Cass. crim., 12 décembre 2007, n° 06-81.907
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Thin
Avocats :
Me Ricard, SCP Baraduc, Duhamel
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société X, contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Tours, en date du 20 octobre 2005, qui a statué sur la régularité des opérations de visite et de saisie de documents effectuées par l'Administration de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 695-27 et 63-1 à 65 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense et des articles 6 § 1 et 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, violation de l'article L. 450-4 du Code de commerce ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a validé les opérations de visite et saisie effectuées dans les locaux de la société X à Montlouis-sur-Loire et a dit régulière la saisie de l'ensemble des éléments sur support informatique ;
"aux motifs que l'article 56 du Code de procédure pénale auquel renvoie l'article L. 450-4 du Code de commerce n'exige pas de description exhaustive des pièces saisies ; qu'ici, en conformité avec l'alinéa 4 du même article 56, il fut procédé non à la saisie du support physique des données informatiques mais à de simples copies en présence des personnes qui assistaient à la perquisition ; que les fichiers informatiques copiés sur CD-ROM faisaient bien, le 30 juin 2005, l'objet d'un inventaire dont mention était inscrite au procès-verbal qui nous a été transmis ; que l'inventaire systématique s'annexait dans un répertoire nommé "DGCCRF" et des trois exemplaires créés, un était toujours remis à l'occupant des lieux ; que l'entreprise connaît avec exactitude les éléments saisis et au stade actuel de l'enquête, il est compatible avec les droits de la défense de ne pas connaître avec précision les points à charge qui seront retenus en phase contentieuse ; qu'il ne fut diligenté aucun enlèvement physique de disque dur et la copie des boîtes de messagerie était complète puisque, d'une part, ce document est insécable et que de plus seule la saisie de ce fichier indissociable donne une garantie d'origine pour ne pas modifier le numéro d'identification par une entrée ; qu'à défaut de cette garantie, respectueuse des droits de la défense, la polémique naîtrait sur la source ; que l'autorisation du 8 juin 2005 s'étendait au secteur des déchets hospitaliers dans la région Bretagne, Pays de Loire et Centre ; que le mot clé "Vendôme " intéresse un marché du centre hospitalier de Vendôme qui s'intègre dans le champ de l'autorisation ; que se vérifie donc le respect de l'obligation d'inventaire et l'exécution, le 30/06/05, de l'ordonnance du 8 juin 2005 restait dans les limites précises du champ de cette autorisation, donc la requête ne saurait prospérer ;
"alors que, d'une part, l'Administration ne peut appréhender que les documents se rapportant aux agissements retenus par l'ordonnance autorisant les visite et saisie domiciliaires ou les pièces pour partie utiles à la preuve desdits agissements ; que cette limite s'applique aux documents informatiques comme aux documents édités sur un support matériel ; que l'Administration ne peut ainsi saisir l'ensemble des documents informatiques présents sur le disque dur d'un ordinateur sans opérer au préalable un tri afin de ne saisir que les documents en adéquation avec l'autorisation obtenue ; qu'en exécution de l'ordonnance du 30 juin 2005, l'Administration, en n'opérant pas de tri lors des saisies informatiques pratiquées, a appréhendé des fichiers étrangers à l'ordonnance d'autorisation, ce qu'elle ne conteste pas, et n'a pas mis le juge des libertés et de la détention en mesure de vérifier l'adéquation de la saisie avec l'autorisation délivrée ; qu'en validant néanmoins les opérations de saisies, le juge des libertés et de la détention a violé les textes susvisés ;
"alors que, d'autre part, il appartient à l'Administration de délimiter celles des pièces qu'elle estime entrer dans le champ visé par l'ordonnance autorisant les visite et saisie domiciliaires ; qu'il ne peut être exigé de la personne dont les documents sont saisis qu'elle détermine elle-même, a posteriori et après que l'Administration a saisi un ensemble de documents informatiques, ceux de ces documents entrant dans le champ de l'autorisation, sauf à contraindre cette personne à s'incriminer elle-même ; qu'en validant néanmoins les opérations de saisies pratiquées le 30 juin 2005, en ce qu'elles portaient sur les disques durs et boîtes de messageries se trouvant sur les ordinateurs de salariés de la société X, le juge des libertés et de la détention a violé les textes susvisés ;
"alors, qu'enfin, l'Administration ne peut appréhender les documents informatiques se rapportant aux agissements retenus par l'ordonnance autorisant les visite et saisie domiciliaires qu'à charge d'en dresser inventaire ; qu'en validant néanmoins les opérations de saisies pratiquées le 30 juin 2005, en ce qu'elles portaient sur les disques durs et boîtes de messageries se trouvant sur les ordinateurs de salariés de la société X, tandis que le procès-verbal de saisie ne dressait pas l'inventaire des documents figurant sur ces supports, le juge des libertés et de la détention a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, d'une part, si l'Administration ne peut appréhender que des documents se rapportant aux agissements retenus par l'ordonnance d'autorisation de visite et de saisie, il ne lui est pas interdit de saisir des pièces pour partie utiles à la preuve desdits agissements ; qu'en l'espèce, le juge, qui a souverainement estimé que ces pièces n'étaient pas étrangères au but de l'autorisation accordée, a justifié sa décision ;
Attendu que, d'autre part, l'ordonnance attaquée énonce que les fichiers informatiques copiés ont fait l'objet d'un inventaire, dont mention a été portée au procès-verbal relatant les opérations ; d'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa troisième branche, doit être écarté ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
Rejette le pourvoi.