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Décisions

CA Amiens, 4e ch. com., 8 novembre 1996, n° 9504365

AMIENS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Proliterie (SA)

Défendeur :

Declercq

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chapuis de Montaunet

Conseillers :

MM. Roche, Ducrotte

Avoué :

SCP Le Roy

Avocat :

Me Baudrillard

T. com. Senlis, du 7 juill. 1995

7 juillet 1995

Le 10 mars 1994 M. Declercq passait commande auprès de la société Proliterie d'un sommier, d'un matelas ainsi que d'un jeu de 4 pieds de lit pour un montant total de 6 986 F TTC.

Les parties avaient convenues d'une livraison le 21 mars 1994 dans la matinée.

Si M. Declercq a effectivement réglé lors de la commande la somme de 1 748 F, le solde restant dû devant provenir d'un prêt de la société Sofinco, la société Proliterie reconnaît, pour sa part, que ses livreurs, à la suite d'une erreur de lecture du bon de commande, ne se sont pas présentés au domicile de l'intéressé pendant la période prévue mais seulement à 12 h 30.

C'est dans ces conditions que, par acte du 17 octobre 1994, M. Declercq, qui avait refusé les offres de la société Proliterie de lui livrer la marchandise commandée à une autre date et, par courrier du 30 mars 1994, vainement sollicité la résiliation du contrat conclu, a assigné cette dernière devant le Tribunal de commerce de Senlis en restitution de la somme déjà versée.

Par jugement en date du 7 juillet 1995, le tribunal saisi a prononcé la résolution de la vente ayant fait l'objet du bon de commande susmentionné du 10 mars 1994 et ordonné la restitution par la société Proliterie de la somme de 1 748 F avec intérêts au taux légal à compter du 21 juin 1994.

Régulièrement appelante, la société Proliterie fait valoir qu'après s'être présentés au domicile de l'intimé le jour prévu vers 12 h 30, ses livreurs ont fait une seconde tentative le même jour à 17 h et, en l'absence de M. Declercq, ont laissé un avis de passage invitant ce dernier à reprendre contact avec elle pour convenir d'une nouvelle date de livraison, que, par ailleurs, il convient de rappeler à la cour les sujétions auxquelles sont soumises les sociétés qui livrent les clients à domicile, qu'il ne saurait lui être fait grief de la demi-heure de retard qu'elle reconnaît et qu'elle explique, que cette demi-heure n'a causé aucun préjudice à M. Declercq eu égard à la marchandise livrée, qu'ainsi, on voit mal quelle faute peut lui être reprochée de nature à voir prononcer la résolution de la vente, qu'en effet, elle s'est strictement conformée à ses obligations contractuelles, que c'est M. Declercq absent de son domicile au moment du passage des livreurs qui a rendu impossible la livraison, que d'ailleurs, on peut s'étonner de cette absence, alors qu'il avait bien été précisé à M. Declercq que la livraison interviendrait dans la matinée, ceci s'entendant de manière large compte tenu des imprévus que peuvent rencontrer les livreurs.

L'appelante prie donc la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente, et ordonné la restitution de la somme de 1748 F à M. Declercq,

- lui donner acte de ce qu'elle accepte de livrer à première demande à M. Declercq la marchandise commandée contre paiement concomitant de l'intégralité du prix,

- condamner M. Declercq au paiement d'une somme de 5 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamner M. Declercq aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP Le Roy, avoué à la cour, aux offres de droit.

M. Declercq, assigné puis réassigné, à mairie, n'a ni constitué avoué ni conclu.

Sur ce

Attendu qu'aux termes de l'art de 3.1 de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992 renforçant a protection des consommateurs, article codifié sous l'article L. 114-1 du Code de la consommation:

" Dans tout contrat ayant pour objet la vente d'un bien meuble ou la fourniture d'une prestation de services à un consommateur, le professionnel doit, lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation n'est pas immédiate et si le prix convenu excède des seuils fixés par décret, indiquer la date limite à laquelle il s'engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation.

Le consommateur peut dénoncer le contrat de vente d'un bien meuble ou de fourniture d'une prestation de services par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien ou d'exécution de la prestation excédant sept jours et non dû à un cas de force majeure.

Ce contrat est, le cas échéant, considéré comme rompu à la réception, par le vendeur ou le prestataire de services, de la lettre par laquelle le consommateur l'informe de sa décision, si la livraison n'est pas intervenue ou si la prestation n'a pas été exécutée entre l'envoi et la réception de cette lettre. Le consommateur exerce ce droit dans un délai de soixante jours ouvrés à compter de la date indiquée pour la livraison du bien ou l'exécution de la prestation... ";

Attendu, en l'espèce, qu'il ressort des pièces du dossier que le bon de commande par lequel M. Declercq s'est porté acquéreur d'un ensemble de literie mentionnait expressément que la livraison de celui-ci devait intervenir le 21 mars au matin ; qu'il convient, à ce propos, de relever que les conditions générales de vente annexées audit bon précisaient que les retards éventuels de livraison autorisaient "l'acheteur à se prévaloir des dispositions de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992 et du décret n° 92-1156 du 13 octobre 1992" ; qu'il est cependant constant que les livreurs de la société Proliterie ne se sont présentés qu'après 12 h au domicile de l'intéressé, et alors que celui-ci était absent ; que si l'appelante indique avoir une nouvelle fois tenté, le même jour vers 17 h, de procéder à la livraison desdites marchandises et avoir laissé un avis de passage dans la boîte aux lettres de l'intimé, elle ne justifie pas avoir, elle-même, pris contact par la suite avec ce dernier pour convenir d'une nouvelle date de livraison; que, dans ces conditions, la société Proliterie doit être regardée comme ayant dépassé la date de livraison convenue de plus de sept jours, autorisant, de la sorte, le consommateur à exciper des dispositions précitées de la loi susvisée du 18 janvier 1992 ; qu'est sans influence sur la mise en œuvre de ces dispositions législatives la circonstance que le retard de livraison n'aurait pas causé de réel préjudice à M. Declercq ou que les livreurs rencontrent habituellement des imprévus dans les fonctions qui sont les leurs dès lors que l'appelante n'établit, ni même n'allègue, l'existence d'un cas de force majeure, seul susceptible de justifier le dépassement des délais prévus; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont constaté le non-respect par la société Proliterie de ses engagements dans les formes et délais stipulés et prononcé, en conséquence, la résolution de la vente dont s'agit; qu'il y a lieu, dès lors, de débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire; Reçoit l'appel jugé régulier en la forme; Au fond, le rejetant, confirme le jugement déféré; Déboute la société Proliterie de l'ensemble de ses demandes; La condamne aux dépens d'appel.