Livv
Décisions

Ministre de l’Économie, 28 octobre 2008, n° ECEC0901007S

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ECONOMIE

Défendeur :

Aux conseils de la société Compagnie Fruitière de Paris SAS

Ministre de l’Économie n° ECEC0901007S

28 octobre 2008

MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI

Maîtres,

Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 26 septembre 2008, vous avez notifié la prise de contrôle exclusif des sociétés Dole France SAS (ci-après " Dole France ") et JP Fresh Limited (ci-après " JP Fresh), qui appartiennent au groupe Dole, par la société la Compagnie Fruitière de Paris SAS (ci-après " la Compagnie Fruitière de Paris "), filiale de la Compagnie Financière de Participations (ci-après " la Compagnie Fruitière ") (1). Cette opération a été formalisée par un contrat d'achat d'actions signé le 18 septembre 2008.

1. LES ENTREPRISES CONCERNÉES ET L'OPÉRATION

Les entreprises concernées par la présente opération sont : la Compagnie Fruitière, l'acquéreur, ainsi que Dole France et JP Fresh, les cibles.

La Compagnie Fruitière est une société holding placée sous le contrôle exclusif de la société Sofica (2), société qui ne détient aucune autre participation contrôlante. Les principales activités des différentes filiales (3) de la Compagnie Fruitière sont la production, le transport, l'importation et la vente en gros de fruits et légumes.

En 2007, la Compagnie Fruitière a réalisé un chiffre d'affaires mondial total consolidé de 304,13 millions d'euro hors taxes, dont [...] millions d'euro en France.

Dole France est actuellement placée sous le contrôle exclusif [...] du Groupe Dole. Dole France est principalement présente dans la production/importation et la vente en gros de fruits et notamment de bananes ainsi que d'ananas. Elle exerce également, de manière plus marginale, des activités de production/importation et de vente en gros de légumes.

En 2007, Dole France a réalisé un chiffre d'affaires mondial total consolidé de 136,76 millions d'euro hors taxes, dont [>50] millions d'euro en France.

JP Fresh est actuellement placée sous le contrôle exclusif [...] [du] Groupe Dole [...] JP Fresh exerce une activité similaire à celle de la société Dole France mais limitée aux territoires du Royaume- Uni et de l'Irlande.

En 2007, le chiffre d'affaires mondial total consolidé de JP Fresh s'est élevé à [...] millions d'euro hors taxes*. Elle n'a réalisé aucun chiffre d'affaires en France.

La présente opération consiste en la prise de contrôle exclusif des sociétés Dole France et JP Fresh par la Compagnie Fruitière, via la Compagnie Fruitière de Paris. En effet, à l'issue de l'opération, la Compagnie Fruitière de Paris disposera de l'intégralité du capital et des droits de vote de Dole France et de JP Fresh.

En ce qu'elle entraîne la prise de contrôle exclusif Dole France et de JP Fresh par la Compagnie Fruitière, la présente opération constitue bien une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises concernées, elle ne revêt pas une dimension communautaire et est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

2. LES MARCHÉS CONCERNÉS

Les parties sont simultanément actives dans la production/importation et la vente en gros de fruits et légumes.

2.1. Les marchés de produits

Dans de précédentes décisions, la Commission européenne (4) a opéré une distinction entre le marché de la production/importation de fruits et légumes, d'une part, et le marché de la vente en gros de fruits et légumes, d'autre part, sans toutefois trancher la question de la délimitation exacte du marché. Cette distinction se fonde sur le fait que les producteurs/importateurs et les vendeurs en gros de fruits et légumes ne sont pas présents à des niveaux comparables. En effet, concernant la production/importation, les intervenants fournissent des fruits et légumes du monde entier à des grossistes et détaillants de taille importante. Au niveau de la vente en gros, les grossistes importants approvisionnent de petits grossistes et détaillants, ainsi que la restauration hors foyer.

Cette distinction entre les marchés de la production/importation et de la vente en gros est d'autant plus pertinente s'agissant des bananes. En effet, tandis que les producteurs/importateurs commercialisent des bananes encore vertes, aisément transportables en grande quantité sur de longues distances, les grossistes ne vendent que des bananes mûres prêtes à la consommation par le consommateur final. Ainsi, les grossistes se chargent de faire mûrir les bananes, qu'ils achètent vertes aux producteurs/importateurs, afin de proposer à leurs clients un produit rapidement utilisable. Au cas d'espèce, les parties étant simultanément actives dans la production/importation et la vente en gros de fruits et légumes, l'analyse concurrentielle sera menée sur les segments de la production/importation de fruits et légumes, d'une part, et de la vente en gros de fruits et légumes, d'autre part.

2.1.1. Production et importation de fruits et légumes

Concernant les activités de production/importation, la Commission européenne (5) a évoqué, tout en laissant la question ouverte, la possibilité d'une distinction entre le marché de la production/importation de légumes et le marché de la production/importation de fruits. En effet, il n'existe pas de substituabilité entre la demande en fruits et celle en légumes.

Au cas d'espèce, les parties produisant et important simultanément tant des fruits que des légumes, l'analyse concurrentielle sera menée sur les segments de la production/importation de fruits, d'une part, et de la production/importation de légumes, d'autre part.

2.1.1.1 Production et importation de fruits

Concernant la production/importation de fruits, la Commission européenne (6), tout en ne tranchant pas cette question, a évoqué la possibilité d'une segmentation par type de fruits. L'autorité communautaire de concurrence (7) a plus particulièrement examiné la possibilité de considérer au sein de l'activité de production/importation de fruits, un marché spécifique de la production/importation de bananes, laissant néanmoins cette question ouverte.

Les parties produisent et importent des bananes, ananas, mangues, limes, papayes, bananes plantain (8), pommes, poires, raisin, agrumes, avocats, litchis, prunes, melons et marginalement d'autres fruits.

Au cas d'espèce, la question d'une éventuelle segmentation par type de fruits peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.1.2 Production et importation de légumes

Concernant la production/importation de légumes, la Commission européenne (9), tout en laissant la question ouverte, a évoqué la possibilité d'une segmentation par type de légumes. Les parties produisent et importent simultanément des tomates, poivrons et haricots.

Au cas d'espèce, la question d'une éventuelle segmentation par type de légumes peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.2. Vente en gros de fruits et légumes

Concernant la vente en gros de fruits et légumes, la pratique décisionnelle du Ministre chargé de l'économie (10) a dénombré six types de produits qui constituent autant de marchés pertinents distincts :

- 1re gamme : les produits frais ;

- 2e gamme : les conserves ;

- 3e gamme : les surgelés ;

- 4e gamme : les fruits et légumes frais crus, lavés, épluchés et coupés ;

- 5e gamme : les légumes stérilisés et pasteurisés en sachet sous vide ;

- 6e gamme : les produits traiteurs.

Au cas d'espèce, les parties sont simultanément actives sur le marché de la première gamme.

En outre, la Compagnie Fruitière est également présente sur le marché de la vente en gros de fruits et légumes de la quatrième gamme.

En outre, en matière de produits alimentaires, les autorités communautaires et nationales de concurrence (11) opèrent une segmentation selon le canal de distribution des produits, à savoir la grande distribution et les commerces de détail à dominante alimentaire (grandes surfaces alimentaires, ci-après " GSA ") la restauration hors foyer (RHF) et l'industrie agroalimentaire.

Par ailleurs, le Ministre chargé de l'économie (12) a envisagé l'existence d'une segmentation entre les ventes aux centrales d'achat des GSA et les ventes aux grossistes.

En l'espèce, les parties vendent uniquement leurs produits aux centrales d'achat des GSA et aux grossistes concernant les fruits et légumes frais. La Compagnie Fruitière vend ses produits de la quatrième gamme à la restauration hors domicile et aux centrales d'achat des GSA.

Au cas d'espèce, la question d'une segmentation par canal de distribution peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.2.1 Vente en gros de fruits et légumes frais

La pratique décisionnelle des autorités communautaire et nationale de concurrence (13) a distingué le marché de la vente en gros de fruits frais de celui de la vente en gros de légumes frais. En effet, il existe des différences importantes de prix, d'utilisation et de caractéristiques, qui ne permettent pas d'établir de substituabilité entre ces deux catégories de produits.

Au cas d'espèce, les parties vendant simultanément tant des fruits que des légumes, l'analyse concurrentielle sera menée sur les segments de la vente en gros de fruits, d'une part, et de la vente en gros de légumes, d'autre part.

2.1.2.1.1 Vente en gros de fruits frais

Au sein de la vente en gros de fruits frais, la Commission européenne (14) a envisagé la possibilité d'une segmentation par type de fruits. Elle a ainsi notamment étudié l'existence d'un marché de la vente en gros de bananes (15).

La pratique décisionnelle du ministre de l'Economie n'a pas examiné la question d'une segmentation par type de fruits.

Les parties vendent simultanément des bananes et des ananas. Par ailleurs, la Compagnie Fruitière vend également des mangues, limes, papayes et bananes plantain, tandis que Dole France et JP Fresh (ci-après " les sociétés cibles ") vendent des pommes, poires, raisins, agrumes, avocats, litchis et prunes.

Au cas d'espèce, la question d'une segmentation par type de fruits peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.2.1.2 Vente en gros de légumes frais

Au sein de la vente en gros de légumes frais, la Commission européenne (16) a envisagé, sans toutefois trancher la question, la possibilité d'une segmentation par type de légumes.

La pratique décisionnelle du ministre de l'Economie (17) a envisagé l'existence d'une segmentation entre la vente en gros de pommes de terre et la vente en gros d'autres légumes en raison de différences significatives dans l'utilisation et les habitudes de consommation relatives à la pomme de terre.

Les parties sont simultanément actives dans la vente en gros de tomates, poivrons et haricots.

Au cas d'espèce, la question d'une segmentation par type de légumes peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la position retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

2.1.2.2 Vente en gros de fruits et légumes de la quatrième gamme

La pratique décisionnelle du ministre chargé de l'Economie (18) a retenu l'existence d'un marché de la vente en gros des fruits et légumes de la quatrième gamme. La question d'une éventuelle segmentation entre la vente en gros de fruits de la quatrième gamme, d'une part, et de légumes de la quatrième gamme, d'autre part, n'a toutefois pas été envisagée.

En l'espèce, la question d'une éventuelle segmentation du marché de la vente en gros de fruits et légumes de la quatrième gamme entre les fruits, d'une part, et les légumes, d'autre part, peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. La Compagnie Fruitière proposant uniquement des fruits issus de la quatrième gamme, l'analyse concurrentielle sera menée sur le seul segment de la vente en gros de fruits de la quatrième gamme.

2.1.3. Transport maritime de fruits et légumes

La Compagnie Fruitière a intégré des activités logistiques lui permettant de transporter les productions de ses plantations africaines jusqu'en Europe. Ainsi, elle contrôle la compagnie maritime de droit britannique Africa Express Line qui opère une flotte de huit navires spécialement équipés, pour le transport des fruits et légumes, de systèmes de réfrigération et de contrôle de l'atmosphère permettant de stopper la maturation des produits pendant leur transport. Cette flotte lui permet de transporter ses propres productions de fruits et légumes, mais également celles de producteurs tiers. A différentes reprises, les autorités communautaires et nationales de concurrence ont envisagé le marché du transport de fret qui peut être segmenté suivant le mode de transport (maritime, terrestre, aérien) ainsi que suivant la nature des marchandises transportées.

En l'espèce, la question de la définition précise du marché du transport de marchandises peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées. En l'espèce, l'analyse concurrentielle sera uniquement menée sur le segment du transport maritime de fruits et légumes frais, seul segment sur lequel la Compagnie Fruitière soit active.

2.2. Les marchés géographiques

2.2.1. Production/importation de fruits et légumes

La pratique décisionnelle de la Commission européenne et du ministre chargé de l'Economie (19) considère que le marché de la production/importation de fruits et légumes ainsi que ses éventuels segments sont de dimension au moins nationale.

Au cas d'espèce, la question de la délimitation géographique précise du marché de la production/importation de fruits et légumes et de ses éventuels segments peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées. L'analyse concurrentielle fournira en l'espèce des parts de marché au niveau national, sachant que les parties indiquent détenir sur les différents segments envisageables des parts de marché nationales supérieures ou similaires à leurs parts de marché européennes.

2.2.2. Vente en gros de fruits et légumes

Les autorités communautaire et nationale de concurrence (20) considèrent que le marché de la vente en gros de fruits et légumes et ses éventuels segments sont de dimension au moins nationale. L'instruction du présent dossier n'ayant pas permis de remettre en cause la pratique décisionnelle des autorités de concurrence, l'analyse concurrentielle sera menée sur un marché et des segments de dimension au moins nationale. Elle fournira en l'espèce des parts de marché au niveau national, sachant que les parties indiquent détenir sur les différents segments envisageables des parts de marché nationales supérieures ou similaires à leurs parts de marché européennes.

2.2.3. Transport maritime de fruits et légumes frais

La Commission européenne (21) a précédemment envisagé une définition géographique du marché du transport maritime de marchandises en fonction des lignes maritimes. La Compagnie Fruitière via la société Africa Express Line dessert trois ports européens : Anvers, Douvres et Port-Vendres. Elle est ainsi active sur le transport de fruits et légumes frais en provenance d'Afrique de l'Ouest et à destination de l'Europe.

En l'espèce, la question de la dimension géographique précise peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que la dimension retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangée. En l'espèce, l'analyse concurrentielle sera menée sur une ligne Afrique de l'Ouest/France.

3. L'ANALYSE CONCURRENTIELLE

Le tableau ci-dessous présente les parts de marché des parties et de la nouvelle entité, au niveau national, sur les segments de la production/importation et de la vente en gros de fruits en général ainsi que de bananes et d'ananas.

<emplacement tableau>

3.1. Analyse des effets horizontaux

3.1.1. Production/importation de fruits

Sur un éventuel marché de la production/importation de fruits, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0-10] % (à [0-10] % pour la Compagnie Fruitière et à [0-5] % pour les sociétés cibles).

Si une segmentation par type de fruits devait être retenue, l'opération ne conduirait à aucun chevauchement d'activité au niveau national.

Compte tenu de la faible part de marché de la nouvelle entité et de l'absence de chevauchement d'activité sur d'éventuels sous-segments, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la production/importation de fruits et ses éventuels sous-segments.

3.1.2. Vente en gros de fruits frais

Sur un éventuel marché de la vente en gros de fruits frais, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [0-10] % (à[0-5] % pour la Compagnie Fruitière et à [0-10] % pour les sociétés cibles). Si une segmentation par canal de distribution devait être retenue, la part de marché de la nouvelle entité s'élèverait à [0-10] % concernant la vente en gros à destination des GMS (à[0-5] % pour la Compagnie Fruitière et à [0-10] % pour les sociétés cibles) et à [0-10] % concernant la vente en gros à destination des grossistes (à [0-5] % pour la Compagnie Fruitière et à [0-10] % pour les sociétés cibles).

Sur le segment de la vente en gros de bananes, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [20-30] % (à [0-10] % pour la Compagnie Fruitière et à [10-20] % pour les sociétés cibles). Si une segmentation par canal de distribution devait être retenue, la part de marché de la nouvelle entité s'élèverait à [10-20] % concernant la vente en gros à destination des GMS (à [0-5] % pour la Compagnie Fruitière et à [10-20] % pour les sociétés cibles) et demeurerait inchangée concernant la vente en gros à destination des grossistes dans la mesure où seule les sociétés cibles sont actives sur ce segment avec [20-30] % de parts de marché.

Sur le segment de la vente en gros d'ananas, la part de marché de la nouvelle entité s'élèvera à [20-30] % (à [0-10] % pour la Compagnie Fruitière et à [10-20] % pour les sociétés cibles). Si une segmentation par canal de distribution devait être retenue, la part de marché de la nouvelle entité s'élèverait à [20-30] % concernant la vente en gros à destination des GMS (à [0-10] % pour la Compagnie Fruitière et à 1[0-10] % pour les sociétés cibles) et à [20-30] % concernant la vente en gros à destination des grossistes (à [0-10] % pour la Compagnie Fruitière et à [10-20] % pour les sociétés cibles).

Compte tenu de la faible part de marché de la nouvelle entité sur le segment de la vente en gros de fruits frais et des faibles additions de parts de marché sur le sous-segment des bananes quel que soit le canal de distribution considéré, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur ces segments et sous-segments.

Les risques d'atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux peuvent également être écartés sur le sous-segment de la vente en gros d'ananas, dans la mesure où la nouvelle entité sera confrontée à la concurrence d'opérateurs importants tels que Fruidor, Katopé et AZ.

3.1.3. Production/importation de légumes

Sur un éventuel marché de la production/importation de légumes, la part de marché de la nouvelle entité sera, selon les parties, inférieure à [0-10] %.

Si une segmentation par type de légumes devait être retenue, les parts de marché de la nouvelle entité seraient inférieures à 1 % sur les segments de la production/importation de tomates, de poivrons et de haricots.

Compte tenu des faibles parts de marché de la nouvelle entité, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la production/importation de légumes ainsi que sur ses éventuels sous-segments.

3.1.4. Vente en gros de légumes

Sur un éventuel marché de la vente en gros de légumes, la part de marché de la nouvelle entité sera, selon les parties, inférieure à [0-10] %.

Si une segmentation par type de légumes devait être retenue, les parts de marché de la nouvelle entité seraient inférieures à [0-10] % sur les segments de la vente en gros de tomates, de poivrons et de haricots quel que soit le canal de distribution considéré (GMS ou grossistes). Compte tenu des faibles parts de marché de la nouvelle entité, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le segment de la vente en gros de légumes ainsi que sur ses éventuels sous-segments.

3.2. Analyse des effets verticaux

A l'issue de l'opération, la Compagnie Fruitière aura renforcé sa position sur les segments aval de la vente en gros de bananes et de la vente en gros d'ananas, alors qu'elle est déjà présente sur les segments amont de la production/importation de ces deux fruits. Dès lors, il convient d'étudier les éventuels effets verticaux de l'opération.

3.2.1. Effets verticaux sur les marchés de la banane

En premier lieu, il ne peut résulter de l'opération aucun effet de forclusion qui priverait les concurrents de la nouvelle entité sur le segment aval de la vente en gros de bananes d'accès à la banane verte. En effet, à l'issue de l'opération, les concurrents de La Compagnie Fruitière sur le segment amont de la production/importation de bananes continueront de représenter plus de [70-80] % de l'offre de cette matière première. Ces concurrents, qui sont d'importants groupes intégrés tels que Chiquita, Dole, Del Monte, l'UGPBAN, ont ainsi la capacité d'approvisionner les clients que la Compagnie Fruitière aurait éventuellement cessé d'alimenter. Ceci dit, il ne serait pas dans l'intérêt de la Compagnie Fruitière de fournir uniquement ses propres réseaux de distribution de gros : en effet, si ses grossistes venaient à être déréférencés par une ou plusieurs enseignes de la grande distribution, la Compagnie Fruitière serait privée d'une partie de la demande de ce canal majeur de la distribution de détail. En outre, la Compagnie Fruitière a intérêt à maintenir des liens avec les grossistes concurrents afin d'assurer une présence commerciale la plus large possible.

En second lieu, il ne peut résulter de l'opération aucun effet de forclusion qui priverait les concurrents de la Compagnie Fruitière sur le segment amont de la production/importation de bananes d'accès à des débouchés. En effet, à l'issue de l'opération, les concurrents de la nouvelle entité sur le segment aval de la vente en gros de bananes continueront de représenter [70-80] % de la demande en bananes vertes. De surcroît, même si les capacités de la nouvelle entité permettraient en théorie à la Compagnie Fruitière de faire mûrir et d'écouler sa production de bananes vertes par le seul biais de ses propres installations de mûrissage et de vente de gros, l'adoption d'une telle stratégie conduirait à limiter fortement sa marge de manœuvre pour une éventuelle augmentation de ses volumes de ventes sur le marché de gros français. En effet, si la Compagnie Fruitière cessait d'approvisionner les autres grossistes, ces derniers se tourneraient vers de nouvelles sources d'approvisionnement plus sûres, et il serait probable alors qu'elle ne trouverait plus d'autres débouchés que ses seules filiales de vente en gros.

En conclusion, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux entre les segments de la production/importation et de la vente en gros de bananes.

3.2.2. Effets verticaux sur les marchés de l'ananas

En premier lieu, il convient d'étudier si l'opération est de nature à priver les concurrents de la nouvelle entité sur le segment de la vente en gros d'ananas de leurs approvisionnements. Ce risque peut être écarté dans la mesure où les concurrents de la Compagnie Fruitière représentent plus de [50- 60] % de l'offre en ananas importés. Ces concurrents sont de gros groupes intégrés tels que Katope, SIIM ou Canavese. Par ailleurs, comme évoqué concernant les bananes, la Compagnie Fruitière n'aurait pas intérêt à fournir en ananas uniquement ses propres filiales de vente en gros, dans la mesure où, si ces dernières devaient être déréférencées par une ou plusieurs enseignes de la grande distribution, elle se trouverait ainsi privée d'importants débouchés. De surcroît, les ventes de la Compagnie Fruitière aux autres grossistes en ananas représentent actuellement [40-50] % de ses ventes. Or, elle n'aurait pas la capacité d'écouler cette part importante de sa production par le seul biais de ses propres filiales de gros. Enfin, la Compagnie Fruitière ne peut pas se permettre une éventuelle stratégie d'assèchement de ses approvisionnements d'ananas aux grossistes, dans la mesure où ces derniers représentent aussi des débouchés pour les autres fruits qui seront commercialisés par la nouvelle entité, et qu'ils pourraient, en représailles, choisir d'autres fournisseurs que la nouvelle entité pour leurs achats de ces autres fruits.

En second lieu, il ne peut résulter de l'opération aucun effet de forclusion qui priverait les concurrents de la Compagnie Fruitière sur le segment amont de la production/importation d'ananas d'accès à des débouchés. En effet, à l'issue de l'opération, les concurrents de la nouvelle entité sur le segment de la vente en gros d'ananas continueront de représenter plus de [70-80] % de la demande. Par ailleurs, précédemment à l'opération, la demande de Dole France était déjà largement tournée vers la Compagnie Fruitière qui couvrait [60-70] % de ses besoins. Enfin, il convient de souligner que le marché français de l'ananas est un marché très dynamique, avec des capacités importantes de réponse à l'évolution de la demande, puisqu'il a connu une augmentation de 80 % sur les cinq dernières années. En conclusion, l'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux entre les segments de la production/importation et de la vente en gros d'ananas.

3.2.3. Effets verticaux entre les activités de transport maritime et de production/importation de fruits et légumes frais

La Compagnie Fruitière est active sur le segment amont du transport maritime de fruits et légumes frais sur lequel elle dispose d'une part de marché de [30-40] %. L'acquisition des sociétés cibles va lui permettre de renforcer sa position sur les activités de production/importation de fruits et légumes frais. Il convient dès lors de s'interroger sur les difficultés que pourraient rencontrer les producteurs concurrents de la nouvelle entité pour le transport de leurs produits, d'une part, et sur un éventuel effet de forclusion qui priverait les transporteurs concurrents de la nouvelle entité d'accès à des débouchés.

Néanmoins, en raison des faibles parts de marché de la nouvelle entité sur le marché de la production/importation de fruits et légumes frais (en tout état de cause inférieure à [0-10] %)22, de l'existence de nombreuses compagnies de transport maritime telles que Maersk, CMA-CGM, MOL, ainsi que de la présence d'importants producteurs de fruits et légumes frais tels que Del Monte, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux entre les activités de transport maritime et de production/importation de fruits et légumes frais.

3.3. Analyse des effets congloméraux

Le tableau ci-dessous présente les parts de marché de la nouvelle entité sur les segments de la production/importation, d'une part, et de la vente en gros, d'autre part, de fruits autres que les bananes et les ananas, sur lesquels les parties sont alternativement présentes.

<emplacement tableau>

Au regard du tableau ci-avant reproduit, l'opération va permettre à la Compagnie Fruitière d'élargir la gamme de fruits proposée, tant au niveau de la production/importation que de la vente en gros. Il convient dès lors d'étudier les éventuels effets de gamme entraînés par l'opération. La présente opération conduira à un élargissement du portefeuille de variétés de fruits importés par la Compagnie Fruitière. Toutefois, les parts de marché des sociétés cibles sur la production/importation ou la vente en gros de ces nouvelles variétés de fruits sont modérées voire faibles, et ne peuvent en tout état de cause pas lui permettre de conditionner la vente des fruits sur lesquels elle détiendrait un éventuel pouvoir de marché à l'achat par le client de ses autres variétés de fruits. S'agissant de la papaye, qui est la variété sur laquelle la nouvelle entité aura la plus forte part de marché, il convient de souligner le caractère marginal de la consommation de ce fruit en France, où il ne représente que [0-5] % de la consommation totale de fruits. La papaye n'étant ainsi pas indispensable à la construction de l'offre de fruits frais des clients de la Compagnie Fruitière, toute stratégie de vente liée avec d'autres fruits est donc vouée à l'échec. Par ailleurs, il existe sur le marché des concurrents de taille importante tels que SIIM, Katope ou Canavese, qui disposent également d'une large gamme de fruits frais.

Enfin, la Compagnie Fruitière est présente sur le segment, connexe à la vente en gros de fruits frais, de la vente en gros de fruits de la quatrième gamme. Néanmoins, les faibles parts de marché dont elle dispose sur ce segment et ses éventuels sous-segments ([0-10] % sur un segment global, [0-5] % sur un segment de la vente en gros à destination de la restauration hors foyer et [0-10] % sur un segment de la vente en gros à destination des GSA) n'est pas de nature à entraîner un effet de gamme (23). L'opération n'est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets de gamme.

En conclusion, il ressort de l'instruction du dossier que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.

Je vous prie d'agréer, Maîtres, l'expression de ma considération distinguée.

NOTA : Des informations relatives au secret des affaires ont été occultées à la demande des parties notifiantes, et la part de marché exacte remplacée par une fourchette plus générale. Ces informations relèvent du " secret des affaires ", en application de l'article R. 430-7 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

Notes :

1 Le capital de la Compagnie Fruitière de Paris est détenu à hauteur de 94,4 % par la Compagnie Fruitière et à hauteur de 5,6 % par la Compagnie Fruitière Import, société qui est-elle même détenue à hauteur de 90 % par la Compagnie Fruitière.

2 La société Sofica détient 60 % du capital de la Compagnie Fruitière, tandis que les 40 % restants sont détenus par le groupe américain Dole Food Company Incorporated (ci-après " groupe Dole "), via la société Solvest Limited. En vertu du pacte d'actionnaires conclu entre les sociétés Sofica et Solvest Limited, le groupe Dole ne dispose d'aucun droit de véto concernant les décisions stratégiques de la Compagnie Fruitière.

3 Les filiales de la Compagnie Fruitière sont les sociétés suivantes :[...].

4 Décisions de la Commission européenne COMP/M.4216 CVC/Bocchi/De Weile Blick, du 30 mai 2006 et COMP/M/4896 CVC Capital Partners/Katope International, du 8 février 2008. *le chiffre d'affaires mondial hors taxes cumulé des parties à l'opération est supérieur à 150 millions d'euro.

5 Décisions COMP/M.4216 et COMP/M.4896 précitées.

6 Décisions COMP/M.4216 et COMP/M.4896 précitées.

7 Décisions de la Commission européenne IV/M.140 Fyffes/Capespan, du 27 avril 1999 ainsi que COMP/M.4216 et COMP/M.4896 précitées.

8 La banane plantain ne doit être confondue avec la banane douce dont elle est un hybride voisin. Elle ne peut, en effet, pas être consommée crue. Par ailleurs, sa chair plus épaisse, sa taille plus importante et son goût acidulé la distinguent nettement des bananes douces.

9 Décisions COMP/M.4216 et COMP/M.4896 précitées.

10 Décisions du ministre de l'Economie C2003-19 Geest Foods Limited/Genevieve Langlais SA, du 31 mars 2003 et C2008- 24 Transgourmet/All Fresh Logisitique, du 23 avril 2008.

11 Voir à titre d'exemple la décision COMP/M.1990 Unilever/Bestfood, du 28 septembre 2000 et décision C2008-24 précitée.

12 Décision du ministre de l'Economie C2008-67 Baninvest Antilles/Fruidor, du 4 septembre 2008 en instance de publication au BOCCRF.

13 Décisions COMP/M.4216, COMP/M.4896 et C2008-24 précitées.

14 Décision COMP/M.4216 précitée.

15 Décisions COMP/M.4216 et COMP/M.4896 précitées.

16 Décision COMP/M.4216 précitée.

17 Décision C2008-24 précitée.

18 Décision C2008-24 précitée.

19 Décisions COMP/M.4216, COMP/M.4896 et C2008-67 précitées.

20 Décisions COMP/M.4216, COMP/M.4896, C2008-24 et C2008-67 précitées.

21 Décision de la Commission européenne COMP/M.2879 3* Wallenius Lines AB/Wilhelmsem ASA/Hyundai Merchant Marine, du 29 novembre 2002.

22 Voir les lignes directrices de la Commission européenne sur l'appréciation des concentrations non-horizontales au regard du règlement du Conseil relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.

23 Voir les lignes directrices de la Commission européenne sur l'appréciation des concentrations non-horizontales au regard du règlement du Conseil relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.