Cass. com., 16 décembre 2008, n° 07-21.903
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Garage Gremeau (SA)
Défendeur :
Mercedes Benz France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Michel-Amsellem
Avocat général :
M. Bonnet
Avocats :
SCP Ghestin, SCP Peignot, Garreau
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 novembre 2007), que la société Daimler Chrysler France (la société DCF), devenue la société Mercedes Benz France, importateur en France des véhicules de la marque Mercedes Benz, qu'elle distribue par un réseau de distributeurs indépendants, a conclu avec la société Garage Gremeau, le 17 octobre 1996, un contrat de concession exclusive pour le territoire dit " de la concession de Dijon ", pour une durée indéterminée ; qu'ayant décidé de restructurer son réseau en supprimant un certain nombre de distributeurs pour constituer des grandes " plaques régionales de distribution " de véhicules neufs de marque Mercedes Benz, la société DCF a informé, le 8 janvier 2001, la société Garage Gremeau qu'elle avait décidé d'attribuer la " plaque " de distribution qui le concernait à d'autres concessionnaires, MM. Bernard et Chwatacz exploitant ensemble au sein de la société Etoile 21, et l'a invitée à étudier la reprise de son activité par ces derniers ; que par lettre du 25 juin 2001, la société DCF a notifié à la société Garage Gremeau qu'elle résiliait le contrat de concession pour le 30 juin 2003, c'est-à-dire avec un préavis de deux ans ; qu'invoquant la violation de ses obligations contractuelles et diverses fautes rendant abusive la mise en œuvre du droit de résiliation, la société Garage Gremeau a poursuivi la société DCF en réparation ;
Sur le second moyen : - Attendu que la société Garage Gremeau fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement ayant rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation des divers préjudices que lui a causé la rupture abusive du contrat de concession, alors, selon le moyen : 1°) que commet un abus de droit de résilier un contrat de concession, le concédant qui agit dans le but de réserver la concession à un nouveau concessionnaire sans que celui-ci ait besoin de racheter l'activité de l'ancien concessionnaire ; que la société DCF a, dès le 8 janvier 2001, choisi MM. Bernard et Chwatacz comme nouveaux concessionnaires exclusifs sur le territoire de la Bourgogne, bien qu'ils n'aient pas satisfait aux critères de la marque ; que la société DCF a interdit une association paritaire entre les nouveaux concessionnaires qu'elle avait choisis et la société Garage Gremeau ; qu'elle a fait chiffrer à un prix dérisoire la valeur de la concession du Garage Gremeau ; qu'elle a permis au nouveau concessionnaire d'installer les locaux de sa concession à 850 mètres des installations du Garage Gremeau ; qu'elle a laissé et même facilité l'appréhension de la clientèle développée pendant 20 ans par la société Garage Gremeau par le nouveau concessionnaire sans bourse délier ; qu'en estimant néanmoins que la société DCF n'avait commis aucun abus dans son droit de résilier le contrat de concession, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; 2°) que commet un abus de droit de résilier un contrat de concession exclusive, le concédant qui rompt le contrat sans motif bien que le concédant ait développé une activité en progression constante, afin d'attribuer le territoire concédé à un nouveau concessionnaire sans permettre à l'ancien concédant de retirer la juste contrepartie de 20 années de développement de la clientèle ; que la société Garage Gremeau avait développé une activité en progression constante supérieure à la moyenne nationale et meilleure que celle du concessionnaire choisi auquel DCF a attribué la concession sans permettre à la société Garage Gremeau de retirer la moindre contrepartie de la clientèle qu'elle avait développée pendant 20 ans ; qu'en estimant néanmoins que la société DCF n'avait pas commis de faute dans l'exercice de son droit de résilier le contrat de concession, la cour d'appel a derechef violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la société DCF, qui a seulement proposé une association de nature à constituer une " plaque solide " entre les concessionnaires déjà implantés dans la région et les nouveaux distributeurs, est demeurée extérieure aux négociations entre ces parties puisqu'elle s'est bornée à suggérer si elles le souhaitaient, de recourir à un arbitrage spécifique dans lequel elle n'intervenait pas ; que l'arrêt ajoute que la société Garage Gremeau n'a fait aucune proposition à MM. Bernard et Chwatacz, nouveaux concessionnaires agréés par la société DCF, même au vu d'une évaluation autre que celle du cabinet Price Waterhouse Coopers, se bornant à faire connaître au concédant qu'elle accepterait à la rigueur une association à 50 % avec eux, ce à quoi la société DCF s'est opposée car elle aurait eu alors deux " investisseurs " pour la " plaque Bourgogne Nord " tandis que l'économie de sa restructuration était de diminuer le nombre des investisseurs ; que l'arrêt relève encore qu'aucune disposition contractuelle n'interdisait l'autorisation d'implantation d'un nouveau concessionnaire à proximité de l'ancien ; qu'en l'état de ces observations et constatations dont elle a déduit que les conditions défavorables du transfert de la clientèle de la société Garage Gremeau, qui n'a pas voulu s'associer de quelque manière que ce soit à MM. Bernard et Chwatacz, nouveaux concessionnaires, ne résultaient pas d'un comportement fautif de la société DCF, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.