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Décisions

Cass. com., 1 juillet 2008, n° 03-12.724

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Chevassus-Marche (Consorts)

Défendeur :

Groupe Danone (SA), Kro Beer Brands (SA), Eaux minérales d'Evian (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Michel-Amsellem

Avocat général :

Mme Bonhomme

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Waquet, Farge, Hazan

T. com. Paris, 19e ch., du 5 avr. 2001

5 avril 2001

LA COUR : - Donne acte à Mme Michèle Belorgey, M. Guillaume Chevassus-Marche et Mme Caroline Chevassus-Marche de leur reprise d'instance ; - Sur le premier moyen : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 décembre 2002), que par un contrat du 14 avril 1987, la société BSN, devenue société Groupe Danone, agissant au nom et pour le compte de ses filiales les sociétés Brasseries Kronenbourg (devenue société Kro Beer Brands) et Eaux minérales d'Evian, a confié à M. Chevassus-Marche un mandat exclusif de représentation de ces sociétés auprès de la clientèle des importateurs, grossistes ou détaillants de leurs produits, dans un territoire déterminé comprenant les îles de La Réunion et Mayotte ; que dans le cadre d'un litige relatif à la rupture de leurs relations contractuelles, M. Chevassus-Marche a demandé paiement de diverses sommes, dont des commissions, ainsi que les indemnités de rupture correspondantes, relatives à des achats effectués par deux sociétés implantées sur son secteur d'intervention, les sociétés Sodexpro et Tigre ; que les sociétés mandantes se sont opposées à ces demandes en soutenant que les achats concernés étaient intervenus auprès de centrales d'achats et de revendeurs sans qu'elles en aient eu un contrôle direct ou indirect ; que les héritiers de Paul Chevassus-Marche, décédé, ont repris l'instance ; que par arrêt du 19 décembre 2006, la Chambre commerciale, financière et économique a saisi la Cour de justice des Communautés européennes d'une question préjudicielle ;

Attendu que Paul Chevassus-Marche reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de condamnation solidaire des sociétés Groupe Danone, Brasserie Kronenbourg et Eaux minérales d'Evian à lui verser la somme de 102 784, 48 euro au titre des commissions qui lui étaient dues sur les ventes effectuées sans son intervention, par des centrales d'achat, aux sociétés Sodexpro et Tigre, ainsi que la somme de 102 784,48 euro au titre de l'indemnité statutaire de fin de contrat correspondant à ces mêmes ventes parallèles, alors, selon le moyen : 1°) qu'en se bornant à s'appuyer sur des considérations relatives aux ventes et au chiffre d'affaires réalisés par les sociétés Sodexpro et Tigre pour rejeter les demandes de M. Chevassus-Marche, alors que celles-ci se rapportaient aux commissions qui lui étaient dues en raison des achats réalisés par ces sociétés auprès de ses mandantes via des centrales d'achat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 134-6 du Code de commerce ; 2°) que lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminées, l'agent commercial a droit à une commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ; si bien qu'en limitant le bénéfice d'une commission aux seules opérations directement ou indirectement contrôlées par les mandants, la cour d'appel a violé l'article L. 134-6 alinéa 2 du Code de commerce en y ajoutant une condition non prévue par ce texte ; 3°) que la preuve incombe au mandant de l'absence de contrôle direct ou indirect d'une opération propre à l'exonérer de son obligation de verser une commission à son agent commercial ; qu'en jugeant le contraire la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ; 4°) que lorsque l'agent commercial a établi l'existence d'opérations lui donnant droit à un commissionnement, la preuve du chiffre d'affaires généré par ces opérations, nécessaire au calcul de la commission, incombe également au mandant ; qu'en jugeant le contraire la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article 1315 du Code civil ;

Mais attendu que la Cour de justice des Communautés européennes, saisie à titre préjudiciel par arrêt de cette chambre du 19 décembre 2006 a dit pour droit (CJCE, 17 janvier 2008, affaire C-19-07) que l'article 7, paragraphe 2, premier tiret, de la directive 86-653-CEE du Conseil, du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants, doit être interprété en ce sens que l'agent commercial chargé d'un secteur géographique déterminé n'a pas droit à la commission pour les opérations conclues par des clients appartenant à ce secteur avec un tiers en l'absence d'intervention, directe ou indirecte, du commettant ; que l'arrêt attaqué constate que les achats des sociétés Sodexpro et Tigre ont été effectués auprès de grandes centrales ou de revendeurs métropolitains ; qu'il relève que Paul Chevassus-Marche n'a pas démontré que ces achats auraient été contrôlés directement ou indirectement par ses mandantes et précise qu'il résulte de l'arrêt rendu le 19 septembre 2000 par la Cour d'appel de Versailles et relatif aux conditions de la rupture des relations entre l'agent commercial et ses mandantes, qu'aucun manquement n'est imputable aux sociétés mandantes dans le cadre de ces ventes parallèles ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, dont il résulte que ces dernières ne sont pas intervenues dans les ventes invoquées, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a justement estimé que les ventes parallèles invoquées n'ouvraient dans ces circonstances pas droit, pour l'agent commercial, à percevoir une commission ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que les deuxième et troisième moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.