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Décisions

CA Grenoble, ch. com., 20 septembre 2006, n° 06-00805

GRENOBLE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Laser Rhône-Alpes (SAS)

Défendeur :

SAFT (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Uran

Conseillers :

M. Bernaud, Mme Cuny

Avocats :

Mes Medina, Damerval

T. com. Grenoble, du 9 déc. 2005

9 décembre 2005

La SAS Laser Rhône-Alpes (LRA) se plaint de la rupture brutale par lettre du 4 octobre 2004 des relations contractuelles anciennes qu'elle entretenait avec la société SAFT, pour le compte de laquelle elle effectuait des prestations de soudure au laser et d'assemblage.

Elle a fait assigner la société SAFT devant le Tribunal de commerce de Grenoble à l'effet d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 208 027,45 euro à titre de dommages et intérêts.

Excipant de la clause attributive de compétence contenue dans ses conditions générales de vente reproduites au verso des bons de commande, la société SAFT a demandé le renvoi de l'affaire devant le Tribunal de commerce de Paris, et subsidiairement devant le Tribunal de commerce de Poitiers dans le ressort duquel est établi son siège social.

Par jugement du 9 décembre 2005, le Tribunal de commerce de Grenoble s'est déclaré territorialement incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris.

La société LRA a formé contredit le 20 décembre 2005 à l'encontre de cette décision.

Elle demande à la cour de dire que le Tribunal de commerce de Grenoble était compétent pour connaitre de sa demande, de renvoyer l'affaire à cette juridiction pour jugement au fond et de condamner la société SAFT à lui payer une indemnité de 1 000 euro pour frais irrépétibles aux motifs que la clause invoquée, qui n'a jamais été expressément acceptée et qui figure de façon peu apparente au verso des bons de commande, ne lui est pas opposable, qu'en outre le litige n'entre pas dans le champ d'application de la clause qui ne vise que l'interprétation des conditions générales ou l'exécution d'une commande, qu'en vertu de l'option de compétence instituée par l'article 46 du nouveau Code de procédure civile elle était fondée à saisir le Tribunal de commerce de Grenoble dans le ressort duquel elle effectuait des travaux de soudure sur les composants que lui expédiait la société SAFT.

Aux termes de ses conclusions en défense sur contredit signifiées et déposées le 19 mai 2006, la société SAFT sollicite la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société LRA à lui payer une indemnité de procédure de 1 000 euro aux motifs que la clause litigieuse est opposable à sa cocontractante comme figurant de façon apparente au verso des bons de commande signés, lesquels contiennent au recto une mention de renvoi aux conditions générales, et que le litige entre nécessairement dans le champ d'application de la clause dès lors que la rupture des relations contractuelles relève de l'exécution des commandes.

Motifs de l'arrêt

La clause attribuant compétence exclusive aux juridictions de Paris pour tout différend entre les parties "concernant l'interprétation des présentes conditions générales ou l'exécution d'une commande" est reproduite, avec les conditions générales d'achat de la société SAFT, au verso de chacun des bons de commande émargés par la société LRA.

Dès lors que figure au recto de chacun des nombreux ordres d'achat signés une mention de renvoi aux conditions générales reproduites au verso, et que la stipulation litigieuse est signalée par un titre en caractères gras, la clause attribuant compétence aux tribunaux parisiens est opposable à la société LRA.

Désignant la juridiction territorialement compétente en cas de litige relatif à l'interprétation des conditions générales ou à l'exécution d'une commande, la clause n'a toutefois pas vocation à s'appliquer au différend opposant les parties.

Insérée dans des conditions générales destinées à régir exclusivement chaque ordre de service particulier, dont les modalités sont définies notamment en matière de livraison, de prix, de facturation, de paiement et de garantie, la clause de juridiction, qui est d'interprétation stricte, ne peut, en effet, être étendue à tout litige intéressant la convention-cadre liant les parties et notamment à l'action indemnitaire soumise au Tribunal de commerce de Grenoble fondée sur la brutalité avec laquelle il aurait été mis fin à la relation commerciale globale entre les parties au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce.

Il convient par conséquent d'accueillir le contredit et de renvoyer l'affaire devant le Tribunal de commerce de Grenoble, qui est compétent en vertu de l'une des branches de l'option de compétence ouverte au demandeur par l'article 46 du nouveau Code de procédure civile, dès lors qu'il est constant que les travaux de soudure confiés à la société LRA étaient exécutés au siège de l'entreprise dans le ressort de cette juridiction.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant en audience publique et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, Déclare bien fondé le contredit de compétence formé par la SAS LRA ; Renvoie l'affaire devant le Tribunal de commerce de Grenoble pour jugement sur le fond; Dit n'y avoir lieu de part et d'autre à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne la SA SAFT aux dépens du contredit.