Cass. com., 18 novembre 2008, n° 07-18.599
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Le Pain de Navarre (SARL), Berthe (ès qual.)
Défendeur :
HFS (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Laporte
Avocat général :
Mme Batut
Avocats :
SCP Thomas-Raquin, Bénabent, SCP Waquet, Farge, Hazan
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 mai 2007), que le 26 novembre 1996, la société Le Pain de Navarre a souscrit auprès de la société Holding financière Seguy (la société HFS) une sous-licence d'exploitation du savoir-faire et de la marque "le Pétrin Ribeirou" ; que ce contrat d'une durée de cinq ans à compter du 13 décembre 1996 a été renouvelé par tacite reconduction jusqu'à sa dénonciation par la société Le Pain de Navarre à effet du 12 décembre 2005 ; que la société Le Pain de Navarre n'ayant plus honoré les redevances, la société HFS l'a assignée en paiement ; que cette dernière a soulevé la nullité des conventions de sous-licence et demandé subsidiairement leur résolution ou leur résiliation ainsi que la nullité des clauses de non-concurrence et de non-rétablissement ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société Le Pain de Navarre fait grief à l'arrêt d'avoir écarté l'exception de nullité des conventions de sous-licence des 13 décembre 2001, 13 décembre 2002, 13 décembre 2003 et 13 décembre 2004, tirée de la violation de l'article L. 330-3 du Code de commerce, alors, selon le moyen : 1°) que l'obligation d'information préalable à la conclusion d'un contrat d'exclusivité, prévue par l'article L. 330-3 du Code de commerce, s'applique non seulement à la conclusion du contrat initial mais aussi à la conclusion des contrats ultérieurs, notamment ceux formés par tacite reconduction ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 330-3 du Code de commerce ; 2°) que le défaut de l'information prévue par l'article L. 330-3 du Code de commerce est susceptible d'entraîner la nullité d'un contrat d'exclusivité lorsqu'il a entraîné un vice du consentement du créancier de cette information ; que dans ses conclusions d'appel, la société Le Pain de Navarre faisait valoir que l'annulation pour violation de l'article L. 330-3 du Code de commerce concernait les seuls contrats de sous-licence conclus par tacite reconduction, les 13 décembre 2001, 2002, 2003, 2004 (conclusions d'appel, p. 27) et non la convention initiale conclue le 13 décembre 2006 ; qu'en se bornant à affirmer que l'information précontractuelle avait été fournie pour la conclusion du contrat initial et qu'il n'était pas établi que cette information ait été insuffisante, sans rechercher si le défaut d'information légale lors de la reconduction tacite du contrat n'avait pas vicié le consentement de la société Le Pain de Navarre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 330-3 du Code de commerce, ensemble les articles 1110 et 1116 du Code civil ; 3°) qu'en se référant, pour écarter la demande de nullité pour vice du consentement, à l'absence de préjudice allégué, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant en violation de l'article L. 330-3 du Code de commerce, ensemble les articles 1110 et 1116 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la société Le Pain de Navarre avait eu connaissance des procédures engagées par les dissidents du réseau au plus tard en 2000, avait été secrétaire de l'association constituée pour défendre le réseau et combattu les arguments développés par les dissidents sur le savoir-faire et relevé que, nonobstant ces informations, celle-ci avait poursuivi et renouvelé le contrat de sous-licence, l'arrêt retient qu'une information avait été donnée préalablement à la signature du contrat et qu'il appartenait à la société Le Pain de Navarre d'établir son insuffisance et en quoi celle-ci a vicié son consentement ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations desquelles il ressortait que le défaut d'information invoqué n'avait pu vicier le consentement de la société Le Pain de Navarre qui ne l'alléguait pas au soutien de sa demande en nullité sur le fondement de l'article L. 330-3 du Code commerce, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués dans la première et la troisième branches, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Le Pain de Navarre fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes de résolution et subsidiairement de résiliation des conventions de sous-licence, alors, selon le moyen que le savoir-faire doit revêtir un caractère secret pour pouvoir être l'objet d'un contrat ; que dans ses conclusions d'appel, la société Le Pain de Navarre soutenait que la licence de sous-location était privée d'objet puisque le savoir-faire transféré n'avait aucun caractère secret ou avait à tout le moins perdu son caractère confidentiel, notamment depuis 2002, date à laquelle un grand nombre de franchisés avaient quitté le réseau de la société HFS et cela sans qu'aucune mesure de protection du procédé de fabrication ne fut prise ;qu'en se bornant à affirmer que le franchiseur avait fourni un savoir-faire eu égard à l'originalité du concept du Pétrin Ribeirou, sans rechercher si ce concept avait été gardé secret lors de l'exécution du contrat de sous-licence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société Le Pain de Navarre ait soutenu devant la cour d'appel que le savoir-faire aurait perdu son caractère secret au cours de l'exécution du contrat de sous-licence ; que le moyen est donc nouveau et, mélangé de fait et de droit ;
Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Le Pain de Navarre fait grief à l'arrêt d'avoir limité l'annulation de la clause de non-concurrence qu'elle a souscrite et d'avoir dit que la clause de non-concurrence et de non-rétablissement à laquelle elle était tenue concernait l'interdiction de s'affilier directement ou indirectement à un réseau concurrent durant trois ans à compter de la cessation du contrat dans la zone mentionnée et l'interdiction d'exploiter le savoir-faire et les produits développés sous la marque "le Pétrin Ribeirou", alors, selon le moyen : 1°) qu'en vertu de l'article 5 b du règlement communautaire n° 2790-1999 du 22 décembre 1999, est prohibée la clause de non-concurrence indispensable à la protection d'un savoir-faire transféré par le franchiseur à son franchisé dont la durée est supérieure à un an à compter de la cessation du contrat de franchise ; que cette prohibition concerne aussi bien les clauses de non-rétablissement que les clauses de non-affiliation à un réseau ; qu'en refusant d'annuler la clause de non-concurrence en ce qu'elle interdit à la société Le Pain de Navarre de s'affilier à un réseau concurrent durant trois ans après avoir quitté le réseau de la société HFS, la cour d'appel a violé l'article 5 b précité ; 2°) qu'est nulle la clause de non-concurrence, fût-elle une clause de non-affiliation, lorsqu'elle est dépourvue de toute contrepartie financière accordée au franchiseur ; qu'en affirmant que la clause de non-affiliation souscrite par la société Le Pain de Navarre était licite, la cour d'appel a violé le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société Le Pain de Navarre ait soutenu devant la cour d'appel que la durée convenue de la clause de non-concurrence devait entraîner son annulation par application du règlement communautaire du 22 décembre 1999 ; que le moyen est donc nouveau et mélangé de fait ;
Attendu d'autre part, qu'après avoir relevé que la clause de non-concurrence invoquée était limitée dans l'espace au département de la zone de chalandise définie au contrat ainsi qu'aux départements limitrophes et dans le temps à trois années et qu'elle était indispensable à la protection des intérêts légitimes de la société HFS, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que cette clause était licite ; d'où il suit qu'irrecevable en sa première branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.