Livv
Décisions

CA Limoges, ch. corr., 4 janvier 2006, n° 05-00429

LIMOGES

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bazot

Conseillers :

M. Baluze, Mme Dubillot-Bailly

Avocat :

Me Roy

TGI Limoges, ch. corr., du 18 mars 2005

18 mars 2005

Décision dont appel

Par jugement n° 453-2005 en date du 18 mars 2005 le Tribunal correctionnel de Limoges a :

- relaxé Christophe X du chef de publicité mensongère et l'a déclaré coupable de vente en solde en dehors des périodes autorisées, l'a condamné en répression à la peine d'amende de 1 500 euro

- relaxé la société Z du chef de publicité mensongère et l'a déclarée coupable de vente en solde, par personne morale, en dehors des périodes autorisées, l'a condamnée en répression à une peine d'amende de 8 000 euro

- condamné Y Roger à la peine de 177 amendes d'un montant de 10 euro chacune. Les a condamnés au paiement d'un droit fixe de procédure d'un montant de 90 euro chacun.

Appels

Appel de cette décision a été interjeté par :

Monsieur X Christophe, le 23 mars 2005

Monsieur Y Roger, le 23 mars 2005

SAS Z, le 23 mars 2005

Monsieur le Procureur de la République, le 24 mars 2005 contre X Christophe, Y Roger, SAS Z.

LA COUR,

Les faits

Des constatations ont été effectuées le 24 décembre 2003 à 9 heures dans l'hypermarché à l'enseigne Carrefour sis à Boisseuil (87220) par les agents de La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de la Haute-Vienne qui ont donné lieu à l'établissement de deux procès-verbaux clos le 9 février 2004 auxquels il sera référé (côte D5 et D18) au terme desquels les agents verbalisateurs ont relevé des infractions de publicité mensongère, de soldes hors période et de défaut d'étiquetage des prix visées à la prévention.

Sur l'exception de procédure invoquée tirée de la nullité de la citation de la personne morale et du jugement entrepris.

La SAS Z France qui comparait pour la première fois en cause d'appel sollicite avant toute défense au fond que soit déclarée nulle la citation du 24 février 2005 délivrée à la juriste se trouvant dans les locaux d'Evry hébergeant une trentaine de sociétés. Cette juriste Madame Loubet Martine n'est pas salariée de la société SAS Z France et n'a aucune vocation à recevoir une citation pour le compte de la SAS Z France. Cette dernière fait valoir que les formes de l'article 706-43 du Code de procédure pénale n'ont pas été respectées.

Ce texte précise que l'action publique est exercée à l'encontre de la personne morale prise en la personne de son représentant légal à l'époque des poursuites. Il appartenait au Ministère public de rechercher sur l'extrait K bis de la société le nom du représentant légal et d'indiquer le nom de celui-ci dans l'acte de poursuite. Lorsque se produit un changement de représentant légal de société ce dernier doit en informer la juridiction saisie en application de l'article 706-43 alinéa 4 du Code de procédure pénale.

D'autre part, l'article 555 du Code de procédure pénale précise que si le destinataire de la citation est une personne morale, la délivrance de l'exploit doit être faite à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute personne habilitée.

En l'espèce la citation a été remise à une personne non habilitée à représenter la société.

Au fond

1- Concernant Monsieur X Christophe:

Devant la cour, Monsieur X reprend les moyens de défense au fond développés devant le tribunal correctionnel. Il sollicite la confirmation de la relaxe du chef de publicité mensongère et l'infirmation des dispositions du jugement qui l'a condamné du chef de soldes hors période.

Il estime que l'opération litigieuse ne peut être qualifiée de soldes car elle s'inscrit dans le cadre de l'exception à l'article L. 442-4 I A du Code de commerce qui autorise la revente à perte de produits ayant un caractère saisonnier marqué pendant la période terminale de la saison des ventes qui selon le prévenu se situe nécessairement le 24 décembre de l'année en cours.

Il se fonde sur un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 3 mai 2001 de rejet du pourvoi formé à l'encontre d'un arrêt de la Cour d'appel de Caen qui avait confirmé la relaxe du pénalement responsable d'un hypermarché A concernant la vente de jouets (des peluches) un 23 décembre à un prix nettement inférieur à leur prix d'achat effectif.

2- Concernant Monsieur Y Roger :

Devant la cour Monsieur Y qui reconnaît sa qualité de pénalement responsable en raison de sa fonction de responsable non alimentaire du magasin titulaire d'une subdélégation de pouvoirs acceptée par ses soins émanant de Monsieur X.

Il fait valoir que la citation visant l'absence d'étiquetage sur 177 jouets constitue une seule contravention de sorte qu'il ne pouvait être condamné au paiement de 177 amendes.

Subsidiairement il sollicite l'indulgence de la cour en lui demandant de prendre en considération la situation du moment, les rayons jouets étant en cours de modification afin d'implanter le "blanc" pour le 26 décembre de l'année en cours.

Sur quoi, LA COUR,

1- Sur l'exception de procédure

En application de l'article 459 du Code de procédure pénale l'exception de procédure soulevée in limine litis est jointe au fond.

* Sur la nullité de la citation

La citation du 24 février 2005 ne mentionne pas le nom du représentant légal de la prévenue la SAS Z France.

Il n'est pas établi que le représentant légal de la société Z France ait été informé de la citation devant le Tribunal correctionnel de Limoges et de la date de l'audience, il n'était ni présent ni représenté à l'audience du tribunal correctionnel.

Le non-respect des formalités substantielles prévues aux articles 706-43 et 555 du Code de procédure pénale a eu pour effet de porter atteinte à la partie qu'elle concerne, la SAS Z France qui n'a pas été informée de l'exercice de l'action publique à encontre. Elle n'a donc pas pu comparaître en première instance ni se faire représenter pour assurer sa défense et n'a pas bénéficié du double degré de juridiction.

Il y a donc lieu de prononcer la nullité de la citation du 24 février 2005 et du jugement du tribunal correctionnel qui est inopposable à la personne morale SAS Z France, en application des articles 385, 706-43, 555, 802 du Code de procédure pénale.

Il y a lieu en conséquence de renvoyer le Ministère public à se mieux pourvoir.

2- Sur le fond

Concernant Monsieur X

Les motifs du jugement déféré sont exacts, pertinents et suffisants en ce qui concerne la relaxe prononcée du chef de publicité mensongère et quant à la déclaration de culpabilité du chef de réalisation de soldes hors période. La cour adopte expressément cette motivation à laquelle il sera référé.

C'est à juste titre que le tribunal a écarté le moyen de défense de Monsieur X qui consiste à qualifier l'opération promotionnelle litigieuse de revente à perte. S'il est exact que cette infraction n'est pas visée à la prévention il appartient néanmoins à la cour d'appel de rechercher si l'action commerciale objet des poursuites peut constituer une vente à perte autorisée par l'article 442-4 I A du Code du commerce.

Or à ce sujet aucun document ne figure au dossier en particulier aucune facture n'a été versée aux débats relatifs aux prix d'achat et de revente des articles mis en vente avec une réduction de 50 %.

Il est simplement allégué qu'en pratiquant une réduction importante de moitié du prix de vente la vente serait nécessairement réalisée à perte ce qui n'est nullement démontré ; d'où il suit que ce moyen sera écarté.

Le jugement sera donc émendé en ce sens sur ce point.

C'est donc à juste titre que le tribunal a relaxé Monsieur Christian X du chef de publicité mensongère et l'a déclaré coupable du délit visé à la prévention de soldes en dehors des périodes autorisées. Sa culpabilité sera donc confirmée par substitution de motifs.

La peine d'amende de 1 500 euro est adaptée à la gravité des faits, aux antécédents judiciaires du prévenu, à la situation personnelle et pécuniaire de celui-ci. Elle sera donc confirmée.

Il échet en outre de confirmer la peine de diffusion de la décision aux frais du condamné Monsieur X en application des articles L. 310-5 du Code de commerce et 131-35 du Code pénal.

Concernant Monsieur Y Roger

Les constatations ne portent pas sur un même produit ou une même référence de jouets mais sur divers articles de jouets de type différent dont certains se trouvaient présentés à la vente dans de grands bacs et d'autres exposés en rayon sans indication du prix de vente. L'omission d'étiquetage existe donc pour chaque article et se reproduit à chaque fois qu'un article a été mis en vente sans étiquetage du prix.

En application de l'article 132-7 du Code pénal, la règle de non-cumul des peines n'est pas applicable en matière de contravention.

La commercialisation de chaque article non étiqueté constitue le fait générateur de fautes distinctes punissables séparément.

Il existe autant de faits générateurs distincts que d'articles non étiquetés offerts à la vente (en ce sens Crim., 26 avril 2000, Bull. crim., n° 163).

C'est donc à juste titre que le tribunal a déclaré Monsieur Y coupable de 177 contraventions constatées.

Le montant de chaque amende est proportionné à la gravité des faits et à la situation personnelle et pécuniaire du prévenu Monsieur Y Roger de sorte que le jugement sera confirmé sur la culpabilité et la peine.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement : Déclare les appels recevables; Réforme partiellement le jugement du 18 mars 2005 et statuant à nouveau, Prononce la nullité de la citation du 24 février 2005 et du jugement du 18 mars 2005 en ce qui concerne la personne morale SAS Z; Renvoie le Ministère public à se mieux pourvoir; Confirme la relaxe de Monsieur Christophe X du chef de publicité mensongère; Confirme la culpabilité de Monsieur X du chef de vente en soldes en dehors des périodes autorisées et la peine d'amende prononcée; Compte tenu de l'absence du condamné, Monsieur le Président n'a pu lui donner lecture de l'avertissement que s'il s'acquitte du paiement de l'amende dans un délai d'un mois à compter du jour du prononcé de la présente décision, son montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro ; Le paiement de l'amende ne fait pas obstacle à l'exercice des voies de recours. Confirme la culpabilité de Monsieur Y Roger du chef de défaut d'affichage des prix sur 177 articles et les peines d'amende prononcées; Compte tenu de l'absence du condamné, Monsieur le Président n'a pu lui donner lecture de l'avertissement que s'il s'acquitte du paiement de l'amende dans un délai d'un mois à compter du jour du prononcé de la présente décision, son montant est diminué de 20 % sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro ; Le paiement de l'amende ne fait pas obstacle à l'exercice des voies de recours. Y ajoutant Ordonne la diffusion de la présente décision pendant une journée par le Journal officiel de la République française, par les quotidiens le Populaire du Centre et la Montagne, aux frais du condamné Monsieur X. Dit que les condamnés seront soumis au paiement du droit fixe de procédure d'un montant de cent vingt euro (120 euro) chacun, prévu par l'article 1018 A du Code général des impôts. Le tout par application des articles L. 310-5 al. 1 3°, L. 310-3 § 1, du Code de commerce, 11 du décret 96-1097 du 16/12/1996, R. 113-1 al. 2, al. 1, L. 113-3, du Code de la consommation, 473 et 800 du Code de procédure pénale.