funérarium de la régie municipale de Lyon pour accueillir les corps des personnes décédées en leur sein dont les familles ne prenaient pas elles-mêmes à bref délai en mains les opérations funéraires. Ce choix, qui impliquait aussi systématiquement le recours au transporteur choisi par la régie, a été dicté par le concours de raisons de proximité et de raisons administratives, la réglementation interdisant le transport des corps avant mise en bière hors de la commune de décès sans autorisation du maire, c'est-à-dire l'interdisant en pratique lorsque les services administratifs municipaux sont fermés, en particulier de nuit, en fin de semaine et les jours fériés. Aucun autre opérateur disposant d'une chambre funéraire n'a contracté avec les établissements de santé ou de soins de Lyon. Il n'y a d'ailleurs pas d'autre chambre funéraire à Lyon. De plus, il a été vu aux paragraphes 47, 54 et 62 que l'hôpital Saint-Joseph Saint Luc, les cliniques Eugène André et la Sauvegarde ont pris des dispositions conduisant la chambre funéraire à recevoir, ainsi qu'indiqué au paragraphe 37, plus de 90 % des personnes décédées en leur sein. Il en ressort d'une part qu'il existe un marché géographique spécifique à Lyon pour le marché de services en question et d'autre part que la régie municipale y est en position dominante.
152. En ce qui concerne l'offre aux établissements de soins ou de séjour des funérariums de Saint-Priest et de Vénissieux, gérés par OGF-PFG, le ou les marchés géographiques concernés semblent plus larges que l'étendue de ces deux communes. En effet, la clinique du Grand Large située à Decines-Charpieu utilise le funérarium de Saint-Priest et le centre hospitalier Le Vinatier, situé à Bron, utilise la chambre funéraire de Vénissieux, après avoir sollicité différents opérateurs situés à Bron ou ailleurs. Le dossier révèle que le centre Le Vinatier utilise aussi la chambre funéraire de Bron lorsque les raisons administratives mentionnées précédemment ne permettent pas le transfert du corps à Vénissieux. Compte tenu de l'analyse suivie ci-après par le Conseil, il n'est cependant pas nécessaire de se prononcer sur la dimension géographique du ou des marchés sur lesquels interviennent les prestations des funérariums de Vénissieux et Saint-Priest au profit des établissements de soins ou de séjour.
153. S'agissant ensuite des marchés des obsèques des personnes transportées dans une chambre funéraire à l'initiative des établissements de santé ou de soins, l'offre peut être plus ou moins étendue sur le plan géographique selon les lieux de domicile des défunts et il n'est pas exclu qu'une même chambre funéraire " desserve " des marchés géographiques distincts, ainsi que l'a illustré la situation ayant donné lieu à la décision n° 04-D-70, précitée, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes funèbres de la région de Saint-Germain-en-Laye, confirmée par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 13 septembre 2005, n° 2005-03709.
154. Néanmoins, en l'espèce, les conditions de confrontation de l'offre et de la demande sont suffisamment distinguées selon la chambre funéraire pour qu'en tout état de cause les marchés pertinents soient distingués selon que les prestations d'obsèques sont apportées aux personnes décédées dont le corps a été transporté à la chambre funéraire de la ville de Lyon ou bien aux personnes dont le corps a été transporté à celles de Vénissieux ou Saint-Priest.
155. Pour ce qui est de la chambre funéraire de Lyon, dès lors que 70 % des obsèques des personnes qui y ont été transportées sont organisés par la régie municipale, il y a lieu de considérer que celle-ci détient une position dominante, et ce, qu'il existe un marché géographique limité à la ville de Lyon, à côté d'un ou plusieurs autres marchés géographiques, ou un seul marché géographique de l'agglomération, " desservi " par la chambre funéraire.
156. Pour ce qui est des chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest, il est également clair qu'en organisant 90 % des convois à partir de celle de Vénissieux et également une proportion très importante à partir de celle de Saint-Priest, la société OGF-PFG détient une position dominante en ce qui concerne les obsèques des personnes transportées dans ces chambres funéraires, quels que soient, là aussi, l'étendue et le nombre des marchés géographiques " desservis " par ces chambres funéraires.
157. Il résulte de ce qui précède que tant la régie municipale que la société OGF-PFG disposent de positions dominantes sur l'un ou l'autre des marchés concernés par la présente affaire.
C. SUR LES PRATIQUES ALLÉGUÉES
158. La discussion portera en premier lieu sur l'ensemble des griefs formulés à l'encontre de la régie municipale des pompes funèbres, en deuxième lieu sur des griefs formulés à l'encontre d'OGF-PFG et en troisième lieu sur le grief d'entente entre la régie municipale et OGF-PFG tendant à une répartition entre elles des marchés de Lyon et de son agglomération.
159. Il convient de rappeler à titre liminaire qu'une entreprise en position dominante sur un marché peut se voir reprocher un abus dont les effets affectent d'autres marchés, dès lors que son comportement a un lien de causalité avec sa position dominante et que le marché sur lequel celle-ci est détenue et ceux sur lesquels l'abus déploie ses effets sont suffisamment connexes (voir notamment les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes du 6 mars 1974 Commercial Solvents/Commission, 6-73 et 7-73, Rec. p. 223, point 22 et du 3 octobre 1985, CBEM, 311/84, Rec. p. 3261, point 26, l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 17 février 2003 British Airways/Commission, T-219-99, Rec. p. II-5917, points 127, 130 et 132, et l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 22 février 2005, JC Decaux, rendu sur le recours contre la décision du Conseil de la concurrence n° 04-D-32, BOCCRF 2005-06). En l'occurrence les griefs d'abus de position dominante notifiés à la régie municipale de la ville de Lyon et à OGF-PFG visent des effets tant sur le marché général des prestations funéraires proposées aux familles que sur les marchés particuliers des obsèques des personnes dont le corps a été transporté à la chambre funéraire de Lyon ou à celles de Vénissieux et de Saint-Priest à la demande des établissements de soins ou de séjour. Des positions dominantes des opérateurs de pompes funèbres précités ont été identifiées soit sur ces derniers marchés, soit sur ceux répondant à la demande des établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de chambre mortuaire de services de transfert en chambre funéraire. Ces différents marchés ont tous un lien de connexité étroit, soit parce qu'ils sont en amont ou en aval les uns des autres, soit parce qu'ils concernent des prestations semblables, à défaut d'être complètement substituables.
1. SUR LES PRATIQUES REPROCHÉES À LA RÉGIE MUNICIPALE ET À DES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS DE LYON
a) Sur les accords avec plusieurs établissements de soins (griefs n ° 1 et 2)
160. En substance, il a été fait grief à la régie municipale d'avoir conclu des conventions ou des accords informels avec l'hôpital Saint Joseph-Saint Luc ainsi qu'avec la clinique Eugène André et la clinique de la Sauvegarde visant à favoriser le transfert systématique des personnes décédées dans ces établissements à la chambre funéraire de la ville de Lyon. Cette pratique aurait eu pour objet et pour effet d'inciter les établissements de soins à dissuader les familles de choisir tout autre opérateur funéraire que la régie municipale et aurait emprunté des modalités telles que le non-respect du délai réglementaire de conservation des corps dans l'établissement lorsque la famille ne peut être contactée ou l'incitation financière à ce que celle-ci laisse l'établissement faire transférer le corps à cette chambre funéraire. Ces pratiques traduiraient aussi bien des ententes anticoncurrentielles entre la régie et les établissements de soins concernés, contraires à l'article L. 420-1 du Code de commerce, qu'un abus de position dominante de la régie contraire à l'article L. 420-2 de ce Code.
161. Toutefois, il y a lieu de relever tout d'abord qu'il est légitime que les établissements de soins ou de séjour ne disposant pas de chambre mortuaire s'assurent qu'une chambre funéraire sera en mesure d'accueillir les corps des personnes décédées en leur sein lorsque les familles n'auront pas elles-mêmes fait transporter les défunts en temps utile. Bien entendu, les établissements de soins ou de séjour sont dans ce contexte soumis à la réglementation en la matière, notamment en ce qui concerne le respect de différents délais. La signature de conventions écrites ou la conclusion d'accords informels entre de tels établissements et un ou plusieurs gestionnaires de chambres funéraires ne sont donc pas critiquables dans leur principe au regard des règles de concurrence.
162. Ensuite, le seul document figurant au dossier qui peut être considéré comme une convention écrite entre la régie municipale et un établissement de soins est le " règlement d'admission " envoyé au Centre hospitalier Saint Joseph-Saint Luc (paragraphes 47 et suiv.). Ce document ne contient en lui-même aucune disposition anticoncurrentielle, ni d'ailleurs aucune disposition contraire à la réglementation. Il expose les conditions d'accueil des corps au centre funéraire municipal, que le transport soit demandé par les familles ou par le directeur de l'établissement. Il présente la nature et le prix des prestations et rappelle que si le transfert du corps vers le funérarium a été demandé par la famille, celle-ci assumera tous les frais, tandis que si ce transfert a été demandé par l'établissement au sein duquel la personne est décédée, ce dernier prendra en charge au minimum les frais de transport et de première journée de dépôt. Il indique aussi que les frais d'obsèques d'une personne dont le corps n'est pas réclamé seront assumés par l'établissement où elle est décédée. Aucun terme de ce " règlement d'admission " n'indique qu'il obligeait le Centre hospitalier à refuser le transfert d'un corps demandé par la famille vers une autre chambre funéraire ou qu'il conduisait à réduire le délai laissé aux familles pour faire le choix d'une autre chambre funéraire. Si l'hôpital Saint Joseph-Saint Luc indique dans le document communiqué aux familles avoir conclu une convention avec le funérarium de la ville de Lyon, il précise mettre à leur disposition une liste non exhaustive des services des pompes funèbres et être prêt à les aider à trouver les coordonnées d'un autre service de pompes funèbres. La mention dans ce même document de l'obligation pour l'établissement de transférer les corps des défunts au funérarium les nuits, dimanches et jours fériés peut s'expliquer par l'impossibilité administrative de faire transporter le corps d'un défunt hors de la commune avant d'avoir déclaré le décès à la mairie.
163. Les relations entre le funérarium de la ville de Lyon et la clinique Eugène André ainsi que la clinique de la Sauvegarde n'ont, comme indiqué ci-dessus (paragraphes 55 et suiv.), pas fait l'objet de conventions écrites présentes au dossier. Seules figurent les notes, internes aux établissements de soins, de procédure de gestion des décès. Même si ces notes contiennent certaines dispositions qui pourraient être critiquables au regard d'un souci de neutralité vis à vis des différents opérateurs de pompes funèbres ou gestionnaires de chambres funéraires ou au regard de la réglementation, aucun élément ne permet de démontrer que ces dispositions sont le résultat d'une concertation avec la régie municipale ou qu'elles auraient été imposées par celle-ci. En particulier, s'il est vrai que le " passage par le funérarium municipal " est présenté comme la solution la plus simple et la plus économique pour les familles qui, lorsqu'elles veulent faire un autre choix, sont soumises à des démarches administratives et à des frais supplémentaires, l'incitation exercée peut résulter de l'intérêt propre des hôpitaux à faire transporter hors de leurs locaux dès que possible les personnes décédées en leurs murs, ce qui parfois les conduit à méconnaître les délais imposés par la réglementation. Il convient néanmoins de relever que dans sa procédure interne, la clinique mutualiste Eugène André a fait état d'un " logigramme gestion des décès " qui envisage la possibilité pour une famille de choisir une destination particulière au défunt (cote 2258-2259). De même dans sa notice interne, la clinique de la Sauvegarde n'écarte pas la possibilité pour les familles de rapatrier le corps des défunts sans passer par la chambre funéraire de Lyon (paragraphe 69).
164. Enfin, aucun élément du dossier ne permet non plus de démontrer que les éventuels comportements peu respectueux de la neutralité vis à vis des différents opérateurs de pompes funèbres qu'a pu adopter le personnel de tel ou tel établissement de soins résultent d'accords passés entre ces établissements et la régie municipale ou de manœuvres unilatérales de celle-ci.
165. Dans ces conditions, les griefs n° 1 et n° 2 liés à des accords conclus entre la régie municipale des pompes funèbres et certains établissements de soins de Lyon ne sont pas établis.
b) Sur l'organisation des services funéraires de la ville de Lyon (grief n° 3)
166. La pratique décisionnelle constante du Conseil de la concurrence, confirmée par la Cour d'appel de Paris, concernant les situations où un même opérateur dominant gère une chambre funéraire et propose d'autres services de pompes funèbres a été résumée dans la décision n° 04-D-70, précitée, de la façon qui suit : " Comme l'a relevé le Conseil de la concurrence, dans la décision n° 03-D-15 du 17 mars 2003 : " La possession par un opérateur funéraire d'une chambre funéraire, située à proximité immédiate du magasin où sont vendues les autres prestations funéraires, constitue un fort avantage commercial et concurrentiel. En effet, il est constaté qu'il est de plus en plus fréquent que les corps des personnes décédées soient transférés par les familles en chambre funéraire, où celles-ci peuvent recevoir des conseils et des préconisations pour l'organisation des funérailles, et, ainsi, déterminer leur choix, nécessairement rapide. Le possesseur de chambre funéraire bénéficie donc d'un contact privilégié avec les familles auxquelles il peut proposer une offre globale et cette situation est peu propice à favoriser le jeu de la concurrence surtout lorsqu'il n'existe qu'une seule chambre funéraire dans la zone géographique concernée ".
Le Conseil de la concurrence sanctionne les pratiques susceptibles de créer la confusion dans l'esprit des familles des défunts et pouvant les inciter à recourir aux services de la même société, pour l'ensemble des prestations funéraires.
Dans la décision n° 03-D-15, le Conseil a condamné la société Goupil pour abus de sa position dominante en raison de l'absence de distinction pour cette dernière entre son activité de gestionnaire de la chambre funéraire et ses autres activités de service extérieur. Concernant l'agencement des locaux, il a été constaté que : " (...) bien que possédant des entrées distinctes, les locaux où s'exercent les activités de funérarium et ceux où sont offertes les autres prestations funéraires sont reliés par deux portes communicantes, situées au niveau du hall et de l'accueil du funérarium et permettant d'accéder directement dans le magasin ".
L'enquête avait également permis d'établir, que le numéro d'appel indiqué au public dans les pages jaunes et le minitel était commun aux deux magasins de la société Goupil et à la chambre funéraire dont elle était la gestionnaire. " (paragraphes 95 à 98 de cette décision).
167. A fortiori, une confusion entretenue entre l'exercice du service public administratif d'état civil, de police ou de gestion des cimetières dont l'organisation incombe à l'autorité communale et les activités commerciales d'un opérateur de pompes funèbres dominant peut fausser la concurrence et tomber sous le coup de l'interdiction édictée à l'article L. 420-2 du Code de commerce.
168. En l'espèce, il a été fait grief à la régie municipale d'avoir abusé de sa position dominante : d'une part, en empêchant la nuit et les jours fériés l'accès à la chambre funéraire des opérateurs concurrents d'elle-même ou de son transporteur dans les conditions indiquées aux paragraphes 104 à 106 ; d'autre part en favorisant le choix des familles pour ses propres services commerciaux en s'abstenant de distinguer, dans l'information donnée au public ou dans l'organisation externe et interne des locaux du centre funéraire municipal, ses activités de gestionnaire du funérarium, ses activités commerciales de prestataire de pompes funèbres et le service public administratif funéraire ainsi qu'il résulterait des éléments présentés aux paragraphes 107 à 123.
169. S'agissant de l'accès au funérarium hors des heures d'ouverture, qui supposait pour les entreprises de pompes funèbres concurrentes la possession d'une clé, les Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise, qui ont répondu pour l'ancienne régie municipale, ont indiqué que cette clé était confiée, pour des raisons de sécurité des locaux, à la société CGPF, titulaire du marché passé pour le transport des défunts avant mise en bière vers le funérarium. Elles soulignent que cette clé servait uniquement à ouvrir le funérarium la nuit à un moment où le nombre d'admissions était très limité. Selon elles, les opérateurs concurrents pouvaient demander cette clé à la société CGPF. Elles indiquent par ailleurs que depuis 2004 la clé a été reprise par la régie, celle-ci assurant l'accueil au funérarium 24 heures sur 24.
170. Sur cet aspect, le fait d'avoir, entre 1992 et 2004, confié la clé du funérarium seulement à la CGPF et dans un premier temps aussi à l'entreprise Rozier, a rendu impossible ou difficile, lorsque l'accueil n'était pas assuré sur place, l'accès d'entreprises concurrentes à la seule chambre funéraire utilisable la nuit et aux autres moments où, pour des raisons administratives, un corps ne peut pas être transféré dans une autre commune. Une telle pratique d'exclusion pourrait être considérée comme abusive, sauf à ce que des raisons sérieuses la justifient. Toutefois, en l'espèce les entreprises concurrentes n'ont évoqué des difficultés qu'en ce qui concerne la nuit et, dès lors, l'effet de cette pratique n'a vraisemblablement pas été sensible. Faute d'éléments plus précis au dossier, le Conseil ne retient pas cette composante du grief notifié.
171. S'agissant des autres aspects du grief, les Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise estiment que la régie n'a créé aucune confusion entre ses différentes activités dans l'esprit des familles. D'abord il serait rare que les familles se rendent elles-mêmes au service administratif, les opérateurs se chargeant eux-mêmes des formalités dans la majorité des cas. Ensuite la chambre funéraire, située au rez-de-chaussée des locaux de l'avenue Berthelot, serait matériellement séparée des autres services situés au premier étage et serait dépourvue de toute information de nature à diriger les familles vers les services commerciaux de la régie. Par ailleurs, il serait normal que la régie ait fait connaître dans l'annuaire téléphonique l'ensemble des prestations qu'elle proposait, y compris celles ayant trait à la chambre funéraire et au crématorium. La régie municipale aurait veillé à distinguer les numéros de téléphone du funérarium, des activités administratives et des activités commerciales, comme l'attesteraient les annuaires téléphoniques de 2004 et 2005. Les Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise soutiennent enfin, qu'alors que la chambre funéraire recevait en moyenne 2000 familles par an, aucun témoignage crédible d'une famille n'a été apporté, démontrant l'absence de neutralité dans la gestion du funérarium.
172. Cependant, ces arguments n'emportent pas la conviction.
173. Il résulte des constatations faites par l'enquêteur (paragraphes 111 et suiv.) que la chambre funéraire ne dispose pas d'une entrée séparée, qu'elle communique avec les services commerciaux de la régie et qu'à l'étage du bâtiment les services commerciaux et les services administratifs ne font pas l'objet d'une distinction claire. L'implantation des services commerciaux et administratifs accessibles par un escalier situé dans la chambre funéraire et une porte de communication située à son sommet, la présence commune à cet étage des différents services conduisent nécessairement les familles venues visiter leurs défunts à la chambre funéraire et accomplir les démarches nécessaires à l'inhumation à passer dans les services commerciaux de la régie municipale.
174. La présentation des services à l'entrée de l'avenue Berthelot ne sépare pas les activités réglementaires des activités de pompes funèbres qui figurent ensemble sur les panneaux de signalisation, ainsi qu'il est décrit au paragraphe 113. Il en est de même dans la cour où d'anciennes signalisations qui subsistent, décrites au paragraphe 114, présentent sur un même panneau d'accueil les services administratifs, le service des concessions et les funérailles.
175. A cet égard, deux sociétés concurrentes, les sociétés Rozier et Pinault, qui ont utilisé les services du centre funéraire municipal ont déclaré sans être démenties que des familles venues à la chambre funéraire étaient invitées à monter au premier étage pour faire les démarches administratives où des conseillers funéraires de la régie étaient présents pour les accueillir.
176. À l'occasion de la création des pompes funèbres intercommunales, la signalisation a été modifiée en 2007. Toutefois cet état des lieux est postérieur à la période visée par le grief (1997-2003) et ne peut être examiné par le Conseil.
177. Par ailleurs, dans les notices de présentation de ses activités distribuées dans les hôpitaux ou mises autrement à la disposition du public (voir paragraphes 65 et 108), la ville de Lyon n'a pris aucune précaution pour distinguer les différentes catégories de services liés aux opérations funéraires selon leur nature.
178. Enfin, si les annuaires téléphoniques pour 2004 et 2005 présentent des numéros de téléphone différents pour la chambre funéraire, les services administratifs et les activités commerciales de la régie, il n'en reste pas moins que l'existence d'un seul numéro pour toutes ces activités est démontrée entre 1997 et 2003, ainsi qu'exposé aux paragraphes 119 à 123. Pendant cette période, le numéro de téléphone spécifique de la chambre funéraire n'était diffusé ni par la ville de Lyon ni par la régie, le seul numéro d'appel diffusé couvrant l'ensemble des services de l'avenue Berthelot. Cette confusion dans l'information donnée au public a rendu plus difficile le choix d'un opérateur concurrent pour les familles venues au centre funéraire municipal ou cherchant une information depuis leur domicile.
179. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la régie municipale de la ville de Lyon a abusé de sa position dominante en mettant en place une information et un accueil des familles ainsi qu'une organisation des locaux qui ne permettaient pas de distinguer clairement les activités de la chambre funéraire, les autres activités de pompes funèbres et les services administratifs, s'attribuant ainsi un avantage concurrentiel indu sur les autres opérateurs de pompes funèbres. Le grief n° 3 est par conséquent établi ; la régie municipale de la ville de Lyon a méconnu les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
2. SUR LES PRATIQUES REPROCHÉES À LA SOCIÉTÉ OGF-PFG ET À DES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS DE LA BANLIEUE DE LYON
a) Sur les accords avec plusieurs établissements de soins (griefs n° 4, 5 et 8)
180. De la même façon que pour la régie municipale et les établissements de soins de Lyon, il a été fait grief à OGF-PFG d'avoir conclu des conventions ou des accords informels avec la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand Large, la clinique de La Roseraie, la clinique des Minguettes, et le centre hospitalier Le Vinatier visant à favoriser le transfert systématique des personnes décédées dans ces établissements aux chambres funéraires de Vénissieux ou de Saint-Priest. Il est à cet égard tout d'abord renvoyé aux considérations exprimées aux paragraphes 160 et 161.
181. S'agissant des conventions écrites figurant au dossier, force est de constater que la convention de 2000 mentionnée au paragraphe 68, conclue avec la polyclinique Pasteur de Saint-Priest, ne comporte aucune stipulation anticoncurrentielle et se réfère à la réglementation. Il en est de même de la convention de 2003 mentionnée au paragraphe 74 conclue avec la clinique du Grand Large de Décines.
182. Les conventions de 1992 mentionnées aux paragraphes 76 et 82, concernant la clinique de la Roseraie et la clinique des Minguettes, situées à Vénissieux, posent en revanche un problème dans la mesure, notamment, où elles méconnaissent explicitement le délai de 10 heures après le décès imposé par la réglementation pendant lequel l'établissement de soins doit s'efforcer de joindre la famille et ne peut d'autorité faire transférer le corps en chambre funéraire. Toutefois, ces conventions ont été conclues par la SRT et non par OGF-PFG.
183. A cet égard, à l'époque de la signature des deux conventions, diverses sociétés du groupe OGF-PFG détenaient une participation minoritaire dans diverses sociétés du groupe Hygeco parmi lesquelles figurait la SRT dont 31 % du capital était détenu par OGF-PFG. Selon un protocole d'accord signé le 5 juin 1997, les sociétés du groupe OGF-PFG ont cédé des actions de sociétés du groupe Hygeco qu'elles détenaient et en particulier la société OGF a cédé l'ensemble de ses participations dans SRT à l'actionnaire majoritaire de celle-ci, la société Hygeco. Si OGF-PFG et la SRT ont entretenu d'importantes relations commerciales et si, à partir de la fin 1997, la CGPF, la filiale d'OGF-PFG spécialisée dans le transport des corps, s'est imposée comme interlocuteur naturel des deux cliniques à la place de la SRT sans que les établissements de santé qui avaient conclu des conventions avec celle-ci estiment devoir les dénoncer explicitement pour conclure de nouvelles conventions écrites avec la CGPF, ces éléments sont insuffisants pour établir qu'OGF-PFG contrôlait la politique commerciale de la SRT en 1992 et qu'au cours des années 1999 à 2003, visées par les griefs, OGF-PFG était venue aux droits de la SRT pour l'application des conventions signées par celle-ci ou que ces conventions aient été encore opposables aux établissements de soins concernés. Dès lors, pour critiquables qu'elles soient, ces conventions ne peuvent permettre d'établir une infraction aux articles L. 420-1 ou L. 420-2 du Code de commerce pour la période 1999-2003 dans le chef d'OGF-PFG ou des établissements de soins concernés, les éléments du dossier ne permettant pas en particulier pour ces derniers de démontrer que les conventions s'appliquaient encore pendant ladite période.
184. Aucune convention écrite ne figure au dossier concernant le centre hospitalier Le Vinatier de Bron, qui a pourtant confié à OGF-PFG le transfert des corps des personnes décédées en son sein après appel d'offres, ainsi qu'il est exposé aux paragraphes 91 et 92. Néanmoins, le Conseil peut prendre acte des précisions apportées par la société OGF-PFG, selon laquelle, dans l'offre adressée au centre hospitalier le Vinatier, elle mentionnait la réglementation et en particulier les dispositions relatives au délai de dix heures sans avoir pu joindre la famille qui doit être respecté avant que l'établissement demande à son initiative le transfert d'un corps en chambre funéraire.
185. S'agissant des documents internes aux différents établissements de soins, le compte rendu des réunions qui ont eu lieu en janvier et février 1996 entre les responsables d'OGF-PFG et la polyclinique Pasteur, cité paragraphe 71, relate clairement l'existence de relations privilégiées permettant à l'opérateur de demander à la clinique de favoriser ses services à l'égard des familles en deuil, notamment en signant les demandes d'admission en chambre funéraire sans les prévenir. Pour convaincre les responsables de la clinique, le représentant d'OGF-PFG propose de ne facturer aucun frais à la clinique si les familles confient les obsèques aux PFG de Saint-Priest.
186. Toutefois, cet arrangement qui devait faire l'objet d'une période d'essai n'a pu être mis en œuvre car la chambre funéraire de Saint-Priest destinée à recevoir les corps des défunts provenant de la polyclinique a été fermée fin 1996 jusqu'en mars 1998 et rien ne permet de démontrer que sur la période de 2000 à 2003, visée par les griefs, cet arrangement avait encore cours. En particulier, fin 2000 la convention analysée au paragraphe 181 a été conclue et la fiche de procédure interne figurant au dossier, présentée paragraphe 73, a un caractère neutre, même s'il en ressort que le choix par la famille d'un transfert du corps au domicile ou à un funérarium situé en dehors de la commune de Saint Priest implique des contraintes pratiques ou administratives.
187. La note de procédure interne de la clinique du Grand Large, tout comme la note d'information de cet établissement aux familles, citées paragraphes 74 et 75, présentent un caractère fortement incitatif pour les familles à laisser transporter les défunts au funérarium d'OGF-PFG, puisque la gratuité de cette solution y est mise en avant, même si le libre choix des familles est souligné. Néanmoins, aucun élément du dossier ne permet d'établir que c'est là le résultat d'une concertation avec OGF-PFG ou d'une exigence de celle-ci, et non d'une initiative de la clinique qui y voit là le moyen d'assurer plus rapidement l'évacuation des corps des personnes décédées en son sein.
188. Les notes de procédure interne relatives aux décès du centre hospitalier Le Vinatier présentées paragraphes 93 à 96 imposent une décision des familles dans les deux heures du décès si elles souhaitent que le corps soit transféré dans une autre chambre que celle de Vénissieux. En particulier, la procédure de transfert des corps précise : " Quel que soit le jour du décès et quelle que soit l'heure, dans tous les cas appeler les PFG. "..." les pompes funèbres générales : ... transportent le corps vers une autre chambre funéraire si la famille le souhaite, à condition que le transport ait lieu impérativement dans les 2 heures après le décès. Si le transport a lieu plus de 2 heures après le décès, il faut envisager un 2ème transport de corps sans mise en bière. Dans ce cas, les Pompes funèbres générales s'occupent des démarches administratives auprès de la mairie et tous les frais incombent à la famille. ".
189. La même constatation peut être faite au vu des éléments de l'enquête concernant les modalités suivies par les cliniques de la Roseraie et des Minguettes. Les familles ne disposent pas du délai raisonnable prévu par la réglementation pour effectuer leur choix puisque le transfert des corps est imposé au plus tard dans les deux heures.
190. Les procédures internes suivies par ces trois établissements de santé ne respectent donc pas le délai de dix heures laissé par la réglementation pour que les familles puissent choisir le lieu du transfert des corps des défunts. Elles expriment la volonté de ces établissements d'apporter une solution rapide au problème posé par le décès de personnes hospitalisées mais ne démontrent pas non plus qu'OGF-PFG ait négocié ce dispositif ou l'ait imposé.
191. Aucun élément du dossier ne fait par ailleurs apparaître qu'OGF-PFG a exigé que les hôpitaux qui décidaient le transfert des défunts prennent systématiquement en charge les frais de transport et d'admission à la chambre funéraire et insistent auprès des familles sur le coût qu'elles auraient à supporter dans le cas où elles décideraient elles-mêmes de ce transfert.
192. Le Conseil, rappelle que, dans sa décision 04-D-70 précitée, il a souligné que " le fait que la prestation soit à la charge de la famille, lorsque cette dernière demande à ce que le corps soit transféré dans un autre lieu, résulte des dispositions des articles R. 2223-76 et R. 2223-79 du Code général des collectivités territoriales et ne saurait être analysé comme une pratique visant à permettre à la société OGF de capter la clientèle provenant de cet établissement de soins ".
193. Les témoignages des familles cités aux paragraphes 81 et 102 sont certes révélateurs des difficultés rencontrées par celles-ci pour décider du choix de la chambre funéraire et organiser le transport des corps vers une autre chambre funéraire que celles prévues par les établissements de soins, mais ces difficultés ne peuvent, au vu des éléments du dossier, être imputées à OGF-PFG qui n'avait pas de contact direct avec elles à l'hôpital.
194. Enfin, aucun élément du dossier ne permet non plus de démontrer que les éventuels comportements peu respectueux de la neutralité vis-à-vis des différents opérateurs de pompes funèbres qu'a pu adopter le personnel de tel ou tel établissement de soins résultent d'accords passés entre ces établissements et OGF-PFG ou de manœuvres unilatérales de celle-ci.
195. Dans ces conditions, les griefs n° 4, 5 et 8 liés à des accords conclus entre OGF-PFG et certains établissements de soins de la banlieue de Lyon ne sont pas établis.
b) Sur l'organisation d'OGF-PFG à Vénissieux et Saint-Priest (griefs n° 6 et 7)
196. Le Conseil se réfère à titre liminaire aux considérations rappelées au paragraphe 166.
197. En l'espèce, il a été fait grief à OGF-PFG d'avoir, d'une part, retenu une présentation et un accueil dans ses locaux et d'autre part, donné des informations sur ses chambres funéraires de Vénissieux et Saint-Priest dans l'annuaire téléphonique, susceptibles de créer la confusion entre son activité de gestionnaire de ces chambres funéraires et son activité de prestataire de service de funérailles, ainsi qu'il résulterait des éléments présentés aux paragraphes 124 à 132.
198. OGF-PFG a produit des photographies montrant qu'il existe, pour chacune des chambres funéraires concernées une entrée distincte du local commercial et qu'il n'apparaît aucune confusion liée à la signalétique ou aux façades des bâtiments. Elle certifie qu'à l'intérieur des locaux, une information neutre est fournie aux familles rappelant qu'elles sont libres de choisir leur opérateur de pompes funèbres. S'agissant plus particulièrement de la chambre funéraire de Vénissieux, la société conteste que le digicode permettant d'accéder à la chambre funéraire entraîne un risque de confusion. La mention sur le panneau au-dessus du digicode : " pour obtenir le Code d'accès en cas d'absence, merci de prendre contact avec l'entreprise de pompes funèbres de votre choix. Vous pouvez aussi joindre la maison funéraire en composant le 04 72 90 95 22 " montrerait que les services commerciaux d'OGF-PFG ne sont pas un passage obligé avant la chambre funéraire. Elle observe aussi que l'enquêteur n'établit pas que, lors de sa visite, il n'a pu obtenir le Code d'accès en s'adressant à un autre opérateur ou en téléphonant au numéro indiqué sur le panneau.
199. Compte tenu de ce qui précède, aucune pratique anticoncurrentielle ne peut être retenue à cet égard. En particulier en cas d'utilisation d'un digicode comme mode d'accès à la chambre funéraire il faut qu'en cas d'absence du gestionnaire, le Code puisse être accessible facilement. Le témoignage de l'enquêteur présenté au paragraphe 130 et celui d'une famille présenté au paragraphe 131 pourraient être retenus s'il était effectivement démontré que ces visiteurs ne pouvaient obtenir le Code qu'en allant le chercher au bureau des PFG. Or il n'est pas discutable que le Code d'accès pouvait être obtenu auprès de l'opérateur choisi par la famille. En l'absence de témoignage contraire ou d'autres déclarations concordantes des familles, ce seul élément ne peut être retenu à la charge d'OGF.
200. Concernant les annonces téléphoniques, OGF-PFG relève que le Conseil n'a jamais considéré qu'à elle seule la présentation des encarts dans les annuaires était suffisante pour établir un risque de confusion dans l'esprit des familles et se réfère à la décision n° 04-D-21 dans laquelle le Conseil a estimé que la présentation pour les activités de l'opérateur de pompes funèbres en cause " d'un numéro d'appel téléphonique unique n'apparaît pas, à lui seul, dans les circonstances de l'espèce, de nature à entraîner un risque de confusion dans l'esprit des personnes désireuses d'organiser les obsèques d'un de leurs proches ... "
201. OGF-PFG observe que la critique porte, non sur une identité de numéros, mais sur la présentation ensemble de ses différentes activités. Elle estime que l'obligation de neutralité ne peut aller jusqu'à l'empêcher de faire état de la totalité des services qu'elle assure, y compris ceux des chambres funéraires.
202. Elle fait remarquer que si la publicité contenue dans les pages jaunes en 2002 présente l'ensemble de ses prestations, la chambre funéraire est indiquée dans les lignes de l'annuaire avec une adresse et un numéro de téléphone distincts, d'autre part, qu'elle n'a pas la maîtrise de la présentation de ses annonces, l'éditeur des annuaires lui ayant indiqué en septembre 2007 qu'il lui était impossible d'isoler dans l'annuaire un classement sous la seule rubrique de la chambre funéraire.
203. Il y a lieu d'admettre l'argumentation d'OGF-PFG en observant que les autres opérateurs présentent aussi ensemble la prestation relative au passage en chambre funéraire et les autres prestations proposées aux familles et qu'il n'a pas été démontré par ailleurs qu'OGF pouvait facilement obtenir de l'éditeur de l'annuaire qu'il sépare complètement l'annonce de la chambre funéraire des autres activités de l'entreprise.
204. En conséquence, les griefs n° 6 et 7 liés à l'organisation d'OGF-PFG à Vénissieux et Saint-Priest ne sont pas établis.
3. SUR L'ENTENTE POUR LE PARTAGE DU MARCHÉ DE L'ORGANISATION DES OBSÈQUES À LYON ET DANS SON AGGLOMÉRATION (GRIEF N ° 9)
205. Les éléments, analysés aux paragraphes 23 et suivants et 35 et suivants, relatifs à la possession par la régie municipale et OGF-PFG de la majeure partie des chambres funéraires au sein de la Courly, à la stabilité des parts de marché de ces opérateurs, au fait qu'ils ne se font pas concurrence dans la zone géographique où chacun est plus particulièrement en position dominante sur le marché de l'organisation des obsèques, à la mise en œuvre d'une collaboration privilégiée pour l'utilisation du funérarium municipal ou à l'attribution des marchés de la ville de Lyon et de ses hôpitaux à CGPF filiale du groupe OGF, ont été avancés comme des indices venant à l'appui du grief n° 9.
206. A cet égard, en ce qui concerne l'installation d'une nouvelle chambre funéraire à Lyon, OGF-PFG souligne qu'elle a effectué des démarches en ce sens mais qu'elle se serait heurtée à la difficulté d'obtenir un emplacement respectant les contraintes imposées par la ville. Cependant, elle a pu, comme les autres opérateurs, utiliser le funérarium municipal et surtout se servir de ses chambres funéraires sur la Courly pour organiser les obsèques des personnes décédées à Lyon. Elle a, à ce titre, une part de marché située entre 24 et 27 %. De son côté, la régie municipale, qui ne pouvait créer une chambre funéraire en dehors de la ville de Lyon, a pu organiser les obsèques de personnes décédées à Lyon mais domiciliées ailleurs comme des personnes décédées en dehors de Lyon mais dont la mise en bière ou l'inhumation avait lieu à Lyon. En ce qui concerne le transport des corps des défunts les Pompes funèbres intercommunales de l'agglomération lyonnaise, pour l'ancienne régie municipale, ont fait valoir que tous les trois ans le marché de sous-traitance pour le transport des corps vers le funérarium municipal a fait l'objet d'une procédure de mise en concurrence au terme de laquelle il a été attribué dans des conditions régulières à l'entreprise la mieux et moins-disante qui s'est trouvée être la CGPF.
207. Ces observations présentées par les opérateurs n'ont pas été contredites au cours de l'instruction. De plus, le tableau produit au paragraphe 36 montre qu'entre 1998 et 2003 les parts de marché sur la ville de Lyon ne restent pas figées et évoluent annuellement dans des fourchettes de 4 points pour la régie et de 3 points pour OGF-PFG comme le souligne cette dernière. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet de dire que les concurrents comme la société Roc'Eclerc n'ont pas pu développer leur activité.
208. En conséquence, aucune preuve tangible, ni aucun faisceau d'indices suffisamment consistant n'établit que la régie municipale des pompes funèbres et la société PFG ont mis en œuvre une entente de répartition des marchés à Lyon et dans son agglomération. Le grief n° 9 n'est donc pas établi.
209. Au terme de l'examen de l'ensemble des griefs, aucune pratique anticoncurrentielle n'est donc retenue à l'encontre de la société OGF, ni des établissements de soins mis en cause. Mais il est établi un abus de position dominante de la régie municipale dans la gestion de la chambre funéraire et la diffusion d'informations aux familles.
D. SUR L'IMPUTABILITÉ DE LA PRATIQUE DE LA RÉGIE MUNICIPALE DE LA VILLE DE LYON
210. Le Conseil constate que la régie municipale des pompes funèbres était précédemment une structure administrative, non dotée de la personnalité morale, de la ville de Lyon. En application de la jurisprudence constante en la matière, les pratiques de la régie sont donc toujours imputables à la ville de Lyon.
211. En effet, selon cette jurisprudence, rappelée en détail dans le rapport du Conseil de la concurrence pour 2001 (p. 126 et s.), tant que la personne morale responsable de l'exploitation de l'entreprise qui a mis en œuvre des pratiques anticoncurrentielles subsiste juridiquement, c'est elle qui assume la responsabilité de ces pratiques, même si les éléments matériels et humains ayant concouru à ces pratiques ont été cédés à une tierce personne. En revanche, lorsque la personne morale responsable de l'exploitation de l'entreprise a juridiquement disparu, les pratiques doivent être imputées à la personne morale à laquelle l'entreprise a juridiquement été transmise c'est-à-dire à la personne morale qui a reçu les droits et obligations de la personne auteur des pratiques. Enfin, si aucune autre personne n'a reçu transmission de ces droits et obligations, les pratiques sont imputées à l'entreprise qui assure, en fait, sa continuité économique et fonctionnelle.
212. Les articles du Code général des collectivités territoriales (L. 5211-17 et L. 5212-18) mentionnés par la ville de Lyon pour soutenir que c'est le nouveau syndicat intercommunal qui devrait assumer les conséquences du comportement de l'ancienne régie ne peuvent conduire à remettre en cause en l'espèce cette jurisprudence, car les dispositions invoquées renvoient à l'article L. 1321-2, aux deux premiers alinéas de l'article L. 1321-2 et aux articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5 du même Code qui portent uniquement sur les conditions de transfert de biens meubles et immeubles en cas de transfert de compétence et nullement sur l'imputabilité de comportements passés de la collectivité cédante, en particulier de comportements anticoncurrentiels. De même, les arrêts du Conseil d'Etat invoqués ne portent pas davantage sur cette question. En particulier, il ressort seulement de l'arrêt du 10 octobre 2007, communauté urbaine de Lyon (n° 305130) qu'une fois une compétence transférée entre collectivités, c'est seulement la collectivité bénéficiaire qui peut exercer ladite compétence, même si pour ce faire elle utilise des biens ayant antérieurement appartenu à la collectivité cédante. Les conséquences de l'exercice passé de la compétence par la collectivité cédante ne sont pas concernées.
E. SUR LA DÉTERMINATION DE LA SANCTION
213. La ville de Lyon est responsable d'une pratique mise en œuvre entre 1997 et 2003. Il s'agit d'une infraction continue qui a débuté avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques et qui s'est poursuivie après cette date. La saisine du 26 juillet 2002 est postérieure à cette entrée en vigueur. Il en résulte que les dispositions du livre IV du Code de commerce applicables sont celles issues de la loi du 15 mai 2001.
214. Le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 15 mai 2001, dispose : " Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération des pratiques prohibées (...) Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d'euro. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante. "
1. SUR LA GRAVITÉ DE LA PRATIQUE
215. La pratique d'abus de position dominante retenue au grief n° 3 émane de la ville de Lyon qui avait la charge du service public administratif funéraire municipal en même temps qu'elle exploitait le service public à caractère industriel et commercial des pompes funèbres. Cette collectivité publique disposait de ce fait d'une position historique prédominante existant avant la fin du monopole des pompes funèbres et maintenue après la disparition de ce monopole. Elle devait être attentive aux modalités de gestion de la chambre funéraire dont elle connaissait l'importance sur le marché de l'organisation des obsèques.
216. Alors qu'elle disposait de la seule chambre funéraire existant à Lyon qui lui procurait une force d'attraction avec laquelle les entreprises concurrentes pouvaient difficilement rivaliser, elle a pendant six ans abusé de cette position en maintenant une organisation confondant les prestations propres à la chambre funéraire avec les services commerciaux et administratifs. Cette pratique a eu d'autant plus d'influence sur le choix des familles des défunts qu'elles se trouvent, au moment où elles accordent leur confiance à un opérateur, dans un état de dépendance lié à la peine que le deuil est de nature à leur causer et à la nécessité d'organiser rapidement les funérailles.
217. Ainsi les faits établis revêtent une gravité certaine. Ils sont intervenus après la fin du monopole des pompes funèbres et témoignent de la résistance de la régie municipale à intégrer dans son comportement l'ouverture du service des pompes funèbres à la concurrence comme le prescrit la loi du 8 janvier 1993.
218. Il sera cependant tenu compte du fait que la régie municipale a modifié l'annonce des services de la chambre funéraire dans l'annuaire " Pages jaunes ", à compter de l'année 2004, avec la mention d'un nouveau numéro de téléphone et que de nouvelles dispositions ont été prises en 2006 dans le cadre de la création du Syndicat intercommunal des pompes funèbres pour mieux séparer les différentes activités développées dans le centre funéraire municipal.
2. SUR LE DOMMAGE À L'ÉCONOMIE
219. Comme l'a précisé le Conseil de la concurrence dans son rapport annuel pour 1999, le dommage à l'économie " ne peut être évalué qu'en comparant la situation résultant de la pratique à la situation qui aurait prévalu en l'absence de cette pratique ". Le dossier ne contient pas d'élément notamment sur les prix comparés des prestations funéraires permettant de mesurer le surcoût pour le client lié à la mise en œuvre de la pratique de la ville de Lyon. Il a été constaté, par ailleurs, qu'elles n'ont pas permis à la régie municipale d'augmenter sa part de marché. Néanmoins, l'importance du dommage à l'économie, visée au I de l'article L. 464-2 du Code de commerce, est liée à la taille des marchés affectés et le cas échéant à l'exemplarité du comportement en cause qui a pu influencer d'autres entreprises. En l'occurrence, le nombre de décès enregistrés à Lyon était de l'ordre de 5 000 par an au cours des années considérées, celui des corps transportés au funérarium municipal a varié d'environ 1 200 à environ 1 900 et celui des funérailles organisées par la régie municipale a été d'un peu plus de 1 700 (dont environ 1 100 concernant des défunts préalablement transportés au funérarium). Il faut également tenir compte de la malheureuse valeur d'exemple donnée par la ville de Lyon qui, collectivité publique, aurait dû clairement distinguer ses différentes activités.
3. SUR LE MONTANT DE LA SANCTION
220. La ville de Lyon est une personne morale de droit public qui assure la continuité juridique de la régie municipale des pompes funèbres auteur des pratiques en cause dans le dossier depuis sa disparition le 27 octobre 2005.
221. Elle a abusé de sa position de gestionnaire exclusif de la chambre funéraire municipale pour empêcher les familles de faire jouer la concurrence avec d'autres opérateurs de pompes funèbres (grief n° 3), pratique prohibée par les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
222. N'étant pas une entreprise, le montant maximum de la sanction qui lui est applicable est de 3 millions d'euro. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 50 000 euro.
Décision
Article 1er : Il n'est pas établi que la société OGF, le centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc, la clinique mutualiste Eugène André, la clinique de la Sauvegarde, la polyclinique Pasteur, la clinique du Grand large, la clinique La Roseraie, la polyclinique des Minguettes et le centre hospitalier Le Vinatier ont enfreint les dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce.
Article 2 : Il est établi que la régie municipale des pompes funèbres de Lyon, dont la ville de Lyon doit répondre des agissements, a enfreint les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
Article 3 : Est infligée à la ville de Lyon une sanction pécuniaire de 50 000 euro.