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Décisions

CJCE, 5e ch., 5 octobre 1988, n° 250-85

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Brother Industries Ltd, Brother International (Belgium) SA, Brother International Maskin A/S, Brother International GmbH, Brother-Jones SMC Ltd, Brother International Corp. (IRL) Ltd, Brother International (Nederland) BV, Brother France SA

Défendeur :

Conseil des Communautés européennes, Commission des Communautés européennes, Committee of European typewriter manufacturers

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Bosco

Avocat général :

Sir Slynn

Juges :

MM. Moitinho de Almeida, Everling, Galmot, Joliet

Avocats :

Mes Didier, Vandersanden, Ehle

CJCE n° 250-85

5 octobre 1988

LA COUR (cinquième chambre),

Par requête déposée au greffe de la Cour le 12 août 1985, la société Brother industries Ltd (ci-après "Brother"), ayant son siège à Nagoya, Japon, a introduit, en vertu de l'article 173, alinéa 2, du traité CEE, un recours visant à l'annulation du règlement n° 1698-85 du Conseil, du 19 juin 1985, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de machines à écrire électroniques originaires du Japon (JO L 163, p. 1), dans la mesure où ce règlement la concerne, ainsi que l'attribution de dommages et intérêts à la charge du Conseil et de la Commission pour violation caractérisée des dispositions de la réglementation communautaire en matière de dumping et des principes généraux du droit communautaire.

Brother est une société dont les activités portent, entre autres, sur la fabrication de machines à écrire électroniques (ci-après "MEE ") qu'elle vend principalement à l'étranger. En 1984, elle a fait l'objet, avec d'autres producteurs Japonais, d'une plainte déposée auprès de la Commission par une association de fabricants européens, le Committee of European typewriter manufacturers (ci-après "CETMA "), qui l'accusait de vendre ses produits dans la Communauté à des prix de dumping.

La procédure antidumping engagée par la Commission sur la base du règlement n° 2176-84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 201, p. 1), a conduit d'abord à imposer à Brother, par règlement n° 3643-84 de la Commission du 20 décembre 1984 (JO L 335, p. 43), un droit antidumping provisoire de 43,7 %. Le Conseil, sur proposition de la Commission, a ensuite fixé le droit antidumping définitif à 21 %, par son règlement n° 1698-85, contre lequel Brother a introduit le présent recours.

Par acte déposé le 29 août 1985, Brother a introduit une demande en référé visant à obtenir le sursis à l'exécution, à son égard, du règlement n° 1698-85, jusqu'à ce que la Cour se soit prononcée sur le recours. Cette demande a été rejetée par ordonnance du Président de la Cour du 18 octobre 1985, qui a réservé les dépens.

Le CETMA a été admis à intervenir dans l'affaire à l'appui des conclusions de la partie défenderesse. La Commission a également été admise à intervenir à l'appui des conclusions de la partie défenderesse, après que Brother eût déclaré renoncer à son recours pour autant qu'il s'agissait de l'action en responsabilité engagée, dans la même requête que l'action en annulation, tant contre le Conseil que contre la Commission.

Pour un plus ample exposé des faits de l'affaire, du déroulement de la procédure et des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-dessous que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

Brother soulève à l'encontre du règlement n° 1698-85 les sept moyens suivants :

- erreurs dans le calcul de la valeur normale

- violation du règlement n° 2176-84 en ce qui concerne le calcul du prix à l'exportation

- violation du règlement n° 2176-84 dans la comparaison entre la valeur normale et le prix à l'exportation

- violation du principe de la sécurité juridique

- violation du règlement n° 2176-84 dans la détermination du préjudice subi par l'industrie communautaire

- appréciation inexacte des intérêts de la Communauté

- violation des principes d'égalité et de non-discrimination

Sur le moyen tiré des erreurs dans le calcul de la valeur normale

Brother soutient tout d'abord que la structure du marche au Japon, où les machines à écrire électroniques seraient très peu répandues, ne peut pas être valablement comparée avec celle du marché communautaire, et que les prix japonais ne sont donc pas des prix "comparables" au sens des dispositions du règlement n° 2176-84.

A cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l'article 2, paragraphe 2, du règlement n° 2176-84, précité, "un produit est considéré comme faisant l'objet d'un dumping lorsque son prix à l'exportation vers la Communauté est inferieur à la valeur normale d'un produit similaire". Ainsi qu'il ressort du paragraphe 3, sous a), de ce même article, on entend par valeur normale le "prix comparable réellement payé ou à payer au cours d'opérations commerciales normales pour le produit similaire destiné à la consommation dans le pays d'exportation ou d'origine". D'autres critères pour la détermination de la valeur normale sont prévus lorsqu'aucune vente d'un produit similaire n'a lieu au cours d'opérations commerciales normales dans le pays d'exportation ou d'origine, ou lorsque de telles ventes ne permettent pas une comparaison valable.

Il faut reconnaitre que, pour des raisons qui sont notamment connexes aux particularités de l'écriture japonaise, les machines à écrire ne sont pas utilisées au Japon dans les relations commerciales internes et y sont donc commercialisées dans des quantités très réduites par rapport à celles qui sont écoulées dans la Communauté. Il existe néanmoins au Japon, comme l'indiquent les pièces du dossier, un marché des MEE qui porte sur quelques dizaines de milliers de machines chaque année et qui est caractérisé par une situation de compétition assez vive, ainsi que le prouve, entre autres, la présence sur ce marché de produits étrangers. Dans ces conditions, rien n'empêche d'estimer que les prix réalisés sur le marché japonais sont comparables avec les prix obtenus sur le marché communautaire.

Brother soutient ensuite que les prix pratiqués sur le marché Japonais n'étaient pas représentatifs, eu égard au nombre de MEE qu'elle vendait sur ce marché. En effet, ce nombre n'aurait pas dépassé le seuil de 5 % des exportations au-dessous duquel les institutions avaient décidé de considérer comme négligeables les ventes sur le marché japonais. Elle estime aussi que le troisième considérant du règlement n° 2176-84 imposerait de tenir compte des pratiques des principaux partenaires commerciaux de la Communauté. Ce seuil de 5 % aurait donc dû être calculé conformément à la pratique suivie par les États-Unis d'Amérique. En outre, l'attitude prise en l'espèce par les institutions communautaires constituerait un revirement soudain de la pratique précédente fondée sur des "seuils d'insignifiance" beaucoup plus élevés.

Les pièces du dossier ne fournissent pas d'appui à l'allégation de Brother selon laquelle les ventes intérieures, prises en considération afin de déterminer la valeur normale de ses produits, n'ont pas dépassé le seuil d'insignifiance. Cela ne serait en réalité exact que si l'on fixait le seuil d'insignifiance des ventes intérieures, comme le fait Brother, à 5 % du total des exportations toutes destinations confondues, mais une telle approche n'a jamais été adoptée par les institutions, qui se sont référées en l'espèce a 5 % du total des exportations vers la Communauté.

En ce qui concerne l'argument tiré de la référence à la pratique suivie en la matière par les Etats-Unis d'Amérique, il convient de remarquer que l'attitude d'un de ses partenaires commerciaux, même important, ne suffit pas pour obliger la Communauté à procéder de la même manière.

Brother reproche, en troisième lieu, aux institutions d'avoir déterminé la valeur normale de la plupart de ses modèles à partir du prix de revente de son distributeur affilié au Japon, Brother sales Ltd., alors que, si elles étaient convaincues que les prix pratiqués par Brother à Brother sales Ltd n'étaient pas des prix établis dans le cadre d'opérations commerciales normales, elles auraient dû avoir recours, conformément à l'article 2, paragraphe 3, sous b), du règlement n° 2176-84, aux prix de produits similaires exportés vers des pays tiers ou à la valeur construite.

Il y a lieu d'observer que l'utilisation des prix de revente du distributeur affilié est justifiée, étant donné que ces prix peuvent, à juste titre, être considérés comme les prix de la première vente du produit effectuée au cours d'opérations commerciales normales. En effet, Brother commercialise ses produits sur le marché intérieur par l'intermédiaire d'une société de distribution qu'elle contrôle économiquement et à laquelle elle confie des taches qui relèvent normalement d'un département de vente interne à l'organisation du producteur.

Le partage des activités de production et de celles de vente à l'intérieur d'un groupe formé par des sociétés juridiquement distinctes ne saurait rien enlever au fait qu'il s'agit d'une entité économique unique qui organise de cette manière un ensemble d'activités exercées, dans d'autres cas, par une entité qui est unique aussi du point de vue juridique.

Pour ce qui est des modèles dont la valeur normale a été construite, Brother fait valoir que les frais administratifs, généraux et autres auraient dû être établis par rapport à l'hypothèse de l'exportation du produit.

A cet égard, il convient de rappeler que, selon l'économie du règlement n° 2176-84, la construction de la valeur normale vise à déterminer le prix de vente d'un produit tel qu'il serait si ce produit était vendu dans son pays d'origine ou d'exportation. Par conséquent, ce sont les frais afférents aux ventes sur le marché intérieur qui doivent être prises en considération.

Encore convient-il de souligner que, si, pour les modèles vendus en quantités suffisantes sur le marché intérieur, un prix réel a pu être établi, alors que la valeur normale a dû être construite pour les modèles qui font uniquement l'objet d'exportation, le fait de ne pas prendre en considération pour ces derniers les mêmes frais que ceux qui figurent dans le prix réel des modèles vendus à l'intérieur conduirait à traiter, sans aucune raison, de manière différente les fabricants exportateurs de MEE selon qu'ils vendent aussi dans leur propre pays ou uniquement à l'étranger.

En cinquième lieu, Brother se plaint de ce que la marge bénéficiaire utilisée pour la construction de la valeur normale de certains de ses modèles aurait été établie de manière erronée, en divisant les frais généraux de vente de Brother sales Ltd au Japon par le volume des ventes de Brother à travers le monde, ventes qui n'ont aucun rapport avec les ventes de Brother sales Ltd., ce qui aurait gonflé le profit et réduit les frais généraux de vente.

A cet égard, les institutions soulignent à juste titre que, même si les calculs avaient été effectués sur la base des chiffres indiqués par Brother, le résultat n'aurait pas changé, étant donné que tant la marge bénéficiaire que les frais généraux utilisés pour la construction de la valeur normale sont des composants des prix intérieurs des produits de Brother, ce qui fait que l'un d'eux ne peut diminuer sans que l'autre augmente dans les mêmes proportions.

A la lumière de ces considérations, le moyen tiré des erreurs dans le calcul de la valeur normale doit dès lors être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation du règlement n° 2176-84 en ce qui concerne le calcul du prix à l'exportation

Après que les institutions ont corrigé l'erreur invoquée dans ce moyen, à savoir la double prise en compte du coût du crédit à l'acheteur, et ont réduit de 1,5 % la marge de dumping, Brother se demande s'il était possible d'exclure que les nouvelles données ainsi établies puissent influencer aussi le calcul du droit antidumping.

Compte tenu de ce que le droit antidumping a été fixé par les institutions au niveau du préjudice subi par l'industrie communautaire, à savoir 21 % du prix du produit, alors que la marge de dumping retenue pour Brother a été de 33,6 % du prix du produit, il y a lieu de constater que les institutions communautaires étaient manifestement en droit de considérer qu'une réduction de 1,5 % de la marge de dumping n'aurait aucune influence sur le taux du droit antidumping.

Sur le moyen tiré de la violation du règlement n° 2176-84 dans la comparaison entre la valeur normale et le prix à l'exportation

Brother soutient tout d'abord que la comparaison entre la valeur normale et le prix à l'exportation a été faite de manière incorrecte, en ce que des prix à l'exportation établis au stade "sortie d'usine" du fabricant auraient été comparés avec des valeurs normales déterminées au stade "sortie du distributeur exclusif ".

Ce moyen ne saurait être retenu au motif que, pour les considérations déjà exposées, Brother et son distributeur affilie doivent être considérés comme une entité économique unique.

Le rejet du moyen ci-dessus rend superflu l'examen des moyens relatifs au refus des institutions d'accorder à la requérante des ajustements au sens de l'article 2, paragraphe 10, du règlement n° 2176-84. Ces derniers sont en effet des moyens subsidiaires et n'ont été soulevés que pour le cas où il serait établi que la comparaison entre la valeur normale et le prix a l'exportation a été effectuée à des stades commerciaux différents.

Sur le moyen tiré de la violation du principe de la sécurité juridique

Brother fait valoir que le règlement attaqué a pris, compte tenu du caractère imprécis du règlement de base n° 2176-84 quant aux modalités pratiques du calcul de la marge de dumping, un nombre important de nouvelles options de principe. Cette façon de procéder aurait violé le principe de la sécurité juridique en ce qu'elle aurait empêché tout opérateur, même diligent et avisé, de faire le nécessaire pour éviter qu'un droit antidumping lui soit imposé.

Par rapport à ce moyen, il y a lieu d'observer que la règlementation arrêtée par le règlement n° 2176-84 laisse aux institutions communautaires, notamment à la Commission au cours de l'enquête antidumping, lors de la fixation d'un droit provisoire et lors de la proposition d'un droit définitif au Conseil, une certaine marge d'appréciation à plusieurs égards, et que le fait que la Commission utilise cette marge sans expliquer en détail et à l'avance les critères qu'elle envisage d'appliquer dans chaque situation concrète ne viole pas le principe de la sécurité juridique.

Le moyen tiré de la violation du principe de la sécurité juridique doit dès lors être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation du règlement n° 2176-84 dans la détermination du préjudice subi par l'industrie communautaire

Par le premier des arguments qu'elle avance dans le cadre de ce moyen, Brother fait valoir que, en vertu de l'article 4, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2176-84, l'examen du préjudice doit comprendre, entre autres, les "prix des importations faisant l'objet d'un dumping ou de subventions, notamment pour déterminer s'il y a eu sous-cotation significative du prix par rapport au prix d'un produit similaire dans la Communauté ". Selon Brother, la comparaison prévue à cet article ne peut être qu'une comparaison entre des prix réels, à condition qu'il s'agisse de prix loyaux.

Le bien-fondé de ce moyen doit être apprécié en tenant compte de ce que les institutions n'ont pu procéder à la détermination du préjudice qu'après la plainte déposée par les producteurs communautaires le 15 février 1984, alors qu'il ressort du dossier que les effets d'importations Japonaises, qui ont fait ultérieurement l'objet de la procédure antidumping, avaient déjà, depuis quelque temps, commencé à être ressentis par l'industrie communautaire. Les prix des produits communautaires au cours de l'année 1984 n'étaient donc plus des prix utilisables pour la détermination du préjudice au sens de l'article 4, précité, en ce qu'ils avaient déjà subi des dépréciations depuis un certain temps, afin de pouvoir résister à la pression toujours croissante des importations Japonaises.

A la lumière des considérations qui précédent, la construction d'un prix à l'intérieur de la Communauté, tel qu'il aurait été s'il n'avait pas subi, pendant une longue période, une pression à la baisse du fait des importations Japonaises, constitue la seule solution permettant de ne pas priver de signification la comparaison prévue à l'article 4, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2176-84.

L'argument de Brother selon lequel elle ignorait tout de la manière dont les prix cibles ont été calculés ne saurait être retenu, puisque la méthode de calcul des prix cibles a été communiquée à la requérante, et les coûts de production des entreprises communautaires sont des données confidentielles qui n'auraient pu, en aucun cas, lui être transmises.

Brother soutient ensuite que les ajustements entre les différents modèles, nécessaires pour permettre une comparaison des prix, ont été effectués de façon déraisonnable.

Il y a lieu de souligner à cet égard que, comme Brother le reconnait, une comparaison directe entre les modèles importés et les modèles communautaires les plus proches était impossible en raison de la grande variété de modèles et de leurs caractéristiques techniques. Un ajustement étant dès lors nécessaire pour tenir compte de ces différences, les institutions ont demandé aux exportateurs japonais et aux producteurs communautaires d'évaluer de bonne foi la valeur commerciale de chaque modèle en fonction de ses caractéristiques techniques et ont calculé la moyenne des deux évaluations.

Compte tenu du fait qu'un mécanisme technique dont le cout de production n'est pas très élevé peut présenter un grand intérêt aux yeux d'un acheteur potentiel, en ce qu'il permet une utilisation particulière de la machine, il y a lieu de constater que la valeur commerciale d'une machine ne varie pas nécessairement en fonction du cout de production de ses éléments. En l'absence de toute méthode objective pour apprécier la valeur commerciale des MEE, il y a donc lieu d'estimer que la méthode suivie par les institutions, fondée sur la moyenne des différentes appréciations subjectives, était raisonnable.

Brother avait enfin fait valoir que certains modèles considérés comme communautaires avaient, en réalité, été fabriqués dans des pays tiers. Le Conseil a répondu, et Brother a admis, que tous ces modèles ou bien avaient été fabriqués dans la Communauté, ou bien n'avaient pas été pris en considération aux fins du calcul du préjudice, sauf deux d'entre eux, pour lesquels cette erreur a été corrigée, au cours de la procédure, par le règlement n° 113-86 du Conseil, du 20 janvier 1986 (JO L 17, p. 2). Ce moyen est donc devenu sans objet.

Les moyens ayant trait à la détermination du préjudice subi par l'industrie communautaire doivent des lors être rejetés.

Sur les moyens tirés d'une appréciation inexacte des intérêts de la Communauté

Brother soutient que l'institution d'un droit antidumping définitif à son égard n'est pas conforme à l'article 12 du règlement n° 2176-84, selon lequel une telle mesure peut être adoptée lorsqu'il ressort, entre autres, que "les intérêts de la Communauté nécessitent une action communautaire ". En l'espèce, l'imposition d'un droit antidumping à Brother ne serait d'aucune utilité pour les intérêts de la Communauté, alors que d'autres entreprises extracommunautaires continuent à vendre sur le marché communautaire à des prix égaux ou inférieurs à ceux de la requérante.

Il y a lieu d'observer, à cet égard, que Brother n'affirme pas que les entreprises susmentionnées vendent sur le marché communautaire à des prix de dumping. Dans ces conditions, il importe de relever que les intérêts de la Communauté sont efficacement garantis par des mesures de protection contre les importations faisant l'objet d'un dumping, même si un droit antidumping n'a pas pour effet de soustraire l'industrie communautaire à la concurrence des produits originaires d'autres pays tiers, mais ne faisant pas l'objet d'un dumping.

Brother fait également valoir qu'il n'est pas dans l'intérêt de la Communauté de protéger les producteurs non efficients. Comme l'ont rappelé à juste titre les institutions, il leur appartient, conformément à l'article 12, paragraphe 1, du règlement n° 2176-84, d'apprécier, en présence d'un dumping et d'un préjudice, si les "intérêts de la Communauté nécessitent une action communautaire ". Le fait, pour un producteur communautaire, d'éprouver des difficultés, dues également à des causes autres que le dumping, n'est pas une raison pour enlever à ce producteur toute protection contre le préjudice causé par le dumping.

La protection accordée aux producteurs communautaires, incluant même les moins efficients, n'est d'ailleurs pas excessive, puisque le prix cible a été calculé en attribuant à l'industrie communautaire une marge bénéficiaire de 10 %, alors que celle-ci avait fait valoir, sur la base d'éléments probants, qu'une marge de 18 à 20 % du chiffre d'affaires pourrait être considérée comme adéquate.

Les moyens tirés d'une appréciation inexacte des intérêts de la Communauté doivent des lors être rejetés.

Les conclusions auxquelles on est parvenu par rapport aux autres moyens avances par Brother rend inutile l'examen du moyen tiré de la violation des principes d'égalité et de non-discrimination, moyen qui revient en réalité à la question de savoir si les critères de calcul adoptés par les institutions communautaires étaient corrects.

Au vu des constatations qui précédent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble comme non fondé.

Sur les dépens

Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. Brother ayant succombe en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens, tant de la procédure principale que de la procédure en référé, y compris ceux des parties intervenantes qui ont conclu en ce sens.

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre),

Déclaré et arrêté :

1) le recours est rejeté.

2) la requérante est condamnée aux dépens, tant de la procédure principale que de la procédure en référé, y compris ceux des parties intervenantes qui ont conclu en ce sens.