CA Dijon, ch. civ. B, 14 novembre 2006, n° 06-00742
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Futurisme (SARL)
Défendeur :
Gautriaud
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Littner
Conseillers :
M. Richard, Mme Vieillard
Avoués :
Me Gerbay, SCP Avril & Hanssen
Avocats :
SCP Lancelin & Associés, SCP Profumo, Me Delahaut
Exposé de l'affaire
La SARL Futurisme a fait appel de l'ordonnance rendue le 14 avril 2006 par le juge des référés du Tribunal de grande instance de Dijon, qui lui a enjoint de restituer à M. Didier Gautriaud le chèque CIC Lyonnaise de Banque n° 1063136 de 16 500 euro émis à son ordre sous astreinte de 1 000 euro par jour de retard.
Par conclusions du 27 septembre 2006, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la société appelante expose qu'en ordonnant la restitution du chèque le juge des référés s'est prononcé sur la rupture du contrat de vente, excédant ainsi sa compétence, que la question de la mauvaise foi de M. Gautriaud ainsi que celle de la nature du délai constituent des contestations sérieuses et que le tribunal de grande instance saisi le 29 mars 2006 devra statuer sur ces points.
Elle conclut à la réformation de la décision entreprise et à la condamnation de l'intimé à consigner sous astreinte la somme de 16 500 euro ainsi qu'à lui verser celle de 1 200 euro sur le fondement de l'article 700 du même Code.
M. Didier Gautriaud, par des écritures du 14 septembre 2006, auxquelles il est de même référé, répond que la SARL Futurisme ne l'a pas mis en demeure avant le 15 janvier 2006 d'avoir à lui permettre d'effectuer les livraisons et n'invoque aucun cas de force majeure, qu'ainsi il était fondé à faire usage de la faculté reconnue par l'article L. 114-1 du Code de la consommation et que les allégations de la société appelante sur sa prétendue mauvaise foi ne sont pas établies.
Il conclut à la confirmation de la décision, dont appel, et à la condamnation de la SARL Futurisme à lui verser une somme de 1 000 euro au titre des frais irrépétibles.
Motifs de la décision
Attendu que le 9 novembre 2005 M. Gautriaud a signé avec la SARL Futurisme, qui exerce une activité de vente de meubles sous l'enseigne l'Espace Intérieur, un bon de commande portant sur l'aménagement d'un appartement:
" - Salon deux canapés Manhattan, 205 x 96 x 76 ht cuir noir [et] 175 x 96 x 16 ht
- table basse TA 131 Slim chêne wengé : 130 x 90 x 27 ht
- cuisine Elam programme Curry : plateau marbre noir
- chambre Zoé wengé : 160 x 200
- aménagement placard entrée
- chambre enfants - parents
Délai de livraison : 15 janvier 2006
Total : 51 500 euro
acompte à la commande : 16 500 euro (chèque)
Reste à payer 35 000 euro";
Attendu que l'article L. 114-1 du Code de la consommation dispose que dans tout contrat de vente d'un bien meuble ou la fourniture d'une prestation de service, lorsque la livraison n'est pas immédiate et si le prix est supérieur à 500 (article R. 114-1 du même Code), le vendeur professionnel doit indiquer la date limite à laquelle il s'engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation; que ce texte autorise le consommateur à dénoncer un tel contrat de vente ou de prestation de service par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien excédant sept jours et non dû à un cas de force majeure, le contrat étant considéré comme rompu à la réception par le vendeur de cette lettre;
Attendu qu'une livraison très partielle ayant eu lieu les 3 et 11 janvier 2006, M. Didier Gautriaud a adressé à la société appelante le 1er février 2006 une lettre recommandée avec accusé de réception, dans laquelle il annule sa commande de novembre 2005 et demande la restitution de son chèque de 16 500 euro;
Attendu que les conditions d'application de ce texte étant manifestement remplies, le juge des référés, qui constate que la commande litigieuse du 9 novembre 2005 entre dans le champ d'application de ce texte, même s'il s'agit pour partie d'une prestation de service (aménagement d'un appartement), ne peut que constater la rupture du contrat en cause faute de preuve d'un cas de force majeure; que pareillement la date de livraison prévue par l'article L. 114-1 précité ne souffre pas de discussion;
Attendu que les allégations de la SARL Futurisme sur la mauvaise foi de M. Gautriaud, non démontrées, ne constituent pas des contestations sérieuses excluant la compétence du juge des référés, les messages téléphoniques du 1er février 2006 n'ayant pas été enregistrés, leur contenu ne peut être prouvé, et le seul fait de déménager ne constitue pas à lui seul cette mauvaise foi ; qu'au surplus il s'est écoulé plus de sept jours entre le 15 janvier 2006 et le 1er février 2006, date à laquelle la SARL Futurisme prétend avoir voulu livrer ; qu'enfin l'existence d'une assignation devant le Tribunal de grande instance de Dijon du 29 mars 2006 n'est pas établie;
Attendu qu'en conséquence la décision du premier juge, qui a fait droit à la demande de M. Gautriaud de restitution de son chèque, ne peut qu'être confirmée ; que la cour doit pour les mêmes raisons rejeter la demande de consignation de la somme de 16 500 euro;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire à M. Gautriaud application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que la SARL Futurisme, qui succombe, ne saurait prétendre bénéficier de ce texte et sera condamnée aux dépens;
Par ces motifs, LA COUR, Confirme la décision entreprise, Ajoutant, Déboute les parties de leurs autres demandes, Condamne la SARL Futurisme aux dépens d'appel.