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Décisions

CA Paris, 1re ch. H, 23 septembre 2008, n° 2008-15800

PARIS

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Plysorol (SAS)

Défendeur :

Président du Conseil de la concurrence, Ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avoué :

SCP Roblin-Chaix de Lavarene

Avocats :

Me Quint, SCP Granrut

CA Paris n° 2008-15800

23 septembre 2008

Ayant reçu une demande de clémence émanant de la société UPM Kymmene, le Conseil de la concurrence s'est saisi d'office, le 14 mai 2004, de la situation de la concurrence dans le secteur du bois.

Par décision n° 08-D-12 du 21 mai 2008, le Conseil a retenu que huit entreprises avaient enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce dans le secteur des contreplaqués et leur a infligé, à l'exception de la société UPM Kymmene, des sanctions pécuniaires, tout en ordonnant la publication de la décision à leurs frais partagés.

La société Plysorol, condamnée à une sanction de 4 240 000 euro, a formé un recours contre cette décision le 27 juin 2008 et, par assignations délivrées les 22, 24, 28 et 30 juillet 2008 aux autres parties sanctionnées ainsi qu'au ministre chargé de l'Economie, a saisi la cour d'une demande de sursis à l'exécution de la sanction.

A l'audience du 8 septembre 2008, ont été entendus en leurs observations le conseil de la société Plysorol, qui a été mis en mesure de répliquer, le représentant du Conseil de la concurrence qui s'est opposé à la demande, celui du ministre chargé de l'Economie qui a conclu au sursis demandé et le Ministère public qui a admis la possibilité d'un sursis partiel.

Sur ce :

Attendu qu'il résulte de l'article L. 464-8 du Code de commerce que le recours n'est pas suspensif mais que le premier Président de la Cour d'appel de Paris, ou son délégué, peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu postérieurement à sa notification des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité;

Attendu que la société Plysorol invoque les conséquences manifestement excessives qui résulteraient pour elle du paiement immédiat de la sanction du fait de sa situation financière difficile, proche du dépôt de bilan ; qu'elle précise à cet égard que son activité est déficitaire depuis 2000, à l'exception de l'exercice 2004 où elle est parvenue à un équilibre qu'elle attribue à la réintégration de provisions pour un montant de 1,8 million d'euro comptabilisés sur un exercice antérieur, ainsi qu'aux effets, qu'elle estime provisoires, des mesures anti-dumping imposées par la Commission européenne aux importations chinoises; qu'elle ajoute qu'elle a dû fermer son usine de Rochefort en 2001 en licenciant 185 salariés, qu'elle a réduit ses effectifs de moitié depuis 2000, qu'en 2006, son résultat net était déficitaire de 5 035 865 euro et, en 2007, de 10 064 873 euro et que, le 8 avril 2008, son commissaire aux comptes a, pour la seconde fois, informé son président de certains faits de nature à compromettre son activité, soulignant même qu'elle est inscrite à la Banque de France à la suite d'incidents de paiements de lettres de change;

Attendu qu'il résulte en effet des documents produits, notamment comptables, de la procédure d'alerte mise en œuvre par le commissaire aux comptes le 9 avril 2008 et de la réponse subséquente de son dirigeant que la société Plysorol connaît des tensions importantes sur sa trésorerie, qu'elle éprouve des difficultés à honorer ses fournisseurs, qu'elle ne pourra obtenir rapidement le remboursement des comptes-courants débiteurs de ses filiales africaines, elles-mêmes en difficulté, et qu'elle ne doit finalement sa survie qu'aux avances répétées et significatives consenties par la société-mère, la société Elmo SGPS, en sus du non remboursement de son compte-courant créditeur (39 M€) ; que ces difficultés avérées, qui sont de nature à menacer la continuité de son exploitation, justifient qu'il soit sursis à l'exécution de la sanction;

Par ces motifs, Ordonnons le sursis de l'exécution de la sanction prononcée contre la société Plysorol par la décision n° 08-D-12 rendue par le Conseil de la concurrence le 21 mai 2008, jusqu'à ce que la cour statue sur le bien-fondé du recours formé par cette société contre la décision; Laissons les dépens de la présente instance à la charge de la société Plysorol.