CA Lyon, 3e ch. civ. A, 30 octobre 2008, n° 06-05332
LYON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Simac (SARL)
Défendeur :
Gan Assurances IARD (Sté), Gras Savoye (Sté), AGF IART (Sté), Gan Eurocourtage IARD (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvet
Conseillers :
M. Santelli, Mme Clozel-Truche
Avoués :
SCP Baufumé-Sourbe, SCP Ligier de Mauroy-Ligier, SCP Laffly-Wicky, SCP Brondel-Tudela, Me Guillaume
Avocats :
Selarl Roubaud Simonin, Mes Rochet, Brun, Risselet, Tardieu
Faits, procédure et prétentions des parties
Monsieur Simac expert automobile a créé la société Simac en 1986, dont l'activité principale était l'expertise automobile et notamment celle des véhicules de compétition.
A partir de 1989, la société Simac a exercé cette activité au bénéfice de Monsieur Lefebvre puis de la société ACL, courtier acquéreur de son fonds de commerce, au profit de plusieurs sociétés d'assurance.
Invoquant une cessation brutale des relations commerciales en 2001, la société Simac et Monsieur Simac ont donné assignation à la société ACL, la société Gan Assurances IARD et à la société AGF IART, aux droits de la société Camat AGF le 15 octobre 2003 devant le Tribunal de commerce de Lyon pour obtenir leur condamnation au paiement de la somme de 382 660 euro et, par jugement en date du 6 juillet 2006, ils ont été déboutés de leurs demandes et condamnés à payer à chacune des sociétés citées, la somme de 1 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les 1er août et 26 octobre 2006, la société Simac a relevé appel de cette décision en intimant la société ACL, puis la société Actéon, venant aux droits de celle-ci, la société Gan Assurances, puis la société Gan Assurances IARD venant aux droits de cette société, la société Camat AGF puis la société AGF IART venant aux droits de cette dernière société.
Le 15 mars 2007, la société Gan Assurances IARD a interjeté appel - appel provoqué - contre la société Gan Eurocourtage.
Elle expose que la forme juridique de la société Gan a évolué au fil des années et que les différentes sociétés Gan Eurocourtage et Gan Assurances, qui tirent le plus grand profit de la confusion qu'elles entretiennent, justifient de la personne morale venant aux droits de la société Gan Assurances Direction Courtage IA.
La société Simac fait valoir que jusqu'en janvier 2001 elle détenait l'exclusivité pour les expertises concernant les véhicules assurés par les sociétés Gan et AGF, ce qui ressort des conventions signées entre elles et la société ACL.
Elle soutient que s'il n'existe aucun contrat avec la société AGF et les entités de la société Gan, les pièces produites établissent qu'il existait des relations commerciales entre elles, qui ont duré plus de 12 années, la société ACL n'agissant que dans le cadre d'une délégation de pouvoir qui ne la plaçait qu'en qualité d'intermédiaire-courtier.
La société Simac soutient que d'ailleurs, en 1999, Monsieur Simac a créé une société Zilian Consultancy Management, dont le siège social est à Singapour, afin de prendre en charge les sinistres pour cette partie du monde et que cette société a été agréée par les compagnies d'assurances.
Elle fonde sa demande sur les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et relève que la rupture des relations commerciales est intervenue brusquement sans respect d'aucun préavis et sans aucune justification, l'invocation d'une hausse des facturations - qui n'ont jamais été mises en cause - n'étant qu'un prétexte développé postérieurement à la rupture.
La société Simac prétend que si la société ACL était informée du mécontentement des sociétés d'assurance, elle engage comme elles sa responsabilité, puisqu'elle ne l'a pas informée, manquant ainsi à son obligation de conseil et à l'exécution de bonne foi du contrat qui les liait.
Elle demande que son préjudice soit fixé à la somme de 582 660 euro - sauf à désigner un expert à titre subsidiaire - et elle conclut à la condamnation solidaire de la société Gras Savoye, aux droits de la société ACL, de la société Gan Eurocourtage et de la société AGF IART au paiement de cette somme outre celle de 3 000 euro à titre de dommages-intérêts.
La société Gan Eurocourtage relève que l'assignation devant le tribunal de commerce visait la société Gan Assurances Direction Courtage Risques Entreprises IA, qui n'existe pas, la direction courtage étant en réalité attachée à la société Gan Eurocourtage qui a accepté d'intervenir volontairement mais qui ne peut être signataire d'un contrat avec la société ACL, puisqu'elle n'a été créée qu'en janvier 1997 et qu'elle a réalisé des opérations d'assurances avec son réseau de courtiers.
Elle indique que seule la société Gan Assurances IARD était signataire du contrat avec la société ACL - elle avait vocation de créer les contrats d'assurance et de les proposer aux clients par ses agents généraux - et que Gan Direction Courtage, qui constituait à l'origine un département de Gan IARD est devenue une société d'assurances Gan Eurocourtage qui avait pour objet les relations avec les courtiers et qui a naturellement poursuivi seule les relations avec la société ACL: aucune des compagnies du Gan n'avaient de relations contractuelles avec la société Simac.
La société Gan Eurocourtage rappelle que la relation commerciale invoquée par la société Simac implique qu'un lien direct ait existé entre le demandeur à l'action en réparation et le défendeur, ce qui n'est nullement le cas en l'espèce, puisqu'aux termes d'une convention entre la société Gan Assurances et la société ACL, c'est cette dernière et elle seule, qui désignait les experts en fonction d'une délégation de gestion des sinistres dont elle était investie.
Selon elle, en l'absence de relations commerciales directes entre la société Simac et le Gan, les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce sont inapplicables.
La société Gan Eurocourtage conteste à titre subsidiaire les conditions d'application de cet article, faisant valoir que la rupture serait en tout état de cause légitime, compte tenu des dérives de la société Simac dans la facturation des sinistres (elle facturait autant de frais de déplacement que de véhicules à expertiser), ce qui a conduit à lui adresser plusieurs avertissements dès le mois de septembre 2000, ce qui justifie la rupture.
Sur le préjudice, elle souligne que la société Simac n'a versé aucun document comptable - se contentant de tableaux élaborés pour les besoins de la cause - précise que c'est par la seule volonté de Monsieur Simac que l'activité hors France de la société Simac a été transférée à Singapour dans une société Zilian Consultancy Management qui n'a jamais été agréée et que c'est ce transfert qui a contribué à la diminution de l'activité de la société Simac.
La société Gan Eurocourtage ajoute que la mauvaise foi de la société Simac résulte de l'augmentation de son chiffre d'affaires (180 % entre 1997 et 1999), alors que le nombre de sinistres est demeuré identique, ce qui démontre une augmentation anormale et non justifiée des tarifs.
Elle rappelle de plus, que la société Simac n'a reçu du Gan des missions d'expertise que bien postérieurement aux autres intimées - à partir de 1994 - et qu'aucune condamnation solidaire ne peut intervenir.
La société Gan Eurocourtage conclut à la confirmation du jugement, au rejet des demandes de la société Simac et à sa condamnation au paiement de la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Gan Assurances IARD dénie tout lien contractuel avec la société Simac qui reconnaît n'avoir contracté qu'avec la société ACL qui bénéficiait d'une entière délégation pour la gestion des sinistres et le choix des experts: en l'absence de relation contractuelles et de relations commerciales, les dispositions de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce sont inapplicables.
Elle conteste l'existence d'un préjudice subi par la société Simac, s'oppose à toute condamnation solidaire, rappelle que le chiffre d'affaires avec la Compagnie Gan ne s'est élevé qu'à la somme de 18 141,43 euro en 1999 et sollicite la confirmation du jugement, le rejet des prétentions de la société Simac et à sa condamnation au paiement de la somme de 3 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
A titre subsidiaire, elle demande à être relevée et garantie de toute condamnation par la société Gan Eurocourtage.
La société Gras Savoye indique exercer une activité de courtage - et non d'assurance - depuis 1994 et avoir eu des rapports professionnels avec la société Simac dans le cadre des expertises, mais pas de relations contractuelles qui étaient établies avec les seules compagnies d'assurances.
Elle reconnaît qu'elle est mandatée par les compagnies d'assurances pour gérer en leur nom et pour leur compte auprès des assurés, les contrats d'assurance souscrits et notamment les sinistres et que ce sont les compagnies qui sélectionnent les experts dont la société Simac, qui ne bénéficie d'aucune exclusivité auprès du Gan et des AGF.
La société Gras Savoye conteste avoir des relations contractuelles avec la société Simac et donc être tenue à une obligation de conseil ou d'information, indique être étrangère au contrat de référencement entre les compagnies et la société appelante et que celle-ci correspondait directement avec les compagnies.
Elle sollicite sa mise hors de cause, souligne que la société Simac ne peut se plaindre que les compagnies d'assurances aient suspendu tout envoi de nouveaux dossiers en se prévalant de l'exception d'inexécution, dès lors qu'elle a refusé de s'expliquer sur l'augmentation de ses frais, manquant ainsi à son obligation de loyauté.
La société Gras Savoye ajoute que la société Simac ne démontre pas la rupture du contrat avec la société ACL au nom et pour le compte des AGF, son mandat de gestion en matière de sinistres n'incluant pas la sélection et l'éviction des experts et précise que c'est le Gan qui a pris la décision de ne plus désigner la société appelante du fait de son attitude.
Sur le préjudice, elle confirme que la société Simac n'a perdu aucun chiffre d'affaires en 2001, car elle n'en n'avait plus du fait qu'elle a dirigé son chiffre d'affaires sur la société Zilian Consultancy Management pour des raisons fiscales et personnelles.
Elle conteste le montant des chiffres d'affaires avancés par la société Simac et conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société Simac au paiement de la somme de 5 000 euro à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de celle de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société AGF IART prétend qu'il n'existe aucune relation commerciale établie entre elle et la société Simac, seule la société ACL saisissant l'expert, qu'il n'y a pas eu de brusque rupture des relations commerciales puisqu'elle a continué à travailler avec cette société postérieurement au 1er janvier 2001 et qu'il semble que ce soit la société ACL qui a pris l'initiative de la rupture en raison des multiples problèmes rencontrés.
Elle ajoute que le préjudice de la société Simac n'est pas établi et qu'elle ne peut en tout état de cause prétendre à une indemnisation représentant deux années de chiffre d'affaires, ce d'autant qu'elle ne peut justifier d'un préavis de deux ans.
La société AGF IART conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation de la somme de 3 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur Simac, qui n'a pas relevé appel et qui n'est pas intimé, a pris des conclusions identiques à celles de la société Simac, y compris dans les demandes formées au nom de cette dernière.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 septembre 2008.
Motifs de la décision
* Sur les demandes à l'encontre de la société Gan Eurocourtage IARD et de la société Gan Assurances IARD :
Attendu que selon protocole ayant pris effet le 1er avril 1994, la société Gan Incendie Accidents Risques Divers (IARD), élisant domicile dans les locaux d'Eurocourtage et la société ACL, courtier représentée par Monsieur Lefebvre, précisent les modalités de leur collaboration dans la gestion de deux contrats ayant pour objet de garantir les dommages aux véhicules participant à des compétitions automobiles sur circuit (contrat à la course et contrat à la saison) ;
Qu'il indique que le Gan Incendie Accident, soucieux d'améliorer les rapports de travail courtiers-compagnie (...) a estimé nécessaire de préciser les modalités selon lesquelles une collaboration confiante et efficace doit s'instaurer entre le courtier gestionnaire et les services de Gan Eurocourtage ;
Qu'il organise une délégation de gestion des sinistres par laquelle le courtier gestionnaire missionne l'expert, expressément désigné, Monsieur Simac ;
Attendu que les conditions particulières du contrat à la course, produites par la société ACL sont à l'en-tête du "Gan" ;
Attendu que les correspondances produites aux débats émanent de Gan Direction Courtage ou de Gan IA Eurocourtage.
Qu'il est constant et admis par les sociétés Gan Eurocourtage IARD et Gan Assurances IARD que Gan Direction Courtage était rattachée à la société Gan Eurocourtage IARD et a pour objet les relations avec les courtiers ;
Que la société Gan Eurocourtage IARD a repris l'activité de la direction de courtage de la société Gan Assurances IARD et a poursuivi les relations de cette dernière société avec la société ACL ;
Attendu dès lors, que seule la société Gan Eurocourtage IARD doit être considérée comme étant liée contractuellement avec la société ACL et qu'il convient de mettre hors de cause la société Gan Assurances IARD ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait par tout commerçant de rompre brutalement une relation commerciale établie sans préavis écrit ;
Que ces dispositions s'appliquent tant aux relations contractuelles qu'aux relations extra-contractuelles et qu'elles concernent notamment les activités de production et de services ;
Attendu en l'espèce, que la société ACL est le mandataire de la société Gan Eurocourtage IARD en ce qui concerne la gestion des sinistres visés au protocole et que c'est le mandant qui est dès lors à l'origine de la décision du recours à l'expertise, qui contrôle l'exécution des missions (courrier de Direction Courtage à la société Simac du 15 mai 2001 et lettre de la société Simac du 12 avril 2001), et qui apprécie et paie les honoraires ;
Que d'ailleurs, les conditions particulières du contrat "à la course" indiquent que l'assuré, en cas de sinistre, doit prendre contact avec Monsieur Simac, "expert mandaté par l'assureur" ;
Qu'il est dès lors indifférent qu'aucun contrat n'ait existé entre la société Gan Eurocourtage IARD et la société Simac, les relations contractuelles résultant de l'acceptation par l'assureur du choix de cette société en qualité d'expert et de sa désignation dans le cadre du protocole et de la délégation de gestion des sinistres ;
Attendu que la société Gan Eurocourtage IARD reconnaît que la société Simac effectuait des expertises pour la société Gan depuis 1994 et que l'appelant ne fournit aucun document justifiant d'une intervention antérieure ;
Qu'il apparaît ainsi qu'il existait une relation commerciale établie entre la société Gan Eurocourtage IARD et la société Simac et que si l'assureur est libre de changer d'expert, il convient de le faire en respectant un préavis ;
Attendu que par courrier en date du 22 février 2001, la Direction Courtage de la société Gan a fait connaître à Monsieur Simac qu'elle ne souhaitait plus lui confier les missions d'expertise des véhicules de compétition automobile assurés par le cabinet ACL ;
Qu'il est constant que la société Simac n'a bénéficié d'aucun préavis et que la rupture doit être considérée comme brutale ;
Attendu sur le bien-fondé de la rupture, que l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ne fait pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ;
Attendu en l'espèce, que la correspondance adressée antérieurement à la rupture à la société Simac par l'assureur est celle du 29 septembre 2000, par laquelle la Direction Courtage lui demandait de plus détailler ses notes d'honoraires, de distinguer le montant des frais de celui des honoraires et lui faisait le reproche du montant élevé des frais de déplacement lorsque plusieurs accidents affectaient une même course ;
Que ce seul courrier, en dehors de tout autre reproche ou mise en garde, est insuffisant pour établir que la société Simac a manqué à ses obligations et que la société Gan Eurocourtage IARD n'était pas fondée à résilier les relations commerciales sans préavis ;
Attendu sur la durée du préavis, que la société Simac était le seul expert désigné pour la compétition automobile et qu'il bénéficiait ainsi d'une exclusivité ;
Que compte tenu de la durée de la relation commerciale - 7 années - du fait que la société Simac ne réalisait plus que les expertises sur les compétitions automobiles en France (toutes les expertises hors de France devaient être facturées à compter de mai 1999 à la société Zilian Consultancy Management à Singapour : lettre du 30 mai 1999), qu'elle ne comptait qu'un salarié, qu'elle ne justifie d'aucun investissement particulier lié à sa relation avec la société Gan Eurocourtage IARD et que le chiffre d'affaires avec le Gan représentait moins de 6 % de l'ensemble de son chiffre en 1999, il convient de fixer un préavis de 4 mois ;
Attendu sur le préjudice, que ne peut être indemnisé que celui entraîné par le caractère brutal de la rupture et non le préjudice résultant de la rupture elle-même et qu'il doit être apprécié au regard de la marge bénéficiaire brute que la société Simac aurait été en droit d'escompter en l'absence de rupture pendant la durée du préavis ;
Attendu que la société Simac produit aux débats le compte de résultat au 31 décembre 1998, faisant ressortir un chiffre d'affaires de 2 166 738 F, des charges d'exploitation de 2 032 297 F et un résultat d'exploitation de 134 441 F, le compte de résultat au 31 décembre 1999 qui mentionne un chiffre d'affaires de 2 227 478 F, des charges d'exploitation de 1 986 837 F et un résultat d'exploitation de 240 673 F et le compte de résultat au 31 décembre 2000, faisant apparaître un chiffre d'affaires de 164 930 euro (1 081 869 F), des charges d'exploitation de 215 304 euro (1 412 301 F) et un résultat d'exploitation déficitaire de 42 968 euro (281 851 F) ;
Que le seul document produit relatif aux honoraires versés par la société Gan Eurocourtage IARD figure dans un tableau de synthèse 1997 à 2000, dans lequel seuls sont renseignés les honoraires pour l'année 1999 (119 000 F HT), que la société Gan Eurocourtage IARD évoque un chiffre d'affaires d'environ 45 735 euro (300 000 F) et que dans son assignation la société Simac faisait état d'un montant d'honoraires de 152 884 F TTC en 1999 et de 201 844 F TTC en 2000 soit une moyenne annuelle de 177 364 F TTC, et mensuelle de 14 780 F TTC soit 2 253 euro TTC ;
Attendu que la marge brute figurant dans l'état de synthèse ressort à une moyenne de 45 % ;
Attendu que compte tenu de ces éléments, il convient de condamner la société Gan Eurocourtage IARD à payer à la société Simac la somme de 6 000 euro à titre de dommages- intérêts et de réformer le jugement de ce chef ;
* Sur la demande à l'encontre de la société AGF IART :
Attendu qu'il ressort tant des écritures de la société Gras Savoye que du protocole d'indemnisation intervenu entre la société AGF IART et la société ACL le 17 janvier 2001, que celle-ci est gestionnaire délégué des sinistres, à l'exception de leur instruction, et que pour les sinistres dommages sur véhicules de compétition, l'expert est le Cabinet Simac et la société Zilian Consultancy Management pour l'étranger ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que la société AGF IART a confié à la société Simac, au moins depuis 1997 - aucun document antérieur n'étant produit - les expertises de véhicules sinistrés lors de compétitions automobiles et qu'elle lui a réglé les honoraires correspondant (1 033 055,01 F TTC soit 885 259 F HT en 2000) ;
Attendu que pour les raisons déjà exposées pour la société Gan Eurocourtage IARD, que la société ACL est le mandataire de la société AGF IART en ce qui concerne la gestion des sinistres visés au protocole et que c'est le mandant qui est dès lors à l'origine de la décision du recours à l'expertise, qui contrôle l'exécution des missions, et qui apprécie (mail du 27 novembre 2000 et du 21 mai 2001) et paie les honoraires (571 807 F en 1997, 686 905 F en 1998, 839 821 F en 1999 et 885 259 F en 2000) ;
Qu'il apparaît ainsi qu'il existait une relation commerciale établie entre la société AGF IART et la société Simac ;
Attendu sur la rupture des relations, que la société AGF IART indique dans ses écritures qu'elle s'est retirée du marché en partie en raison des coûts d'expertise dont elle n'obtenait pas justification ;
Que si dans un mail adressé à la société ACL le 27 novembre 2000, la société AGF IART indique qu'il n'est pas dans ses intentions de remettre en cause la collaboration avec la société Simac, elle demande au courtier qu'il recherche un second expert et qu'aucun justificatif de missions après le 1er janvier 2001, n'est produit aux débats, le mail du 21 mai 2001 (de la société AGF IART à la société Simac) concernant des honoraires impayés de l'année 2000 (voir mails des 17 et 26 mars 2001) ;
Attendu dès lors, qu'il résulte de ces éléments que la société AGF IART a cessé toute collaboration avec la société Simac en 2001, sans lui accorder de préavis ;
Attendu sur le bien-fondé de la rupture, que le 27 novembre 2000, la société AGF IART a demandé à la société Simac de détailler ses factures, dans le but d'améliorer sa gestion et ses statistiques et afin de respecter les règles d'usage pratiquées pour cette nature de dossier ;
Attendu que les pièces produites, si elles établissent quelques litiges sur le montant des frais facturés par la société Simac, n'établissent pas que la société Simac a manqué à ses obligations, ce d'autant qu'elle était reconduite en qualité d'expert dans le protocole d'indemnisation du 17 janvier 2001 ;
Qu'il convient de retenir que la société AGF IART n'était pas fondée à rompre sans préavis les relations commerciales établies avec la société Simac depuis 1997 ;
Attendu que compte tenu de la durée des relations (4 ans), mais aussi du montant du chiffre d'affaires réalisé (45 % en moyenne par rapport au chiffre d'affaires global), du fait que la société Simac n'effectuait plus, depuis 1999, que les expertises sur le territoire national, ayant confié à une société étrangère les autres expertises (lettre du 30 mai 1999), il y a lieu de fixer à quatre mois le préavis qu'aurait dû respecter la société AGF IART ;
Attendu sur le préjudice, compte tenu de la marge brute moyenne (45 %), du transfert à une société étrangère des expertises hors de France, il convient de condamner la société AGF IART à payer à la société Simac la somme de 24 000 euro au titre du préjudice subi du fait de la rupture brutale ;
Que le jugement est réformé de ce chef ;
* Sur la demande à l'encontre de la société Gras Savoye :
Attendu que la société Simac ne démontre pas que la société ACL, mandataire des compagnies, soit à l'origine de la rupture des relations commerciales tant avec la société Gan Eurocourtage IARD qu'avec la société AGF IART ;
Qu'elle ne peut lui reprocher de ne pas avoir exécuté le contrat de bonne foi ou de ne pas l'avoir tenue informée des exigences de ses mandants, alors que dès le 29 septembre 2000 faisant suite à une réunion du 7 juin 2000 au cours de laquelle l'assureur lui avait demandé que ses notes d'honoraires soient plus détaillées, la société Gan Eurocourtage IARD réitérait sa demande de précision ;
Que de même, le 27 novembre 2000, la société AGF IART prenait directement contact avec la société Simac et qu'il résulte du mail du même jour adressé par l'assureur à la société ACL, que cette dernière avait déjà répondu aux interrogations de son mandant ;
Attendu que le jugement est confirmé pour avoir rejeté la demande de la société Simac à l'encontre de la société ACL, aux droits de laquelle se trouve la société Gras Savoye ;
Attendu que les relations de la société Simac étant indépendantes vis-à-vis de chacun des assureurs, sa demande de condamnation solidaire est rejetée ;
Attendu que ni la société Gras Savoye ni la société Gan Assurances IARD ne démontrent le caractère abusif de la procédure engagée à leur encontre par la société Simac et que leur demande de dommages-intérêts est écartée ;
Attendu que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit l'appel comme régulier en la forme, Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Simac à l'encontre de la société Gan Assurances IARD et de la société ACL aux droits de laquelle se trouve la société Gras Savoye et en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive, Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, Condamne la société Gan Eurocourtage IARD à payer à la société Simac la somme de 6 000 euro à titre de dommages-intérêts, Condamne la société AGF IART à payer à la société Simac la somme de 24 000 euro à titre de dommages-intérêts, Rejette les autres demandes, Condamne in solidum la société Gan Eurocourtage IARD et la société AGF IART aux dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.