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Décisions

Ministre de l’Économie, 29 décembre 2008, n° ECEC0901731S

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ECONOMIE

Défendeur :

Conseil de la société Cofepp

Ministre de l’Économie n° ECEC0901731S

29 décembre 2008

MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI

Maître,

Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 3 décembre 2008, vous avez notifié la prise de contrôle exclusif d'actifs du groupe Boisset (ci-après " l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset ") par la société Compagnie Financière Européenne de Prises de Participations (ci-après " la Cofepp ") (1). Cette opération a été formalisée par un protocole de cession signé le 25 septembre 2008.

1. LES ENTITÉS CONCERNÉES ET L'OPÉRATION

Les entités concernées par la présente opération sont les suivantes : la Cofepp, l'acquéreur, et l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset, la cible.

La Cofepp est une société anonyme placée sous le contrôle exclusif de Monsieur Jean-Pierre Cayard et de sa famille. Aucun des membres de cette famille ne détient de participations contrôlantes dans d'autres sociétés. La Cofepp et l'ensemble de ses participations contrôlantes, seront ci-après désignées, pour les besoins de la présente notification, " groupe Cofepp ". Le groupe Cofepp est actif dans la production et la vente de spiritueux. Il exerce notamment un contrôle exclusif sur les sociétés La Martiniquaise et Bardinet.

En 2007, le groupe Cofepp a réalisé un chiffre d'affaires mondial total consolidé d'environ 770 millions d'euro hors taxes, dont environ 520 millions d'euro réalisés en France.

L'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset regroupe, d'une part, l'intégralité du capital des sociétés suivantes : Casanis SAS, Maison Duval SAS, Manor SAS, Rapha SAS, Valauria SAS, Saint- Raphaël SAS, Avèze SAS et Société de Participations Viticoles (ci-après " SPV "). Ces sociétés ont pour principaux actifs les marques commerciales éponymes, sauf la société SAS Avèze, qui est également propriétaire d'un site de production situé à Riom-ès-Montagnes (Cantal), et SPV, qui détient 49 % du capital des Distilleries Bruggeman et une option d'achat sur le reste du capital de ces distilleries. Cette activité se compose, d'autre part, de l'ensemble (i) des actifs et du personnel attachés à la branche d'activité alcools, spiritueux et sirops de la société L'Héritier Guyot SA, (ii) des éléments incorporels et du personnel attachés à la branche d'activité alcools et spiritueux de la société Morin Père et Fils SARL, (iii) des éléments incorporels, du personnel et des contrats attachés à la branche d'activité marques de distributeurs (" MDD ") et marques premier prix (" MPP ") de la société FGVS ainsi que (iv) les actifs corporels afférents à l'activité de fabrication et de commercialisation d'alcools et spiritueux de la société FGVS. L'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset consiste ainsi en la commercialisation d'apéritifs anisés, d'apéritifs à base de gentiane, d'apéritifs à base de vins, de vins doux naturels, de crèmes de fruits et de liqueurs modernes.

En 2007, le chiffre d'affaires mondial total consolidé correspondant à l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset s'est élevé à environ 70 millions d'euro hors taxes, dont environ 66 millions d'euro réalisés en France.

La présente opération consiste en la prise de contrôle exclusif de l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset par la Cofepp. En effet, à l'issue de l'opération, la Cofepp aura racheté l'ensemble des sociétés et actifs constituant l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset.

En ce qu'elle entraîne la prise de contrôle exclusif de l'Activité alcools et spiritueux du Groupe Boisset par la Cofepp, la présente opération constitue bien une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires des entités concernées, elle ne revêt pas une dimension communautaire et est soumise aux dispositions des articles L. 430.3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

2. LES MARCHÉS CONCERNÉS

Les parties sont simultanément actives dans le secteur des spiritueux et autres alcools apéritifs.

2.1. Les marchés de produits

2.1.1. Segmentation selon le produit

Concernant les spiritueux, la pratique décisionnelle de la Commission européenne (2) considère de manière constante que chaque type de spiritueux (gin, rhum, vodka, whisky, tequila, anisés, amers, liqueurs, cognac/armagnac et autres eaux de vie), constitue un marché pertinent en raison de la faible substituabilité entre des différents alcools. Cette faible substituabilité est due aux différences de goût ainsi qu'à l'existence de caractéristiques propres à chaque spiritueux. Le ministre de l'Economie a confirmé cette analyse dans sa lettre n° C2006-26 en date du 28 mars 2006 aux conseils de la société Saint Louis Sucre, relative à une concentration dans le secteur des spiritueux.

En revanche, les parties considèrent que, du point de vue de consommateur, divers types de boissons spiritueuses qui ont pu être considérées comme relevant de marchés distincts, sont en réalité substituables entre elles. Par ailleurs, elles insistent sur le fait que de nombreuses boissons spiritueuses sont désormais concurrencées par le vin, en fonction notamment du moment où elles sont consommées dans la journée. L'instruction de la présente opération et les retours au test de marché ont néanmoins confirmé la pratique décisionnelle antérieure des autorités communautaire et nationale de concurrence, dans la mesure où chaque spiritueux répond à des habitudes de consommation ainsi qu'à des typologies de clientèles différentes.

Au cas présent, les parties sont simultanément actives sur les marchés des anisés, des liqueurs et des amers. Par ailleurs, le groupe Cofepp est également actif sur les marchés du rhum, du gin, de la vodka, du whisky, de la tequila et du cognac/armagnac et autres eau-de-vie.

Concernant les autres alcools apéritifs, le ministre de l'Economie, dans la décision Saint Louis Sucre précitée, a considéré que les vins doux naturels, le porto et les vermouths constituaient chacun un marché pertinent. Par ailleurs, la pratique décisionnelle de la Commission européenne (3) a relevé l'existence d'un marché des " apéritifs légers " incluant notamment les vins aromatisés, catégorie à laquelle les vermouths appartiennent. [...].

Au cas présent, les parties sont simultanément actives sur les marchés des apéritifs légers et des vins doux naturels. Par ailleurs, le groupe Cofepp est également actif sur les marchés des portos et des cocktails.

En conclusion, les marchés concernés par la présente opération sont, au titre des effets horizontaux, ceux des anisés, des amers, des vins doux naturels, des liqueurs ainsi que des apéritifs légers et, au titre des effets congloméraux, ceux du gin, de la vodka, du whisky, de la tequila, du rhum, du porto et du cognac/armagnac et autres eau-de-vie. Au sein de chacun de ces marchés, des segmentations supplémentaires peuvent être introduites qui seront ci-après développées.

2.1.1.1 Les liqueurs

Les liqueurs constituent un ensemble de boissons obtenues par aromatisation d'un alcool, qui peut être d'origine agricole ou issu d'une autre boisson spiritueuse. Elles sont ensuite édulcorées et enrichies en produits d'origine agricole ou en denrées alimentaires (crème, lait, autres produits laitiers, fruits, etc.).

La pratique décisionnelle de la Commission européenne (4) considère que chaque type de liqueur peut constituer un marché pertinent, en raison des différences de goût existant entre les liqueurs. En revanche, le ministre de l'Economie, dans la décision Saint Louis Sucre, a analyse un marché global des liqueurs. Au cas d'espèce, les réponses au test de marché ont indiqué la possibilité de segmenter le marché des liqueurs entre les liqueurs traditionnelles (Grand Marnier, Cointreau, etc.), les liqueurs modernes (Passoa, Manzana, etc.) et les crèmes de fruits, chacune répondant à des usages et un type de clientèle particulier. Les parties vendent simultanément des liqueurs modernes et des crèmes de fruits. Si une segmentation plus fine au sein de chacun de ces deux segments devait être envisagée, conformément à la pratique décisionnelle communautaire, l'opération entraînerait un chevauchement sur les liqueurs de pomme (manzana) concernant les liqueurs modernes. Concernant les crèmes de fruit, une segmentation plus fine peut être envisagée, entre les crèmes de cassis, d'une part, et les autres crèmes de fruit, d'autre part, bien qu'il existe, selon les parties, une forte substituabilité entre les différents parfums. En effet, les crèmes de cassis représentent plus de 75 % des ventes de crèmes de fruit et peuvent être valorisées par l'appellation " de Dijon ". Cette mention est uniquement attribuée aux producteurs qui font macérer leurs fruits sur la commune de Dijon. Les parties soutiennent que cette appellation n'est pas systématiquement associée à un produit haut de gamme. Elles soulignent ainsi que divers producteurs de crèmes de cassis, tels que les sociétés Vedrenne et Cartron, implantés hors de la commune de Dijon ont développé des crèmes de " cassis de Bourgogne " qui peuvent être vendues à des prix supérieurs à ceux des crèmes de cassis de Dijon. Néanmoins, les réponses au test de marché ont indiqué que l'appellation " de Dijon " restait une mention valorisante recherchée par une partie des consommateurs.

En l'espèce toutefois, la question de la délimitation précise du marché des liqueurs peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Compte tenu de l'activité des parties, l'analyse concurrentielle sera menée sur le marché global des liqueurs, sur le segment des liqueurs modernes ainsi que sur le sous-segment de la manzana, le segment des crèmes de fruits ainsi que sur les soussegments des crèmes de cassis (en distinguant en son sein les crèmes de cassis de Dijon, d'une part, et les autres crèmes de cassis, d'autre part) et des autres crèmes de fruit.

2.1.1.2 Les anisés

Les apéritifs anisés sont obtenus par aromatisation d'un alcool d'origine agricole avec des extraits naturels d'anis étoilé, d'anis vert, ou de toute autre plante qui contient le même constituant aromatique principal (fenouil, badiane, etc.).

En France, la consommation d'apéritifs anisés est essentiellement axée sur le Pastis qui constitue plus de 98 % des ventes d'anisés. Les anisés blancs ne représentent qu'une part marginale de la consommation d'apéritifs anisés. Les parties vendent simultanément du Pastis, tandis que le groupe Cofepp propose également des anisés blancs.

La Commission européenne (5) a envisagé l'existence d'un marché global des anisés. Certaines réponses au test de marché ont considéré qu'une segmentation entre anisés jaunes (Pastis) et anisés blancs serait pertinente.

En l'espèce toutefois, la question d'une éventuelle segmentation entre anisés blancs et Pastis peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Au cas présent, l'analyse concurrentielle sera menée sur le marché global des anisés, dans la mesure où l'opération n'entraîne pas de chevauchement d'activité sur le segment des anisés blancs et où ce segment ne représente qu'une part marginale des ventes d'apéritifs anisés.

2.1.1.3 Les amers

Les amers sont fabriqués à partir de l'infusion de plantes amères (les plus utilisées étant la gentiane amère, l'orange amère et le quinquina). Le marché se compose de différents types de boissons comme les bitters ou encore les boissons à base de gentiane (ci-après " gentianes "). Les parties vendent uniquement des gentianes.

La pratique décisionnelle de la Commission européenne (6) n'a pas envisagé de segmentation de ce marché suivant les différentes catégories d'amers. En revanche, les réponses au test de marché ont souligné que les gentianes pouvaient constituer un marché pertinent. En l'espèce toutefois, la question d'une éventuelle segmentation au sein du marché des amers peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Au cas présent, l'analyse concurrentielle sera menée sur le marché global des amers, ainsi que sur le segment des gentianes, seul segment sur lequel les parties sont actives.

2.1.1.4 Les vins doux naturels

Les vins doux naturels sont des boissons apéritives principalement produites dans le sud de la France (vallée du Rhône et Languedoc-Roussillon) et dans certains pays méditerranéens comme l'Italie, la Grèce, l'Espagne et le Portugal. Ces vins sont obtenus par l'apport d'un supplément d'alcool neutre sur le moût du raisin afin d'arrêter la fermentation et de conserver une partie du sucre.

Le ministre de l'Economie, dans sa décision Saint Louis Sucre précitée, a considéré l'existence d'un marché global des vins doux naturels. Néanmoins, une segmentation plus fine de ce marché peut être envisagée, dans la mesure où l'instruction du présent dossier a indiqué que la couleur du vin constituait un élément important dans le choix du consommateur. En France, les vins doux naturels regroupent les Muscats (blancs), les Rivesaltes et les Banyuls (tuilés ou ambrés) (7). Néanmoins, les catégories Rivesaltes et Banyuls peuvent être regroupées dans un même segment étant donné que ces deux produits sont élaborés à partir des mêmes cépages principaux et que leur goût ainsi que leur couleur sont proches.

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation du marché des vins doux naturels suivant la couleur peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Au cas présent, l'analyse concurrentielle sera menée sur le marché global des vins doux naturels, ainsi que sur le segment des vins doux naturels blancs (Muscats), d'une part, et sur celui des vins doux naturels rouges (regroupant les Rivesaltes ainsi que les Banyuls), d'autre part.

2.1.1.5 Les apéritifs légers

La Commission européenne (8) a relevé l'existence d'un marché global des apéritifs légers incluant les vermouths, les vins apéritifs et les apéritifs à base de vins de fruit. Les parties sont uniquement actives sur les deux premières catégories d'apéritifs légers. Les vermouths et les vins apéritifs sont obtenus à partir de vin auquel est ajouté de l'alcool ayant été aromatisé à l'aide de substances telles que des herbes aromatiques et/ou des épices. Les vermouths et les vins apéritifs appartiennent ainsi à la catégorie des " vins aromatisés " telle que définie dans le règlement communautaire n°1601-91 du 10 juin 1991.

En l'espèce toutefois, la question de l'existence d'un marché distinct des vins aromatisés peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Au cas présent, l'analyse concurrentielle sera uniquement menée sur le segment des vins aromatisés, seul segment sur lequel existe un chevauchement d'activité entre les parties.

Au sein des vins aromatisés, la question d'une segmentation plus fine suivant le type d'aromatisation subie peut être envisagée. Le règlement communautaire précité distingue ainsi trois catégories de vins aromatisés : les vermouths, les vins aromatisés amers et les vins aromatisés à l'oeuf. Néanmoins, une telle segmentation n'aboutirait à aucun chevauchement d'activité entre les parties, dans la mesure où le groupe Cofepp est uniquement actif sur les vermouths, tandis que l'Activité alcools et spiritueux du groupe Boisset relève des vins aromatisés amers (Américano et vin au quinquina).

2.1.1.6 Le porto

Le porto est un vin muté portugais, produit uniquement dans la région du Douro. La pratique décisionnelle du ministre de l'Economie (9) a considéré que le Porto constituait un marché pertinent, tandis que la pratique décisionnelle de la Commission européenne (10) a envisagé l'existence d'un marché plus large, celui des vins fortifiés qui engloberait le porto mais également le xérès (vin blanc espagnol).

Au cas d'espèce, la question de la délimitation précise du marché peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. Le groupe Cofepp étant uniquement présent dans la commercialisation de Porto, seul ce segment sera analysé dans l'analyse concurrentielle de la présente opération, au titre d'éventuels effets congloméraux.

L'instruction du présent dossier a montré que les portos pouvaient être segmentés suivant leur couleur (essentiellement rouge ou blanc).

En l'espèce toutefois, la question d'une éventuelle segmentation par couleur peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.7 Le gin

Le gin est une eau-de-vie composée de grains et de baies de genévrier ainsi que d'un alcool d'origine agricole. La pratique décisionnelle des autorités communautaire (11) et nationale (12) considère qu'il s'agit d'un marché pertinent de produit, thèse soutenue par les parties et que l'instruction du présent dossier n'a pas permis de remettre en cause.

2.1.1.8 La téquila

La téquila est une boisson alcoolisée produite essentiellement au Mexique à partir d'une plante, l'agave bleue. La pratique décisionnelle des autorités communautaire (13) et nationale (14) considère qu'il s'agit d'un marché pertinent de produit, thèse soutenue par les parties et que l'instruction du présent dossier n'a pas permis de remettre en cause.

2.1.1.9 La vodka

La vodka est une eau-de-vie qui peut être produite à partir de seigle, de blé, de pomme de terre ou de betterave. La pratique décisionnelle du ministre de l'Economie (15) considère qu'il s'agit d'un marché pertinent de produit. La Commission européenne (16) a, en revanche, envisagé l'existence d'une segmentation entre les vodkas natures et les vodkas aromatisées, tout en laissant la question ouverte.

En France, les vodkas aromatisées sont toutefois moins développées que dans d'autres pays européens, elles ne représentent qu'une part marginale de la consommation de vodka (17).

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation entre vodka nature et vodka aromatisée peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.10 Les cognac/armagnac et autres eaux de vies

La terminologie eau-de-vie désigne de façon générique le produit de la distillation d'un liquide faiblement alcoolisé produit à partir de vin, de fruits, d'herbe ou de grains. Cette terminologie inclut de nombreuses boissons alcoolisées telles que le cognac, l'armagnac, le calvados ou encore le kirsch.

En l'espèce, le groupe Cofepp vend du cognac, de l'armagnac et du calvados.

La pratique décisionnelle communautaire (18) a envisagé l'existence d'un marché des cognacs/armagnacs et autres eau-de-vie. Au sein de ce marché, elle a considéré que le les cognacs/armagnacs pouvaient constituer un segment distinct, dans la mesure où ce sont deux eau-de-vie de vin, où leurs prix sont relativement proches et où leurs zones de production sont relativement éloignées de celles des autres eaux-de-vie. Néanmoins, l'instruction du présent dossier ainsi que les réponses au test de marché ont souligné la pertinence d'une segmentation entre l'armagnac, d'une part, et le cognac, d'autre part. En effet, chacun de ces produits doit respecter des normes de production précises et être produit dans une région très délimitée (autour de Cognac pour le Cognac et dans des régions d'appellations Bas-Armagnac, Téranèze et Haut-Armagnac, situées en Gascogne, pour l'Armagnac).

Par ailleurs, la question d'un segment distinct du calvados peut également être envisagée, compte-tenu de l'existence d'une zone géographique limitée pour la production de cette eau-de-vie. En l'espèce toutefois, la question de l'existence de marchés distincts de l'armagnac, du cognac et du calvados peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.11 Le whisky

Le whisky est une eau-de-vie d'orge maltée, parfois additionnée de seigle, d'avoine ou encore de maïs. La pratique décisionnelle communautaire (19) a considéré que ce marché pouvait être segmenté en fonction de l'origine du whisky (Irlande, Ecosse, Canada et Etats-Unis). En l'espèce, le groupe Cofepp vend majoritairement des whiskies écossais, et dans une moindre mesure des whiskies américains, irlandais et d'origines autres. Les parties considèrent qu'une telle distinction n'est pas pertinente sur le marché français, dans la mesure le whisky écossais représente 88 % des ventes de whisky sur le circuit " off trade " (consommation à domicile).

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation par origine du whisky peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.12 Le rhum

Le rhum est une eau-de-vie issue de la canne à sucre. Il est issu soit directement du jus de canne à sucre (rhum pouvant bénéficier de l'appellation " rhum agricole "), soit de mélasses ou de sirops provenant de la fabrication du sucre de canne (rhum non-agricole).

La pratique décisionnelle des autorités communautaire (20) et nationale (21) de concurrence a envisagé l'existence d'un marché global du rhum. Toutefois, l'instruction du présent dossier ainsi qu'une partie des réponses au test de marché ont souligné la pertinence d'une segmentation entre rhum agricole et rhum non-agricole, dans la mesure où il existe des différences notables de goût, de qualité et de prix entre ces deux catégories de produits. En outre, au sein de chacun de ces deux segments, une segmentation supplémentaire suivant l'âge, auquel correspond une couleur particulière, pourrait être envisagée.

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation du marché du rhum suivant qu'il soit ou non d'origine agricole et suivant l'âge peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.13 Les cocktails

Les cocktails sont des mélanges de boissons composés d'au moins un alcool. Les punchs sont les cocktails les plus consommés. Ils représentent en effet 75 % des ventes de cocktails. Ils sont composés de rhum auquel sont rajoutés différents arômes dont notamment des jus de fruit et des épices. Selon les parties, l'existence d'une distinction entre les punchs, d'une part, et les autres cocktails, d'autre part, est peu pertinente dans la mesure où les principaux acteurs du marché (les groupes Cofepp et Marie Brizard) sont actifs sur ces deux segments et où les ventes de cocktails enregistrent une nette progression (plus de 12 % en valeur sur un an), tandis que les ventes punchs reculent (moins 3 % en valeur sur un an).

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation entre les punchs d'une part, et les cocktails autres, d'autre part, peut être laissée ouverte dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.2. Segmentation suivant le canal de distribution

La pratique décisionnelle des autorités communautaire (22) et nationale (23) de concurrence opère une distinction entre la distribution de boissons destinées à la consommation à domicile, circuit " off trade ", et la distribution de boissons destinées à la consommation hors domicile, circuit " on trade ", chacun de ces circuits constituant un marché pertinent. Cette segmentation se fonde sur l'existence de caractéristiques propres à chacun des canaux (conditionnement des bouteilles différencié suivant le circuit, forces de vente dédiées à chacun des circuits, etc.).

L'instruction n'ayant pas permis de remettre en cause la pertinence d'une segmentation suivant le canal de distribution, l'analyse concurrentielle sera menée, d'une part, sur le marché de la distribution de boissons destinées à la consommation hors domicile et d'autre part, sur le marché de la distribution de boissons destinées à la consommation à domicile.

2.1.2.1 Segmentation suivant le positionnement du produit

Au sein du marché de la distribution de boissons destinées à la consommation à domicile, la pratique décisionnelle du ministre de l'Economie (24) opère généralement une distinction selon le positionnement du produit. En effet, les produits peuvent être vendus sous différents types de marque, à savoir les marques de fabricant (MDF), les marques de distributeur (MDD), les marques de hard discount (MHD) et les marques de premier prix (MPP).

Selon les parties, il n'y a pas lieu de segmenter les différents marchés des spiritueux et autres alcools apéritifs selon les types de marque. Elles estiment tout d'abord qu'une segmentation entre les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MDD, MHD et MPP n'est pas pertinente, dans la mesure où les écarts de prix entre ces produits seraient relativement faibles. De plus, elles considèrent que les produits vendus sous MDD, MHD et MPP exercent une pression forte sur les produits de MDF sur les marchés concernés par la présente opération. Les parties citent le cas des crèmes de fruit, segment sur lequel les MDD, MHD et MPP représentent plus de 70 % des ventes de crèmes de fruit.

Enfin, selon les parties, les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MDD répondent aux mêmes exigences organoleptiques que les produits vendus sous MDF, l'écart de prix entre ces deux produits s'expliquant par le fait que les produits de MDD ne subissent aucun coût lié à la promotion de la marque.

Il ressort cependant de l'instruction du présent dossier et des réponses aux tests de marché qu'une telle segmentation est pertinente.

En premier lieu concernant la segmentation entre MDD et MDF, il convient de souligner que les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MDD font généralement l'objet d'un appel d'offre et sont soumis à un cahier des charges particulier préalablement établi par le distributeur, ce qui n'est pas le cas pour les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MDF. Par ailleurs, les acteurs intervenant sur la fabrication de spiritueux et autres alcools apéritifs ne sont pas nécessairement les mêmes suivant le positionnement du produit. A titre d'exemple, le groupe Pernod Ricard propose uniquement des produits MDF, tandis que le Groupe Quartier Français est présent sur certains marchés uniquement au travers de produits MDD. Enfin, il existe des différences de prix substantielles entre les produits vendus sous MDD et ceux vendus sous MDF sur les marchés concernés par l'opération. En effet, les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MDF sont au minimum 10 % plus chers que ceux vendus sous MDD, à l'exception des segments des cocktails et des Muscats.

En second lieu, concernant la pertinence d'une segmentation entre MDD, MHD et MPP, il convient de souligner que les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MPP peuvent ne pas faire l'objet d'un appel d'offre et ne pas être soumis à un cahier des charges précis fixé par le distributeur. En outre, il existe des différences substantielles de prix entre les produits MDD et MHD.

En effet, les spiritueux et autres alcools apéritifs vendus sous MHD sont au minimum 5 % plus chers que ceux vendus sous MDD, à l'exception des segments des gentianes et des crèmes de fruit.

En conclusion, les différences de prix, de qualité et de caractéristiques, peuvent justifier le recours à une segmentation suivant le positionnement du produit.

En l'espèce toutefois, la question d'une segmentation des marchés suivant le positionnement des produits peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.2. Les marchés géographiques

La pratique décisionnelle des autorités communautaire (25) et nationale (26) de concurrence considère que les différents marchés des spiritueux et autres boissons apéritives alcoolisées sont de dimension nationale en raison de l'existence d'habitudes de consommation qui diffèrent selon les états. Dans la décision Pernod Ricard/V&S du 17 juillet 2008, la Commission européenne a certes relevé l'émergence de marques communes à plusieurs Etats. Elle a toutefois considéré que malgré cette tendance naissante, les marchés restaient essentiellement nationaux. Les parties ont souligné que les appels d'offre de leurs clients sont de plus en plus souvent passés au niveau européen ce qui amène des producteurs de pays voisins à postuler et dans certains cas à remporter ces appels.

En l'espèce toutefois, la question de la délimitation précise des marchés de produits concernés peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la dimension retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. En l'espèce, l'analyse concurrentielle sera menée au niveau national, niveau sur lequel les parts de marché des parties sont les plus importantes.

3. L'ANALYSE CONCURRENTIELLE

3.1. Analyse des effets horizontaux

L'opération entraîne des chevauchements d'activité sur le segment des vins aromatisés ainsi que sur les marchés des liqueurs, des apéritifs anisés, des apéritifs amers et des vins doux naturels.

3.1.1. Les vins aromatisés

3.1.1.1 Segment de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation hors domicile

Sur le segment de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation hors domicile, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inchangée dans la mesure où seuls les actifs cédés sont présents sur ce segment avec une part de marché inférieure à [0-5] %.

Compte tenu de l'absence de chevauchement d'activité entre les parties, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation hors domicile ainsi que sur ses éventuels segments.

3.1.1.2 Segment de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation à domicile

Sur un segment global de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation à domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [10-20] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés). Sur ce marché, la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence de groupes importants tels que Barcadi-Martini et Pernod-Ricard.

Si une segmentation par type de vin aromatisés devait être envisagée, l'opération n'entraînerait aucune addition de part de marché dans la mesure où les parties ne sont pas actives sur les mêmes types de vins aromatisés.

Si une segmentation en fonction du positionnement du produit devait être envisagée, l'opération n'entraînerait pas de chevauchement d'activité, dans la mesure où le groupe Cofepp est uniquement actif sur le segment des MDD et MPP, tandis que les actifs cédés ne sont présents que sur le segment des MDF (les parties sont absentes du segment des MHD).

L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le segment de la distribution de vins aromatisés destinés à la consommation à domicile et sur ses éventuelles sous-segmentations par le biais d'effets horizontaux.

3.1.2. Les apéritifs amers

3.1.2.1 Marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation hors domicile

Sur le marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation hors domicile ainsi que sur le segment des gentianes, les parts de marché de la nouvelle entité demeureront inchangées, dans la mesure où seuls les actifs cédés sont présents sur ce marché et sur ce segment avec des parts de marché respectives de [0-5] % et [0-10] %.

Compte tenu de l'absence de chevauchement d'activité entre les parties, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation hors domicile ainsi que sur le segment des gentianes.

3.1.2.2 Marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation à domicile Sur le marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation à domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0-10] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés).

Sur un marché des apéritifs amers segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [70-80] % sur le segment des MDD (à [50-60] % pour le groupe Cofepp et à [20-30] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur les segments des MDF (seuls les actifs cédés sont actifs sur ce segment), des MHD et des MPP (seul le groupe Cofepp est actif sur ces deux derniers segments).

Sur le segment des gentianes, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [15-25] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des gentianes segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [90-100] % sur le segment des MDD (à [60-70] % pour le groupe Cofepp et à [30-40] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur les segments des MDF (seuls les actifs cédés sont actif sur ce segment avec [5-15] % de parts de marché), des MHD et des MPP (seul le groupe Cofepp est actif sur ces deux derniers segments avec des parts de marché qui s'élèvent respectivement à [10-20] % et à [30-40] %).

Compte tenu de la très forte part de marché de la nouvelle entité sur le segment des gentianes vendus sous MDD, il convient de s'interroger sur les éventuels effets horizontaux à l'issue de l'opération sur ce segment.

Le segment des gentianes vendus sous MDD demeure restreint : il ne représente que [0-10] % des ventes totales en volume de gentianes sur le marché off trade, tandis que les gentianes vendues sous MDF représentent [80-90] % du marché off trade et sont dominées par deux grands groupes, à savoir LVMH et Pernod Ricard. Cette faible part s'explique par le fait que les distributeurs n'ont développé que récemment la production de gentianes sous MDD. Par ailleurs, sur les segments des gentianes vendus sous MHD et sous MPP, qui représentent respectivement [0-10] % et [0-10] % du segment off trade des gentianes, les parts de marché de la nouvelle entité seront plus modestes ([5-15] % pour les MHD et [30-40] % pour les MPP) et la nouvelle entité restera confrontée à la concurrents d'autres opérateurs tels que les sociétés Salers-Vedrenne, Girard, les Grands Chais de France et Quartier Français. Or, ces acteurs ont la capacité de postuler à des appels d'offre pour des produits MDD, dans la mesure où les produits fabriqués sous MHD et MPP sont relativement proches de ceux fabriqués sous MDD, tandis que leur prix de vente est inférieur de plus de 30 % à celui des produits MDD. Par ailleurs, les parties estiment que sur ce marché, les capacités de production demeurent excédentaires, tandis que l'instruction ainsi que les réponses au test de marché ont montré que les ventes de gentianes étaient appelées à stagner, voire à régresser dans le futur. Enfin, les barrières à l'entrée sont limitées, dans la mesure où la production d'apéritifs à base de gentiane ne requiert aucun savoir-faire particulier : elle nécessite uniquement de disposer d'une chaîne d'embouteillage ainsi que d'un lieu de stockage pour la macération des racines de gentiane pendant neuf mois.

Ainsi, toute hausse des prix des produits MDD pourraient inciter les fabricants de produits MDD et MPP à postuler aux appels d'offre de la grande distribution. De plus, la grande distribution dispose d'un fort contre-pouvoir comme l'illustre le fait que les contrats ne font pas l'objet de reconduction automatique et sont renégociés chaque année ou tous les deux ans.

Compte tenu de l'existence d'opérateurs alternatifs, de la tendance baissière des ventes de gentianes et du fort contrepouvoir de la demande, les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment des gentianes vendus sous MDD peut être écarté.

L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la distribution d'apéritifs amers destinés à la consommation à domicile et sur ses éventuels segments par le biais d'effets horizontaux.

3.1.3. Les liqueurs

3.1.3.1 Marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation hors domicile

Sur le marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation hors domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0-10] % (à [0-5] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés).

Sur les segments de la distribution de crèmes de fruit et de manzana destinées à la consommation hors domicile, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inchangée, dans la mesure où seuls les actifs cédés sont actifs sur les crèmes de fruit avec une part de marché de [0-10] % et où seul le groupe Cofepp est actif sur la manzana avec une part de marché de [10-20] %. Compte tenu des parts de marché modérées de la nouvelle entité à l'issue de l'opération et de l'existence de concurrents importants tels que les groupe Pernod Ricard et Marie Brizard, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation hors domicile ainsi que sur ses éventuelles segmentations.

3.1.3.2 Marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation à domicile

Sur le marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation à domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [20-30] % (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

Sur un marché des liqueurs segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0-10] % sur le segment des MDF (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), à [35-45] % sur le segment des MDD (à [15-25] % pour le groupe Cofepp et à [15-25] % pour les actifs cédés), à [40-50] % sur le segment des MHD (à [30-40] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés) et à [30-40] % sur le segment des MPP (à [10- 20] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

3.1.3.2.1 Les liqueurs modernes

Sur le segment des liqueurs modernes, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0- 10] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des liqueurs modernes segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [20-30] % sur le segment des MPP (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur les segments des MDF, MDD et MHD dans la mesure où seul le groupe Cofepp est présent sur ces segments avec des parts de marché qui s'élèvent respectivement à [0-10] %, [10-20] % et [20-30] %.

Sur le sous-segment de la manzana, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [10-20] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché de la manzana segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inchangée, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur le segment des MDF, tandis que seuls les actifs cédés sont actifs sur les segments des MDD, MHD et MPP.

La nouvelle entité restera confrontée à la concurrence d'opérateurs importants tels que Marie Brizard sur le segment des MDF ainsi que les sociétés Picard Girard, Boudier et Vedrenne concernant la fabrication de produits pour le compte de distributeurs.

L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la distribution de liqueurs modernes destinées à la consommation à domicile ainsi que sur le sous-segment de la manzana.

3.1.3.2.2 Les crèmes de fruit

Sur le segment des crèmes de fruits, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [50-60] % (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [40-50] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des crèmes de fruit segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [80-90] % sur le segment des MDF (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [70-80] % pour les actifs cédés), à [65-75] % sur le segment des MDD (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [50-60] % pour les actifs cédés), à [50-60] % sur le segment des MHD (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [40-50] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur le segment des MPP, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ce segment avec [0-10] % de parts de marché.

Sur le segment des crèmes de cassis, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [60-70] % (à [20-30] % pour le groupe Cofepp et à [40-50] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des crèmes de cassis segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [35-45] % sur le segment des MDD (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [30-40] % pour les actifs cédés), à [90-100] % sur le segment des MHD (à [50-60] % pour le groupe Cofepp et à [40-50] % pour les actifs cédés), à [85-95] % sur le segment des MPP (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [70-80] % pour les actifs cédés), et demeura inchangée sur le segment des MDF, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ce segment avec [60- 70] % de parts de marché.

Si une segmentation entre crèmes de cassis de Dijon et autres crèmes de cassis devait être envisagée, la part de marché de la nouvelle entité serait inchangée dans la mesure où seuls les actifs cédés sont actifs sur le segment des crèmes de cassis de Dijon sur lequel il dispose d'une part de marché de [40-50] % ([60-70] % en MDF et [30-40] % en MDD).

Sur le segment des autres crèmes de fruits, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [70-80], % (à [20-30] % pour le groupe Cofepp et à [50-60] % pour les actifs cédés). Sur un éventuel marché des autres crèmes de fruits segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [70-80] % sur le segment des MDD (à [40- 50] % pour le groupe Cofepp et à [20-30] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur les segments des MDF et MHD, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ces segments avec des parts de marché respectives de [80-90] % et [90-100] %. La nouvelle entité sera absente du segment des MPP.

Dans la mesure où la nouvelle entité disposera de fortes parts de marché sur le segment des crèmes de fruits, il convient de s'interroger sur les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur ce segment et ses éventuelles sous-segmentations.

En premier lieu, l'instruction et les réponses au test de marché ont montré que les consommateurs étaient relativement peu attachés aux produits de marques lorsqu'ils achètent une crème de fruit. Ce faible attachement est d'ailleurs illustré par le fait que les crèmes de fruits vendues sous MDD, MHD et MPP représentent plus de 70 % des ventes de crèmes de fruits sur le circuit off trade. Or, la fabrication de ces produits est généralement conditionnée par le fait que le fournisseur remporte l'appel d'offre lancé annuellement, voire tous les deux ans, par les distributeurs. Les parts de marché des fournisseurs de MDD, MHD et MPP peuvent donc être régulièrement remises en cause par la grande distribution. A titre illustratif, les parties ont indiqué que les actifs cédés ont perdu en 2008 le contrat de fabrication de crèmes de fruit pour le compte de Casino. L'instruction du dossier a confirmé le fait que les contrats de fourniture de crèmes MDD/MHD et MPP étaient rediscutés chaque année ou au plus tous les deux ans. Par ailleurs, l'important contre pouvoir de la demande est illustré par la diminution régulière du taux de marge des fournisseurs de crèmes de fruit. Ainsi, les taux de marge brute des actifs cédés concernant la production de différentes crèmes de cassis pour le groupe Casino ont subi une chute comprise entre 60 % et 87 % durant les quatre dernières années. Cette forte pression de la grande distribution s'illustre également par le fait que les sociétés Lejay Lagoute, Vedrenne et Cartron, qui distribuent des crèmes de fruit vendues sous MDF et MDD, ne produisent plus de produits MHD et MPP.

En second lieu, l'instruction a montré qu'il existait une offre alternative sur le marché des crèmes de fruit quelque que soit le segment considéré à l'issue de l'opération. Il existe en effet sur ce marché un certain nombre de concurrents actifs sur les segments des crèmes de fruits vendus sous MDF tels que Cartron, Vedrenne et Lejay Lagoute. Ces groupes sont également actifs sur le segment des MDD. Par ailleurs, la société Boudier est active sur les segments des MPP et MHD, ainsi que sur le segment des MDD. En outre, les "petits " producteurs représentent plus d'un tiers du marché off trade des crèmes de fruit. Ces producteurs pourraient être soutenus par la grande distribution en cas de hausse des prix de la nouvelle entité, comme elle a pu le faire, notamment avec la société Suprex sur les marchés des VDN et des anisés.

En dernier lieu, l'instruction ainsi que les réponses au test de marché ont montré que les ventes de crèmes de fruit sur le marché off trade étaient appelées à stagner voire à baisser. L'existence d'un fort contrepouvoir de la demande ainsi que d'offreurs alternatifs ainsi que les faibles perspectives de croissance du segment des crèmes de fruit, permettent ainsi d'écarter les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la distribution de crèmes de fruits destinées à la consommation à domicile ainsi que sur ses éventuelles segmentations. L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de liqueurs destinées à la consommation à domicile ainsi que sur ses éventuelles segmentations.

3.1.4. Les vins doux naturels

3.1.4.1 Marché de la distribution de vins doux naturels destinés à la consommation hors domicile

Sur le marché de la distribution de vins doux naturels (ci-après " VDN ") destinés à la consommation hors domicile ainsi que sur le segment des VDN blancs, les parts de marché de la nouvelle entité demeureront inchangées dans la mesure où seuls les actifs cédés sont actifs sur ce marché et ce segment avec des parts de marché qui s'élèvent respectivement à [0-5] %, et à [0-5] %.

La nouvelle entité ne sera pas active sur le segment de la distribution de VDN rouges destinés à la consommation hors domicile.

Compte tenu de l'absence de chevauchement d'activité entre les parties, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de VDN destinés à la consommation hors domicile et sur ses éventuels segments.

3.1.4.2 Marché de la distribution de vins doux naturels destinés à la consommation à domicile

Sur le marché global de la distribution de VDN destinés à la consommation à domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % (à [30-40] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés).

Sur un marché des VDN segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % sur le segment des MDF (à [30-40] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés), à [45-55] % sur le segment des MDD (à [40-50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), à [50-60] % sur le segment des MHD (à [40-50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés) et demeurera inchangée sur le segment des MPP, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ce segment avec [30-40] % de parts de marché.

Sur le segment des VDN rouges, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % (à [25-35] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des VDN rouges segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [30-40] % sur le segment des MDF (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [20-30] % pour les actifs cédés), à [50-60] % sur le segment des MDD (à [40- 50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), à [45-55] % sur le segment des MHD (à [40-50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), et demeurera inchangée sur le segment des MPP, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ce segment avec [30- 40] % de parts de marché.

Sur le segment des VDN blancs, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [40-50] % (à [40-50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés).

Sur un éventuel marché des VDN blancs segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [50-60] % sur le segment des MDF (à [35-45] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés), à [40-50] % sur le segment des MDD (à [40-50] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), à [50-60] % sur le segment des MHD (à [50-60] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), et demeurera inchangée sur le segment des MPP, dans la mesure où seul le groupe Cofepp est actif sur ce segment avec [30- 40] % de parts de marché.

La nouvelle entité disposera donc d'importantes parts de marché sur le marché des vins doux naturels et sur ses éventuels segments. Dès lors, il convient de s'interroger sur les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux à l'issue de l'opération.

A titre liminaire, il faut souligner que sur ce marché, il existe un faible attachement du consommateur aux marques. Ainsi, les VDN vendus sous MDF ne représentent que 46 % du marché off trade des VDN, tandis que les vins vendus sous MDD, MHD et MPP, qui ont des prix relativement similaires, représentent respectivement 20 %, 19,2 % et 14,8 % du marché et exercent ainsi une forte pression sur les produits de MDF.

Le marché des VDN est un marché sur lequel intervient un grand nombre d'opérateurs tels que le groupe Pernod Ricard, des coopératives de producteurs (Coopérative de Montauch, Vignerons des Beaumes des Venise) ainsi que la société Prodis, qui pourraient augmenter leur production de VDN.

En effet, l'instruction ainsi que les réponses au test de marché ont souligné qu'il existait d'importants stocks de vins pour la production de VDN. Les parties estiment que ces stocks sont suffisants pour couvrir les besoins du marché pendant trois ans. Néanmoins, l'écoulement de ces stocks est soumis à un contingentement afin d'éviter un effondrement des cours. Toutefois, il est vraisemblable qu'en cas d'augmentation des prix pratiqués par la nouvelle entité, ce contingentement pourrait être relâché pour faire face à la demande d'autres opérateurs. Par ailleurs, les parties ont indiqué qu'il était fréquent qu'une ligne de fabrication pour VDN serve pour la fabrication d'autres vins, voire d'autres boissons, alcoolisées ou non et que la production de VDN ne requiert aucun savoir-faire particulier. Ainsi, des opérateurs produisant des vins autres que des VDN pourraient entrer rapidement (dans un délai compris entre trois et six mois) sur ce marché dans le cas où la nouvelle entité augmenterait ses prix.

En outre, la nouvelle entité continuera d'être confrontée à l'important contre-pouvoir de la demande sur le circuit off trade, qui en cas d'augmentation des prix proposés par la nouvelle entité pourra s'adresser à d'autres opérateurs déjà présents sur le marché ou encourager l'entrée de nouveaux opérateurs, comme elle a pu le faire à la fin des années 1990 avec les société Suprex et la Côté Radieux, ainsi que plus récemment (il y a environ un an) avec la coopérative des vignerons de Montauch, qui représente aujourd'hui [0-10] % des volumes de ventes sur le circuit off trade. Ainsi, si les prix des VDN venaient à augmenter du fait des agissements de la nouvelle entité, les opérateurs présents sur le marché ainsi que de nouveaux entrants pourraient proposer une offre alternative de VDN sur le circuit off trade.

L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de vins doux naturels destinés à la consommation à domicile ainsi que sur ses éventuelles segmentations.

3.1.5. Les anisés

3.1.5.1 Marché de la distribution d'anisés destinés à la consommation hors domicile

Sur le marché de la distribution d'anisés destinés à la consommation hors domicile, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inchangée dans la mesure où seuls les actifs cédés sont actifs sur ce marché avec [0-5] % de parts de marché.

Compte tenu de l'absence de chevauchement d'activité entre les parties, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution d'anisés destinés à la consommation hors domicile.

3.1.5.2 Marché de la distribution d'anisés destinés à la consommation à domicile

Sur le marché global de la distribution d'anisés destinés à la consommation à domicile, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [20-30] % (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés).

Sur un marché des anisés segmenté suivant le positionnement du produit, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [10-20] % sur le segment des MDF (à [0-10] % pour le groupe Cofepp et à [0-10] % pour les actifs cédés), à [30-40] % sur le segment des MDD (à [10-20] % pour le groupe Cofepp et à [10-20] % pour les actifs cédés), à [60-70] % sur le segment des MHD (à [30-40] % pour le groupe Cofepp et à [20-30] % pour les actifs cédés) et à [70-80] % sur le segment des MPP (à [50- 60] % pour le groupe Cofepp et à [20-30] % pour les actifs cédés).

Compte tenu des fortes parts de marché de la nouvelle entité sur les segments des anisés vendus sous MDD, MHD et MPP, il convient de s'interroger sur les éventuels effets horizontaux à l'issue de l'opération sur ces segments. Les segments des MDD, MHD et MPP représentent respectivement 24,7 %, 16,5 % et 6,6 % du marché off trade des anisés. L'étude des prix moyens de vente au consommateur a démontré que les prix des anisés vendus sous MPP et MHD sont sensiblement identiques, tandis que les anisés vendus sous MDD coûtent environ 10 % plus cher que les anisés vendus sous MHD ou MPP. Dans la mesure où il existe ainsi peu de différences entre ces produits, la présente analyse considéra un segment global des anisés produits pour le compte de distributeurs (anisés vendus sous MDD, MHD et MPP).

En premier lieu, il existe sur le segment des anisés produits pour le compte de distributeurs, un certain nombre d'opérateurs alternatifs, tels que les sociétés Girard, Grands Chais de France, Quartier Français, Limana. De plus, l'instruction a montré que les barrières à l'entrée ou l'extension de la production d'anisés sont relativement faibles s'agissant des produits fabriqués pour le compte de distributeurs. En effet, le savoir-faire ainsi que l'équipement requis pour la production d'anisés sont limités. Les parties ont estimé que le coût d'entrée (comprenant l'acquisition d'une chaîne d'embouteillage et les frais de personnel) sur le marché des anisés s'élevait à moins de 1,5 millions d'euro. Or , le total des ventes sur le marché off trade des anisés s'élève à plus de 1,3 milliard d'euro. Par ailleurs, les parties ont indiqué, que sous réserve d'équiper leur chaîne de production d'un système de nettoyage efficace, des acteurs présents sur d'autres spiritueux pouvaient produire des anisés. Or, le coût d'un système de rinçage performant permettant d'éliminer le goût très prégnant de certains alcools tels que les anisés, demeure modéré : il s'élève à environ 30 000 euro. Par ailleurs, le délai pour entrer sur le marché des anisés est relativement court, compris entre six et douze mois, dans la mesure où les anisés ne nécessitent pas de vieillissement particulier. En outre, l'instruction ainsi que les réponses au test de marché ont souligné qu'il n'était pas nécessaire de détenir une marque en nom propre pour fabriquer des anisés pour le compte des distributeurs.

En second lieu, la grande distribution dispose d'un fort contre-pouvoir sur les segments des MDD, MHD et MPP. En effet, la fabrication de ces produits fait le plus souvent l'objet d'appels d'offre annuels ou biennaux. Ainsi, selon les parties, toute tentative d'augmentation des prix par les fournisseurs peut se traduire par la perte d'un marché. A titre d'exemple, les parties ont indiqué que le groupe Cofepp avait perdu en 2007 les appels d'offres [...], tandis que les actifs cédés avaient remporté sur cette même période l'appel d'offre [...], qui avait auparavant confié la fabrication de ses anisés à la société [...]. Enfin, la grande distribution peut inciter de nouveaux acteurs à fabriquer des anisés pour son compte comme elle a pu le faire avec les sociétés Suprex (à la fin des années 1990) et Picard/Girard (en 2003) qui représentent aujourd'hui respectivement [0-10] % et [5-15] % du marché. Compte tenu des faibles barrières à l'entrée sur les segments des anisés produits sous MDD, MHD et MPP, de la faible part de marché de la nouvelle entité sur le segment des anisés sous MDF (segment largement dominé par le groupe Pernod Ricard) et du fort contrepouvoir de la demande, les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution d'anisés destinés à la consommation à domicile et ses éventuels segments peuvent être écartés.

3.2. Analyse des effets congloméraux

3.2.1. Les effets de gamme

Le tableau reproduit ci-après présente les positions du groupe Cofepp sur l'ensemble des marchés et segments connexes de la distribution de spiritueux et autres alcools apéritifs destinés à la consommation à domicile27.

<emplacement tableau>

Compte tenu des fortes positions du groupe Cofepp sur un certain nombre de marchés connexes ainsi que des fortes parts de marché de la nouvelle entité à l'issue de l'opération sur les crèmes de fruits et les VDN, il convient de s'interroger sur les risques d'atteinte à la concurrence de la nouvelle entité par la mise en œuvre d'un effet de gamme.

Les effets de gamme reposent sur l'addition de différents produits, ou types de produits dans une même offre. Selon les lignes directrices de la DGCCRF relatives au contrôle des concentrations, " pour qu'il y ait un risque d'atteinte à la concurrence par mise en œuvre d'un effet de gamme, il est nécessaire que la détention d'une gamme puisse constituer un avantage décisif. Ainsi, il faut :

- que l'entreprise ait une forte position sur ou moins un ou des marchés (a fortiori en cas de position dominante), à partir duquel elle pourra faire jouer un effet de levier,

- que les concurrents ne soient pas en mesure de proposer une gamme aussi complète de produits,

- et que la détention d'une gamme de produits soit un argument de vente déterminant pour les clients. "

Les trois conditions posées sont cumulatives, il suffit que l'une d'entre elles ne soit pas remplie pour que le risque d'atteinte à la concurrence par la mise en œuvre d'un effet de gamme puisse être écarté. Concernant la première condition, le groupe Cofepp disposera effectivement à l'issue de l'opération, de fortes parts de marché sur les marchés ou segments des vins doux naturels, des crèmes de fruit et des VDN et conservera d'importantes parts de marché sur des marchés tels que les rhums, les cocktails et le porto. Il convient néanmoins de préciser que les ventes cumulées de vins doux naturels, de crèmes de fruit, de rhums, de cocktails et de porto représentent moins de 13 % (en valeur) des ventes totales de spiritueux et autres alcools apéritifs (28). Ce secteur est largement dominé par le whisky et les anisés qui représentent respectivement 37 % et 27,8 % des ventes en valeur de spiritueux et autres apéritifs alcoolisés. Dès lors, il serait difficile pour la nouvelle entité de s'appuyer sur ses fortes positions sur les marchés précités pour renforcer ses positions sur les autres produits qu'elle vendra.

Concernant la seconde condition, le groupe Cofepp sera confronté à la présence de concurrents importants qui disposent d'une gamme de produits aussi large. Il s'agit en premier lieu du groupe Pernod Ricard, mais également dans une moindre mesure du groupe Marie Brizard. Dès lors, si la nouvelle entité devait mettre en place des pratiques de couplage de ces ventes, les clients disposeraient de sources alternatives d'approvisionnement.

Enfin, concernant la troisième condition, il convient de souligner que si la détention d'une gamme peut être un élément favorisant un opérateur, elle ne constitue pas pour autant un argument de vente déterminant. Les produits vendus sous MDD, MHD et MPP font en règle générale l'objet d'appels séparés, tandis que les réponses au test de marché ont indiqué qu'en règle générale les négociations relatives aux produits de MDF se faisaient produit par produit. Dès lors, la troisième condition n'est pas remplie.

En conclusion, le risque d'atteinte à la concurrence par la mise en œuvre d'un effet de gamme à l'issue de l'opération peut être écarté.

3.2.2. Les effets de portefeuille

L'effet de portefeuille résulte de la détention par un même groupe d'un portefeuille de marques notoires, le plus souvent appuyés par des marques jugées incontournables par les revendeurs ou les consommateurs.

A l'issue de l'opération, le groupe Cofepp aura acquis les marques suivantes : Valauria, Manor, Rapha (VDN), l'Héritier-Guyot (crèmes de fruit), Pastis Duval, Casanis (anisés), Avèze (gentianes), Saint-Raphael (vins aromatisés). Selon les parties, aucune de ces marques ne serait incontournables. Les réponses au test de marché n'ont pas permis de mettre clairement en avant le caractère incontournable de l'une ou de certaines de ces marques. De plus, la nouvelle entité se retrouvera confrontée à la concurrence du groupe Pernod Ricard qui dispose d'un portefeuille aussi large voire plus large de marques, notamment avec les marques Pastis 51 et Ricard concernant les anisés, Suze concernant les gentianes et Ambassadeur concernant les vins aromatisés. Par ailleurs, sur le marché des vins aromatisés, le groupe Barcadi-Martini dispose également d'une marque incontournable, à savoir Martini. Sur les marchés des crèmes de fruit et des vins doux naturels, l'instruction a permis de démontrer que la marque ne revêt pas nécessairement un caractère déterminant dans le choix des clients. Ainsi sur le segment des crèmes de fruit et des vins doux naturels, les MDF ne représentent respectivement que 22,4 % et 36,2 % des ventes. En outre, les parties soulignent l'important pouvoir de rétorsion de la grande distribution. A titre d'exemple, elles indiquent que le groupe Cofepp, qui dispose pourtant d'un certain nombre de marques importantes sur les marchés connexes telles que Porto Cruz, Poliakov, Gibson's ou Negrita, a été déréférencé [...] à la suite d'un différend commercial avec [...].

Ainsi, le risque d'atteinte à la concurrence par la mise en œuvre d'un effet de portefeuille à l'issue de l'opération peut être écarté.

En conclusion, il ressort de l'instruction du dossier que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.

Je vous prie d'agréer, Maître, l'expression de ma considération distinguée.

NOTA : Des informations relatives au secret des affaires ont été occultées à la demande des parties notifiantes. Ces informations relèvent du " secret des affaires ", en application de l'article R. 430-7 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

Notes :

1 Ou par toute autre filiale directement ou indirectement contrôlée par la Cofepp.

2 Décisions de la Commission européenne IV/M.938 - Guinness/Grand Metropolitan du 15 octobre 1997, COMP/M.2268 - Pernod Ricard/Diageo/Seagram Spirits du 20 mars 2001, COMP/M.3779 Pernod Ricard/Allied Domecq du 24 juin 2005 et COMP/M/5114 - Pernod Ricard/V &S du 17 juillet 2008.

3 Décision COMP/M.5114 précitée.

4 Décision IV/M.938, COMP/M.2268 et COMP/M.5114 précitées.

5 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

6 Ibidem.

7 Les producteurs de Banyuls et de Rivesaltes peuvent également produire des vins d'autres couleurs (grenat par exemple), néanmoins ces vins ne sont que peu ou pas vendus en GMS, à l'exception de ventes locales dans les GMS du Roussillon.

8 Décision COMP/M.5114 précitée.

9 Décision C2006-26 précitée.

10 Décision COMP/M.5114 précitée.

11 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

12 Décision du ministre de l'Economie C2006-26 précitée.

13 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114.

14 Décision du ministre de l'Economie C2006-26 précitée.

15 Décision du ministre de l'Economie C2006-26 précitée.

16 Décision COMP/M.5114 précitée.

17 Selon les parties, les vodkas aromatisées représentent à peine 1 % du marché de la vente de vodka en vue de la consommation à domicile.

18 Décisions COMP/M.2268 et COMP/M.5514 précitées.

19 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

20 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

21 Décision C2006-26 précitée.

22 Voir notamment les décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

23 Voir notamment la lettre du ministre de l'Economie n°C2007-158 du 12 décembre 2007, aux conseils de la société Pepsico Inc., relative à une concentration dans le secteur de la distribution de boissons rafraîchissantes sans alcool.

24 Voir notamment les lettres du ministre de l'Economie n°C2003-166 du 18 juillet 2003, aux conseils de la société Financière Turenne Lafayette, relative à une concentration dans le secteur des plats cuisinés appertisés et des produits charcutiers ; n° C2007-81 du 6 juillet 2007, aux conseils de la société Cémoi, relative à une concentration dans le secteur du chocolat et n°C2007-73 du 2 août 2007, aux conseils de la société Orlait, relative à une concentration dans les secteurs de la collecte et de la commercialisation du lait.

25 Décisions IV/M.938, COMP/M.2268, COMP/M.3779 et COMP/M.5114 précitées.

26 Décision C2006-26 précitée.

27 Le groupe Cofepp n'est pas présent sur le circuit de la distribution de boissons destinées à la consommation hors domicile concernant les marchés connexes, à l'exception du marché des rhums sur lequel sa part de marché s'élève à 17 %.

28 Les ventes de vins doux naturels, de crèmes de fruit, de rhums, de cocktails et de porto représentent respectivement 3,2 %, 5,5 %, 0,8 % et 3,1 %) des ventes totales, en valeur de spiritueux et autres alcools apéritifs