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Décisions

CA Toulouse, 3e ch. sect. 1, 21 février 2006, n° 04-05684

TOULOUSE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Fillacier (Epoux)

Défendeur :

Macalit Grand Litier (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dreuilhe

Conseillers :

MM. Helip, Boyer-Campourcy

Avoués :

SCP Boyer-Lescat-Merle, SCP Nidecker Prieu-Philippot

Avocats :

Me Beauté, SCP Conquet Massol, Mascarras

TI Montauban, du 6 oct. 2004

6 octobre 2004

Rappel des faits et de la procédure

Le 25 janvier 2002, les époux Fillacier ont acquis auprès de la SARL Macalit deux matelas et deux sommiers moyennant le paiement d'une somme de 3 507 euro.

La literie livrée présentant divers désordres, les époux Fillacier ont saisi le juge des référés près le Tribunal de grande instance de Montauban d'une demande d'organisation d'expertise judiciaire.

Par ordonnance en date du 20 mars 2003, le juge des référés a désigné un expert judiciaire, Monsieur Batmalle.

Par suite du dépôt de son rapport, les époux Fillacier ont, le 13 avril 2004, fait assigner la société Macalit devant le Tribunal d'instance de Montauban à l'effet de voir prononcer:

* la résolution de la vente pour défaut de conformité et manquement du vendeur à son obligation d'information;

* la condamnation de la SARL Macalit au paiement de la somme de 1 500 euro à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par jugement du 6 octobre 2004, la juridiction du premier degré a:

* débouté les époux Fillacier de l'ensemble de leurs demandes;

* dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Le 24 décembre 2004, Monsieur et Madame Fillacier ont interjeté appel dudit jugement.

Prétentions des parties

Par conclusions déposées le 20 avril 2005, les époux Fillacier demandent à la cour:

* de réformer la décision entreprise;

* de prononcer la résolution judiciaire de la vente intervenue le 25 janvier 2002;

* de condamner la société Macalit à leur:

- rembourser la somme de 3 507 euro augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2002,

- payer la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les époux Fillacier font valoir, au visa des articles 1147 et suivants du Code civil, les manquements de la SARL Macalit, spécialiste de la literie, dans son obligation d'information.

En effet, ils soulignent qu'aucune fiche descriptive du produit ne leur a été transmise, qu'en outre il ne leur a pas été proposé d'essayer lesdits produits avant toute commande, ce qui leur aurait pourtant permis de se rendre compte de l'incompatibilité de ces derniers avec leurs exigences.

Par conclusions en date du 4 mai 2005, la SARL Macalit demande à la cour :

* de confirmer le jugement entrepris;

* de condamner les époux Fillacier à lui verser la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SARL Macalit conteste l'argumentation développée par ses contradicteurs et selon laquelle elle n'aurait pas satisfait au devoir de conseil qui lui incombait du fait de sa qualité de vendeur professionnel.

Elle affirme que si la demande formulée par les époux Fillacier avait été suffisamment précise, elle aurait été en mesure de les orienter vers un modèle mieux adapté à leurs exigences,

D'ailleurs, elle précise que les matelas livrés étaient bien conformes au bon de commande rempli par les acquéreurs, à savoir "des matelas laine vierge type très ferme et ferme", la mention "indéformabilité" n'ayant pas été apposée sur ledit bon de commande.

En outre, sa responsabilité ne saurait être engagée dans le cadre d'une garantie de vice caché, le matériel livré ne présentant aucun défaut ni aucune malfaçon.

Motifs de la décision

Aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, tout professionnel vendeur de biens ou prestataire des services doit avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur an mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service et il incombe au vendeur professionnel tenu d'une obligation de conseil et de renseignement à l'égard de son client de prouver qu'il a exécuté cette obligation.

Dans le cas présent, il résulte de la facture du 25 janvier 2002 que l'indéformabilité des matelas et la fermeté des sommiers étaient une condition essentielle de l'achat de la literie.

Cette exigence ressort clairement du libellé des matériels commandés dans cette facture et ensuite du rapport de l'expert.

Les époux Fillacier souhaitaient par goût, mais aussi en ce qui concerne Monsieur Fillacier pour des raisons de santé, un matériel indéformable et très ferme.

Dans ces conditions, satisfaits de la marque Treca qu'ils connaissaient, ils se sont adressés à un professionnel, la société Macalit exploitant sous l'enseigne "le Grand Litier".

Les époux Fillacier ont utilisé cette literie à partir du 10 avril 2002; ils ont très rapidement introduit une réclamation auprès du magasin Grand Litier en mai 2002, se plaignant d'un creux dans la partie médiane, creux constaté par huissier et corroboré par les essais personnels de l'expert.

Selon celui-ci, " le creux constaté est normal et résulte de la conception même du matelas ".

Le catalogue du fournisseur explique très précisément la structure du matelas avec des schémas explicites. Leur simple consultation suffit à donner une information claire à ce sujet.

Il en résulte que ces informations essentielles auraient dû être fournies par le professionnel le Grand Litier, spécialiste de la literie aux acheteurs les époux Fillacier.

Ceux-ci recherchaient un matelas particulièrement ferme et indéformable, ce qui n'est pas le cas du matériel conseillé et vendu, la documentation technique relative à l'impérial Air Spring indique très clairement " un accueil très enveloppant..., c'est le confort coocooning ", côté enveloppant qui ne convenait précisément pas aux époux Fillacier.

L'expert indique que la solution aurait consisté en un remplacement du matelas par un Pullman de Treca très ferme et un sommier sans cuvette Oméga Spring.

Le service et l'assistance dans le choix des produits du magasin le Grand Litier sont donc pris en défaut alors qu'un simple essai des articles commandés dans le magasin, au vu des exigences du client, aurait immédiatement dénoué la situation, démontrant que le matériel commandé ne convenait pas et ne répondait pas aux exigences du client.

Le vendeur a donc failli à son obligation de conseil, le matériel vendu ne correspondant ni aux besoins exprimés ni à l'utilisation qui en était attendue.

Ce manquement est rattaché à l'exécution du contrat et les époux Fillacier qui ont le choix entre la résolution de la vente ou une indemnisation de l'article 1184 du Code civil sont recevables dans leur demande de résolution judiciaire du contrat.

La décision est donc réformée dans toutes ses dispositions.

La société Macalit sera condamnée à rembourser aux époux Fillacier la somme de 3 507 euro augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Les époux Fillacier seront tenus de restituer à la diligence et aux frais de la société Macalit le matériel ainsi acquis dans le délai de quinze jours du paiement.

Aucun préjudice particulier justifié aux débats ne fonde la demande de dommages-intérêts qui est donc rejetée.

L'équité commande l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile aux appelants contraints d'exposer des frais pour faire valoir leurs droits en justice.

Les dépens suivent le sort du principal.

Par ces motifs, LA COUR, Rejetant toutes autres demandes, Réformant la décision appelée dans toutes ses dispositions, Prononce la résolution judiciaire de la vente du 25 janvier 2005; En conséquence, Condamne la société Macalit à payer à Monsieur et Madame Fillacier la somme de 3 507 euro, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour; Ordonne la restitution du matériel litigieux par les époux Fillacier à la société Macalit, aux frais et diligences de la société, dans le délai de quinzaine du paiement de la condamnation; Dit n'y avoir lieu à dommages intérêts; Condamne la société Macalit à payer aux époux Fillacier la somme de 1 000 euro par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne la société Macalit aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire avec distraction au profit de la SCP Boyer Lescat Merle, avoué, sur son affirmation de droit.