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Décisions

CCE, 8 novembre 2006, n° 38.907

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Poutrelles en acier

CCE n° 38.907

8 novembre 2006

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier, et notamment son article 65, vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement (CE) n° 1-2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (1), et notamment son article 7, paragraphe 1, et son article 23, paragraphe 2, vu la décision de la Commission du 8 mars 2006 d'ouvrir la procédure dans la présente affaire, vu les demandes de renseignement et les vérifications effectuées au titre de l'article 47 du traité CECA par des agents de la Commission ainsi que les demandes de renseignements effectuées au titre de l'article 18 du règlement (CE) n° 1-2003, vu les observations écrites présentées au nom et pour le compte des parties en vertu de l'article 27, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1-2003 et du règlement (CE) n° 773-2004 de la Commission du 7 avril 2004 relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 et 82 du traité CE (2), après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire, considérant ce qui suit :

1. INTRODUCTION

(1) Les personnes morales suivantes sont destinataires de la présente décision :

- Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA, ci-après " Arbed SA ") ;

- Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA, ci-après " Trade Arbed SA ") ;

- Arcelor Profil Luxembourg SA (ex-Profil Arbed SA, ci-après "Profil Arbed SA").

(2) Parmi les sociétés mentionnées au considérant (1), Trade Arbed SA a participé, en violation de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, à une série d'accords et de pratiques concertées qui ont eu pour objet ou pour effet de fixer les prix, d'attribuer des quotas et d'échanger, à grande échelle, des informations sur le marché communautaire des poutrelles. Arbed SA et Profil Arbed SA sont quant à elles tenues pour solidairement responsables avec Trade Arbed SA de ces infractions, dans la mesure où ces sociétés appartiennent toutes à l'entreprise chapeautée dans un premier temps par Arbed SA puis par Arcelor SA. Bien que certains de ces accords ou pratiques concertées remontent à 1984 au moins, la participation des destinataires de la présente décision à ces infractions par le biais de Trade Arbed SA n'est retenue dans la présente décision qu'à compter du 1er juillet 1988.

(3) Le 6 février 1992, la Commission a adressé à Trade Arbed SA, ainsi qu'à 17 autres entreprises et à une association d'entreprises, une communication des griefs relative à leur participation aux infractions mentionnées au considérant (2). Le 16 février 1994, la Commission a adopté la décision 94-215-CECA relative à une procédure d'application de l'article 65 du traité CECA concernant des accords et pratiques concertées impliquant des producteurs européens de poutrelles (3), infligeant des amendes à Arbed SA, la société-mère de Trade Arbed SA, pour la participation de Trade Arbed SA aux infractions à l'article 65 du traité CECA. Elle a également infligé des amendes à 13 autres entreprises, sur le même fondement (4).

(4) Arbed SA a introduit un recours en annulation contre cette décision devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes. Le 11 mars 1999, dans l'affaire T-137-94, Arbed SA/Commission (ci-après " l'arrêt T-137-94 ") (5), le Tribunal a pour l'essentiel confirmé la décision 94-215-CECA, tout en annulant certains des griefs retenus par la Commission et en réduisant le montant des amendes infligées (6).

(5) Arbed SA a alors introduit un pourvoi contre l'arrêt T-137-94 devant la Cour de justice des Communautés européennes. Le 2 octobre 2003, dans l'affaire C-176-99 P, Arbed SA/Commission (ci-après " l'arrêt C-176-99) (7), la Cour a annulé, pour irrégularité de procédure, l'arrêt T-137-94 ainsi que la décision 94-215-CECA pour autant qu'elle concerne Arbed SA (8). La Cour a en effet jugé que la procédure suivie pour l'adoption de la décision 94-215-CECA infligeant une amende à Arbed SA en raison de la participation de sa filiale Trade Arbed SA aux infractions à l'article 65 du traité CECA mentionnées au considérant (2), était irrégulière dans la mesure où la Commission n'avait préalablement adressé une communication des griefs qu'à Trade Arbed SA et non à Arbed SA qu'elle avait sanctionnée.

(6) À la suite de cette annulation, la Commission a décidé d'engager une nouvelle procédure à l'encontre du comportement anticoncurrentiel qui avait fait l'objet de la décision 94-215-CECA. Le 8 mars 2006, la Commission a adressé à Arbed SA, Trade Arbed SA, et Profil Arbed SA une communication des griefs les informant de l'intention de la Commission d'adopter une décision les tenant pour solidairement responsables des infractions mentionnées au considérant (2) (9). Arbed SA, Trade Arbed SA, et Profil Arbed SA ont chacune répondu à cette communication des griefs le 20 avril 2006.

(7) L'adoption de la présente décision fait suite à l'adoption de la communication des griefs du 8 mars 2006 et vise à rectifier l'irrégularité de procédure commise lors de l'adoption de la décision 94-215-CECA qui a été annulée par la Cour pour autant qu'elle concerne Arbed SA. En conséquence, la présente décision reprend les informations relatives au marché énoncées dans la décision 92-215-CECA et tient compte des solutions dégagées par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 quant à la nature et à la sanction des infractions commises (10). Par ailleurs, il doit être souligné que la présente décision n'a aucune incidence sur la décision 94-215-CECA pour ce qui est des autres entreprises et de l'association d'entreprises qui avaient participé aux infractions décrites au considérant (2) et auxquelles cette dernière avait aussi été adressée. Enfin, comme il est exposé dans la section 5.1 de la présente décision, il importe de souligner que le traité CECA, qui a expiré le 23 juillet 2002, demeure le droit matériel applicable en l'espèce, tandis que, sur le plan procédural, le droit applicable est celui du traité CE en vigueur (11).

2. LES FAITS

(8) Comme il est indiqué au considérant (7), les informations relatives au marché mentionnées dans la présente décision sont identiques à celles qui figurent dans la décision 94-215-CECA. De plus, les faits et infractions établis dans la présente décision sont identiques à ceux qui ont été retenus par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 (12). Il convient en outre de souligner que les trois sociétés destinataires de la présente décision ne contestent, dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, ni les faits ni la qualification juridique des faits retenus par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 (13) et que la présente décision reprend.

2.1. RESUME DES INFRACTIONS

(9) Les restrictions de la concurrence que la Commission sanctionne dans la présente décision découlent de la coopération entre Trade Arbed SA, certains producteurs et distributeurs européens de poutrelles, et certaines de leurs associations professionnelles. Cette coopération s'effectuait à plusieurs niveaux, qu'il est possible de résumer comme suit.

2.1.1. La Communauté

(10) Au niveau communautaire, cette coopération avait principalement lieu au cours de réunions d'un groupe connu sous le nom de "Commission poutrelles", l'une des commissions d'Eurofer ASBL (ci-après " Eurofer "). Eurofer, qui est la confédération européenne des entreprises de la sidérurgie, était à l'époque des faits une association dont la plupart des adhérents étaient des associations d'entreprises, mais qui regroupait aussi certaines entreprises. L'échange d'informations par l'intermédiaire d'Eurofer doit aussi être mentionné dans ce contexte.

2.1.2. Les marchés individuels

(11) En dehors des réunions de la Commission poutrelles, des entreprises et associations d'entreprises se réunissaient aussi de manière moins régulière, afin d'examiner des marchés dans certains États membres - à savoir l'Italie, la France et l'Allemagne - et de coordonner leur comportement sur ces marchés.

2.1.3. Les accords individuels

(12) En plus de la coopération sommairement décrite aux considérants (9) à (11), le groupe Arbed a conclu des accords individuels de répartition des marchés et/ou de fixation des prix.

2.1.4. Eurofer/Scandinavie

(13) Les entreprises et associations d'entreprises de la Communauté rencontraient régulièrement leurs partenaires norvégiens, suédois et finlandais à l'occasion de réunions dites "Eurofer/Scandinavie", au cours desquelles les marchés scandinaves (y compris le marché danois) étaient examinés.

2.2. PRODUITS EN CAUSE

(14) Les produits concernés par la présente décision sont les poutrelles à ailes larges et d'autres poutrelles I, H et U, d'une dimension supérieure ou égale à quatre-vingt millimètres (à l'exception des profilés pour soutènement de mines). Dans la présente décision, ces produits sont regroupés sous l'appellation collective de "poutrelles". Il s'agit de produits finis longs laminés à chaud, principalement utilisés dans la construction. Les poutrelles sont des produits CECA au sens de l'article 81 du traité CECA.

(15) Les entreprises et associations concernées divisaient les poutrelles en plusieurs catégories. La classification qui suit au tableau 1 a été instaurée en Allemagne en juillet 1987.

Tableau 1

Catégorie : Dimensions en mm

1: IPN 80 - 220, UPN 80 - 220

2a: IPE 80 - 220

2b1: HE 100 - 180

2b2: UPN 240 - 300, IPE 240 - 330, HE 200 - 220

2b3: IPN 240 - 300, IPE 360 - 400, HE 240 - 300,

2c: IPN 320 - 500, UPN 320 - 400, IPE 450 - 600, HE 320 - 600,

3: IPN 550 - 600, IPE 750, HE 650 - 1000

(16) Une nouvelle catégorie, appelée 2d (UPN 320-400), a été utilisée en Allemagne à partir du 1er juillet 1990. Toutes les parties concernées utilisaient les mêmes catégories (avec de légères modifications) pour les marchés CECA situés sur le continent.

(17) Étant donné que le système de mesure dit "Impérial" était toujours employé au Royaume-Uni, des catégories différentes y étaient utilisées. Les produits en cause étaient répartis en solives, poutrelles/colonnes et poutrelles U. Par exemple, au quatrième trimestre de 1990, les catégories du tableau 2 étaient employées.

Tableau 2

Catégorie : Dimensions en mm

A1 : 203 x 133 tous poids en kg

152 x 152 tous poids en kg

A2 : 203 x 102

254 x 102 x 22 uniquement

254 x 146 tous poids en kg

305 x 165 tous poids en kg

356 x 171 tous poids en kg

406 x 178 x 54

406 x 178 x 60 uniquement

457 x 191 x 67

457 x 191 x 74 uniquement

533 x 210 x 82

533 x 210 x 92 uniquement

203 x 203 x 46

203 x 203 x 52 uniquement

203 x 203 x 60

254 x 254 x 73

254 x 254 x 89 uniquement

A3 : Toutes les autres poutrelles et colonnes

(18) Selon les termes des diverses mesures adoptées par la Commission depuis 1980 afin de faire face à la crise de la sidérurgie (14), les poutrelles, ainsi que les profilés pour soutènement de mines, étaient désignés sous le nom de "Catégorie III".

2.3. MARCHE

(19) Comme l'indique le tableau 3, la production de poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier a connu une croissance notable jusqu'en 1990 (15):

Tableau 3

Production dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier (en milliers de tonnes)

1984 : 4 769

1985 : 5 218

1986 : 6 508

1987 : 6 618

1988 : 7 580

1989 : 7 944

1990 : 8 003

(Source: Eurostat)

(20) Les plus grands producteurs de la Communauté européenne du charbon et de l'acier étaient à l'époque des faits situés au Royaume-Uni, en Allemagne, en Espagne et au Luxembourg. Le tableau 4 indique la production de poutrelles par État membre au cours des années 1986 à 1990:

<emplacement tableau>

(21) Le commerce entre les États membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier était à l'époque des faits très important. En 1990, par exemple, les importations en provenance d'autres États membres représentaient plus de 36 % de la production totale. Une grande partie de la production de la Communauté (environ 25 % en général) était exportée vers des pays tiers. Les importations de poutrelles en provenance des pays tiers étaient pour leur part plus réduites, ainsi que le montre le tableau 5.

<emplacement tableau>

(22) En l'absence de statistiques suffisamment précises et détaillées relatives aux mouvements de stocks des produits en cause aux différents niveaux de la chaîne de distribution (producteur, grossiste et consommateur), il est difficile de déterminer avec précision la consommation de poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Toutefois, il est possible de calculer la consommation apparente en ajoutant à la production les importations en provenance des pays tiers et en déduisant de ce montant les exportations vers les pays tiers. Ces approximations, reprises au tableau 6, donnent une idée de l'importance des produits en cause.

<emplacement tableau>

(23) Dans la mesure où certains accords et pratiques concertés portaient sur les marchés des différents États membres, il est nécessaire d'examiner ces sous-marchés (voir tableaux 7 à 12).

<emplacement tableau>

2.4. ENTREPRISES ET ASSOCIATIONS D'ENTREPRISES PARTIES A L'INFRACTION

(24) Bien que la présente décision ne concerne que les personnes morales destinataires mentionnées au considérant (1) pour les raisons exposées au considérant (7), il convient de rappeler que les entreprises et associations d'entreprises qui ont participé aux infractions décrites au considérant (2) sont les suivantes:

1. Peine-Salzgitter AG

2. Thyssen Stahl AG

3. Saarstahl AG

4. Walzstahl-Vereinigung

5. Trade Arbed SA

6. Cockerill Sambre SA

7. Unimétal, Société Française des Aciers Longs SA

8. British Steel plc

9. Empresa Nacional Siderurgica SA

10. José María Aristrain, Madrid SA et José María Aristrain SA

11. Ferdofin SpA

12. Acciaierie e Ferriere Stefana F.lli fu Girolamo SpA

13. Eurofer asbl

14. Hoesch Stahl AG

15. Neue Maxhuette Stahlwerke GmbH

16. Norsk Jernverk AS

17. SSAB - Svenskt Stal AB

18. Ovako Profiler AB

19. Smedjebacken/Fundia Steel AB

2.5. INFORMATIONS AU SUJET DES ENTREPRISES ET ASSOCIATIONS D'ENTREPRISES PARTIES A L'INFRACTION

(25) Ces entreprises et associations d'entreprises peuvent être réparties en fonction des Etats membres où est situé leur siège social au moment des faits :

2.5.1. L'Allemagne

a) Stahlwerke Peine-Salzgitter AG, ci-après dénommée "Peine-Salzgitter", était à l'époque des faits une société anonyme dotée d'un capital de 312 millions de marks allemands. La quasi-totalité (99,48 %) de ses actions était détenue par Salzgitter Huettenwerk GmbH, filiale à 100 % de Salzgitter GmbH, elle-même filiale à 100 % de Preussag AG. Peine-Salzgitter était l'un des principaux producteurs d'acier en Allemagne et son chiffre d'affaires consolidé était de 3,225 milliards de marks allemands en 1989/1990. En 1992, le nom de l'entreprise a été changé en Preussag Stahl AG.

b) Thyssen Stahl AG, ci-après dénommée "Thyssen", était à l'époque des faits une société anonyme dotée d'un capital d'environ 2 milliards de marks allemands. Thyssen, filiale à 100 % de Thyssen AG (anciennement August Thyssen-Huette), était la plus importante filiale productrice d'acier du groupe Thyssen. En 1989/1990, son chiffre d'affaires était de 8,241 milliards de marks allemands.

c) Saarstahl AG, ci-après dénommée "Saarstahl", a succédé à Saarstahl Voelklingen GmbH. Cette dernière avait été transformée le 15 juin 1989 en une société anonyme appelée DHS-Dillinger Huette Saarstahl AG, ci-après dénommée "DHS". Par la suite, l'essentiel des activités de l'ancienne Saarstahl Voelklingen GmbH a été transféré à une société nouvelle, appelée Saarstahl AG, filiale à 100 % de DHS Saarstahl, fabricant de produits longs, qui a donc, d'un point de vue économique, succédé à Saarstahl Voelklingen GmbH et accepté de reprendre à son compte tous les engagements souscrits par Saarstahl Voelklingen GmbH. C'est pourquoi, pour la période d'avant juin 1989, le nom de Saarstahl désigne, dans la présente décision, "Saarstahl Voelklingen GmbH". Le groupe Usinor Sacilor détenait 70 % des actions de DHS, tandis que le Land allemand de la Sarre en possédait 27,5 %. Les 2,5 % restants étaient détenus par Arbed SA. En 1989, le chiffre d'affaires de Saarstahl était de 2,438 milliards de marks allemands. Le 18 mai 1993, elle a été déclarée en faillite et le 31 juillet 1993, elle a été placée sous administration judiciaire.

d) Hoesch Stahl AG, ci-après dénommée "Hoesch", Dortmund, était à l'époque des faits une société anonyme dotée d'un capital de 210 millions de marks allemands. Toutes ses actions étaient détenues par Hoesch AG, dont le chiffre d'affaires consolidé était de 10,679 milliards de marks allemands en 1989. En 1992, elle a fusionné avec Krupp pour former Krupp-Hoesch AG.

e) Kloeckner Stahl GmbH, ci-après dénommée "Kloeckner", était à l'époque des faits une filiale à 100 % de Kloeckner-Werke AG, groupe actif dans les secteurs de l'acier, du plastique et de la construction. En 1989/1990, le chiffre d'affaires consolidé de Kloeckner-Werke AG atteignait presque 7,5 milliards de marks allemands. Le volume de produits laminés fabriqués par l'entreprise au cours de la même période dépassait 3,6 millions de tonnes. En mai 1993, Kloeckner Stahl GmbH s'est engagée dans une procédure de compromis (Vergleich) et le 3 juin 1993, elle est parvenue à un accord avec ses créanciers, y compris la Commission.

f) Neue Maxhuette Stahlwerke GmbH, ci-après dénommée "Neue Maxhuette", a été fondée en 1988 par le Land allemand de Bavière (qui possédait à cette époque 45 % du capital), Thyssen Stahl AG (5,5 %), Thyssen Edelstahlwerke AG (5,5 %), Lech-Stahlwerke GmbH (11 %), Krupp Stahl (11 %), Kloeckner Stahl GmbH (11 %) et Mannesmannroehren-Werke AG (11 %). Cette société a acquis l'essentiel des actifs de Eisenwerk-Gesellschaft Maximillianshuette mbH, déclarée en faillite le 16 avril 1987. En 1991, son chiffre d'affaires était de 226 millions de marks allemands. Cette société est à présent dénommée NMH Stahlwerke GmbH.

g) La Walzstahl-Vereinigung était à l'époque des faits une association de fabricants allemands de produits laminés, mais elle comptait aussi des membres établis à l'étranger. Elle faisait partie de la Wirtschaftsvereinigung Stahl, l'association des sidérurgistes allemands.

2.5.2. Le Luxembourg

a) Trade Arbed SA était à l'époque des faits une société anonyme dont toutes les actions étaient détenues (directement ou indirectement) par Arbed SA. Trade Arbed SA avait pour activité la distribution des produits sidérurgiques fabriqués par Arbed SA. En 1990, le chiffre d'affaires consolidé d'Arbed SA était de 208,76 milliards de francs luxembourgeois, (...). En ce qui concerne les poutrelles et d'autres produits longs, Arbed SA avait conclu des accords de coopération et de commercialisation avec deux de ses concurrents, Cockerill Sambre et Unimétal. Le 28 mai 1984, la Commission a autorisé, pour une dizaine d'années, un accord conclu entre Arbed SA et Cockerill Sambre, qui prévoyait la rationalisation et la spécialisation des productions des deux parties, tant pour les produits plats que pour les produits longs. En vertu de l'accord, Arbed SA devait se spécialiser dans les produits longs, tandis que Cockerill Sambre devait se concentrer sur les produits plats. Cet accord a été modifié en 1989/1990. Suite à cette modification, certaines des poutrelles commercialisées par Trade Arbed SA ont été laminées par Cockerill Sambre qui s'était alors retirée de ce marché. Le 14 juillet 1988, la Commission a autorisé, jusqu'à la fin de 1992, un accord de spécialisation entre Arbed SA et Unimétal dans le domaine des produits longs. La décision de la Commission du 9 septembre 1991 autorisant un accord de vente en commun entre ARBED SA et Usinor-Sacilor SA en matière de poutrelles (...) (16) a autorisé la conclusion, entre Arbed SA et Usinor Sacilor, d'un accord de vente en commun de poutrelles. Le 23 juillet 1993, le Commission a autorisé la concentration de certaines activités d'Usinor Sacilor et d'Arbed SA, notamment la production et la distribution des poutrelles, dans Profil Arbed SA, filiale d'Arbed SA.

b) Eurofer la confédération européenne des entreprises de la sidérurgie, était à l'époque des faits une association dont la plupart des adhérents étaient des associations d'entreprises, mais qui regroupait aussi certaines entreprises (comme Det Danske Staalvalsevoek AS et British Steel au cours de la période visée par la présente décision) qui étaient directement membres.

2.5.3. La Belgique

Cockerill Sambre SA, ci-après dénommée "Cockerill Sambre", était à l'époque des faits le principal producteur belge d'acier. Steelinter SA, ci-après dénommée "Steelinter", était le principal distributeur de Cockerill Sambre qui détenait, directement ou indirectement, la totalité de son capital. En 1990, le chiffre d'affaires du groupe Cockerill Sambre s'élevait à 203 milliards de francs belges.

2.5.4. La France

Unimétal société française des aciers longs SA, ci-après dénommée, "Unimétal", était à l'époque des faits le plus important fabricant de produits longs du groupe Usinor Sacilor, dont il était filiale à 100 %. En 1990, son chiffre d'affaires était de 6 896 millions de francs français. Usinor Sacilor SA, ci-après dénommée "Usinor Sacilor", était alors une société de portefeuille d'État qui coiffait la majorité des sociétés françaises productrices d'acier. Elle résultait de la fusion d'Usinor SA et de Sacilor SA, effectivement réalisée le 18 novembre 1987. De fait, les deux sociétés avaient, dès 1982, fait l'objet d'une concentration, opération autorisée par la Commission le 2 avril 1982. Usinor Sacilor était le deuxième producteur d'acier au monde. En 1990, son chiffre d'affaires consolidé était de 96,053 milliards de francs français.

2.5.5. Le Royaume-Uni

British Steel plc, ci-après dénommée "British Steel", était à l'époque des faits le premier producteur d'acier au Royaume-Uni. Cette société a succédé à British Steel Corporation, privatisée en 1988. Pour l'exercice social qui a pris fin le 31 mars 1990, le chiffre d'affaires consolidé de British Steel était de 5,113 milliards de livres sterling.

2.5.6. L'Espagne

a) Empresa Nacional Siderúrgica SA, ci-après dénommée "Ensidesa", était à l'époque des faits un important producteur espagnol d'acier. Elle était détenue à 99,99 % par l'Instituto Nacional de Industria (une entité appartenant au secteur public). Le chiffre d'affaires consolidé d'Ensidesa était de 1 437 millions d'écus en 1990.

b) José María Aristrain Madrid, SA, et José María Aristrain, SA, ci-après dénommées "Aristrain", étaient à l'époque des faits deux sociétés sidérurgiques appartenant au groupe Aristrain dont le capital était détenu par la famille Aristrain. En 1990, le chiffre d'affaires du groupe s'élevait à 73,216 milliards de pesetas espagnoles. José María Aristrain Madrid, SA et José María Aristrain, SA ont changé de dénomination sociale, et ont à présent respectivement pour noms Siderúrgica Aristrain Madrid, SL et Siderúrgica Aristrain Olaberria, SL.

c) Le 6 janvier 1993, la Commission a autorisé un accord de spécialisation et de commercialisation en commun des poutrelles entre Aristrain et Ensidesa.

2.5.7. L'Italie

a) Ferdofin SpA, ci-après dénommée "Ferdofin", était une société de portefeuille spécialisée, par l'intermédiaire de ses filiales, dans les produits longs. L'une de ses filiales était à l'époque des faits Eurocolfer Acciai SpA; alors détenue à 99,99 % par Ferdofin. ILVA possédait 20 % du capital de Ferdofin. En 1990, le chiffre d'affaires consolidé de cette dernière société s'élevait à 773 milliards de lires italiennes.

b) Acciaieria e Ferriere Stefana F.lli fu Girolamo SpA, ci-après dénommée "Stefana", était à l'époque des faits un fabricant de produits longs. Son chiffre d'affaires de 1990 s'élevait à 215,194 milliards de lires italiennes.

2.5.8. La Scandinavie

a) Fundia Norsk Jernverk AS, ci-après dénommée "Norsk Jernverk", a été créée en 1989 lorsque Norsk Jernverk AS a été subdivisée en Fundia Norsk Jernverk AS et Norsk Jern Eiendom AS. Nors Jernverk AS était une société anonyme norvégienne dotée d'un capital de 300 millions de couronnes norvégiennes. En 1990, ses ventes totales ont atteint 1 450 millions de couronnes norvégiennes (180 millions d'écus). Norsk Jernverk était alors active sur le marché CECA, entre autres par l'intermédiaire de filiales en Allemagne et au Royaume-Uni. Pour la période antérieure à 1989, toute mention de "Norsk Jernverk" doit se comprendre comme se rapportant à Norsk Jernverk AS.

b) SSAB Svenskt Staal AB, ci-après dénommée "SSAB", a été créée en 1978. Il s'agit d'une société anonyme suédoise dotée à l'époque des faits d'un capital de 2 650 millions de couronnes suédoises. En 1990, elle avait un chiffre d'affaires consolidé pour l'acier de 15 619 millions de couronnes suédoises (2 094 millions d'écus). En 1990, environ 53 % de la production d'acier de l'entreprise ont été exportés vers des pays hors de la Scandinavie. Des sociétés de vente se sont installées dans plusieurs pays de la Communauté. Le 1er septembre 1988, SSAB a vendu son fonds de commerce concernant les aciers de construction (y compris la production des poutrelles) à Ovako. SSAB s'est ainsi retirée du marché de la production des poutrelles.

c) Ovako AB a été créée en 1986 lors de la fusion des deux principaux producteurs scandinaves d'aciers de construction, le suédois SKF Steel et le finlandais Ovako. Ovako exportait alors vers la Communauté européenne du charbon et de l'acier par l'intermédiaire de filiales à 100 % situées dans plusieurs pays de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Ovako Profiler AB, ci-après dénommée "Ovako", était une filiale à 100 % de la société Ovako AB, englobant les activités poutrelles rachetées à SSAB. Elle appartenait à la "Steel Division" (secteur acier) du groupe Ovako. En 1990, le chiffre d'affaires du groupe Ovako était de 6 006 millions de couronnes suédoises (805 millions d'écus). Les ventes de la "Steel Division" seule atteignaient 3 355 millions de couronnes suédoises (450 millions d'écus), soit 56 % du chiffre d'affaires total. Le 14 mai 1992, Inexa AB, une société nouvellement créée, a acquis toutes les actions de Ovako Profiler AB. Inexa AB a alors fait en sorte que Ovako Profiler AB cède ses activités et tous ses actifs et engagements à sa filiale, Ovako Pretech AB, à la suite de quoi Inexa AB a racheté à Ovako Profiler AB toutes les actions restantes de Ovako Pretech AB; de ce fait, Ovako Profiler AB de même que Ovako Pretech AB sont devenues filiales directes de Inexa AB. Inexa AB a ensuite vendu toutes ses actions dans Ovako Profiler AB à la communauté de Luleaa qui a transformé la dénomination de Ovako Profiler AB en Svartoen Foervalnings AB. À la suite de ces opérations, Inexa AB a fait modifier la dénomination de Ovako Pretech AB en Inexa Profil AB.

d) Fundia Steel AB, filiale à 100 % de Fundia AB, est le produit de la fusion entre Smedjebacken-Boxhom Staal AB, ci-après dénommée "Smedjebacken" et les sociétés suédoises Halmstad Jaernwerk et Forsbacka, réalisée en 1988. En 1990, les ventes totales de Fundia AB étaient de 2 607 millions de couronnes suédoises (349 millions d'écus), dont 1 360 millions de couronnes suédoises (182 millions d'écus) pour Fundia Steel AB. Fundia AB avait à l'époque des faits des comptoirs de vente dans quelques pays de la Communauté qui étaient chargés de la commercialisation de ses produits sur ces marchés.

2.6. IMPORTANCE DES ENTREPRISES EN CAUSE SUR LE MARCHE

(26) Le tableau 13 présente les livraisons effectuées à l'intérieur de la Communauté européenne du charbon et de l'acier entre 1986 et 1989 par les dix premières des sociétés en cause: British Steel, Aristrain (pour laquelle seuls les chiffres de l'année 1989 étaient disponibles), Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Unimétal, Cockerill Sambre, Ferdofin, Ensidesa, Saarstahl et Thyssen. À titre d'exemple, en 1989, les livraisons de ces sociétés représentaient les deux tiers de la consommation apparente de poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier.

<emplacement tableau>

2.7. LES RELATIONS ENTRE L'INDUSTRIE SIDERURGIQUE ET LA COMMISSION

(27) La sidérurgie européenne a connu une chute de la demande qui a engendré des problèmes d'offre excédentaire et de surcapacité et, par conséquent, un faible niveau des prix du milieu des années 1970 à 1988, avec des variations selon les produits.

(28) Le 1er janvier 1977, la Commission a adopté, en vertu de l'article 46 du traité CECA le "plan Simonet" selon lequel chaque entreprise prenait des engagements volontaires unilatéraux à l'égard de la Commission d'adapter ses fournitures aux niveaux proposés par la Commission chaque trimestre dans son programme prévisionnel. Ce système n'a toutefois pas permis de stabiliser le marché et, par conséquent, le "premier plan Davignon" est entré en vigueur en 1978. Ce nouveau régime ajoutait aux engagements volontaires unilatéraux des prix indicatifs et minimaux.

(29) En dépit de toutes ces mesures, la situation du marché sidérurgique a continué à se détériorer et le 31 octobre 1980, la Commission a adopté la décision 2794-80-CECA instaurant un régime de quotas de production d'acier pour les entreprises de l'industrie sidérurgique (17), par laquelle elle constatait un état de crise manifeste au sens de l'article 58 du traité CECA. En vertu de cette décision, la Commission imposait des quotas de production obligatoires pour la plupart des produits sidérurgiques, y compris les poutrelles. Ces mesures ont été prorogées par les décisions 1831-81-CECA (18), 1696-82-CECA (19), 2177-83-CECA (20), 234-84-CECA (21), 3485-85-CECA (22) et 194-88-CECA (23).

(30) Ce régime anticrise peut être résumé comme suit: la Commission fixait un objectif général de production communautaire par trimestre pour les différentes catégories de produits et chaque entreprise se voyait attribuer un quota de production obligatoire et un quota de livraison à l'intérieur du marché commun, appelé "marché I", c'est-à-dire le marché communautaire. Ces quotas ont été complétés, entre 1984 et 1986, par un système de prix minimaux pour les poutrelles et autres produits (24). La Commission a, en outre, adopté la décision 3483-82-CECA du 17 décembre 1982 relative à l'obligation pour les entreprises de la Communauté de déclarer leurs livraisons de certains produits sidérurgiques (25), établissant un "système de surveillance" selon lequel chaque entreprise était tenue de déclarer ses fournitures par pays à la Commission.

(31) Initialement, la Commission considérait que la stabilité des courants traditionnels de livraison de produits sidérurgiques représentait un facteur essentiel qui devait être préservé afin de permettre la restructuration indispensable de l'industrie sidérurgique (cinquième considérant de la décision 234-84-CECA). Dans sa communication sur la politique de l'acier de 1987 (26), la Commission déclarait toutefois qu'elle était parvenue à la conclusion que le maintien des courants traditionnels de livraison était incompatible avec l'établissement du marché commun de l'acier.

(32) Le régime anticrise a pris fin, dans le cas des poutrelles, le 30 juin 1988. Toutefois, par sa décision 2448-88-CECA du 19 juillet 1988 instaurant un régime de surveillance pour certains produits pour les entreprises de l'industrie sidérurgique (27), la Commission a instauré un système de surveillance s'appliquant à la production et aux fournitures des producteurs dans la Communauté et aux pays tiers. Dans le cadre de ce système, chaque entreprise était tenue de déclarer ses livraisons à la Commission. Ce système a expiré en 1990.

(33) Au cours de la période commençant à la fin du régime anticrise et allant jusqu'à la fin de 1990, les producteurs de poutrelles de la Communauté européenne du charbon et de l'acier jouissaient de conditions de marché très favorables, qui se sont considérablement détériorées depuis.

3. PROCEDURE

(34) Le 16, le 17 et le 18 janvier 1991, la Commission a effectué des vérifications dans les bureaux de sept entreprises et deux associations d'entreprises, à savoir: British Steel, Peine-Salzgitter, Thyssen, Usinor Sacilor, Unimétal, Valor, Trade Arbed SA, la Walzstahlvereinigung et le Centre professionnel des statistiques de l'acier (CPS) (28). Ces vérifications ont été effectuées en vertu de décisions individuelles prises par la Commission au titre de l'article 47 du traité CECA. D'autres vérifications ont été effectuées le 5 mars (CPS), le 7 mars (Ferdofin) et le 25 mars 1991 (Ferrosider SpA). Les inspecteurs de la Commission ont pris copie d'un certain nombre de documents au cours de ces inspections.

(35) A la suite de ces vérifications, des informations complémentaires ont été fournies par certaines des entreprises et associations en cause à la suite de demandes formulées par la Commission en vertu de l'article 47 du traité CECA.

(36) Le 6 février 1992, la Commission a adressé à Trade Arbed SA29, ainsi qu'à 17 autres entreprises et à une association d'entreprises, une communication des griefs relative à leur participation à une série d'accords, de décisions et de pratiques concertées qui ont eu pour objet ou pour effet de fixer les prix, d'attribuer des quotas et d'échanger, à grande échelle, des informations sur le marché communautaire des poutrelles. Certains de ces accords ou pratiques concertées remontent à 1984. Les destinataires de cette communication des griefs, y compris Trade Arbed SA, ont eu la possibilité de présenter leur point de vue lors de l'audition qui s'est tenue à Bruxelles du 11 au 14 janvier 1993.

(37) Le 16 février 1994, la Commission a adopté la décision 94-215-CECA infligeant une amende à Arbed SA, la société-mère de Trade Arbed SA, pour la participation de Trade Arbed SA aux infractions à l'article 65 du traité CECA. Elle a également infligé une amende à 13 autres entreprises, en raison de leur participation aux mêmes faits reprochés (30).

(38) Le 8 avril 1994, Arbed SA a introduit un recours en annulation contre la décision 94-215-CECA devant le Tribunal aux motifs notamment que la Commission ne pouvait lui adresser une décision lui infligeant une amende calculée sur la base de son chiffre d'affaires sans lui avoir jamais, dans le cadre de la procédure administrative ni dans la décision, imputé le comportement de sa filiale Trade Arbed SA que la Commission avait sanctionné (31).

(39) Le 11 mars 1999, dans son arrêt T-137-94, le Tribunal a pour l'essentiel confirmé la décision 94-215-CECA, tout en :

- excluant la participation présumée de Trade Arbed SA à un accord de partage du marché italien (32) ; et

- réduisant de 30 à 24 mois la durée de l'infraction consistant dans la fixation des prix sur le marché danois (33) ; et

- réduisant de 15% le montant total de l'amende infligée à Arbed SA, les effets anticoncurrentiels des accords et pratiques concertées relatifs à la fixation des prix (34) ayant été exagérés.

(40) Arbed SA a alors introduit un pourvoi contre l'arrêt T-137-94 devant la Cour. Le 2 octobre 2003, dans son arrêt C-176-99, la Cour a annulé l'arrêt T-137-94 du Tribunal. La Cour a également annulé la décision 94-215-CECA pour autant qu'elle concerne Arbed SA, sans toutefois se prononcer sur le fond de l'affaire. En effet, la Cour a jugé, en substance, que les droits d'Arbed SA avaient été enfreints dans la mesure où la communication des griefs qui avait été adressée à sa filiale Trade Arbed SA ne précisait pas que des amendes pourraient être infligées à Arbed SA et où, d'autre part, Arbed SA n'avait pas été destinataire de la communication des griefs (35).

(41) Le 8 mars 2006, la Commission a ouvert une nouvelle procédure à l'encontre du comportement anticoncurrentiel qui avait fait l'objet de la décision 94-215-CECA annulée. Elle a ainsi adressé à Arbed SA, Trade Arbed SA et Profil Arbed SA, une communication des griefs les informant de son intention d'adopter une décision tenant lesdites personnes morales pour solidairement responsables d'infractions à l'article 65 du traité CECA dans le secteur des poutrelles, celles-ci appartenant toutes à l'entreprise chapeautée dans un premier temps par Arbed SA, puis par Arcelor SA.

(42) La communication des griefs du 8 mars 2006 visait ainsi à corriger l'erreur de procédure susmentionnée en adressant la décision 94-215-CECA à Arbed SA alors que cette dernière n'avait pas été destinataire de la communication des griefs du 6 février 1992. Ensuite, cette communication des griefs a été adressée à Trade Arbed SA afin de remplacer celle qui lui avait été adressée le 6 février 1992, bien qu'elle n'eût pas été destinataire de la décision 94-215-CECA. Enfin, la communication des griefs du 8 mars 2006 a été adressée à Profil Arbed qui est le successeur économique d'Arbed SA en ce qui concerne ses activités industrielles et commerciales dans le domaine des poutrelles (36).

(43) La communication des griefs du 8 mars 2006 informait ainsi les personnes juridiques destinataires de la présente décision que les données relatives au marché et au produit concernés ainsi qu'aux entreprises faisant l'objet de la présente procédure étaient les mêmes que celles de la décision 94-215-CECA. Par contre, la communication des griefs du 8 mars 2006 ne maintient pas les griefs retenus dans la décision 94-215-CECA que le Tribunal avait annulé dans l'arrêt T-137-94. Ainsi, la présente décision ne fait pas état de la participation présumée de Trade Arbed SA à un accord de partage du marché italien. Cela vaut également pour la fixation présumée des prix sur le marché danois (37), à propos de laquelle le Tribunal a estimé que la Commission n'avait pas fourni de preuve confirmant la durée présumée de l'infraction, du 1er juillet 1988 au 31 octobre 1988, et a par conséquent réduit de 30 à 24 mois la durée de l'infraction établie. Enfin, la présente décision se conforme à la conclusion du Tribunal selon laquelle, la Commission ayant exagéré les effets anticoncurrentiels des accords et pratiques concertées relatifs à la fixation des prix (38), le montant total de l'amende infligée pour ces infractions devait en conséquence être réduit de 15 %.

(44) Le 20 avril 2006, les personnes morales destinataires de la présente décision ont répondu à la communication des griefs du 8 mars 2006. Les trois sociétés destinataires de la présente décision ne contestent, dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, ni les faits ni la qualification juridique des faits retenus par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 (39) et que la présente décision reprend. Par contre, elles soulèvent des moyens de droit qui, selon elles, " entachent d'une illégalité fondamentale la procédure intentée par la Commission à son encontre ". La présente décision répond à l'ensemble de ces objections. Pour des raisons de cohérence rédactionnelle entre les appréciations des questions factuelles et juridiques qui sont communes à la présente décision et à la décision 94-215-CECA, la présente décision reprend les réponses apportées par la Commission dans la décision 94-215-CECA aux arguments des autres entreprises destinataires de ladite décision.

(45) Après avoir initialement informé la Commission le 21 avril 2006 qu'elles souhaitaient pouvoir développer leurs arguments oralement au cours d'une audition, les entreprises destinataires de la présente décision ont indiqué à la Commission, par télécopie du 10 mai 2006, qu'elles renonçaient à leur demande d'audition orale, ce qu'elles ont confirmé par courrier du 18 mai 2006.

4. DESCRIPTION DETAILLEE DES INFRACTIONS AUX REGLES DE CONCURRENCE

4.1. LA COMMISSION POUTRELLE ET SES ACTIVITES

4.1.1. Généralités

(46) La Commission poutrelles (également connue sous le nom anglais de "Poutrelles Committee" et parfois dénommée dans le passé "Commission des produits longs" ou "Long Products Committee") était l'une des "Commissions de produits" (Products Committee) d'Eurofer. Comme leurs noms l'indiquent, chacune de ces commissions s'intéressait à un produit ou groupe de produits déterminé (par exemple, les poutrelles, les laminés marchands ou le fil machine). Les réunions de toutes ces commissions étaient organisées par Eurofer, qui fournissait aussi un soutien logistique (par exemple, des interprètes).

(47) Dans ce contexte, il convient de mentionner une autre commission d'Eurofer, appelée "CDE". Celle-ci offrait à l'époque des faits aux directeurs commerciaux des sociétés Eurofer, en d'autres termes, des sociétés qui sont membres d'Eurofer ou qui appartenaient à des associations elles mêmes membres d'Eurofer, un lieu où ils se réunissaient pour examiner le marché. Il y avait aussi des réunions régulières respectivement des présidents et des vice-présidents de ces sociétés. À un niveau plus technique, ce cadre était complété par des réunions d'experts.

(48) Toutes ces commissions ont été créées au cours de la crise de la sidérurgie dont l'historique a été rappelé à la section 2.7. La structure qui avait été alors mise en place, permettait à la Commission de trouver des solutions aux problèmes causés par la crise. Elle a également servi de lieu de discussion entre les producteurs d'acier sur des questions générales, telles que le niveau et les effets des importations en provenance de pays tiers, les tendances du marché et les systèmes de promotion de l'acier dans les pays tiers. Aucune de ces activités ne sera examinée dans la présente décision en ce que cette dernière ne vise que les aspects de la coopération entre les parties concernées qui sont allées au-delà de ce que permettent les règles de concurrence du traité CECA.

(49) La structure et la composition de la Commission poutrelles sont présentées de manière synthétique dans une brève note datée du 4 octobre 1990 et rédigée par M. Vygen, de la Walzstahl-Vereinigung, à l'intention de M. Everard, de Trade Arbed SA, à l'occasion de l'accession de ce dernier à la présidence de la Commission poutrelles. Selon cette note, M. J. Meyer, de Peine-Salzgitter, présidait la Commission depuis le milieu de 1985. On y lit ainsi que le secrétariat de la Commission a été assuré par le groupe Usinor Sacilor pendant de nombreuses années. Une collaboratrice d'Usinor Sacilor (Mme S.) exerçait alors les fonctions de secrétaire. Le secrétariat invitait les membres aux réunions, rédigeait les procès-verbaux qui étaient envoyés aux membres de la Commission poutrelles et fournissait certains documents (tantôt d'office, tantôt sur demande). Certains des documents régulièrement diffusés concernaient le "Monitorage poutrelles".

(50) Il apparaît en outre qu'indépendamment de ce qui précède, la Walzstahl-Vereinigung fournissait régulièrement à ses membres des documents (procès-verbaux de réunions, statistiques et informations sur les prix) avant les réunions de la Commission poutrelles.

(51) La note révèle que les groupes étaient en général représentés aux réunions par les personnes suivantes:

Luxembourg (Belgique) : H. Becker (Trade Arbed SA)

France : Mme S. (secrétariat) (Unimétal)

Royaume-Uni : Cooper, Legge, Mme Ross (British Steel)

Italie : Dr. Amuzzo (Ferdofin) Dr. Masserdotti (Ferrosider)

Espagne : Alvarez (Ensidesa) Naegele (Aristrain) Izquierdo (Unesid)

Allemagne : Engel, Knuefermann (Thyssen) Dr. v. Engelhardt, Schuh (Saarstahl) Kroell, Mette (Peine-Salzgitter) Vygen (Walzstahl-Vereinigung)

(52) Elle indique que M. Masserdotti parlait en général au nom des petits producteurs italiens.

(53) Bien que la Commission poutrelles soit une commission d'Eurofer, certaines des entreprises ou associations d'entreprises qui participaient à ces réunions n'étaient pas membres (directs ou indirects) d'Eurofer.

(54) La Commission poutrelles s'est réunie très souvent; ainsi, elle a été convoquée neuf fois en 1989 et sept fois en 1990. Dans une lettre datée du 5 octobre 1990, Eurofer informait ses membres et d'autres parties qu'en ce qui concerne les réunions relatives aux poutrelles, un "rythme bimestriel" était envisagé pour 1991.

(55) La Commission a connaissance des réunions suivantes de la Commission poutrelles:

7 avril 1987 Duesseldorf

19 mai 1987 Stresa

28 octobre 1987 Paris

25 novembre 1987 Duesseldorf

3 mai 1988 Madrid

19 juillet 1988 Paris

18 octobre 1988 Duesseldorf

15 novembre 1988 Bruxelles

13 décembre 1988 Paris

10 janvier 1989 Duesseldorf

7 février 1989 Paris

19 avril 1989 Paris

6 juin 1989 Paris

11 juillet 1989 Paris

3 août 1989 Duesseldorf

21 septembre 1989 Taormina

7 novembre 1989 Teesside

12 décembre 1989 Duesseldorf

14 février 1990 Berlin

21 mars 1990 Duesseldorf

16 mai 1990 Milan

10 juillet 1990 Duesseldorf

11 septembre Luxembourg

9 octobre 1990 Madrid

4 décembre 1990 Bruxelles

(56) Pour certaines réunions de la Commission poutrelles, la Commission a découvert deux séries de procès-verbaux, dont la teneur varie légèrement. Cette différence paraît s'expliquer par le fait que le secrétariat français, qui les rédigeait, en soumettait le projet au président de la Commission poutrelles pour approbation (et à Eurofer pour commentaires) tout en envoyant une copie à la Walzstahl-Vereinigung aux fins de sa traduction en allemand. D'après les preuves disponibles, il semble que la Walzstahl- Vereinigung diffusait parfois sa traduction de ces projets de procès-verbal avant leur approbation par le président de la Commission poutrelles.

(57) La version finale des procès-verbaux est généralement plus prudente. Ce phénomène peut s'expliquer par une réunion des secrétariats des Commissions de produits d'Eurofer qui s'est tenue le 23 novembre 1988. L'un des deux points à l'ordre du jour de cette réunion était libellé comme suit: "Examen de la rédaction des procès-verbaux".

4.1.2. La participation des sociétés et associations en cause

(58) La note de M. Vygen citée au considérant (49) révèle que les entreprises ou personnes qui y sont mentionnées participaient régulièrement aux réunions de la Commission poutrelles. En ce qui concerne Arbed SA, cette société a informé la Commission que sa filiale Trade Arbed SA avait en principe assisté à toutes les réunions mentionnées au considérant (55).

4.1.3. Le monitorage

4.1.3.1. Le monitorage des commandes jusqu'à la mi-1990

(59) Un système de monitorage qui permettait aux entreprises participantes de s'informer régulièrement sur les commandes qu'elles avaient reçues en vue d'une livraison pour un trimestre précis a fonctionné au moins depuis le troisième trimestre de 1984. British Steel, Peine-Salzgitter, Trade Arbed SA, Thyssen, Cockerill Sambre et Unimétal ont pris part à ce système très tôt, au moins depuis 1987, ainsi qu'il ressort d'une note interne de Peine-Salzgitter datée du 24 novembre 1987 et d'un tableau établi par Peine-Salzgitter et daté du 5 décembre 1989.

(60) Les statistiques fournies et échangées indiquent (à l'exception des chiffres de Federacciai) les commandes reçues par chaque entreprise en vue des livraisons dans les pays suivants: France, Allemagne, Belgique/Luxembourg, Pays-Bas, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Portugal et Grèce/Irlande/Danemark.

(61) Depuis le début de 1989 au moins, ces statistiques étaient réunies et diffusées entre les participants chaque semaine par Usinor Sacilor.

(62) Pour les années 1989 et 1990, la Commission a découvert un nombre considérable de documents illustrant le fonctionnement du système de monitorage. La liste de ces documents figure à l'annexe I.

4.1.3.2. Le monitorage des livraisons jusqu'au milieu de 1990

(63) Un monitorage des livraisons a été instauré en 1988 à la demande du groupe français (voir le procès-verbal de la réunion de la Commission poutrelles du 18 octobre 1988). Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, Trade Arbed SA, Cockerill Sambre, Unimétal, British Steel, Ferdofin, Ensidesa, Aristrain, Neue Maxhuette et Hoesch ont échangé des informations sur leurs fournitures aux marchés de la Communauté européenne du charbon et de l'acier chaque trimestre depuis le début de 1989, à commencer par les statistiques des livraisons au quatrième trimestre de 1988. Cockerill Sambre a cessé de participer au début de 1990 après s'être retirée du marché.

(64) Des statistiques individuelles ont été échangées pour les marchés suivants: la Communauté européenne du charbon et de l'acier dans son ensemble, l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, le Benelux, l'Italie, la Grèce/l'Irlande/le Danemark, le Portugal et l'Espagne. Ces statistiques étaient distribuées un mois ou deux après la fin du trimestre considéré. Depuis la fin de 1989, Federacciai fournissait des chiffres agrégés pour les livraisons des producteurs italiens autres que Ferdofin.

(65) Les principaux documents se rapportant au monitorage des livraisons sont également énumérés à l'annexe I.

4.1.3.3. Le monitorage après le milieu de 1990

(66) Le 18 juillet 1990, la Commission a adopté, en vertu de l'article 65 du traité CECA, la décision 90-417-CECA relative à une procédure au titre de l'article 65 du traité CECA concernant l'accord et les pratiques concertées des producteurs européens de produits plats en acier inoxydable laminés à froid40. Dans cette décision, la Commission a établi que plusieurs entreprises avaient enfreint l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA et elle a infligé des amendes à certaines de ces entreprises.

(67) Le 30 juillet 1990, Eurofer adressait, entre autres au président et au secrétariat de la Commission poutrelles, une lettre intitulée "Échange et diffusion de statistiques". Les passages de cette lettre qui intéressent la présente affaire sont libellés comme suit (41) :

"La décision récemment adoptée par la Commission dans le domaine des produits plats en acier inoxydable, ainsi que certains contacts pris par la DG IV avec les dirigeants d'Eurofer, ont attiré l'attention sur l'échange ou la diffusion de statistiques qu'effectuent notre bureau ou les secrétariats des différentes commissions, et sur leur compatibilité avec l'article 65 du traité CECA.

Dans l'attente d'un examen juridique approfondi, nous avons décidé de suspendre toute diffusion révélant des chiffres individuels de production, de livraisons et de commandes, et nous vous prions de bien vouloir, dans le cadre de votre propre commission, vous abstenir de tous échanges ou diffusions similaires.

Bien entendu, cette demande ne concerne pas la collecte de chiffres individuels assurée par un centre neutre, en d'autres termes le bureau d'Eurofer, ni la diffusion de résultats agrégés sans mention de données individuelles, ainsi que nous le faisons d'habitude. Ces statistiques sont parfaitement légales, puisqu'elles visent manifestement à donner des informations globales au sujet de l'évolution de l'économie et des marchés. Nous les maintiendrons telles qu'auparavant et vous pourrez en faire autant."

(68) La Commission poutrelles a donné suite à la demande d'Eurofer du 30 juillet 1990. Néanmoins, les chiffres (individuels) des livraisons au deuxième trimestre de 1990 de toutes les entreprises concernées sauf British Steel étaient toujours distribués.

(69) À compter du mois d'août 1990, British Steel a refusé de fournir des informations sur ses commandes et ses fournitures.

(70) Une note interne de British Steel, datée du 19 novembre 1990, indique que la distribution de données individuelles a repris rapidement, mais sans British Steel :

"À la suite d'entretiens entre les présidents, l'administration d'Eurofer a décidé de reprendre la distribution de chiffres de livraisons et de production répartis par société (alors qu'elle avait précédemment limité cette distribution aux données agrégées au niveau de l'ensemble des sociétés).

Il est clairement compris que British Steel continue à ne pas fournir de chiffres à Eurofer; par conséquent, il a été précisé, de manière tout aussi claire, que British Steel ne recevrait pas les chiffres des autres sociétés."

(71) Il est prouvé que la décision 90-417-CECA ne s'appliquait pas seulement à Eurofer mais aussi aux Commissions de produits de cette dernière.

(72) La Commission a trouvé des tableaux datés du 3 décembre 1990 (annexe I, point 26) qui fournissent des statistiques individuelles des fournitures du troisième trimestre de 1990 et des commandes à livrer au cours du même trimestre pour Trade Arbed SA, Unimétal, Ensidesa, Aristrain et Ferdofin (commandes uniquement). Les documents révèlent que l'échange d'informations individuelles doit avoir repris - entre Trade Arbed SA, Ensidesa, Unimétal, Ferdofin et Aristrain - en octobre 1990 au plus tard. Des données individuelles portant sur les commandes à livrer par Thyssen, Saarstahl, Peine-Salzgitter, Neue Maxhuette et Hoesch ont été envoyées au secrétariat et diffusées par la Walzstahl-Vereinigung en décembre 1990 et janvier 1991 (annexe I, point 28).

4.1.3.4. L'échange d'informations par l'intermédiaire de la Walzstahl- Vereinigung

(73) Le monitorage organisé par le secrétariat de la Commission poutrelles était complété par un échange d'informations par l'intermédiaire de la Walzstahl-Vereinigung.

(74) La Commission est en possession d'un dossier élaboré par la Walzstahl-Vereinigung en vue de la réunion de la Commission poutrelles du 9 octobre 1990. Entre autres documents, ce dossier contient des tableaux datés du 1er octobre 1990 et présentant les livraisons effectuées et les commandes enregistrées par Thyssen, Peine-Salzgitter Hoesch, Neue Maxhuette, Saarstahl et Trade Arbed SA.

(75) Les quantités livrées de janvier à juillet 1990 inclus y apparaissent, exprimées sur une base mensuelle. En ce qui concerne les commandes à livrer au troisième trimestre de 1990, ces tableaux présentent les chiffres hebdomadaires de chaque société, du 2 juin 1990 au 22 septembre 1990. De manière analogue, les commandes à livrer au quatrième trimestre de 1990, établies le 1er, le 8, le 15 et le 22 septembre 1990 y figurent. Comme les tableaux composés, au cours de la période considérée, par le secrétariat français en vue du monitorage ne contiennent que des chiffres agrégés, et non des chiffres individuels par société, il faut partir du principe que ces tableaux font partie des statistiques à jour que la Walzstahl-Vereinigung, selon la note en date du 4 octobre 1990 adressée par M. Vygen à M. Everard, fournissait à ses membres (considérants (49) et (58). Ceci est confirmé par la page de garde de cette note dont il ressort que la Walzstahl-Vereinigung avait transmis un exemplaire de ce dossier à Trade Arbed SA le 2 octobre 1990.

(76) La Commission a découvert un jeu de documents similaires élaborés par la Walzstahl- Vereinigung pour la réunion de la Commission poutrelles du 4 décembre 1990.

4.1.3.5. L'objet et l'effet de l'échange d'informations

(77) L'importance et l'utilisation des statistiques échangées à l'époque des faits dans le cadre du système de monitorage sont illustrées par plusieurs documents.

(78) À la réunion du 6 juin 1989, les producteurs allemands se sont plaints du niveau élevé des exportations espagnoles vers l'Allemagne. Les producteurs espagnols ont promis de ralentir leurs fournitures à l'avenir.

(79) À la réunion du 11 juillet 1989, Unimétal a fait observer que, d'après les chiffres du monitorage, les entreprises d'Eurofer autres qu'Ensidesa avaient diminué leurs livraisons à la France de 25 % alors que les fournitures des Espagnols avaient augmenté. Le procès-verbal contient cette mention laconique :

"Il est permis d'espérer une certaine modération à l'avenir."

(80) Il a également été signalé qu'au deuxième trimestre de 1989, les commandes à livrer sur le marché belgo-luxembourgeois étaient supérieures, contrairement à ce qui s'était produit sur les autres marchés communautaires, à celles du trimestre précédent. Les participants ont considéré que ce fait :

"risque, par le biais des marchands de fer belges, de perturber les marchés limitrophes"

(81) Pour sa défense, Cockerill Sambre a soutenu que ses livraisons étaient destinées à sa filiale (Steelinter), dont les stocks étaient très faibles. (82) Le procès-verbal fait en outre état d'un échange de vues concernant les importations en provenance d'Espagne :

"Les importations en provenance de l'Espagne demeurent importantes. Ensidesa déclare à cet égard ne pas avoir augmenté son volume habituel."

(83) L'exemplaire du procès-verbal du 21 septembre 1989 découvert par la Commission dans les bureaux de Thyssen, une traduction en allemand du procès-verbal français, indique que Trade Arbed SA avait été accusée d'avoir perturbé le marché français :

"L'usine luxembourgeoise réfute du reste tout comportement perturbateur en France, étant donné qu'elle est hors marché depuis cinq semaines."

(84) La version française du procès-verbal de la réunion du 12 décembre 1989 fait état d'un échange de vues sur le commerce entre le Royaume-Uni et l'Allemagne/la France. La version allemande est beaucoup plus explicite :

"Les usines allemandes et françaises évoquent toutefois une certaine "agressivité" de l'usine britannique sur leur marché national, qui est confirmée par les statistiques de la Commission poutrelles. L'usine britannique déclare qu'elle se limite aux quantités qu'elle livre traditionnellement à ces pays et que ses déclarations pour les statistiques de la Commission poutrelles comprennent les commandes de travail à façon. Elle fait toutefois observer que depuis janvier 1989, 21 000 tonnes ont été livrées de la république fédérale d'Allemagne au Royaume-Uni"

(85) Une note d'information interne datée du 19 mars et rédigée pour M. Meyer (Peine-Salzgitter) révèle qu'une controverse avait surgi à la réunion de la Commission poutrelles du 14 février 1990 :

"Il a été convenu à Berlin que les écarts graves entre la surveillance des carnets de commandes et les livraisons effectives devraient être expliqués. Il y a eu divergence de vues sur ce point entre Ferdofin et Saarstahl."

(86) Un tableau, envoyé par Peine-Salzgitter à British Steel début mars 1990, donne, pour les deux derniers trimestres de 1988 et pour chaque trimestre de 1989, les livraisons du Royaume-Uni à l'Allemagne et celles de Peine-Salzgitter, de Thyssen et de Saarstahl au Royaume-Uni. Deux autres colonnes donnent "l'excédent" du Royaume-Uni et de l'Allemagne, c'est-à-dire la différence entre les livraisons à l'Allemagne du producteur britannique et les livraisons au Royaume-Uni des producteurs allemands. L'exemplaire de ce tableau découvert chez British Steel contient un message manuscrit de Peine-Salzgitter libellé comme suit :

"D'après ces chiffres, il n'y a - je le crains - aucun reliquat pour British Steel plc!"

(87) La version allemande du procès-verbal de la réunion du 21 mars 1990 indique que les producteurs espagnols considéraient que les exportations de British Steel et de Trade Arbed SA vers l'Espagne étaient trop élevées.

(88) Une lettre datée du 10 mai 1990, adressée par Peine-Salzgitter à Trade Arbed SA, révèle que Trade Arbed SA avait accusé Peine-Salzgitter de manipuler ses chiffres de livraisons aux Pays-Bas au premier trimestre de 1990. Dans sa réponse, Peine-Salzgitter a tenté d'expliquer les différences.

(89) Un compte rendu des conclusions de la réunion du 16 mai 1990 (rédigé par la Walzstahl-Vereinigung) contient la mention qui suit : "L'un des thèmes essentiels est comme toujours celui des livraisons d'interpénétration qui perturbent le marché dans une mesure non négligeable. Un comportement modéré servirait dans ce cas à réduire les perturbations du marché."

(90) Une note consignant les conclusions de cette réunion en date du 18 mai 1990, rédigée par le secrétariat de la Commission poutrelles et adressée à Unimétal, en apporte la confirmation :

"Des interpénétrations sont signalées. Chacun demande un retour aux flux traditionnels."

(91) Les livraisons ont été discutées une nouvelle fois à la réunion du 10 juillet 1990. Une note interne de British Steel, datée du 20 juillet 1990, contient le passage suivant :

"Les Français et les Allemands (Arbed SA a gardé le silence) ont critiqué de concert les ventes effectuées par BS en Europe du Nord; selon eux, nous n'avons accru nos ventes sur ces marchés qu'en "achetant" des parts de marché. Mette, de Peine, a formulé des menaces voilées: à moins d'une réduction de près de 10 kilotonnes des ventes trimestrielles de BS sur le marché allemand, Peine réagira sur le marché britannique."

(92) Une note d'information à usage interne datée du 10 septembre 1990 et rédigée par Peine-Salzgitter à l'attention de M. Meyer en vue de la réunion suivante de la Commission poutrelles, organisée le 11 septembre 1990, révèle que l'objet du système de monitorage était de permettre aux participants de s'assurer du comportement de chaque concurrent sur le marché :

"Un échange de chiffres qui se borne aux chiffres agrégés n'a pour nous (presque) aucun intérêt (avis du groupe germano-luxembourgeois du 30 août 1990), étant donné que le comportement sur le marché des différentes entreprises ne peut plus être déduit. Seules les statistiques douanières officielles - dont on sait d'expérience qu'elles ne sont accessibles que quelques mois plus tard -, permettent une individualisation, et ce uniquement dans les pays où il n'y a qu'un seul producteur."

(93) Elle révèle en outre que les parties connaissaient les aspects de ce système qui étaient visés par la législation sur la concurrence :

"Un système d'échange mutuel de statistiques comprenant le renvoi de données individualisées sur les entreprises aux concurrents, constitue au moins une présomption d'effets anticoncurrentiels."

(94) Lors de la réunion du 4 décembre 1990, Trade Arbed SA (appelée dans le compte rendu "le représentant du Luxembourg") a fait observer que l'augmentation de la part de marché de Ferdofin - et d'autres entreprises - inquiétait d'autres producteurs.

(95) Une note de Trade Arbed SA du 3 décembre 1990 (qui reflète le texte du discours que le représentant de Trade Arbed SA devait tenir à la réunion du 4 décembre 1990) révèle que Trade Arbed SA prendrait au besoin des mesures pour remédier à cette situation :

"Je voudrais toutefois faire observer que nous ne pouvons plus admettre, surtout en Belgique qui est notre marché intérieur, que certaines usines procèdent à des augmentations tout à fait considérables depuis cette année, comme par exemple (...)."

4.1.4. Les accords de répartition des marchés et la "méthodologie Traverso"

4.1.4.1. La France

(96) Le 13 septembre 1989, des représentants des entreprises Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, British Steel, Unimétal, Trade Arbed SA, Cockerill Sambre/Steelinter se sont réunis dans les bureaux de la Walzstahl-Vereinigung.

(97) Les discussions lors de cette réunion ont porté sur la question des livraisons de poutrelles sur le marché français au quatrième trimestre de 1989.

(98) La Commission a découvert dans les bureaux de Peine-Salzgitter un document rédigé par la Walzstahl-Vereinigung. La deuxième page porte l'intitulé suivant: "Marché français - poutrelles - quatrième trimestre 1989". Le document indique que, pour le quatrième trimestre de 1989, le marché français était estimé à 75 000 tonnes par mois et que 60 000 tonnes seraient fournies chaque mois par des sociétés membres d'Eurofer. De ce chiffre, 27 000 tonnes, 375 tonnes et 750 tonnes par mois étaient déduites respectivement pour Kloeckner et Ensidesa. Ainsi que le montre le tableau 14, les 31 875 tonnes par mois restantes étaient ensuite réparties sur la base de deux pourcentages se rapportant aux livraisons antérieures (page 1 du document):

<emplacement tableau>

(99) La troisième page du document a pour titre "Alternative G.". Ici, 7 000 tonnes supplémentaires sont déduites au titre de "livraisons indirectes" des 31 875 tonnes par mois précité. Les 24 875 tonnes restantes sont ensuite réparties entre les sept entreprises comme dans le tableau 14.

(100) La note manuscrite jointe à ces documents par Peine-Salzgitter indique que cette dernière formule trouve son origine dans une intervention de M. G. (Unimétal).

(101) Une note interne de Peine-Salzgitter datée du 19 septembre 1989 confirme que les sociétés membres d'Eurofer se sont efforcées de parvenir à un accord de répartition pour les livraisons sur le marché français :

"Dossier France

La base de la répartition des fournisseurs Eurofer est le document établi par la WAV des douze et dix-huit derniers mois. Peine-Salzgitter est d'accord sur le pourcentage.

La base doit toutefois être de 33 000 tonnes par mois."

(102) D'après le procès-verbal officiel de la réunion de la Commission poutrelles du 21 septembre 1989, Unimétal a signalé que pour le quatrième trimestre de 1989, elle considérait comme réaliste une estimation du marché à 75 000 tonnes par mois et a ensuite précisé les tonnages comme suit :

"La forge française envisage de livrer sur ce trimestre 27 000 tonnes par mois. Les quantités des sociétés communautaires hors Eurofer devraient se situer selon elle aux environs de 10 000 tonnes par mois. Les pénétrations dans les pays tiers demeurent raisonnables et devraient se maintenir aux alentours de 5 000 tonnes par mois."

(103) Une brève note datée du 25 septembre 1989, rédigée par la Walzstahl-Vereinigung et consignant les conclusions de cette réunion, indique qu'un compromis avait été trouvé:

"Un comportement de livraison adapté sur le marché français au quatrième trimestre de 1989 devrait contribuer, là aussi, à résoudre bientôt les problèmes de quantité. Tant les usines d'Eurofer que les autres usines ont annoncé des intentions de livraisons réduites."

(104) Cette version est confirmée par un télex du 26 septembre 1989 envoyé par la Walzstahl-Vereinigung aux entreprises suivantes: Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, Ferdofin, Trade Arbed SA, British Steel, Ensidesa et Unimétal :

"Livraisons de poutrelles sur le marché français pour le quatrième trimestre de 1989

----------------------------------------- :

L'enquête convenue dans le cadre du monitorage des poutrelles a révélé qu'il faut s'attendre aux livraisons suivantes sur le marché français pour le quatrième trimestre de 1989 (quantités approximatives):

P+S 9 950 tonnes par trimestre

Thyssen 1 800 tonnes par trimestre

Saarstahl 12 200 tonnes par trimestre

Ferdofin 14 800 tonnes par trimestre

Cockerill-S. 18 100 tonnes par trimestre

Arbed SA 24 750 tonnes par trimestre

BSC 4 950 tonnes par trimestre

Ensidesa 2 250 tonnes par trimestre

Unimétal 72 000 tonnes par trimestre."

(105) Un compte rendu sommaire des conclusions de la réunion tenue par la Commission poutrelles le 7 novembre 1989, rédigé par le secrétariat de la Commission poutrelles et envoyé à la Walzstahl-Vereinigung par télécopieur du 10 novembre 1989, confirme l'existence d'un accord en ce qui concerne les livraisons effectuées sur le marché français au quatrième trimestre de 1989 :

"Souhait que le "système des tonnages pour le quatrième trimestre de 1989 sur le marché français" soit reconduit sur le premier trimestre de 1990 et sur l'ensemble des marchés de la Communauté européenne du charbon et de l'acier."

(106) Le monitorage des livraisons effectuées au quatrième trimestre de 1989 indique que seules trois entreprises ont dépassé largement les quantités prévues sur le marché français :

Thyssen 4 164 tonnes

Ferdofin 18 347 tonnes

British Steel 11 623 tonnes.

(107) Ensidesa n'a pas assisté aux réunions du 13 et du 21 septembre 1989. Même si le chiffre de 750 tonnes par mois pour les fournitures d'Ensidesa à la France peut avoir été fixé initialement par les autres entreprises sans l'approbation d'Ensidesa, comme cette dernière l'affirme, il n'en reste pas moins que cette dernière était informée de ce chiffre et le respectait (ses livraisons réelles se sont élevées à 2 317 tonnes, soit un peu plus de 770 tonnes par mois).

(108) Le procès-verbal de la réunion du 7 novembre 1989 note que les efforts entrepris d'un commun accord afin de réduire le volume des livraisons sur le marché français étaient considérés comme ayant été couronnés de succès et qu'Unimétal espérait qu'ils seraient poursuivis.

4.1.4.2. La "méthodologie Traverso"

(109) Le procès-verbal de la réunion de la Commission poutrelles du 19 juillet 1988 décrit un système mis en place pour faire correspondre l'offre et la demande :

"Les sociétés devraient faire connaître leurs intentions de ventes à Eurofer qui les appréciera globalement au regard des estimations de marché fixées par le CDE. Dans l'hypothèse où il apparaîtrait que certaines de ces intentions s'écartent de façon significative des données historiques, le président du CDE et l'administration d'Eurofer prendront contact avec la société concernée pour lui demander d'orienter sa politique dans un sens plus conforme à l'équilibre qui s'impose."

(110) À cette époque et pendant le reste de la période considérée (c'est-à-dire jusqu'à la fin de 1990) le CDE était présidé par M. Traverso qui était alors un des dirigeants de Nuova Italsider SpA et qui a rejoint ultérieurement la direction d'Ilva (tous deux producteurs d'acier italiens).

(111) Le système sommairement décrit dans le procès-verbal de la réunion du 19 juillet 1988 était généralement appelé "méthode Traverso" ou "méthodologie Traverso" (voir par exemple une note interne de British Steel datée du 11 janvier 1990).

(112) Le premier document qui donne certaines indications concernant le fonctionnement du système est une télécopie (n° 1017) relative aux intentions de livraison au quatrième trimestre de 1988 et adressée par Eurofer aux sociétés Arbed SA Trade Arbed SA, British Steel, Cockerill Sambre, Usinor Sacilor, Ferdofin, Kloeckner, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Thyssen et autres. L'exemplaire que la Commission a en sa possession a été saisi chez Peine-Salzgitter qui l'avait reçu le 4 août 1988. La télécopie évoque un "tableau donnant les intentions de livraisons finales réunies à la fin de la dernière réunion du CDE des 27 et 28 juillet 1988 à Paris" et se poursuit comme suit :

"Notre président attend de toutes les sociétés qu'elles ne dépassent pas le niveau de ces intentions de vente, auxquelles est liée la stabilité des prix."

(113) La Commission a découvert chez Peine-Salzgitter une note interne (non datée) de celle-ci qui compare les intentions de vente pour le quatrième trimestre de 1988 aux livraisons effectuées. À cette note, rédigée en allemand, est annexé un tableau, lui-même en anglais, intitulé "Catégorie III ... (illisible) Intentions de livraison". Il n'a pas été contesté qu'il s'agisse du tableau visé dans la télécopie d'Eurofer. Les intentions de vente indiquées dans le tableau sont celles de Peine-Salzgitter, Thyssen, Kloeckner, Saarstahl, Usinor Sacilor (Unimétal), Ferdofin, Cockerill Sambre, Trade Arbed SA et British Steel.

(114) Il en ressort que les livraisons réelles de toutes les entreprises à l'exception de Kloeckner avaient dépassé les intentions qu'elles avaient annoncées. L'écart entre ces deux chiffres est assez modéré dans le cas de Peine-Salzgitter, de Cockerill Sambre et de Saarstahl et est tout à fait considérable pour les autres (en particulier British Steel).

(115) Il semblerait donc que le système ne fonctionnait pas très efficacement, ce qui semble s'expliquer surtout par le fait qu'il ne prévoyait apparemment aucune sanction à l'encontre des sociétés dont les livraisons excédaient le niveau des commandes qu'elles avaient déclarées à M. Traverso ou les quantités recommandées par ce dernier.

(116) Le fait que ce système fonctionnait sur une base volontaire est confirmé par un télex envoyé par Unimétal à British Steel le 29 novembre 1988 et la réponse de British Steel du 6 décembre 1988. Cependant, cette correspondance démontre aussi que les sociétés participantes y attachaient néanmoins une importance considérable. Elle prouve qu'au moins en principe les sociétés en cause considéraient que les tonnages recommandés par le président de CDE devaient être respectés. Les entreprises qui ne se conformaient pas à ces recommandations devaient s'attendre à ce que les autres participants prennent des mesures de rétorsion sur leur propre marché.

(117) Le système a été abandonné au début de 1989. Il a repris au début de 1990 (pour les livraisons du premier trimestre de 1990), comme l'a confirmé British Steel et comme l'atteste une note d'information de British Steel datée du 20 juillet 1990, ainsi que le fait que le 31 janvier 1990, Peine-Salzgitter a adressé une lettre au président du CDE pour lui exposer ses intentions en matière de livraison pour les premier et deuxième trimestres de 1990.

(118) Il semble toutefois que, dans l'ensemble, ce système d'ajustement de l'offre et de la demande n'ait pas très bien fonctionné et n'ait pas été appliqué longtemps.

(119) Une note de dossier non datée de British Steel résumant les conclusions de la réunion tenue par la Commission poutrelles le 21 mars 1990 fait état de la remarque suivante formulée par M. G. (Unimétal) au sujet du marché français :

"Selon M. G. la méthode Traverso avait échoué à cause d'un "blocage" de la part de certains producteurs."

4.1.5. Les accords de fixation des prix

4.1.5.1. Les prix cibles

(120) Le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie organisée le 30 juillet 1986 indique, en ce qui concerne le marché communautaire des poutrelles :

"Les aciéries membres d'Eurofer s'efforcent de stabiliser les prix et de se défendre contre les importations. Des décisions seront prises lors d'une réunion qui aura lieu dans quelques jours, notamment en matière de prix."

(121) Un document qui indique les "prix pour le quatrième trimestre de 1986" pour les marchés scandinaves était annexé à l'exemplaire de ce procès-verbal découvert par la Commission dans les bureaux de la Walzstahl-Vereinigung. En ce qui concerne les poutrelles sur le marché danois, il est noté ce qui sui t:

"Des informations sont transmises après la fixation des nouveaux prix dans les pays de la Communauté économique européenne".

(122) Des mentions similaires figurent dans les procès-verbaux d'autres réunions Eurofer/Scandinavie.

(123) Dans une télécopie envoyée au CPS le 27 mars 1987, la Walzstahl-Vereinigung expliquait que le président de la Commission poutrelles désirait poursuivre l'examen de deux points précis avant la réunion suivante, le 7 avril 1987. L'un de ces points était l'harmonisation des prix dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier :

"Atteindre des niveaux de prix comparables dans la Communauté et à cet égard, en particulier, à quel rythme les prix français peuvent-ils être relevés de manière à atteindre à peu près le niveau des pays voisins (certaines différences étant admissibles si elles ne provoquent pas de perturbations)."

(124) La réunion suivante de la Commission poutrelles a eu lieu à Paris, le 3 juin 1987. Une note d'information à usage interne du 2 juin 1987, rédigée par Peine-Salzgitter à l'attention du président de la Commission poutrelles, indique ce qui suit :

"À court terme, la réunion du 3 juin devrait toutefois servir à fixer définitivement les prix des poutrelles pour le troisième trimestre de 1987."

(125) Lors de cette réunion ou d'une des réunions qui ont suivi, une décision a effectivement été adoptée au sujet des prix pour le troisième trimestre de 1987. Ceci ressort du procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie organisée le 4 août 1987, qui observe, en ce qui concerne le marché des poutrelles de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, que les prix prévus pour le troisième trimestre de 1987 avaient été obtenus.

(126) La Commission poutrelles a décidé par la suite d'adopter des hausses des prix de vente pour le quatrième trimestre de 1987, comme le révèle une note interne de Peine-Salzgitter du 9 novembre 1987 :

"À l'occasion de la réunion internationale sur les profilés qui s'est tenue à Paris le 28 octobre 1987, il a été convenu, en vue d'une nouvelle consolidation ou application des prix relevés au 1er octobre 1987, de renoncer à une nouvelle adaptation des prix au 1er janvier 1988. Cette démarche doit toutefois être vue dans le contexte de la décision de procéder de toute façon à un nouvel ajustement des prix au 1er avril 1988. Un échange de vues doit alors se tenir en temps voulu sur la portée de cet ajustement."

(127) Cette analyse est confirmée - du moins en ce qui concerne le marché allemand - par le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie organisée le 4 novembre 1987 à Bruxelles, qui indique :

"Allemagne: les prix atteindront l'objectif fixé au cours du quatrième trimestre. Aucune hausse de prix prévue pour le premier trimestre de 1988."

(128) Le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 2 février 1988 contient le passage suivant :

"Au plan des prix, décision de procéder à des relèvements au 1er avril de 20 marks allemands sur le marché allemand en catégories 1, 2A, 2B2 et 2B3, et de 10 marks allemands en catégorie 2B1; de 50 francs français sur le marché français toutes catégories exception faite de la catégorie 2C.

La Grande-Bretagne envisage également une hausse au 1er avril 1988, dont le niveau n'a pas encore été définitivement arrêté."

(129) Les conclusions de la réunion du 19 juillet 1988 sont confirmées par un tableau annexé au procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 25 juillet 1988, dont une copie a été trouvée dans les bureaux d'Usinor Sacilor. Ce tableau donne ce qui est appelé les "prix de marché pour le quatrième trimestre de 1988 pour les poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Les prix de base sont détaillés par catégorie (catégories 1, 2A, 2B1, 2B2, 2B3 et 2C) pour l'Allemagne, la France et le marché belgo luxembourgeois.

(130) Le procès-verbal de la réunion du 18 octobre 1988 indique que la hausse de prix envisagée pour le quatrième trimestre de 1988 a été obtenue sur les marchés. Ce procès-verbal présente aussi ce qu'on y appelle des "estimations de prix" pour le premier trimestre de 1989 :

" Estimation des prix pour le premier trimestre de 1989

Les hausses de prix sont estimées de 25 à 40 marks allemands dans la république fédérale d'Allemagne, de 50 à 100 francs français en France et de 200 à 800 francs belges au Benelux. Elles aboutissent aux niveaux de prix suivants:

<emplacement tableau>

République fédérale d'Allemagne: Rabais "marchands de fer" de 2,5 %, à déduire

plus 20 marks allemands pour les petits négociants

plus 80 marks allemands pour les utilisateurs

France: Utilisateurs + 100 francs français

Italie: Utilisateurs + 30 000 lires italiennes

De nouvelles hausses de prix sont également prévues pour le premier trimestre de 1989 en Espagne. "

(131) Une comparaison entre ce tableau et le tableau annexé au procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 25 juillet 1988 révèle que, en ce qui concerne les marchés français, allemand et belgo luxembourgeois - le tableau annexé au procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie ne contient pas de chiffres pour le marché italien -, la différence entre les prix du quatrième trimestre de 1988 et ceux du premier trimestre de 1989 atteint effectivement de 25 à 45 marks allemands, de 50 à 100 francs français et de 200 à 800 francs belges selon les catégories. La catégorie 1 sur les marchés français (où l'augmentation s'élève à 150 francs français) et belgo luxembourgeois (où elle s'élève à 1 000 francs belges) constitue l'unique exception.

(132) La formulation du paragraphe, cité au considérant (131), du procès-verbal de la réunion du 18 octobre donne à penser que les prix figurant dans ce tableau ne sont pas les prix que les sociétés en cause espéraient obtenir du marché, mais bien ceux qu'elles étaient convenues d'appliquer. Un télex envoyé à Trade Arbed SA par Thyssen le 22 septembre 1988 confirme ce point de vue :

"La discussion aura en fait le plus de sens après le rendez-vous Eurofer/Scandinavie. Néanmoins, comme ce dernier a lieu tardivement, nous devrions à mon avis communiquer à nos amis nos intentions pour la Communauté en moyenne et préconiser le parallélisme, c'est-à-dire une hausse pour le programme scandinave s'établissant comme suit:

Suède 100 couronnes suédoises

Norvège 100 couronnes norvégiennes

Finlande 40 marks finlandais

La décision concernant la catégorie 2C pourra alors être prise le 29 septembre."

(133) Il apparaît que les sociétés membres d'Eurofer avaient examiné les prix pour l'avenir et avaient l'intention d'appliquer des hausses d'environ 40 marks allemands pour les poutrelles relevant du "programme scandinave" (c'est-à-dire les catégories 1, 2a, 2b1, 2b2 et 2b3).

(134) Le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 3 novembre 1988 indique, au sujet du marché des poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier :

"De nouvelles hausses sont envisagées sur le premier trimestre de 1989, hausses qui sont par ailleurs attendues par le négoce. Elles conduisent à des augmentations de l'ordre de 25 à 40 marks allemands en Allemagne, de 50 à 100 francs français en France, de 200 à 800 francs belges au Benelux."

(135) Le procès-verbal de la réunion du 13 décembre 1988 indique que les hausses de prix pour les livraisons du premier trimestre de 1989 (désigné par erreur comme "1988") en Allemagne et en France ont été acceptées sans difficulté par les clients et que de nouvelles augmentations étaient envisagées.

(136) Le procès-verbal de la réunion du 10 janvier 1989 indique que les prix "envisagés" pour le premier trimestre de 1989 avaient été acceptés par les marchés allemand, français, italien, espagnol, britannique et le marché du Benelux. Il expose en outre les hausses de prix "escomptées" au deuxième trimestre de 1989 ainsi que les prix découlant de ces hausses.

(137) Une note de dossier non datée sur les résultats de cette réunion, rédigée par British Steel, mentionne des "intentions en matière de prix" (price intentions). Celles-ci figurent dans un tableau joint à la note - intitulé "European price Intentions April/June, increases" - qui donne, détaillées par catégorie, les hausses de prix par marché (entre 10 et 20 marks allemands en Allemagne, entre 30 et 50 francs français en France, entre 200 et 400 francs belges en Belgique et 20 000 lires italiennes en Italie), ainsi que les nouveaux prix pour avril 1989 (implied new levels April 1989).

(138) En ce qui concerne la France, l'Allemagne et les pays du Benelux, les chiffres sont identiques à ceux qui figurent au procès-verbal de la réunion du 10 janvier 1989. Les prix indiqués pour l'Italie dépassent de 20 000 lires italiennes par tonne les montants correspondants du procès-verbal officiel. Il semble que cette divergence soit due à une méprise de British Steel.

(139) Une note interne de Peine-Salzgitter du 13 janvier 1989 contient des données correspondantes :

"Lors de la réunion internationale sur les poutrelles du 10 janvier 1989, les hausses de prix déjà envisagées au 1er avril 1989 sont concrétisées comme suit."

(140) Le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 1er février l989 fournit d'autres informations sur la concertation en matière de prix dans le cadre de la Commission poutrelles :

"On remarque en outre que des prix de base "harmonieux" (un écart d'environ 10 marks allemands entre les différents marchés communautaires) avaient été obtenus pour trois trimestres."

(141) Selon le procès-verbal de la réunion du 7 février 1989, les participants ont affirmé que les prix envisagés pour le deuxième trimestre de 1989 étaient ou seraient acceptés sans difficulté par tous les marchés en cause (Allemagne, France, Benelux, Italie et Espagne). Les données de prix figurant dans le procès-verbal de la réunion du 10 janvier étaient complétées par des prix pour deux catégories en Italie et des prix pour l'Espagne.

(142) Le procès-verbal de la réunion du 19 avril 1989 révèle que les prix prévus ont été obtenus en Allemagne, en France et en Italie et que British Steel avait l'intention d'augmenter ses prix. Les prix du troisième trimestre de 1989 figurant dans le procès-verbal sont fondamentalement identiques à ceux qui sont indiqués dans le procès-verbal des réunions du 10 janvier 1989 et du 7 février 1989 pour le deuxième trimestre de 1989.

(143) Une note de British Steel du 24 avril 1989 fournit de plus amples informations au sujet des prix demandés sur le marché britannique :

"J'ai informé la Commission que BS augmenterait ses prix de 4 à 5 % au début du mois de juin et ai proposé que les entreprises vendent leurs produits au Royaume-Uni aux "prix fixés" par BS pour éviter de compromettre cette augmentation de prix."

(144) Cette note fait en outre état d'un conflit entre les producteurs espagnols et British Steel:

"Le groupe espagnol s'est plaint des ventes agressives de British Steel sur le marché espagnol et notamment de la faiblesse des prix facturés par cette dernière. British Steel a formulé des observations au sujet des quantités considérables (21 kilotonnes en janvier et février) exportées par l'Espagne vers le Royaume-Uni et des perturbations provoquées par les prix auxquels ces produits étaient vendus."

(145) Un compte rendu succinct des conclusions de la réunion, rédigé par la Walzstahl- Vereinigung, indique que ce problème devait être résolu par le biais d'entretiens bilatéraux.

(146) Le procès-verbal de la réunion du 6 juin 1989 mentionne des difficultés rencontrées pour les petits profilés (catégories 1 et 2) en France et en Italie, mais Unimétal comme les producteurs italiens se déclarent déterminés à maintenir les prix. British Steel (qui n'était pas présente à la réunion) a informé ses concurrents que les hausses de prix sur le marché britannique étaient acceptées sans difficultés.

(147) Lors de la réunion du 11 juillet 1989, il a été annoncé que les prix envisagés avaient été acceptés par le marché français, sauf en ce qui concerne les catégories 1 et 2a, dont les prix restaient faibles. Certaines offres à des prix inférieurs aux niveaux envisagés avaient été remarquées sur les marchés du Benelux : "Les prix prévus sont toutefois atteints et il convient de ne pas fléchir."

(148) En ce qui concerne le marché britannique, il a été confirmé que la hausse des prix, de l'ordre de 4,25 %, avait été acceptée par les clients.

(149) La discussion sur les prix du quatrième trimestre de 1989 a révélé que, eu égard à l'augmentation des suppléments de dimension et de qualité, les producteurs allemands n'avaient pas l'intention de relever les prix. Les prix prévus et obtenus au troisième trimestre de 1989 ont par conséquent été maintenus.

(150) Le procès-verbal de la réunion du 3 août 1989 contient le paragraphe ci-après (concernant le marché français), qui illustre l'état d'esprit et les intentions des membres de la Commission poutrelles :

"Une certaine retenue des marchands de fer dans la passation des commandes existe actuellement dans "l'espérance" que le niveau des prix s'effrite bientôt."

(151) L'utilisation des guillemets implique que les membres de la Commission poutrelles ne considéraient pas cet espoir comme fondé.

(152) Il a été observé que les clients en Italie avaient à présent accepté les niveaux de prix des catégories 1 et 2a. Sur le marché britannique, les prix, qui avaient été relevés au début du mois de juin, étaient décrits comme demeurant stables. Le procès-verbal donne l'impression que les participants n'avaient prévu, pour le quatrième trimestre de 1989, aucune augmentation des prix de base42 sur aucun des marchés en cause.

(153) La Commission a découvert dans les bureaux de Valor un document non daté qui, selon Valor, faisait partie d'une note interne rédigée par Usinor Sacilor pour la réunion du 21 septembre 1989. Ce document examine les rapports entre l'article 60 et l'article 65 du traité CECA. Après avoir indiqué que l'article 60 n'interdit pas à une entreprise de rendre publics les prix futurs longtemps avant la date prévue pour leur application, l'auteur poursuit :

"6. Il reste, cependant, que les dispositions de l'article 65 visent expressément l'interdiction de tous les accords entre entreprises tendant "à fixer ou déterminer les prix". Il paraît évident que l'annonce par un ensemble de sociétés de leur décision d'augmenter d'un même montant leurs barèmes, à la même date, serait en contradiction avec la disposition précitée.

7. Par contre, deux possibilités peuvent s'offrir:

a) soit l'utilisation de formules assez vagues laissant sous-entendre que l'état du marché devrait permettre un aménagement des barèmes dans un délai de temps non spécifiquement précisé;

b) soit l'utilisation d'une formule comme celle des sociétés américaines c'est-à-dire celle du "price leadership". Une société annonce son intention d'augmenter ou de diminuer ses barèmes à telle date. Les autres sociétés, quelques jours plus tard, annoncent qu'elles suivent l'exemple de leur concurrente."

(154) Il apparaît donc qu'Usinor Sacilor envisageait des moyens d'échapper à l'application des règles de concurrence du traité CECA.

(155) Le procès-verbal de la réunion du 7 novembre 1989 note qu'aucune hausse des prix n'était prévue pour le premier trimestre de 1990. Le seul marché qui fît exception était celui de la France où Unimétal espérait réaliser une augmentation d'environ 50 francs français des prix effectifs des poutrelles de dimensions inférieures.

(156) La réunion suivante s'est tenue le 12 décembre 1989. Ses conclusions sont consignées dans une note servant de base à un discours, rédigée par le représentant de Trade Arbed SA (qui présidait alors les réunions Eurofer/Scandinavie) en vue de la réunion Eurofer/Scandinavie du 31 janvier 1990 d'où l'on peut également tirer des informations utiles sur l'état d'esprit et les intentions des entreprises d'Eurofer :

"Il est donc absolument nécessaire que toutes les forges Eurofer et nos amis scandinaves ne fassent pas pression sur le marché.

(...)

Les prix du quatrième trimestre de 1989 ont en principe pu être reconduits sur le premier trimestre de 1990. Les nouveaux suppléments ne présentent plus de problème. Toutefois, il est regrettable, et cela spécialement pour les catégories 1, 2a et 2b1, que quelques forges se sont laissées aller depuis deux à trois semaines à sous coter les prix programmés en créant par cette attitude inutilement des zones grises allant de 15 à 20 marks allemands. Il faut stopper cela tout de suite.

Pour le deuxième trimestre il est clair que cette zone grise doit disparaître et que les prix programmés doivent être appliqués intégralement, surtout que le deuxième trimestre va probablement amener la demande nécessaire. J'invite toutes les personnes ici présentes à se tenir strictement à cette règle."

(157) En ce qui concerne les prix du deuxième trimestre de 1990, le procès-verbal de la réunion du 14 février 1990 note que les producteurs espéraient revenir aux niveaux de prix qu'ils avaient atteints au quatrième trimestre de 1989 :

"Au plan des prix, les forges locales ont un vif espoir de réduire les faiblesses (de l'ordre de 20 marks allemands) actuellement constatées et de retrouver rapidement, chacune en ce qui la concerne, les niveaux obtenus durant le quatrième trimestre de 1989."

(158) Seule Unimétal a déclaré qu'elle avait l'intention de relever le prix de la catégorie 2c de 45 francs français. Il ne s'agissait pas d'une coïncidence. Par lettre à Unimétal en date du 6 novembre 1989 (avec copie à Trade Arbed SA), le président de la Commission poutrelles avait déclaré qu'il était primordial d'harmoniser les prix dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier de façon à éviter ce qu'il appelait des "distorsions" des courants d'échange.

(159) M. Meyer a fait observer que, à son avis, la catégorie 2c posait un problème majeur à cet égard étant donné que les prix appliqués en France et en Allemagne avaient accusé un écart d'environ 30 marks allemands par tonne pendant un certain temps. Le président de la Commission poutrelles considérait qu'il fallait à présent combler cet écart :

"Le moment est donc favorable pour combler la différence par rapport au prix allemand. Je considère que cette mesure était nécessaire depuis longtemps et qu'elle est praticable aujourd'hui."

(160) Peine-Salzgitter a réitéré sa demande par lettre datée du 19 décembre 1989. Le 7 février 1990, Trade Arbed SA a envoyé une télécopie à Unimétal (avec copie à Peine-Salzgitter) dans laquelle celle-ci insistait auprès du producteur français pour que celui-ci relève son prix pour la catégorie 2c afin de rectifier cette distorsion en dépit de ce qu'elle appelle une situation assez difficile sur les marchés :

"Cette distorsion amène certains marchands français à pénétrer plus fortement le marché allemand, dérangeant ainsi l'édifice du prix en Allemagne (...). Malgré l'environnement en général peu propice à un relèvement des prix, il faudra prévoir pour cette catégorie, et ceci au plus tard pour les livraisons trimestre, une augmentation de 100 francs français par tonne."

(161) Peu après la réunion de la Commission poutrelles du 14 février 1990, British Steel a envoyé une télécopie à Trade Arbed SA, à Peine-Salzgitter, à Thyssen, à Saarstahl et à Unimétal/Valor (M. G.), exposant la définition des catégories A1, A2 et A3 telle qu'elle était utilisée par British Steel. D'autres explications devaient être données par téléphone le 19 février 1990.

(162) L'original de cette télécopie, trouvée par la Commission chez British Steel, contient des annotations manuscrites. Sous le titre "Suggested £/t interpen. allowances", des chiffres sont ajoutés pour chacune des catégories pour les stockistes et les négociants respectivement. La signification de ces chiffres ressort d'une note interne de British Steel, datée du 20 février 1990 :

"G. a été informé des prix à facturer qui, selon nous, ne perturberont pas le marché. Je n'ai pas pu contacter Saarstahl (Baron Dr. von Engelhardt), cependant, la semaine dernière, je me suis plaint à lui avec la dernière énergie des prix exagérément bas qu'il offre sur le marché britannique. Il ne serait pas déraisonnable que nous signalions à Unimétal que les conséquences des errements de Saarstahl devraient être supportées par la France plutôt que par l'Allemagne."

(163) Il ressort de tout ceci que British Steel a informé ses concurrents principaux des prix (ou marges d'interpénétration) qu'elle admettrait.

(164) D'après le procès-verbal de la réunion du 21 mars 1990, British Steel regrettait que certaines offres sur le marché britannique fussent de 55 à 70 livres sterling inférieures au barème de prix de British Steel. Une note de dossier non datée sur les conclusions de cette réunion, rédigée par British Steel, contient le passage suivant :

"BS demande aux producteurs communautaires de ne pas maintenir ces rabais."

(165) La note de British Steel contient en outre certaines informations sur le marché allemand :

"Le groupe allemand souhaiterait relever les prix de base de 20 marks allemands afin de revenir à la situation envisagée au mois d'octobre, lorsque les écarts avaient été augmentés de 20 à 25 marks allemands (les prix de base ont diminué depuis)."

(166) D'après le procès-verbal de la réunion du 16 mai 1990, British Steel annonçait qu'elle envisageait de relever les prix au Royaume-Uni pour le troisième trimestre de 1990 et qu'elle prendrait une décision en mai. Une note du 18 mai 1990, produite par Usinor Sacilor, rapporte que British Steel avait invité les autres producteurs à attendre la fin mai avant de faire une offre ferme de livraison au Royaume-Uni.

(167) Le 7 juin 1990, British Steel envoyait une télécopie aux sociétés Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Thyssen, Ensidesa Unimétal et Aristrain :

"Ci-joint le nouveau barème de prix no 5 de British Steel contenant les modifications applicables à partir du 1er juillet 1990 pour les profilés destinés à la construction.

(...)

En général, il y a une augmentation de près de 5 % par rapport au barème précédent. Veuillez faire en sorte que les offres de prix pour le troisième trimestre tiennent compte de la totalité de cette augmentation."

(168) Dans une note d'information interne (datée du 9 juillet 1990), Peine-Salzgitter résume, à l'intention du président de la Commission poutrelles, en vue de la réunion du 10 juillet 1990, les questions qui étaient alors en discussion. L'auteur indique que, en égard à la hausse partielle des suppléments de dimension, il ne fallait pas instaurer de "hausse officielle" des prix avec effet au quatrième trimestre de 1990. Néanmoins, les participants devaient être exhortés à assurer l'application des nouveaux suppléments de dimension et des prix convenus :

"Appel à tous les participants, concernant les troisième et quatrième trimestres:

- application des nouveaux suppléments de dimension,

- application des prix convenus/élimination des rabais "gris"."

(169) Une note interne de British Steel du 17 juillet 1990 observe que les autres producteurs avaient jusqu'à présent fait "peu de cas" des orientations que British Steel leur avait données sur le niveau des prix de vente au Royaume-Uni. Ainsi qu'il ressort de la note de British Steel du 20 juillet 1990, British Steel a utilisé la réunion du 10 juillet 1990 pour insister une nouvelle fois auprès de ses concurrents pour qu'ils respectent ses nouveaux prix.

(170) Une autre note de British Steel, datée du 30 juillet 1990, révèle que British Steel trouvait le comportement de Trade Arbed SA particulièrement irritant :

"Indubitablement, Arbed, qui est considéré comme le premier importateur communautaire, a fixé ses prix de manière irresponsable et n'a pas respecté l'accord conclu lors de notre réunion avec Everard et Sevenig. Point capital, Arbed SA offre des rabais considérables sur toute la gamme des produits."

(171) D'après le procès-verbal de la réunion du 11 septembre 1990, les participants à la réunion ont été informés que la hausse du barème de British Steel était acceptée par les clients britanniques. En ce qui concerne les autres marchés, le procès-verbal remarque qu'une hausse des prix était "prévisible".

(172) Une note de British Steel, datée du 25 septembre 1990, qui consigne les conclusions de cette réunion, dit les choses plus directement :

"Le sentiment qui domine est que les prix devraient faire l'objet d'une hausse modérée - approximativement 30 marks allemands par tonne. Il y a eu discussion sur le point de savoir si celle-ci devait s'appliquer au prix de base ou aux suppléments. La hausse sera probablement appliquée le 1er janvier."

(173) Cette note indique en outre que British Steel n'a pas pris part à la discussion sur les prix :

"British Steel n'est pas entrée dans la discussion sur les prix. Me suis contenté de rester dans l'esprit de la transparence, tout en recommandant énergiquement au président de ne pas révéler au marché que les producteurs d'Eurofer avaient décidé d'appliquer une hausse."

(174) Le procès-verbal de la réunion du 9 octobre 1990 note que les prix du premier trimestre 1991 ont été discutés et qu'une augmentation de prix de l'ordre de 20 à 30 marks allemands serait acceptée par la clientèle du continent. Il n'était pas fait de "prévision" pour le marché britannique.

(175) Une télécopie de la Walzstahl-Vereinigung à Ferdofin datée du 19 décembre 1990 révèle que les sociétés en cause espéraient obtenir une hausse des prix allant jusqu'à 20 marks allemands par tonne en appliquant ces nouveaux suppléments (section 4.1.5.2) :

"Il convient de rappeler que l'on escomptait le maintien du niveau de prix du quatrième trimestre de 1990 au premier trimestre de 1991, avec cependant une amélioration constante des recettes jusqu'à 20 marks allemands par tonne en moyenne pour la fin du trimestre par l'application des nouveaux suppléments."

4.1.5.2. L'harmonisation des suppléments

(176) Une proposition d'harmonisation des suppléments de qualité rédigée par Usinor Sacilor a été présentée à la réunion du 18 octobre 1988. Le procès-verbal de la réunion du 15 novembre 1988 indique que les suppléments de qualité appliqués en Allemagne avaient été choisis comme l'objectif à atteindre (Zielpreis).

(177) Au cours de cette réunion, British Steel a annoncé qu'elle tiendrait compte des résultats de cette harmonisation au moment de fixer ses propres prix.

(178) Le procès-verbal de la réunion du 10 janvier 1989 indique qu'un "représentant italien" a soumis une proposition d'harmonisation des suppléments de dimension pour les poutrelles IPE, HEB et HEA à la réunion. Il a été convenu d'étudier cette proposition et d'élaborer un projet d'harmonisation des suppléments de dimension qui serait mis en œuvre au troisième ou au quatrième trimestre de 1989.

(179) Naturellement, l'augmentation des suppléments comportait le risque qu'une entreprise pouvait être tentée de compenser cette hausse par une réduction du prix de base, obtenant ainsi un avantage sur ses concurrents. S'ils paraissent avoir été conscients de ce risque, les membres de la Commission poutrelles ne semblaient pas l'avoir considéré comme une menace sérieuse. Dans sa lettre du 24 février 1989 au président de la Commission poutrelles (dont le projet se trouve en possession de la Commission), Ferdofin affirmait ce qui suit :

"J'affirme que le groupe européen des producteurs de poutrelles HE (y compris Ferdofin) est suffisamment homogène pour que des réductions des prix de base puissent être exclues en présence d'écarts élevés."

(180) Le procès-verbal de la réunion du 19 avril 1989 indique qu'un groupe de travail devait se réunir afin de déterminer le niveau des hausses des suppléments de dimension qui devaient entrer en vigueur le 1er octobre 1989. Il est établi que cette réunion a eu lieu le même jour, apparemment après celle de la Commission poutrelles.

(181) Un compte rendu des conclusions de la réunion de ce groupe de travail indique que les membres de la Commission poutrelles étaient convenus, à travers le groupe de travail qu'ils avaient créé à cet effet, à la fois d'harmoniser et d'augmenter les suppléments de dimension pour les poutrelles :

"Le groupe italien suggère, compte tenu que la date d'application de ces nouveaux extras a été fixée en Commission poutrelles au 1er octobre 1989, une harmonisation totale sur l'extra de classe le plus élevé de la Communauté.

Il a été jugé néanmoins préférable de procéder par étapes. La réunion a défini dans ce contexte les orientations suivantes:

1) L'harmonisation s'opère à la hausse.

Elle ne doit en effet en aucun cas entraîner de diminution de barème.

2) Elle constitue une seconde étape.

Un troisième pas devra être envisagé pour certains profils afin de réduire l'écart existant par rapport à l'extra communautaire le plus élevé.

3) La date d'application a été fixée au 1er octobre 1989."

(182) Le compte rendu fournit la liste des suppléments harmonisés pour toutes les poutrelles IPN, UPN, IPE, HEA, HEB et HEM.

(183) La Commission a obtenu certains des documents de travail (découverts dans les bureaux de la Walzstahl-Vereinigung) et des tableaux (découverts dans les bureaux de Valor) comparant les suppléments de dimension appliqués à cette époque sur les marchés français, allemand, luxembourgeois et italien aux nouveaux suppléments devant entrer en vigueur le 1er octobre 1989. L'examen de ces documents révèle que l'harmonisation convenue le 19 avril 1989 a entraîné des hausses de presque tous les suppléments de dimension appliqués à cette époque sur les marchés français, allemand et luxembourgeois. Ces augmentations étaient souvent considérables; ainsi, les suppléments sur les poutrelles HEB 200 sur les marchés français, allemand et luxembourgeois, qui s'élevaient au départ à 20, 19 et 19 écus, ont été portés à 46 écus par tonne. Une note interne de Peine-Salzgitter datée du 10 juillet 1989 confirme que l'"harmonisation" des suppléments de dimension a entraîné une hausse des prix.

(184) Une note interne de Peine-Salzgitter du 5 juin 1989 signale que, par lettre du 23 mai 1989, cette société avait notifié à la Commission des Communautés européennes les nouveaux suppléments qu'elle se disposait à appliquer. Ceci souligne le fait que les suppléments harmonisés n'ont été notifiés qu'après leur adoption par les membres de la Commission poutrelles. Le procès-verbal de la réunion Eurofer/Scandinavie du 25 avril 1989 confirme que les nouveaux suppléments de dimension n'avaient pas été publiés avant cette date.

(185) À la réunion du 6 juin 1989, les espagnols ont annoncé leur intention d'aligner leurs suppléments de dimension sur les niveaux européens.

(186) Le problème de l'harmonisation des suppléments de qualité a été examiné à la même réunion. La décision arrêtée en la matière était analogue à celle qui avait été prise lors de la réunion précédente au sujet des suppléments de dimension, c'est-à-dire que l'harmonisation était censée entraîner une hausse des prix :

"La réunion a décidé d'entériner le projet d'harmonisation du groupe français. La date d'application a été fixée au 1er octobre 1989. Il est rappelé que l'harmonisation s'opère à la hausse et ne doit en aucun cas entraîner de diminution de barème."

(187) Le procès-verbal donne la liste des nouveaux suppléments et note que British Steel avait annoncé (par télex) qu'elle se conformerait aux résultats de cette harmonisation.

(188) Par lettre adressée à M. Arnuzzo (Ferdofin) en date du 15 décembre 1989, Peine-Salzgitter indique que plusieurs membres de la Commission poutrelles avaient demandé à la réunion du 12 décembre 1989 (à laquelle Ferdofin n'assistait pas) si Ferdofin appliquait ces nouveaux suppléments, notamment sur le marché allemand.

(189) Par télex du 21 décembre 1989, Ferdofin a assuré Peine-Salzgitter que, depuis le 1er octobre de la même année, elle appliquait les nouveaux suppléments de dimension dans ses ventes sur tous les marchés européens depuis le 1er octobre 1989 sans exception.

(190) La mise en œuvre des nouveaux suppléments semble avoir eu des répercussions sur le prix de base. Le procès-verbal de la réunion du 14 février 1990 contient le passage suivant :

"Les nouveaux suppléments sont intégralement obtenus, bien qu'on puisse regretter qu'ils l'aient été parfois au détriment des prix de base."

(191) Le procès-verbal de la réunion du 16 mai 1990 note que les producteurs "envisageaient" d'augmenter les suppléments de dimension de 15 à 20 marks allemands au 1er juillet 1990.

(192) Ils se fondaient sur une proposition soumise par les participants allemands et luxembourgeois (télécopie du 11 mai 1990 de Peine-Salzgitter au secrétariat). L'examen de ce document a révélé que les modifications proposées auraient entraîné à l'époque une harmonisation quasi complète des suppléments de dimension concernés, mais également une augmentation considérable du montant de ces suppléments de dimension.

(193) Si le procès-verbal de la réunion donne l'impression que la hausse des suppléments de dimension n'était qu'envisagée, un rapport rédigé par la Walzstahl-Vereinigung révèle qu'en réalité, tous les participants avaient accepté cette proposition :

"Tous les groupes présents ont accepté cette proposition avec la réserve que celle-ci n'entraîne pas une nouvelle fois - comme au quatrième trimestre de 1989 - une réduction des prix de base."

(194) Ce point est d'ailleurs confirmé par une note confidentielle du 17 mai 1990, envoyée par le secrétariat de la Commission poutrelles à Unimétal :

"Tous les groupes ont confirmé leur accord sur cette proposition, avec publication immédiate pour application au 1er juillet 1990."

(195) Par télécopie datée du 21 mai 1990, Peine-Salzgitter a informé la représentation d'Aristrain en Allemagne (qui n'avait pu assister à la réunion du 16 mai) des clauses de l'accord réalisé. Ce document révèle qu'il avait aussi été convenu que les commandes à exécuter au cours de la période débutant le 1er juillet 1990 ne seraient pas acceptées par les participants avant le 1er juin 1990.

(196) La note confidentielle d'Usinor-Sacilor datée du 17 mai 1990 indique que certains des participants souhaitaient pousser plus loin encore l'harmonisation :

"En ce qui concerne les petites dimensions (IPE 80-160 millimètres) qui ne font pas l'objet d'une hausse dans la proposition, M. Masserdotti prendra contact avec toi pour examiner s'il n'est pas possible de les augmenter aussi."

(197) Dans une télécopie au secrétariat, rédigée sur papier à en-tête de Stefana et datée du 31 mai 1990, M. Masserdotti exprimait son mécontentement de voir que les suppléments pour les petites dimensions n'avaient pas été augmentés. L'auteur de la note exigeait que tous les participants réexaminent sa proposition dans laquelle il avait suggéré ce qu'il appelait une hausse "modérée" :

"J'invite tout le monde à réexaminer cette proposition afin de maintenir l'esprit de collaboration qui cimente notre relation."

(198) Le président de la Commission poutrelles a répondu par lettre du 12 juin 1990 qu'il ne s'opposerait pas à ce que les producteurs italiens appliquent "des suppléments quelque peu différents sur leur marché" et leur donnait l'assurance suivante :

"Il va sans dire que les aciéries germano-luxembourgeoises appliqueront vos suppléments sur votre marché national."

(199) Le procès-verbal de la réunion du 11 septembre 1990 note que les suppléments de dimension étaient à nouveau à l'ordre du jour.

"La proposition italienne relative à de nouveaux suppléments de dimension pour les catégories IPN, UPN et IPE a été soumise au cours de la réunion (annexe II). Il s'agit d'une harmonisation vers le haut qui, en aucune façon, ne pourrait provoquer de diminution des barèmes. Cette hausse pourrait être appliquée à partir du 1er octobre 1990."

(200) Un bref compte rendu des conclusions de cette réunion, daté du 11 octobre 1990 et rédigé par la Walzstahl-Vereinigung, remarque qu'un producteur espagnol avait informé les autres participants à la réunion qu'il avait l'intention d'augmenter ses suppléments de dimension au cours du quatrième trimestre de 1990 de manière à les rapprocher des suppléments de dimension harmonisés.

(201) Le 14 novembre 1990, la Walzstahl-Vereinigung a diffusé une proposition "allemande" prévoyant l'harmonisation des suppléments de dimension.

(202) L'examen de cette proposition révèle qu'elle aurait entraîné des hausses sur tous les marchés sauf en Italie où, pour certaines des dimensions en cause, les nouveaux suppléments proposés étaient encore inférieurs à ceux qui y étaient alors appliqués.

(203) Le 28 novembre 1990, Eurofer a envoyé une copie de cette proposition au responsable des affaires juridiques d'Eurofer parce qu'elle avait quelques doutes quant à la compatibilité de cette proposition avec les règles de concurrence de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Le destinataire a répondu par télécopie du 3 décembre 1990 que le document en question ne constituait pas une proposition d'harmonisation des prix, mais bien un "avis d'expert" neutre :

"Il pourrait toutefois y avoir infraction aux règles de concurrence du traité CECA au cas où les entreprises décideraient en commun de modifier leur barème suivant ce modèle ou convenaient de modifications de leurs suppléments suivant ce modèle."

(204) Un compte rendu des conclusions de la réunion du 4 décembre, établi par la Walzstahl-Vereinigung, note qu'une "société allemande" avait décidé de relever ses suppléments de dimension d'un montant allant de 5 à 30 marks allemands par tonne à compter du 1er janvier 1991. Le procès-verbal de réunion relève que les autres producteurs envisageaient des actions similaires.

(205) Dans une télécopie qu'elle a adressée à British Steel le 13 décembre 1990, la Walzstahl-Vereinigung met les choses au point :

"Pour la bonne forme, je porte à votre connaissance que Peine-Salzgitter ainsi que, entre-temps, Thyssen Stahl, ont publié de nouveaux suppléments de dimension pour les poutrelles, conformément à une nouvelle structure harmonisée au niveau des États membres de la Communauté (à l'exception du Royaume-Uni et de l'Espagne)."

(206) Le 19 décembre 1990, la Walzstahl-Vereinigung a envoyé une télécopie à Ferdofin : "Nous pouvons vous assurer que dans l'intervalle, toutes les représentations allemandes en Italie ont été informées des hausses des suppléments de dimension dans les barèmes allemands. Ferdofin a-t-elle également modifié depuis son barème pour les suppléments de dimension?"

(207) La formulation du paragraphe ci-dessus et le fait que cette télécopie avait été envoyée à Trade Arbed SA, à Peine-Salzgitter, à Thyssen et à Saarstahl impliquent que ces entreprises avaient adopté les nouveaux suppléments de dimension au 19 décembre 1990.

4.2. L'ECHANGE D'INFORMATIONS PAR L'INTERMEDIAIRE D'EUROFER

(208) Les documents révèlent que certaines statistiques sur les commandes et les livraisons ont également été réunies et diffusées par Eurofer elle-même. Pour les besoins de cet échange d'informations, les sociétés participantes déclaraient leurs commandes et livraisons presque immédiatement à Eurofer, d'où leur dénomination de "fast bookings".

(209) Les chiffres des commandes étaient distribués sous forme agrégée. Néanmoins, des statistiques individuelles ont été échangées pour des commandes des entreprises suivantes: Peine-Salzgitter, Thyssen, Kloeckner, Hoesch, Saarstahl, Usinor Sacilor, Ferdofin, Cockerill Sambre, Arbed SA, British Steel, Ensidesa et Siderurgia Nacional (un producteur portugais), subdivisées selon les marchés des États membres.

(210) Les principaux documents se rapportant à cet échange d'informations sont énumérés à l'annexe II.

(211) Les éléments de preuve démontrent qu'Eurofer diffusait régulièrement les statistiques des livraisons effectuées par les sociétés en cause environ deux mois au plus tard après la fin du trimestre ou du mois considéré. Cet échange d'informations remonte à 1986 au moins.

(212) Cet échange d'informations a été suspendu par Eurofer à la fin de juillet 1990, mais a repris peu de temps après. British Steel n'a pas pris part à ce nouvel échange d'informations.

(213) Les preuves dont dispose la Commission ne permettent pas de déterminer l'identité de tous les destinataires des statistiques distribuées par Eurofer. Il est cependant permis de considérer que toutes les entreprises qui transmettaient à Eurofer leurs chiffres et dont les données figurent dans les tableaux élaborés par cette dernière ont également reçu en retour un exemplaire de ces documents. Cette hypothèse n'a pas été contestée par Eurofer dans sa réponse à la communication des griefs du 6 février 1992.

4.3. LES ACCORDS ET PRATIQUES RELATIFS AUX DIFFERENTS MARCHES

4.3.1. L'Allemagne

(214) Une note du 16 janvier 1987 (découverte dans les bureaux de Peine-Salzgitter) d'une réunion, organisée à Duesseldorf le 15 janvier 1987, entre des représentants de Thyssen, de Peine-Salzgitter et de Trade Arbed SA révèle que ces entreprises ont fixé les prix pour le premier trimestre de 1987.

(215) Une note interne du 2 juin l987, rédigée par Peine-Salzgitter, révèle que des prix étaient fixés par Thyssen, Peine-Salzgitter et Trade Arbed SA depuis un certain temps. Ce document mentionne des accords conclus entre ces sociétés en décembre 1986, en janvier 1987 (voir considérant 214) et en février 1987 et donne la liste des prix fixés.

(216) Une note interne du 9 novembre 1987 rédigée par Peine-Salzgitter en vue d'une réunion avec les distributeurs, le 11 novembre 1987, indique que cette rencontre était le prolongement des discussions qui avaient eu lieu le 11 et le 24 juin 1987. Il semble que les réunions précédentes aient eu pour objet principal la stabilisation ou l'augmentation des prix. Le document signale que ces discussions se sont soldées par deux hausses de prix, le 1er juillet et le 1er octobre 1987.

(217) Trade Arbed SA a confirmé avoir assisté à la réunion du 11 juin 1987. Peine-Salzgitter, Trade Arbed SA et la Walzstahl-Vereinigung ont informé la Commission qu'elles étaient présentes à la réunion du 24 juin 1987.

(218) Le 20 janvier 1988, un groupe nommé "VA Profilstahl" a tenu une réunion à Duesseldorf à laquelle assistaient Trade Arbed SA, Hoesch, Peine-Salzgitter, Saarstahl et Thyssen. Un compte rendu des conclusions de cette réunion, datée du 25 janvier 1988, donne la liste des hausses de prix recommandées pour le 1er avril et se poursuit comme suit :

"Accord entre toutes les usines présentes pour que, lors des annonces de prix futures, des notations soient données pour tous les négociants sur le marché et pour qu'un certain supplément soit concédé/convenu (par exemple 20 marks allemands) pour les six grands."

(219) Le 20 avril 1988, Peine-Salzgitter a envoyé une télécopie à Thyssen, à Trade Arbed SA et à Saarstahl pour les informer que la possibilité d'une nouvelle hausse des prix devrait être examinée lors de la réunion avec les distributeurs, programmée pour le 22 avril 1988. Une proposition relative à ces hausses a été présentée.

(220) Le groupe VA Profilstahl s'est réuni à Paris le 18 avril 1989. Une note manuscrite de la Walzstahl-Vereinigung consignant les conclusions de cette réunion contient le passage suivant :

"Arbed a bloqué des suppléments plus élevés pour UPN 320 et au-delà (les autres fournisseurs - surtout Hoesch - devant d'abord respecter les prix convenus)."

(221) Une note d'information du 20 avril 1989, rédigée par Peine-Salzgitter en vue d'une réunion avec les distributeurs, prévue pour le 21 avril 1989, indique que lors de la dernière rencontre de ce type, le 16 février 1989, il avait été convenu que les producteurs participant à la réunion n'exerceraient aucune pression sur le marché au deuxième trimestre de 1989. L'auteur observe que cette consigne semble avoir été respectée.

(222) Une lettre du 20 décembre 1989 de Peine-Salzgitter à Saarstahl révèle que certains producteurs étaient convenus de limiter leurs livraisons au marché allemand au deuxième semestre de 1989 à un niveau précis (livraisons du troisième trimestre de 1988 moins 10 %). Il apparaît que Saarstahl ne s'est pas conformée à cet accord. Peine-Salzgitter, Saarstahl et Trade Arbed SA à tout le moins ont été parties à cet accord. Ceci est confirmé par une lettre de Peine-Salzgitter à Trade Arbed SA datée du 19 décembre 1989.

4.3.2. La France

(223) Une note interne du 14 mai 1987 rédigée par Peine-Salzgitter révèle qu'à cette époque Unimétal, Cockerill Sambre et Arbed SA/Trade Arbed SA se concertaient pour fixer les prix qu'elles demandaient en France.

(224) Ce fait est confirmé par une note du 18 mai 1987 rédigée par Peine-Salzgitter.

4.3.3. L'Italie

(225) Le 7 avril 1987, une réunion portant notamment sur le marché italien a eu lieu à Duesseldorf. Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Unimétal et la Walzstahl-Vereinigung ont confirmé leur participation à cette réunion; le procès-verbal prouve que Ferdofin y assistait également.

(226) D'après le procès-verbal, les participants ont conclu qu'il était essentiel de coordonner leur action pour obtenir les prix "programmés" :

"Une telle coordination s'impose pour permettre d'atteindre les prix de la programmation, laquelle est rappelée ci-dessous:

Prix de base Catégorie 2B H 100 à 300

PE 240 à 400

1) Les trois négociants: Presider (*), Novasider, Sidercomit

Catégorie 2B: 460 000 lires italiennes rendu nord de l'Italie, moins commission agents plafonnée à 2 %

Catégorie 2C: 500 000 lires italiennes rendu nord de l'Italie, moins commission agents plafonnée à 2 %.

(*) Prix précités majorés de 15 000 lires italiennes rendu magasins dans le centre de l'Italie

2) Autres négociants

Prix précités majorés de 15 000 lires italiennes rendu nord de l'Italie

3) Utilisateurs

Catégorie 2B: 500 000 lires italiennes parité

Catégorie 2C: 550 000 lires italiennes parité."

(227) Par lettre du 23 octobre 1987 à Ferdofin, le président de la Commission poutrelles exposait les grandes lignes de la politique de vente de Peine-Salzgitter sur le marché italien :

"Nous respectons les prix que vous indiquez aux réunions, de même que les prix de marché fixés éventuellement à d'autres occasions, par exemple lors de vos entretiens avec les représentations allemandes."

(228) Dans sa réponse du 27 octobre 1987, Ferdofin s'est plainte de ce que Peine-Salzgitter (de même que British Steel) ne respectait pas les prix convenus.

(229) Un télex du 17 novembre 1987 envoyé par Peine-Salzgitter à Ferdofin contient le passage suivant :

"Nous avons toujours respecté dans le passé les prix convenus avec vous. Nous nous tiendrons également aux décisions qui seront prises le 25 novembre 1987 à Duesseldorf."

(230) Une note d'information du 24 novembre 1987 rédigée par Peine-Salzgitter révèle que le secrétariat de la Commission poutrelles avait insisté pour que les participants s'abstiennent de toute vente en Italie jusqu'à ce qu'un accord (sur les prix) intervienne.

(231) Le document précise en outre les prix convenus précédemment ainsi que les modifications qui y avaient été apportées sous la pression du marché, et note :

"Nous respectons strictement les accords de prix."

(232) Le marché italien a été abordé lors d'une réunion organisée à Duesseldorf le 25 novembre 1987. Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Unimétal et la Walzstahl-Vereinigung ont confirmé y avoir assisté. Une liste des participants (trouvée dans les bureaux de Peine-Salzgitter) indique que British Steel, Aristrain, Ensidesa, Ferdofin, Stefana, Thyssen, Saarstahl et Cockerill Sambre y étaient elles aussi représentées.

(233) Une note de Peine-Salzgitter (du 30 novembre 1987) et le procès-verbal de la réunion révèlent qu'il existait un accord prévoyant une hausse des prix à concurrence de 20 000 lires italiennes au quatrième trimestre de 1987, laquelle n'avait toutefois pu être que partiellement obtenue. Ferdofin avait exigé qu'une forte augmentation des prix intervienne le 1er janvier 1988 et avait distribué une proposition à cet effet (une copie de ce document a été trouvée dans les bureaux de la Walzstahl-Vereinigung).

(234) Le procès-verbal et la note de Peine-Salzgitter susmentionnés confirment que les prix ont effectivement été fixés au cours de cette réunion. Le procès-verbal formule clairement les grandes lignes de l'accord sous le titre "Programmation de prix pour le premier trimestre de 1988" et donne la liste des prix qui avaient été fixés.

(235) La réunion suivante relative au marché italien a eu lieu à Portofino le 13 mars 1988. Trade Arbed SA, British Steel, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Thyssen, Unimétal et la Walzstahl-Vereinigung ont confirmé leur participation à celle-ci. Les preuves dont dispose la Commission indiquent que Cockerill Sambre, Ferdofin et Stefana y ont également pris part.

(236) Le compte rendu de cette réunion prouve que les prix fixés lors de la réunion précédente n'avaient que partiellement été obtenus.

(237) Dans ces conditions, M. Arnuzzo (Ferdofin) a fait la proposition suivante :

"La nécessité d'un accord

(...)

Ainsi propose-t-il de procéder pour le deuxième trimestre à une évaluation de la consommation totale du marché italien et d'attribuer à chacun une part de cette évaluation. Il précise qu'il ne s'agit nullement d'instituer une nouvelle méthode qui modifierait le système Eurofer en matière d'attribution de quotas ou de références mais de limiter au deuxième trimestre les livraisons sur ce marché aux fins de permettre des remontées de prix."

(238) Le procès-verbal indique que cette proposition a été acceptée. Les parties, à l'exclusion de Stefana, ont conclu ce qui était appelé un "gentlemen's agreement " en vertu duquel elles allaient limiter leurs livraisons sur le marché italien afin de permettre une hausse des prix.

(239) Les parties sont également convenues de fixer les prix :

"Il a en outre été décidé de procéder à des hausses au premier trimestre de 1988 de 10 000 lires italiennes en catégories 2B1, 2B2, 2B3, s'agissant des cinq grands négociants, et de 20 000 lires italiennes pour les autres clients, (...)".

(240) Le compte rendu donne la liste des prix convenus pour les livraisons de Ferdofin et des autres entreprises.

(241) Une télécopie du 18 mai 1988 envoyée par le secrétariat de la Commission poutrelles révèle qu'il était prévu d'appliquer de nouvelles hausses de prix sur le marché italien à partir du 1er juillet 1988 à la demande de Ferdofin.

(242) Un télex du 28 juin 1988 envoyé par Ferdofin à Peine-Salzgitter confirme que des prix avaient été fixés :

"Il a été décidé d'un commun accord pour le troisième trimestre une hausse de prix de 30 lires italiennes par kilogramme au lieu de 50 lires italiennes par kilogramme (comme nous l'exigions) pour les cinq gros négociants qui ont refusé la hausse de prix proposée de 50 lires italiennes par kilogramme."

(243) Les preuves dont dispose la Commission donnent à penser que le 21 juin 1988 les usines membres d'Eurofer sont convenues d'appliquer également au troisième trimestre de 1988 les quotas de livraison sur le marché italien qu'elles avaient fixés pour le deuxième trimestre de cette même année.

(244) Ce fait est confirmé par une télécopie du 21 juin 1988 de Saarstahl à la Walzstahl- Vereinigung, par une télécopie du 22 juin 1988 de la Walzstahl-Vereinigung au secrétariat de la Commission poutrelles et par un télex de Ferdofin à Peine-Salzgitter du 28 juin 1988, qui note :

"J'estime pour terminer que l'objectif principal doit rester la hausse des prix, objectif qui ne peut être atteint que par la limitation des quantités. Pour ces raisons, je reste d'avis que les quotas du troisième trimestre ne doivent en aucun cas être relevés."

(245) Un télex de Ferdofin à Peine-Salzgitter en date du 4 août 1988 permet de conclure qu'un quota de plus de 2 000 tonnes avait été attribué à Saarstahl pour le troisième trimestre de 1988.

(246) Les preuves disponibles, et en particulier les chiffres utilisés dans le monitorage des commandes, indiquent que les quotas qui avaient été déterminés ont été respectés par la majorité des sociétés en cause.

(247) Le marché italien a été examiné lors d'une réunion tenue à Milan le 3 octobre 1988. Trade Arbed SA British Steel, Peine-Salzgitter et Unimétal ont confirmé leur participation à cette réunion. Les preuves démontrent que Ferdofin y assistait également. Ferdofin a présenté les conclusions de cette réunion à la réunion de la Commission poutrelles, le 18 octobre 1988.

(248) Une télécopie de Trade Arbed SA à Norsk Jernverk, datée du 5 octobre 1988 note :

"Objet: Profilés HE pour le marché italien.

Comme suite à notre communication téléphonique, ci-joint les prix pour le marché italien, profilés HE, fixés à Milan le lundi 3 octobre."

(249) La réunion suivante relative au marché italien dont la Commission ait connaissance a eu lieu à Milan le 15 mai 1990, la veille de la réunion de la Commission poutrelles.

(250) Le procès-verbal officiel de la réunion de la Commission poutrelles du 16 mai 1990 contient un bref paragraphe mentionnant les prix qui - selon le texte du document - ont effectivement été obtenus sur le marché italien à cette époque. Une note interne du 18 mai 1990, rédigée par le secrétariat de la Commission poutrelles, indique que la version contenue dans le procès-verbal officiel est trompeuse :

"Une réunion sous forme d'un dîner a eu lieu le 15 mai 1990 à propos du marché italien. Les résultats de cette rencontre sont les suivants (cités en réunion plénière le 16 mai 1990): (...)"

(251) Cette note donne ensuite la liste des prix "prévus" pour le marché italien.

(252) Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Valor (c'est-à-dire Unimétal), Thyssen et la Walzstahl-Vereinigung ont confirmé leur participation à la réunion du 15 mai 1990. Il n'est pas concevable que Ferdofin, qui était représentée à la réunion du 16 mai, n'ait pas assisté la veille à la réunion relative au marché italien, qui a également eu lieu à Milan, ou que cet accord de fixation des prix ait été conclu sans sa participation. Cette conclusion est confirmée par un télex de Ferdofin à Peine-Salzgitter daté du 9 juillet 1990 et n'a pas été contestée par les parties.

4.4. LES REUNIONS EUROFER/SCANDINAVIE

4.4.1. Généralités

(253) Des producteurs et distributeurs de poutrelles et de laminés marchands (et certaines de leurs associations) rencontraient régulièrement leurs homologues scandinaves lors des "réunions Eurofer/Scandinavie". Pour les besoins de la décision, seule la coopération dans le domaine des poutrelles sera prise en considération.

(254) Ce groupe se réunissait quatre fois par an. La Commission possède des informations sur les réunions suivantes:

5 février 1986 Berlin

22 avril 1986 Copenhague

30 juillet 1986 Luxembourg

28 octobre 1986 Stockholm

3 février 1987 Londres

28 avril 1987 Paris

4 août 1987 Helsinki

4 novembre 1987 Bruxelles

2 février 1988 Luxembourg

26 avril 1988 Fredensborg

25 juillet 1988 Hambourg

3 novembre 1988 Oslo

1er février 1989 Luxembourg

25 avril 1989 Stockholm

31 juillet 1989 Londres

30 octobre 1989 Copenhague

31 janvier 1990 Paris

24 avril 1990 Helsinki

31 juillet 1990 Duesseldorf

31 octobre 1990 Milan

(255) Un représentant de la Walzstahl-Vereinigung présidait ces réunions au moins depuis 1986. En novembre 1988, la présidence est passée à Trade Arbed SA. Le groupe français (initialement le CPS et ultérieurement Usinor Sacilor) assumait le secrétariat de ce groupe. Le secrétariat, entre autres, envoyait les invitations aux réunions et rédigeait et distribuait le procès-verbal des réunions.

(256) Les sociétés suivantes qui à l'époque des faits produisaient ou distribuaient des poutrelles (43) assistaient régulièrement aux réunions du groupe Eurofer/Scandinavie:

British Steel Saarstahl

Unimétal Norsk Jernverk

Trade Arbed SA Ovako

Steelinter SSAB

Thyssen Smedjebacken/Fundia Steel AB.

Peine-Salzgitter

(257) Certaines des sociétés visées au considérant (256) ont confirmé qu'elles avaient pris part à la totalité ou à certaines des réunions du groupe Eurofer/Scandinavie: Trade Arbed SA et Peine-Salzgitter ont informé la Commission qu'elles avaient assisté à toutes les réunions énumérées au considérant 254. Saarstahl a confirmé qu'elle avait participé à toutes les réunions à dater du 2 février 1988 tandis que Thyssen a indiqué qu'elle avait assisté à toutes ces réunions à l'exception de celle du 25 juillet 1988. British Steel a informé la Commission qu'elle avait assisté à toutes ces réunions à l'exception de trois d'entre elles (4 août 1987, 4 novembre 1987 et 2 février 1988): les documents prouvent que British Steel était également présente à la réunion du 4 août 1987.

(258) Les preuves démontrent que les réunions du groupe Eurofer/Scandinavie servaient à fixer des prix pour les marchés scandinaves, à savoir la Norvège, la Suède, la Finlande et le Danemark. Seuls les accords portant sur le marché danois seront examinés ici.

4.4.2. Exposé détaillé des infractions

4.4.2.1. La réunion du 5 février 1986

(259) Le procès-verbal de cette réunion note que la "programmation" du premier trimestre de 1986 n'avait pas été pleinement réalisée. Les participants ont décidé de ne pas modifier les prix pour le deuxième trimestre de 1986.

4.4.2.2. La réunion du 22 avril 1986

(260) Le procès-verbal de cette réunion indique que les usines d'Eurofer avaient arrêté un prix pour le marché danois.

4.4.2.3. La réunion du 30 juillet 1986

(261) On peut lire le passage suivant dans le procès-verbal de la réunion :

"Fixation des prix pour le quatrième trimestre

L'analyse du marché et l'étude des prix qu'il convient de fixer pour le quatrième trimestre ont produit les résultats suivants:

(...)

Danemark

Le dernier accord conclu est: application du barème CEE le plus bas plus transport. Comme il est prévu de changer les barèmes, des informations seront communiquées plus tard".

(262) Un tableau (daté du 1er août 1986) donnant les "prix pour le quatrième trimestre de 1986", qui semble avoir été établi par la Walzstahl-Vereinigung, en apporte la confirmation :

"Des informations seront communiquées après la fixation des nouveaux prix dans les pays de la Communauté économique européenne."

(263) Une annexe de ce document donne les prix qui ont été fixés ensuite. Il en ressort que, outre la catégorie 1 (pour laquelle aucun prix n'a été fixé), les prix allemands devaient être appliqués aux livraisons au Danemark.

4.4.2.4. La réunion du 28 octobre 1986

(264) Le procès-verbal de cette réunion indique que les objectifs de hausse n'avaient pas été atteints et que les prix du marché "étaient au mieux ceux qui avaient été obtenus au troisième trimestre de 1986".

(265) En ce qui concerne le Danemark, des prix étaient fixés pour les catégories 2b et 2c pour application au premier trimestre de 1987. S'agissant des catégories 1, 2a et 3, le procès-verbal note ce qui suit :

"Le niveau des prix sera fixé ultérieurement par les aciéries membres d'Eurofer".

(266) Une note du 31 octobre 1986, rédigée par le secrétariat, qui donne les "prix décidés pour le premier trimestre de 1987 en Scandinavie", en apporte la confirmation. Ce document indique les prix des catégories 2b et 2c sur le marché danois et précise que les prix des catégories 1, 2a et 3 "seront fixés dans les meilleurs délais".

4.4.2.5. La réunion du 3 février 1987

(267) Un document, rédigé par le secrétariat et adressé à la Walzstahl-Vereinigung le 6 février 1987, qui porte sur "la politique de prix pour le deuxième trimestre de 1987 en Scandinavie", donne les prix pour toutes les catégories sur le marché danois. En ce qui concerne la catégorie 3, il relève que les prix "devaient être fixés après la décision qui serait prise par Eurofer".

4.4.2.6. La réunion du 28 avril 1987

(268) Le procès-verbal de cette réunion indique que les prix programmés pour le deuxième trimestre de 1987 n'avaient pas été atteints. C'est pourquoi les participants à la réunion ont décidé de ne pas modifier les prix des poutrelles sur le marché danois. Le prix de la catégorie 3 serait fixé ultérieurement par les entreprises d'Eurofer.

4.4.2.7. La réunion du 4 août 1987

(269) Là encore, le procès-verbal indique que l'application des prix programmés n'était pas satisfaisante. Le procès-verbal donne les prix programmés pour le quatrième trimestre de 1987 (identiques à ceux qui étaient programmés pour le troisième trimestre). Aucun prix n'est indiqué pour la catégorie 3.

4.4.2.8. La réunion du 4 novembre 1987

(270) Le procès-verbal donne les "prix pour le premier trimestre de 1988". Les prix des poutrelles des catégories 1 et 2 sur le marché danois ont été relevés de 20 marks allemands.

4.4.2.9. La réunion du 2 février 1988

(271) Le procès-verbal relève que l'application des prix programmés pour le premier trimestre de 1988 n'était pas satisfaisante. La situation au Danemark semble toutefois avoir été différente, étant donné que les prix fixés pour le deuxième trimestre de 1988 étaient nettement plus élevés que ceux du trimestre précédent.

4.4.2.10. La réunion du 25 juillet 1988

(272) Les prix pour le quatrième trimestre de 1988 figurent dans un tableau intitulé "Prix de marché pour le quatrième trimestre de 1988 (Forges CECA)" et annexé au procès-verbal de cette réunion. La comparaison montre que certains de ces prix étaient plus élevés que ceux qui avaient été convenus à la réunion du 2 février 1988.

(273) Le 27 juillet 1988, la Walzstahl-Vereinigung a envoyé un télex à Trade Arbed SA, British Steel, Unimétal, Norsk Jernwerk, Thyssen, Peine-Salzgitter, au Jernkontoret (une association suédoise du commerce de l'acier) et au secrétariat, dont le titre était "prix des poutrelles pour le Danemark". Les prix indiqués dans ce télex sont (sauf une légère différence) identiques à ceux qui figurent dans le tableau mentionné au considérant (272).

(274) Une télécopie datée du 7 octobre 1988, adressée par Trade Arbed SA à la Walzstahl- Vereinigung, fournit des éclaircissements sur l'objet de ces réunions :

"Des clients scandinaves s'efforcent depuis quelques jours de placer des commandes pour le premier trimestre pour les profilés/HE de même que pour les laminés marchands. Nous, Trade Arbed, ne sommes nullement disposés ni à accepter de tannages ni à donner de prix avant que les usines Eurofer aient fixé avec les usines scandinaves, le 3 novembre, la politique de prix à suivre pour la Scandinavie. Je vous prie en mon nom de rappeler à tous les participants à la réunion Eurofer/Scandinavie que personne ne doit donner avant cette réunion ni quantités ni prix pour le premier trimestre, sinon nous pouvons nous passer de cette discussion."

(275) Un télex daté du 24 octobre 1988, émanant de Trade Arbed SA, révèle que les producteurs d'Eurofer avaient fait une proposition concernant les nouveaux prix à adopter et donne les prix proposés.

4.4.2.11. La réunion du 3 novembre 1988

(276) Le procès-verbal de cette réunion note que les prix attendus pour le quatrième trimestre de 1988 avaient été atteints et que des hausses de 10 à 40 marks allemands étaient prévues pour le premier trimestre de 1989.

(277) Un télex du 17 novembre 1988 envoyé à la Walzstahl-Vereinigung par Trade Arbed SA, contient le commentaire suivant :

"Objet: Scandinavie - Laminés marchands et profilés

D'après les dernières informations, les prix fixés à la réunion d'Oslo ont dans l'intervalle été réalisés. Je vous serais reconnaissant d'en informer les participants à la réunion Eurofer/Scandinavie afin que tous restent calmes et ne s'écartent en aucun cas des conditions."

(278) Un télex du 20 janvier 1989, envoyé par l'un des vendeurs de Trade Arbed SA à l'administration à Luxembourg, révèle que les sociétés qui assistaient aux réunions Eurofer/Scandinavie refusaient de faire des offres de prix pour un trimestre donné avant leur fixation lors de ces réunions.

(279) Ceci est confirmé par un télex envoyé par la Walzstahl-Vereinigung le 23 janvier 1989:

"Ventes à la Scandinavie: Au nom du président de la commission de travail Eurofer/Scandinavie, nous vous prions de ne pas faire offre de prix ou de quantités sur tous les marché scandinaves pour le deuxième trimestre de 1989 avant la prochaine réunion, qui aura lieu le 1er février."

4.4.2.12. La réunion du 1er février 1989

(280) Le procès-verbal de cette réunion note que d'autres hausses du prix des poutrelles sur le marché danois avaient été convenues, comme le confirme une note interne datée du 2 février 1989 rédigée par British Steel qui contient l'observation suivante concernant le marché danois :

"Ce marché reste calme. Cependant, les prix cibles pour le quatrième trimestre ont été obtenus et une nouvelle augmentation de 20 marks allemands a été prévue pour le premier trimestre."

(281) Ce document donne également "l'objectif de prix" pour janvier/mars, le prix obtenu dans cette période et "l'objectif de prix" pour avril/juin.

4.4.2.13.La réunion du 25 avril 1989

(282) Le procès-verbal de cette réunion note que les prix prévus pour le deuxième trimestre avaient été atteints. Il s'avère qu'aucune hausse de prix n'était prévue pour le troisième trimestre de 1989.

4.4.2.14.La réunion du 31 juillet 1989

(283) Le procès-verbal de cette réunion note, en ce qui concerne le Danemark, qu'il n'était pas prévu de relever les prix de base au quatrième trimestre de 1989.

(284) Une note interne de British Steel, datée du 3 août 1989, qui fait le compte rendu de la réunion Eurofer/Scandinavie du 31 juillet 1989, contient le passage suivant :

"Malgré le faible niveau des commandes, les prix pour juillet/septembre ont été obtenus et il a été convenu qu'ils seraient maintenus pour la période octobre/décembre."

(285) La note contient en outre un tableau indiquant l'objectif de prix juillet/septembre (price target July/September), les prix obtenus au troisième trimestre et l'objectif de prix (price target) pour le quatrième trimestre.

4.4.2.15.La réunion du 30 octobre 1989

(286) Un télex confidentiel a été adressé aux participants par le secrétariat le 2 novembre 1989 où il était indiqué que les prix de base devaient être reconduits, mais que les nouveaux suppléments devaient être appliqués.

4.4.2.16. La réunion du 31 janvier 1990

(287) Une note rédigée par le président de la réunion Eurofer/Scandinavie le 1er février 1990, dans laquelle il résumait ce qu'il avait déclaré à la réunion le jour précédent, contient le passage suivant :

"(...) Jusqu'à maintenant les échos qu'on pouvait avoir de nos rencontres étaient bons et certains représentants d'autres produits nous envient même les résultats et l'entente de notre club.

Je ne dis pas ces mots sans raison, car pour le premier trimestre, tout le monde n'a pas joué fair play et cela spécialement en aciers marchands. Je vous demande de ce fait, en tant que représentants du club Eurofer/Scandinavie et pour le bien de nos entreprises, de tout faire pour qu'on puisse sortir de cette salle avec la ferme volonté de stabiliser le marché et, avec cela, sauver l'honneur de notre club."

4.4.2.17. La réunion du 24 avril 1990

(288) Une lettre (ou télécopie) confidentielle non datée du secrétariat, qui résume les décisions prises à la réunion Eurofer/Scandinavie du 24 avril 1990, révèle que les prix de base devaient être maintenus.

4.4.2.18. La réunion du 31 juillet 1990

(289) Un rapport confidentiel qui résume les conclusions de la réunion, rédigé par le secrétariat, relève que les prix de base devaient une nouvelle fois être reconduits. Un document non daté, rédigé par le secrétariat et intitulé "Supputation de prix pour le quatrième trimestre de 1990 (Forges CECA)", donne les prix de toutes les catégories (notamment) au Danemark.

4.4.2.19. La réunion du 31 octobre 1990

(290) Le procès-verbal de cette réunion ne mentionne pas le marché danois. L'ordre du jour révèle néanmoins que les prix qui devaient être facturés sur ce marché ont dû être discutés à la réunion. Un tableau non daté, établi par le secrétariat et intitulé

"Supputation de prix pour le premier trimestre 1991 (Forges CECA)", indique les prix des catégories 1, 2a, 2b1, 2b2, 2b3, et 2c sur le marché danois.

5. APPRÉCIATION JURIDIQUE

(291) Comme il a été mentionné au considérant (8), il doit être rappelé que les trois sociétés destinataires de la présente décision ne contestent, dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, ni les faits ni la qualification juridique des faits retenus par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 (44) et qui sont repris dans la présente décision.

5.1. CONSEQUENCES JURIDIQUES DE L'EXPIRATION DU TRAITE CECA

(292) L'expiration du traité CECA le 23 juillet 2002 n'emporte pas l'extinction de la compétence de la Commission de sanctionner les infractions aux règles de concurrence dans les secteurs concernés par ce traité pour les raisons qui sont exposées dans la présente section.

(293) En effet, le traité CECA et le traité CE appartenaient au même ordre juridique. L'ordre juridique unique est fondé sur les traités établissant l'Union européenne et les différentes Communautés (45) et est caractérisé par des objectifs communs (prévus dans l'article 3 du traité sur l'Union européenne, ci-après dénommé "TUE"), des sujets communs (à savoir, les Etats membres et les citoyens de l'Union), des normes et procédures communes (telles que celles prévues aux articles 7, 48 et 49 du TUE) et par des institutions communes. A cet égard, il convient de rappeler qu'une Cour de justice unique et une assemblée parlementaire unique ont été fondées au moment de l'établissement de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique et que le 8 avril 1965, les Etats membres ont conclu un traité qui établit un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes. L'article 3 du TUE déclare que : " L'union dispose d'un cadre institutionnel unique qui assure la cohérence et la continuité des actions menées en vue d'atteindre ses objectifs, tout en développant et en respectant l'acquis communautaire ". Ce cadre institutionnel unique est accompagné d'une fonction publique commune et d'un budget administratif commun (voir en ce sens l'article 20 du traité sur la fusion des exécutifs). De plus, les juridictions communautaires veillent à ce que les dispositions des différents traités soient interprétées de manière cohérente et systématique. (46)

(294) Les relations entre les traités fondateurs sont régies par des dispositions expresses, à savoir l'article 47 du TUE et l'article 305 du traité CE, dont la Cour assure le respect. L'article 305, premier alinéa, du traité CE prévoit que : " les dispositions du présent traité ne modifient pas celles du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier, notamment en ce qui concerne les droits et obligations des Etats membres, les pouvoirs des institutions de cette Communauté et les règles posées par ce traité pour le fonctionnement du marché commun du charbon et de l'acier ". Cette disposition a été interprétée comme établissant une relation de lex generalis/lex specialis entre les traités CE et CECA respectivement (47), relation qui est concevable uniquement s'il s'agit d'un ordre juridique unique.

(295) Or, s'agissant d'un ordre juridique unique, la succession des règles au sein de cet ordre est réglementée par des normes propres à celui-ci. Ainsi, depuis que le traité CECA a expiré, et vu la relation existante entre les deux traités, les secteurs qui relevaient précédemment du traité CECA, de ses dispositions de procédure et de la législation dérivée, sont soumis aux normes qui dérivent du traité CE, qui constitue le régime général applicable.

(296) Aussi, c'est afin de garantir une transition en douceur du traité CECA vers le traité CE que la Commission a adopté la communication sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l'expiration du traité CECA (" la Communication ") (48).

(297) La Communication prévoit à son point 31 que : "Si, dans l'application des règles communautaires de la concurrence à des accords, la Commission constate une infraction dans un domaine relevant du traité CECA, le droit matériel applicable est, quelle que soit la date d'application, celui en vigueur au moment où les faits constitutifs de l'infraction se sont produits. En tout état de cause, sur le plan procédural, le droit applicable après l'expiration du traité CECA sera le droit communautaire".

(298) Ainsi, comme le souligne la Communication, une distinction doit être faite quant aux règles de procédure et aux règles de fond applicables après l'expiration du traité CECA aux infractions commises avant son expiration.

(299) Tout d'abord, en ce qui concerne les questions de procédure, il résulte d'un principe général du droit communautaire tel que repris par la Communication et reconnu par la Cour dans les affaires Salumi et CT Control (49) que les règles de procédure applicables sont celles en vigueur au moment où la mesure en question est adoptée. Aussi, ce principe commande que les règles de procédure du traité CE actuellement en vigueur sont applicables depuis l'expiration du traité CECA (50). La présente décision a donc été adoptée conformément aux règles de procédure du traité CE, en particulier le règlement (CE) n° 1-2003. L'article 7, paragraphe 1, dudit règlement prévoit, conformément à l'article 85 du traité CE, que la Commission est compétente pour la constatation d'infractions par les entreprises aux règles de concurrence. L'article 23, paragraphe 2, dudit règlement lui permet d'imposer des sanctions en présence de telles infractions.

(300) Quant à la compétence de la Commission d'adopter la présente décision, une telle compétence découle de la succession, à l'intérieur de l'ordre juridique unique, de l'article 81 du traité CE, en tant que lex generalis, à l'article 65 du traité CECA, en tant que lex specialis, lors de l'expiration de ce dernier traité. Compte tenu de l'équivalence substantielle de ces règles matérielles à l'intérieur de la limite juridictionnelle posée par le critère de l'affectation du commerce entre Etats membres prévue à l'article 81 du traité CE et de l'identité de l'organe, à savoir la Commission, compétent pour l'application de ces deux règles sous l'empire des deux traités respectifs (51), la succession des normes implique que la Commission est également compétente, au titre de l'article 7, paragraphe 1, et de l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1-2003, pour engager une procédure d'application de l'article 65 du traité CECA, pour constater une infraction audit article, pour mettre fin à l'infraction ainsi constatée et pour imposer une amende afin de sanctionner ladite infraction.

(301) Ensuite, en ce qui concerne les règles de fond, il est un principe général de droit, tel que repris par la Communication et reconnu par la Cour dans les affaires Salumi et CT Control (52) que le droit matériel applicable demeure celui en vigueur au moment où l'infraction a été commise, quelle que soit la date d'application, dans la limite du principe lex mitior reconnu par la Cour dans les affaires Berlusconi et autres, (53) dans l'hypothèse où il est applicable aux procédures d'imposition d'amendes administratives pour des infractions aux règles de concurrence. En effet, en vertu du principe lex mitior, nul ne peut être sanctionné pour un fait qui ne constitue pas un fait illicite selon le jus superveniens. En outre, si le droit en vigueur à l'époque où le fait en question a été commis et le jus superveniens sont différents, l'auteur du fait illicite doit alors bénéficier des dispositions qui lui sont les plus favorables. L'appréciation de la " disposition la plus favorable " doit donc se faire in concreto afin d'établir si l'application des règles de concurrence du traité CE seraient plus favorables aux entreprises destinataires de la présente décision que l'application des règles de concurrence du traité CECA en vigueur au moment où les faits reprochés ont été commis.

(302) L'application de l'article 65 du traité CECA doit donc être comparée in concreto avec l'application de l'article 81 du traité CE y compris les règles matérielles relatives à sa mise en œuvre. L'article 81 du traité CE dispose en effet que sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction, à limiter ou contrôler la production et les débouchés et à répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(303) Aussi, les trois dispositions du traité CECA (54) qui in abstracto pourraient être qualifiées de moins favorables sont:

- l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, qui n'exige pas, contrairement à l'article 81, paragraphe 1, du traité CE, pour qu'il y ait infraction, que l'entente restreignant la concurrence soit susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres;

- l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA, dans la mesure où son champ d'application est plus étroit que celle de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE. Cependant, dans le cas d'espèce, les conditions d'application d'aucune des deux dispositions ne sont remplies; et

- l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, dans la mesure où il prévoit la possibilité d'infliger des amendes au maximum égales au double du chiffre d'affaires réalisé sur les produits ayant fait l'objet de l'entente, tandis que les dispositions du droit CE (à savoir, l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1-2003) prévoient une amende n'excédant pas 10% du chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent, plafond qui pourrait en certains cas être inférieur à celui fixé par le traité CECA.

(304) En l'espèce, comme il est établi à la section 5.2 relative à l'affectation du commerce entre les Etats membres, à la section 5.4 relative à l'inapplicabilité de l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA et la section 5.8.2 relative à la détermination du montant de l'amende, l'application in concreto de chacune des dispositions du traité CECA susmentionnées montre qu'aucune d'elles n'est moins favorable aux personnes morales destinataires de la présente décision que les dispositions correspondantes du droit CE. Aussi, la présente décision applique l'article 65, paragraphes 1 et 5, du traité CECA qui est la principale disposition applicable aux questions de fond, dans la mesure où l'application de l'article 81, paragraphe 1, ne serait pas en l'espèce plus favorable.

(305) Dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, les personnes morales destinataires de la présente décision contestent la compétence de la Commission à appliquer le traité CECA, après son expiration, à des faits constitutifs d'infraction commis avant la date d'expiration dudit traité. Elles arguent que la Commission ne dispose pas de base légale lui donnant compétence pour modifier, par le biais de la Communication, la portée du traité CECA auquel les parties signataires ont entendu mettre fin. Aussi, ces entreprises considèrent que c'est à tort que la Commission se réfère aux arrêts Salumi et CT Control (55) pour fonder sa décision. En outre, selon les entreprises destinataires de la présente décision, l'incompétence de la Commission serait d'autant plus flagrante qu'elle ne poursuit pas une procédure qui aurait valablement été entamée durant la période de validité du traité CECA mais a engagé une procédure plus de trois ans et demi après l'expiration dudit traité.

(306) Comme il a été rappelé au considérant (293), le traité CE et le traité CECA appartiennent au même ordre juridique, l'ordre juridique communautaire, à l'intérieur duquel le traité CECA a constitué, jusqu'au 23 juillet 2002, une lex specialis alors que le traité CE constitue la lex generalis. Il ne fait donc pas de doute que les secteurs qui relevaient du traité CECA jusqu'à son expiration, de ses dispositions de procédure et de la législation dérivée, sont par voie de conséquence soumis aux normes qui dérivent du traité CE, qui constitue en effet le régime général applicable. Il convient de souligner, contrairement à ce que les entreprises destinataires de la présente décision arguent, que la Commission n'a pas, et n'aurait pas pu, établir des règles transitoires par le biais de l'adoption de la Communication dont l'objet se limite simplement à expliquer ex ante, dans un souci de transparence, de quelle façon, sur la base des principes généraux du droit, la transition entre les deux traités s'effectue. Enfin, il convient de souligner, comme le rappelle la Communication, qu'en application des principes généraux du droit, le fait qu'une procédure ait été entamée après ou avant l'expiration du traité CECA est sans conséquence sur l'application des règles applicables aux questions de fond qui, comme cela a été précisé par la Cour dans les affaires Salumi et CT Control (56), demeurent celles applicables au moment où l'infraction a été commise, sauf dans l'hypothèse où la loi nouvelle serait plus favorable comme la Cour l'a reconnu dans les affaires Berlusconi et autres (57). En l'espèce, les règles de fond du traité CECA s'appliquent donc en raison du fait que l'infraction a été commise pendant la durée de validité du traité CECA et dans la mesure où l'application de l'article 81 du traité CE ne serait pas plus favorable. A cet égard, le fait que la procédure ait été entamée avant ou après l'expiration du traité CECA est donc sans incidence.

5.2. L'AFFECTATION DU COMMERCE ENTRE LES ETATS MEMBRES

(307) Comme il est mentionné au considérant (303), si l'entente en question n'était pas susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres, l'application du droit CE serait effectivement plus favorable dans la mesure où il manquerait un élément constitutif de l'infraction, et par conséquent, les comportements imputés aux entreprises ne tomberaient pas sous le coup de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE.

(308) En l'espèce, dans la mesure où les pratiques convenues entre les producteurs de poutrelles en acier étaient susceptibles d'affecter le commerce entre États membres, l'application in concreto du droit CECA n'est pas moins favorable que celle du droit CE.

(309) Premièrement, les ententes en cause ont impliqué une coopération tant au niveau communautaire qu'au niveau national. Au niveau communautaire, la coopération a essentiellement eu lieu lors des réunions du "comité poutrelles", au sein d'un des comités d'Eurofer, ainsi que lors des échanges d'informations détaillées organisés par l'intermédiaire d'Eurofer dans l'ensemble de la Communauté. Les sociétés ayant participé aux activités illicites étaient implantées en Belgique, en France, en Allemagne, en Italie, au Luxembourg, en Espagne et dans les pays scandinaves (58). Les entreprises concernées se sont également réunies d'une part pour examiner, tout particulièrement, la situation sur les marchés français, allemand et italien et, d'autre part, pour coordonner leurs comportements sur ces marchés. Entre 1986 et 1990, de 37 à 38 % du marché CECA des poutrelles en acier étaient produits dans ces trois pays (59).

(310) Deuxièmement, les ententes couvraient pratiquement l'ensemble des échanges dans l'UE et dans l'EEE. Les ententes de partage des marchés, l'attribution de quotas, la fixation d'objectifs de prix et l'échange d'informations à grande échelle ont eu pour effet, ou ont été susceptibles d'avoir pour effet, de détourner automatiquement les courants commerciaux de l'orientation qu'ils auraient autrement connue (60). Le marché des poutrelles en acier est caractérisé par un important volume d'échanges entre les États membres de la CECA à l'époque des faits (voir les tableaux 5 à 12).

(311) Dans ce contexte, la Commission est parvenue à la conclusion que les ententes ont eu un effet sur le commerce entre États membres ou étaient au moins susceptibles d'avoir un tel effet. Par conséquent, le droit matériel applicable est l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

5.3. ARTICLE 65, PARAGRAPHE 1, DU TRAITE CECA

5.3.1. Généralités

(312) L'article 65, paragraphe 1, du traité CECA interdit tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui tendraient, sur le marché commun, directement ou indirectement, à empêcher, restreindre ou fausser le jeu normal de la concurrence et en particulier :

- à fixer ou à déterminer les prix ;

- à restreindre ou à contrôler la production, le développement technique ou les investissements ;

- à répartir les marchés, produits, clients ou sources d'approvisionnement.

5.3.2. Le résumé des infractions

(313) La présente affaire se caractérise par l'existence à l'époque de faits d'un certain nombre de systèmes, d'accords et de pratiques de nature à restreindre la concurrence, impliquant des entreprises de la Communauté européenne du charbon et de l'acier et de la Scandinavie.

(314) Chacune de ces infractions a contribué à produire l'effet global de réduire considérablement la concurrence sur le marché des poutrelles. Eu égard à la diversité (tant en ce qui concerne les participants qu'en ce qui concerne la portée) de ces infractions, il convient toutefois de distinguer trois aspects essentiels qui seront traités séparément :

- la Commission poutrelles et les activités qui y sont liées ;

- les autres mesures restrictives ; et

- les réunions Eurofer/Scandinavie.

(315) Comme il a été mentionné au considérant 7, il convient de souligner que la présente décision tient compte des solutions dégagées par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94 quant à la nature et à la sanction des infractions commises61. Aussi, la présente décision ne retient pas la participation de Trade Arbed SA à un accord de répartition du marché italien et ne retient la participation de Trade Arbed SA à une infraction de fixation des prix sur le marché danois que pour la période allant du 1er janvier 1989 au 16 janvier 1991. Enfin, il doit être précisé que la présente décision, conformément à la décision 94-215-CECA, ne retient pas la participation de Trade Arbed SA à une infraction de fixation des prix sur le marché français dans la détermination du montant de l'amende imposée.

5.3.3. Les activités de la Commission poutrelles

5.3.3.1. La nature et la structure de la Commission

(316) A partir de 1986, au moins, des producteurs et distributeurs de poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier et certaines de leurs associations ont pris part à un certain nombre de systèmes et d'accords, adoptés dans le cadre de réunions régulières et de contacts constants qui avaient lieu à l'époque.

(317) Cette coopération a été mise en œuvre principalement lors des réunions de la Commission poutrelles. Les sociétés suivantes y ont régulièrement assisté et ont participé à la coopération qui en a résulté:

- Peine-Salzgitter

- Thyssen

- Saarstahl

- Trade Arbed SA

- Cockerill Sambre (au moins depuis 1988 et jusqu'à la fin de 1989)

- Unimétal

- British Steel

- Ferdofin (au moins depuis 1987)

- Ensidesa

- les deux sociétés Aristrain (au moins depuis 1987).

(318) Ces réunions servaient à examiner la situation sur les principaux marchés des poutrelles dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Elles étaient préparées ou complétées par des réunions et des accords entre toutes les sociétés susmentionnées, ou certaines d'entre elles, réunions et accords qui étaient consacrés à différents marchés comme suit:

- des réunions concernant le marché italien, qui servaient à fixer les prix, se tenaient régulièrement (considérants (225) à (252)),

- des accords et des pratiques concertées portant sur le marché allemand (considérants (215) à (222)),

- des prix étaient fixés sur le marché français (considérant (223)).

(319) La Commission poutrelles assumait certaines fonctions parfaitement légales, telles la préparation des réunions avec la Commission et l'échange d'informations générales sur le marché. Toutefois, les parties se livraient également aux activités suivantes, qui sont contraires à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA:

- la fixation de prix cibles ;

- l'harmonisation des suppléments ;

- la répartition des marchés ; et

- l'échange d'informations détaillées sur leurs activités respectives, du type qui est normalement considéré comme des secrets d'affaires, de manière à faciliter la coordination de leur comportement.

5.3.3.2. Les accords et pratiques concertées

(320) Les notions d'"accords" et de "pratiques concertées" sont distinctes, mais il est des cas où la collusion présente certains éléments des deux formes de coopération interdite.

(321) Pour qu'une restriction constitue un "accord" au sens de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, il n'est pas nécessaire que l'accord soit destiné à être juridiquement contraignant pour les parties. Il y a accord si les parties parviennent à un concours de volonté sur un plan qui limite ou est de nature à limiter leur liberté commerciale en déterminant les lignes de leur action mutuelle sur le marché ou de leur abstention. Ni sanctions contractuelles ni procédures d'exécution ne sont requises. Il n'est pas non plus nécessaire que cet accord soit fait par écrit.

(322) Une pratique concertée consiste en une forme de coopération entre entreprises qui, sans avoir atteint le stade de la conclusion d'un accord à proprement dit, substitue sciemment une coopération pratique aux risques de la concurrence.

(323) En instituant une notion distincte de pratique concertée, les auteurs du traité CECA ont entendu priver les entreprises de la possibilité d'échapper à l'application de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA en se livrant à une collusion anticoncurrentielle ne constituant pas à proprement parler un accord, par exemple en s'informant mutuellement d'avance de l'attitude que chacune d'elles se propose d'adopter, de façon à ce que chacune puisse moduler son comportement commercial en sachant que ses concurrents agiront de la même façon.

(324) Ce principe a été établi par la Cour dans son arrêt rendu le 14 juillet 1972 dans l'affaire Imperial Chemical Industries Ltd/Commission (62). Cet arrêt porte sur l'interprétation de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE; étant donné que cette disposition est à cet égard identique à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, l'interprétation ici donnée par la Cour (et le Tribunal) à la notion de pratique concertée, vaut également pour l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(325) Il va sans dire que la portée de cette notion est déterminée par les dispositions du traité CECA (en particulier son article 60) qui seront examinées plus loin (considérant (360)).

(326) Dans l'arrêt qu'elle a rendu le 16 décembre 1975 dans l'affaire de l'entente européenne sur le marché du sucre (Suiker Unie e.a./ Commission) (63) , la Cour a déclaré que les critères de coordination et de coopération établis par la jurisprudence de la Cour doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité CE relatives à la concurrence, selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique commerciale qu'il entend suivre sur le marché commun. S'il est exact que cette obligation d'indépendance ne prive pas les opérateurs économiques du droit de s'adapter de manière intelligente au comportement, effectif ou potentiel, de leurs concurrents, elle s'oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre de tels opérateurs, ayant pour objet ou pour effet soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent existant ou potentiel, soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on a décidé - ou que l'on envisage - d'adopter soi-même sur le marché.

(327) Ainsi, un comportement peut relever de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA en tant que "pratique concertée" même lorsque les parties n'ont pas conclu d'accord préalable sur un plan commun définissant leur action sur le marché, mais adoptent des mécanismes collusoires ou y adhèrent, de manière à faciliter la coordination de leur comportement commercial.

(328) Cette définition donnée par la Cour peut s'appliquer en particulier aux hausses de prix mises en œuvre au Royaume-Uni en 1990 (considérants (162), (164) et (168)) et à l'harmonisation des suppléments de dimension à la fin de 1990 (considérants (203) à (207)). Il convient en outre de considérer que, dans une entente complexe, certains participants peuvent à un moment ou l'autre ne pas exprimer leur consentement manifeste à une démarche particulière convenue par les autres, mais indiquer néanmoins leur soutien général au système en question et adapter leur comportement en conséquence.

(329) L'importance de la notion de pratique concertée tient donc moins à la différence entre celle-ci et l'"accord" proprement dit qu'à la différence qui existe entre des formes de collusion tombant sous le coup de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA et de simples comportements parallèles dépourvus d'éléments de concertation.

(330) Cette interprétation a été confirmée par le Tribunal dans les arrêts rendus dans les affaires portant sur le polypropylène (64).

(331) C'est pourquoi la forme exacte prise par les arrangements collusoires n'est nullement déterminante dans la présente affaire.

5.3.3.3. L'objet et l'effet de l'entente

(332) En l'espèce, en se livrant à une collusion permanente, les parties avaient pour objet principal d'ajuster l'offre et la demande ainsi que de relever et d'harmoniser les prix dans les différents États membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, consolidant ainsi les courants d'échange traditionnels.

(333) Eu égard à l'objet manifestement anticoncurrentiel de l'entente, il n'est pas strictement nécessaire, aux fins de l'application de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, de démontrer son effet préjudiciable sur la concurrence.

(334) On peut affirmer que l'effet des pratiques incriminées était loin d'être négligeable. D'abord, les participants englobent les principaux producteurs de poutrelles de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Deuxièmement, on relèvera que les procès-verbaux des réunions consignent souvent l'avis exprimé par les parties selon lequel les différentes hausses de prix ont été obtenues.

5.3.3.4. Les modalités de l'entente et sa mise en œuvre

(1) La Commission poutrelles

(a) Les accords de fixation de prix

- Les accords et pratiques concertées

(335) Des accords sur les prix ont été conclus à diverses occasions en 1986 et 1987 (considérants (120) à (128)).

(336) Lors d'une réunion tenue à une date non déterminée, antérieure au 2 février 1988, la Commission poutrelles est parvenue à un accord visant à relever les prix en Allemagne et en France (considérants (127) à (129)).

(337) D'autres prix cibles (pour le quatrième trimestre de 1988) ont été convenus avant le 25 juillet 1988 (considérant (130)).

(338) Lors de sa réunion du 18 octobre 1988, la Commission poutrelles s'est mise d'accord sur les prix cibles à atteindre pour le premier trimestre de 1989 (considérants (130) à (135) ci-dessus). Le procès-verbal de cette réunion parle à ce propos de "prix estimés", suggérant ainsi qu'il s'agissait des prix que les participants s'attendaient à voir s'établir sur les marchés en cause. On se souviendra toutefois que les réunions de la Commission poutrelles regroupaient les plus gros producteurs de poutrelles dans la Communauté, lesquels représentaient ensemble au moins deux tiers des livraisons dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Une discussion sur les prix futurs entre de telles parties ne peut donc être considérée à première vue comme un comportement neutre n'ayant aucune incidence sur la concurrence entre elles. En outre, il existe suffisamment de preuves indirectes qui confirment que les prix figurant dans le procès-verbal étaient en réalité ceux que les sociétés en cause s'efforçaient d'atteindre d'un commun accord:

- le contexte général prouve que des prix avaient été fixés lors de réunions antérieures de la Commission poutrelles et lors de réunions similaires ;

- les participants à la Commission poutrelles sont parvenus à harmoniser dans une large mesure les prix de base sur les marchés continentaux de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (considérant (141)), résultat qui était à l'ordre du jour a partir de 1987 au moins (considérant (124)) ;

- le procès-verbal fixait dans tous les détails, pour chaque catégorie et chaque marché et également pour les différentes catégories de clients, les prix "prévus" pour le premier trimestre de 1989. Ces précisions n'auraient guère été possibles si les parties en cause n'avaient effectivement établi que des estimations des prix futurs ;

- le libellé du procès-verbal ("les hausses de prix aboutissent au niveau suivant des prix") confirme cette conclusion ;

- le télex adressé par Thyssen à Trade Arbed SA le 22 septembre 1988 (considérant (132)) révèle que les participants de la Commission poutrelles avaient l'intention de relever les prix à raison de montants correspondant aux "estimations" figurant dans le procès-verbal de la réunion du 18 octobre 1988. Ce document prouve en outre que des prix avaient été discutés - et convenus - au préalable entre les participants de la Commission poutrelles ;

- une terminologie similaire ou identique à celle qui était utilisée pour les prix discutés aux réunions Eurofer/Scandinavie dont il est abondamment prouvé qu'ils avaient été fixés (par exemple télex cité au considérant (278)) ;

- des accords ont été pris pour relever les prix en harmonisant et en augmentant les suppléments. Il serait surprenant que, dans ces conditions, les parties auraient laissé au libre jeu de la concurrence le soin de décider du montant des prix de base ;

- des chiffres uniformes sont fournis également pour les marchés comportant plus d'un producteur local (comme l'Allemagne).

(339) Ces considérations s'appliquent également aux discussions suivantes des prix qui ont eu lieu lors des réunions du groupe.

(340) Certaines des parties ont fait valoir qu'elles ne se considéraient pas comme tenues d'appliquer ces prix. Même en admettant cet argument, aucun des procès-verbaux et des autres documents échangés entre les parties ne contient d'indications selon lesquelles ces parties en auraient informé les autres participants. C'est pourquoi les parties en cause ont à tout le moins donné l'impression qu'elles appliqueraient ces prix (65) (arrêt rendu par le Tribunal le 17 décembre 1991, Hercules/Commission, T-7-89, Rec. 1991, p. II-1711, point 232). Il importe de relever que les participants ont déclaré à plusieurs occasions que ces prix avaient été appliqués (considérant (143)).

(341) Dans sa réponse à la communication des griefs, Saarstahl a affirmé que le prix cible indiquait le prix maximal qui pouvait être obtenu eu égard aux conditions objectives prévalant sur le marché. Étant donné que cette déclaration implique que ce prix pouvait être vérifié par chaque société indépendamment sur la base de critères objectifs, il est important de noter que les entreprises ont néanmoins trouvé nécessaire de se réunir pour discuter ces prix.

(342) Lors de sa réunion du 10 janvier 1989, la Commission poutrelles a arrêté des prix cibles pour les livraisons en France, en Allemagne, dans les pays du Benelux et en Italie (considérants (136) à (140)).

(343) Elle a adopté d'autres prix cibles pour le marché italien et le marché espagnol lors de sa réunion du 7 février 1989 (considérant (141)).

(344) Des prix cibles à appliquer au troisième trimestre de 1989 sur les marchés allemands, français, belges/luxembourgeois, italiens et espagnols ont été convenus lors de la réunion du 19 avril 1989 (considérant (142)). Ces prix étaient pratiquement identiques aux prix cibles du deuxième trimestre de 1989, ce qui n'implique pas nécessairement que les entreprises participantes aient éprouvé des difficultés à appliquer ces prix sur les marchés en cause, étant donné que les parties étaient convenues, à la même réunion, de relever les suppléments de dimension.

(345) À la même réunion, British Steel a informé ses concurrents de la hausse des prix qu'elle entendait appliquer sur le marché britannique et les a invités à facturer des prix équivalents pour leurs exportations vers le Royaume-Uni (considérant (146)). On se rappellera qu'au Royaume-Uni, les prix étaient nettement plus élevés que sur les marchés continentaux de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. British Steel a donc exigé que ses concurrents se concertent sur les prix des livraisons au Royaume-Uni. Cette incitation a été faite dans le cadre de la coopération entre les entreprises participant à la Commission poutrelles, coopération qui avait, comme on l'a déjà vu, déjà abouti à la passation d'un certain nombre d'accords de fixation des prix pour les marchés continentaux de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, auxquels British Steel avait été partie. Ces facteurs distinguent l'action de British Steel d'une situation où une société informe un concurrent avec lequel elle n'était pas encore en contact ou avec lequel elle n'avait pas de liens de coopération, des prix qu'elle à l'intention d'appliquer.

(346) Les hausses de prix que British Steel a ensuite mises en œuvre ont été acceptées sans difficultés par le marché britannique (considérant (146)). Il y a donc lieu de conclure que les concurrents de British Steel s'étaient en fait conformés à ses exigences, et s'étaient concertés avec elle sur leurs prix.

(347) Lors de sa réunion du 11 juillet 1989, la Commission poutrelles est convenue que les prix cibles du troisième trimestre de 1989 devaient également être appliqués au quatrième trimestre de cette année en Allemagne (considérant (147)).

(348) Lors de sa réunion du 12 décembre 1989, la Commission poutrelles a décidé d'appliquer au premier trimestre de 1990 les prix cibles qui avaient été utilisés au quatrième trimestre de 1989 (considérant (156)).

(349) Lors de la réunion du 14 février 1990, Unimétal a annoncé qu'elle relèverait le prix de la catégorie 2c en France. Les documents prouvent qu'il ne s'agissait pas d'une décision unilatérale d'Unimétal :

- aussi bien Peine-Salzgitter (à plusieurs occasions) que Trade Arbed SA avaient insisté auprès d'Unimétal pour qu'elle mette en œuvre une hausse (considérants (159) et (160)) ;

- la hausse avait été annoncée à une réunion de la Commission poutrelles où ces concurrents (et d'autres) étaient présents ;

- à la date de la hausse, la situation du marché n'était guère favorable, comme en témoigne le fait que, pendant plus d'un an, les prix de base n'avaient pas été relevés en France. Dans ces conditions, la hausse du prix d'une seule catégorie ne peut s'expliquer par des considérations économiques, mais doit être attribuée à la volonté commune des entreprises en cause d'harmoniser les prix.

(350) Peu après la réunion du 14 février 1990, British Steel a informé Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl et Unimétal des prix à facturer pour les livraisons au Royaume-Uni qu'elle ne considérait pas comme de nature à "perturber" le marché (considérant (161)).

(351) Cette action ne peut être considérée comme un comportement unilatéral de la part de British Steel. Elle s'intègre dans le dialogue constant entre cette société et ses concurrents d'autres États membres, qui se déroulait essentiellement lors des réunions de la Commission poutrelles. Le fait qu'il s'agissait effectivement d'une action concertée, et non d'un comportement unilatéral, est attesté notamment par la correspondance échangée par British Steel et Peine-Salzgitter au sujet des quantités (considérant (88)).

(352) Bien qu'à la réunion de la Commission poutrelles du 21 mars 1990 British Steel ait mentionné certaines offres inférieures à son barème sur le marché britannique, on peut considérer que les entreprises en cause ont effectivement relevé leurs prix suivant la proposition de British Steel. On peut en prendre pour preuve le fait que British Steel n'a relevé ses prix que quelques mois plus tard (considérant (166)). Il n'est pas concevable qu'elle aurait agi de la sorte si les entreprises qu'elle avait contactées n'avaient pas suivi ses suggestions au sujet des prix.

(353) Le 7 juin 1990, British Steel a informé Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Thyssen, Ensidesa, Unimétal et Aristrain des nouveaux prix qu'elle avait l'intention d'appliquer et leur a demandé de respecter ce niveau de prix (considérant (167)). À une date non précisée, British Steel a passé un accord avec Trade Arbed SA qui semble avoir fixé les prix à facturer pour les livraisons au Royaume-Uni (considérant (172)).

(354) Les efforts déployés par British Steel pour convaincre les autres sociétés de respecter son niveau de prix n'ont eu que peu de succès dans un premier temps (considérant (171)). Lors de la réunion de la Commission poutrelles du 10 juillet 1990, British Steel a souligné que le soutien de toutes les sociétés Eurofer exportant vers le Royaume-Uni était "nécessaire pour soutenir la nouvelle structure des prix". Comme British Steel a informé la Commission poutrelles à la réunion du 11 septembre 1990 que la hausse des prix avait été acceptée par les clients au Royaume-Uni, il convient d'en conclure que ce soutien a effectivement été apporté.

(355) British Steel affirme que son comportement est justifié par les règles de prix de l'article 60 du traité CECA, qui prévoient qu'une entreprise doit informer à leur demande les parties intéressées sur ses prix. British Steel ne prétend pas avoir fourni l'information en question à la suite d'une demande de ses concurrents. En tout état de cause, ces informations sur les prix ne peuvent être données qu'une fois que ces prix ont été notifiés à la Commission. De plus, British Steel n'a pas expliqué comment l'article 60 du traité CECA pouvait justifier qu'elle ait insisté auprès de ses concurrents pour qu'ils appliquent ses prix aux exportations vers le Royaume-Uni.

(356) En outre, British Steel invoque les discussions qui ont eu lieu en 1989 avec des fonctionnaires de la Commission sur les modifications proposées aux règles de prix pour affirmer que la Commission connaissait et soutenait l'échange bilatéral ou centralisé des prix. Le procès-verbal, rédigé par Eurofer, de la réunion qui s'est tenue entre des représentants de la Commission et d'Eurofer le 20 juillet 1989 précise bien que les fonctionnaires de la Commission:

"... ont souligné que la proposition présentée devait toujours être considérée comme une "réflexion" et qu'elle devait être complétée et examinée par d'autres services de la Commission."

(357) L'affaire n'est pas allée au-delà du stade de la proposition et ne peut donc être invoquée par British Steel.

- L'article 65, paragraphe 1, du traité CECA

(358) Tous ces accords et pratiques concertées tendaient à restreindre la concurrence et sont par conséquent contraires à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

- Les articles 60 et 46 et suivants du traité CECA

(359) L'article 65 du traité CECA évoque "le jeu normal" de la concurrence dans le marché commun. On sait que cette notion doit être interprétée à la lumière de l'ensemble du traité CECA. Contrairement à ce qu'affirment les parties, aucune des autres dispositions dudit traité ne rend toutefois légal le comportement des parties tel qu'il a déjà été décrit.

(360) L'article 60 du traité CECA fait obligation aux entreprises de rendre publics leurs barèmes de prix et conditions de vente dans les formes prescrites par la Commission. Ces prix et conditions doivent être arrêtés de manière autonome par chaque entreprise. L'article 60 du traité CECA ne permet pas aux entreprises de se concerter et de fixer les prix entre elles.

(361) La plupart des entreprises parties à l'infraction ont affirmé que la communication aux concurrents des prix qu'elles avaient l'intention d'appliquer a été rendue légitime, voire nécessaire, par le principe de transparence établi par les articles 46 et suivants et l'article 60 du traité CECA. Même en admettant l'hypothèse que les parties n'ont fait que se communiquer mutuellement leurs prix futurs (et ne se sont pas concertées pour fixer ces prix), cet argument ne serait pas valable. Le principe de transparence - quelle que soit son importance - ne peut être interprété en ce sens qu'il permettrait - et moins encore nécessiterait- le comportement dont les entreprises ont fait preuve dans le cas d'espèce.

(362) L'article 60 du traité CECA limite effectivement dans une certaine mesure la concurrence entre des entreprises en ce qui concerne les prix en obligeant celles-ci à publier leurs prix et à s'abstenir d'appliquer des conditions inégales à des transactions comparables.

(363) Il importe donc d'autant plus de veiller à ce que la concurrence dont le traité CECA suppose le maintien pour le reste ne soit pas restreinte par des accords ou des pratiques concertées entre entreprises. La création de conditions de marché artificielles, dans lesquelles des normes anormales d'information et de stabilité du marché éliminent certains risques concurrentiels, s'écarte du principe du libre jeu de la concurrence que le traité CECA s'efforce de préserver, d'autant plus lorsque les avantages de cette amélioration artificielle de l'information sont, comme dans le cas présent, réservés aux producteurs et à leurs distributeurs et sont refusés aux acheteurs.

(364) Certaines des entreprises parties à l'infraction ont fait valoir que leurs actions visaient uniquement à combattre un comportement incompatible avec l'article 60 du traité CECA, c'est-à-dire des ventes qui ne respectaient pas les règles de prix établies par cette disposition. Selon cet argument, un accord ayant pour objet exclusif de prévenir des actions qui ne sont pas visées par la notion de concurrence "normale" au sens du traité CECA ne violerait pas l'article 65 du traité CECA. Même si cet argument était admis, les sociétés ne seraient pas en mesure d'en bénéficier. Il est évident que tel n'était pas l'objet des accords de prix entre les parties. En tout état de cause, la mise en œuvre des dispositions de l'article 60 du traité CECA relève de la responsabilité de la Commission. Les entreprises ne peuvent faire abstraction des prix officiels qu'elles ont publiés pour convenir entre elles de prix cibles non publiés.

- La participation des parties

(365) Les prix examinés aux réunions de la Commission poutrelles ou dans leur contexte étaient les prix à appliquer aux fournitures pour le marché considéré. En principe, toutes les entreprises en cause exportaient vers les marchés visés par les accords. La responsabilité des accords et pratiques concertées décrite plus haut doit donc être supportée par toutes les entreprises pour la période au cours de laquelle elles ont participé aux réunions et à la coopération qui y était liée.

(366) Étant donné que l'entente s'est poursuivie pendant un certain nombre d'années, le fait que certains participants puissent avoir été absents de certaines réunions n'a aucune implication pratique. De toute façon, les entreprises non représentées étaient informées des décisions prises aux réunions.

(b) L'harmonisation des suppléments "extras"

- Les accords

(367) Lors de sa réunion du 15 novembre 1988, la Commission poutrelles est parvenue à un accord d'harmonisation des suppléments de qualité. L'accord avait pour objet et pour effet non seulement d'harmoniser les suppléments, mais également de les relever en adoptant le niveau des suppléments de qualité en usage en Allemagne à cette date comme l'objectif à atteindre (considérant (178)).

(368) Lors de sa réunion du 19 avril 1989, la Commission poutrelles est parvenue à un accord d'harmonisation des suppléments de dimension qui avait pour objet non seulement d'harmoniser, mais également de relever les suppléments de dimension (considérants (180) à (184)).

(369) Les documents prouvent que les nouveaux suppléments de dimension ont effectivement été appliqués à compter du 1er octobre 1989. Leur mise en œuvre a toutefois eu certaines répercussions défavorables sur les prix de base.

(370) Lors de sa réunion du 6 juin 1989, la Commission poutrelles est parvenue à un autre accord d'harmonisation des suppléments de qualité (considérant (188)). Cet accord avait pour objet et pour effet non seulement d'harmoniser les suppléments, mais également de les relever.

(371) Lors de sa réunion du 16 mai 1990, la Commission poutrelles est parvenue à un autre accord visant à harmoniser les suppléments de dimension (considérants (193) à (196)). Le fait que ces hausses aient effectivement fait l'objet d'un accord est confirmé par un rapport rédigé par la Walzstahl-Vereinigung ainsi que par la note confidentielle, datée du 17 mai 1990, établie par le secrétariat de la Commission poutrelles (considérants (195) et (197)).

(372) Lors de sa réunion du 4 décembre 1990, la Commission poutrelles est parvenue à un accord d'harmonisation des suppléments de dimension. L'existence de cet accord peut en effet être déduite des circonstances suivantes:

- la question avait été discutée aux réunions de la Commission poutrelles et ailleurs au moins depuis le 11 septembre 1990 (considérants (201) et (174)) ;

- le groupe italien avait présenté dès le 11 septembre 1990 une proposition d'harmonisation des suppléments de dimension (considérant (201)) ;

- en novembre 1990, la Walzstahl-Vereinigung a diffusé une proposition qu'elle souhaitait de toute évidence faire adopter par tous les producteurs de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (considérant (203)) ;

- le procès-verbal officiel de la réunion du 4 décembre 1990 et la télécopie adressée par la Walzstahl-Vereinigung à British Steel le 13 décembre 1990 (considérant (206)) confirment qu'un accord avait été conclu sur l'harmonisation des suppléments de dimension. L'objet de cette démarche, à savoir relever les prix globaux sans augmenter les prix de base, est exposé en termes très clairs dans la télécopie adressée par la Walzstahl-Vereinigung à Ferdofin le 19 décembre 1990 (considérant (176)).

- L'article 65, paragraphe 1, du traité CECA

(373) Étant donné que les suppléments faisaient partie du prix final à payer pour les produits en question sur les marchés continentaux de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, ces accords d'harmonisation des suppléments étaient des accords de fixation des prix contraires à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(374) Les documents prouvent que l'objet de ces accords n'était pas, contrairement à ce qu'on pu affirmer certaines des entreprises en cause, d'améliorer la transparence, mais de relever les prix. Pour rendre le marché plus transparent conformément à l'article 60 du traité CECA, il aurait suffi d'harmoniser les structures (et non les montants proprement dits) des suppléments.

- La participation des entreprises

(375) Les éléments de preuve établissent que toutes les entreprises en cause étaient parties à ces accords. Il en va de même de British Steel. Si les accords ne visaient que les marchés du continent et non le marché britannique (étant donné que les suppléments n'y sont pas appliqués), British Steel a accepté de respecter les nouveaux suppléments pour les livraisons destinées au continent.

(c) Les accords de répartition des marchés

- La "méthodologie Traverso"

(376) Un système par lequel les entreprises participantes se sont efforcées d'ajuster l'offre à la demande a fonctionné pour le quatrième trimestre de 1988 et le premier trimestre de 1990 (considérants (110) à (120)). Il est établi que ce système a été mis en place le 19 juillet 1988 ou peu avant cette date (considérant (110)).

(377) Les entreprises suivantes ont pris part à ce mécanisme: Peine-Salzgitter, Thyssen, Kloeckner, Saarstahl, Unimétal, Ferdofin, Cockerill Sambre, Trade Arbed SA et British Steel (considérant (115)).

(378) Les entreprises en cause ont notifié leurs plans en matière de livraison au président du CDE. Ces chiffres ont ensuite été distribués aux entreprises participantes (considérant (113)). Le président du CDE était en mesure de proposer à n'importe laquelle de ces entreprises des modifications lorsqu'il le jugeait utile.

(379) Le président du CDE considérait les plans de livraison distribués aux participants comme des recommandations dont le niveau ne devait pas être dépassé. Il est établi que les entreprises participantes partageaient ce point de vue, du moins en principe (considérant (117)).

(380) Ces "recommandations" établissaient des chiffres spécifiques pour chaque société et chaque marché concerné. Le président du CDE et Eurofer prenaient contact avec les entreprises qui ne se conformaient pas à ces chiffres et leur enjoignaient de respecter la structure traditionnelle des échanges (considérant (110)).

(381) En conséquence, les participants connaissaient le comportement que leurs concurrents se proposaient d'adopter dans l'avenir en matière de vente.

(382) En se révélant mutuellement leurs plans en matière de livraison et en mettant en pratique les recommandations du président du CDE, les entreprises en cause ont supprimé l'incertitude qui aurait dû normalement être la leur au sujet du comportement futur de leurs concurrents. Par conséquent, ce comportement tend à avoir pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence. Il constitue donc une pratique concertée interdite par l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(383) Le fait que le système décrit n'ait connu qu'un succès limité et qu'il ait fonctionné sur une base volontaire n'infirme pas cette conclusion.

- La France

(384) Lors de sa réunion du 21 septembre 1989, ou aux environs de cette date, la Commission poutrelles est parvenue à un arrangement aux termes duquel les participants se concertaient sur leurs livraisons sur le marché français pour le quatrième trimestre de 1989.

(385) Les sociétés suivantes étaient parties à cet accord: Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, Ferdofin, Cockerill Sambre, Trade Arbed SA, British Steel, Ensidesa et Unimétal (considérants (101) à (109)). Ensidesa n'a pas participé activement à l'élaboration du système, mais s'y est conformée.

(386) Le télex de la Walzstahl-Vereinigung du 26 septembre 1989 qui cite les tonnages que les sociétés participantes avaient l'intention de livrer (considérant (105)) ne prouve pas en lui-même que ces sociétés se concertaient sur leurs ventes sur le marché français. Néanmoins, le fait que ces plans de livraison avaient effectivement fait l'objet d'une concertation et n'étaient pas le résultat de décisions individuelles prises indépendamment par chaque société, est établi à suffisance par les circonstances suivantes:

- Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, British Steel, Cockerill Sambre, Unimétal et Trade Arbed SA avaient eu des discussions avant la réunion du 21 septembre 1989 afin de trouver une clé de répartition pour le marché français (considérants (101) à (102)) ;

- lors de la réunion du 21 septembre 1989, Unimétal avait clairement précisé le total des livraisons au marché français pour le quatrième trimestre de 1989, les quantités qu'elle avait l'intention de livrer elle-même ainsi que les tonnages pour les sociétés non membres d'Eurofer des pays membres et des pays non membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Elle ne laissait donc aucun doute sur le fait que le solde (soit environ 33 000 tonnes par mois) devait être réparti entre les autres sociétés représentées à la Commission poutrelles ;

- la note de la Walzstahl-Vereinigung datée du 25 septembre 1989 (considérant (104)) confirme que des sociétés qui livraient en France se concertaient sur leurs ventes ;

- le libellé de la télécopie expédiée par le secrétariat de la Commission poutrelles le 7 novembre 1989 confirme (considérant (106)) qu'un "système" de livraisons à la France avait été établi pour le quatrième trimestre de 1989.

(387) La plupart des sociétés participantes se sont conformées au plan ou ont même livré des quantités moindres que celles qui étaient envisagées (considérant (108)). Seules trois sociétés (Thyssen, Ferdofin et British Steel) ont livré nettement plus que ce qu'elles avaient annoncé.

(d) L'échange d'informations

- Le monitorage des commandes et des livraisons

(388) Les sociétés suivantes ont procédé à un échange d'informations concernant leurs commandes et leurs livraisons de poutrelles (considérants (60) à (73)): Peine-Salzgitter, Thyssen, Saarstahl, Hoesch, Neue Maxhuette, Trade Arbed SA, Cockerill Sambre, British Steel, Unimétal, Ferdofin, Aristrain et Ensidesa.

(389) Les données échangées dans le cadre du système de monitorage des commandes se rapportaient aux commandes que chaque société avait reçues et qui devaient être livrées en France, en Allemagne, en Belgique/au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Italie, en Espagne, au Portugal et en Grèce/en Irlande/au Danemark. Les chiffres échangés dans le cadre du monitorage des livraisons se rapportaient aux livraisons à l'Allemagne, à la France, au Royaume-Uni, aux pays du Benelux, à l'Italie, à la Grèce/en Irlande/au Danemark, au Portugal et à l'Espagne. Les échanges de statistiques se sont poursuivis pendant une période considérable, commençant en 1984 ou à une date antérieure (monitorage des commandes) et au quatrième trimestre de 1988 (monitorage des livraisons) respectivement. L'échange de données individuelles par société a été suspendu temporairement fin juillet ou début août 1990. L'échange de chiffres individuels des commandes a repris - au moins entre Trade Arbed SA, Ensidesa, Unimétal, Ferdofin et Aristrain - en octobre 1990 au plus tard. Thyssen, Saarstahl, Peine-Salzgitter, Neue Maxhuette et Hoesch ont repris part à l'échange d'informations individuelles par l'intermédiaire de la Walzstahl-Vereinigung en décembre 1990 au plus tard (considérant (73)). L'échange d'informations individuelles sur les livraisons s'est poursuivi au troisième trimestre de 1990 entre Trade Arbed SA, Unimétal, Ensidesa et Aristrain.

(390) Le système d'échange d'informations sur les commandes trouve son origine dans un accord entre ceux qui y participaient. L'établissement du système de monitorage des livraisons trouve son origine dans un accord qui n'a été passé que le 18 octobre 1988 (considérant (64)) et renouvelé plusieurs fois (expressément ou tacitement) lors de réunions de la Commission poutrelles. En ce qui concerne les sociétés participant activement aux travaux de la Commission poutrelles (c'est-à-dire toutes les sociétés participant à cet échange d'informations, à l'exception de Hoesch et de Neue Maxhuette), il existe un grand nombre de preuves qui établissent que ces parties avaient connaissance de cet échange d'informations et l'avaient accepté. Il est établi que Hoesch et Neue Maxhuette connaissaient cet accord et y avaient adhéré parce que toutes les entreprises qui fournissaient des statistiques pour ce monitorage recevaient un exemplaire des tableaux préparés par Usinor Sacilor sur la base de ces informations.

(391) Toutes les sociétés qui fournissaient leurs chiffres aux fins de cet échange d'informations savaient donc qu'ils étaient diffusés à leurs concurrents. Il n'est pas concevable qu'elles auraient fourni leurs statistiques si elles n'avaient pas accepté qu'elles fussent révélées à leurs concurrents.

(392) Afin de pouvoir soutenir efficacement la concurrence sur un marché donné, les sociétés ont besoin d'informations sur celui-ci et sur son évolution. La préparation et la distribution des statistiques de la production, des ventes ou autres à intérieur d'un secteur sont des tâches qui peuvent légitimement être entreprise par les bureaux statistiques et associations professionnelles. La fourniture de ces statistiques peut améliorer la connaissance qu'ont les sociétés du marché sur lequel elles opèrent et donc renforcer la concurrence. C'est pourquoi la Commission n'a pas d'objections à formuler lorsque des associations professionnelles nationales représentant les mêmes intérêts économiques dans des pays différents échangent des statistiques de la production et des ventes du secteur en question sans spécifier les entreprises individuellement (66).

(393) En l'espèce, les parties en cause sont toutefois allées au-delà des limites admissibles. Les chiffres échangés portent sur les livraisons et les commandes reçues par chaque société à livrer sur les différents marchés. Ce type d'informations est généralement considéré comme strictement confidentiel par les entreprises. Ces chiffres des commandes étaient mis à jour chaque semaine et diffusés rapidement parmi les participants.

(394) Les chiffres des livraisons étaient diffusés peu après l'expiration du trimestre considéré. Chacune des sociétés participantes connaissait donc de manière complète et détaillée les livraisons que ses concurrents avaient l'intention d'effectuer ainsi que leurs livraisons réelles. Ces sociétés étaient donc en mesure de s'assurer du comportement que leurs concurrents se proposaient d'adopter ou avaient adopté sur le marché et d'y adapter le leur. Les preuves démontrent (considérant (94)) que c'était justement la raison pour laquelle les parties en cause procédaient à cet échange d'informations.

(395) Ces informations ainsi échangées servaient de base de discussion sur les courants d'échanges (considérants (78) à (96)), qui étaient l'un des points essentiels à l'ordre du jour des réunions de la Commission poutrelles (considérant (91)). Les sociétés, dont les commandes excédaient le niveau "normal", étaient rappelées à l'ordre (par exemple considérant (83)).

(396) Les entreprises de pays dont les exportations dépassaient certains niveaux étaient invitées à expliquer les raisons de ces augmentations (par exemple considérant (83)). À certaines occasions, des entreprises ont été directement critiquées en raison de leurs livraisons à d'autres États membres (considérants (85) et (96)).

(397) Le monitorage des livraisons et le monitorage des commandes se complétaient, améliorant ainsi l'efficacité de cet échange d'informations. Les entreprises participantes suivaient de près ces statistiques et vérifiaient si les livraisons correspondaient aux commandes qui avaient été annoncées par les entreprises. En cas de divergence, les entreprises concernées étaient invitées à s'expliquer (considérants (78) à (96)). Les parties parvenaient ainsi effectivement à assurer un degré remarquable de transparence dans leurs relations.

(398) Cet échange ne se limitait pas à des statistiques purement rétrospectives sans effet possible sur la concurrence. Si tel avait été le cas, les discussions approfondies sur ces chiffres auraient été inexplicables.

(399) Cet échange d'informations a, par conséquent, entraîné l'établissement d'un système de solidarité et de coopération destiné à coordonner les activités commerciales. Les parties prenant part à cet échange d'informations ont ainsi substitué une coopération pratique aux risques normaux de la concurrence, coopération aboutissant à des conditions de concurrence qui ne correspondent pas aux conditions normales du marché. Dans ce contexte, il convient de tenir compte du fait que le marché des poutrelles dans la Communauté est un marché oligopolistique où un nombre très limité d'entreprises offre des produits homogènes aux consommateurs.

(400) L'échange d'informations individuelles entre les entreprises ne constitue pas nécessairement une infraction aux règles de concurrence. Chaque cas doit être examiné séparément et tous les facteurs pertinents, y compris la nature des informations, leur degré d'agrégation et le marché concerné, devraient être pris en compte pour déterminer si l'échange constitue une restriction illégale de la concurrence. L'échange d'informations individuelles qui ne sont pas susceptibles d'influencer le comportement des entreprises sur le marché parce qu'elles n'ont qu'un intérêt historique, peut par conséquent être permis. Eu égard à ses effets préjudiciables sur la concurrence entre les sociétés participantes, un système d'échange d'informations comme en l'espèce n'est pas couvert par la communication de la Commission relative aux accords, décisions et pratiques concertées concernant la coopération entre entreprises (67), en particulier son titre II, point 1, ni d'ailleurs par les lignes directrices sur l'applicabilité de l'article 81 du traité CE aux accords de coopération horizontale (68).

(401) Le fait que ce système d'échange d'informations ait eu pour effet de créer des conditions de marché transparentes n'infirme en aucune manière la conclusion selon laquelle il constitue une infraction à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(402) Le Tribunal (69) a confirmé la décision 92-157-CEE de la Commission du 17 février 1992, UK Agricultural Tractor Registration Exchange (70), dans laquelle la Commission avait considéré que l'échange d'informations détaillées permettant de déterminer le comportement des différentes entreprises dans des oligopoles étroits constituait une infraction aux règles de concurrence. La Commission ne voit toutefois pas d'objections à l'échange d'informations historiques agrégées. En l'espèce, les informations échangées comprenaient des informations précises et à jour concernant les commandes et les livraisons des différentes entreprises.

(403) Aucune des dispositions du traité CECA qui ont pu être invoquées par les entreprises en cause (en particulier les articles 46, 47, 48 et 60) ne requiert ni n'autorise l'échange d'informations sensibles, telles que des statistiques de commandes et de livraisons entre concurrents. Cette "transparence" était en tout état de cause limitée aux producteurs eux-mêmes; les consommateurs (article 48, paragraphe 3, du traité CECA) n'en ont pas tiré avantage.

(404) Une marge d'incertitude quant au comportement que les concurrents se proposent d'adopter sur le marché est essentielle au maintien de la concurrence.

- L'échange d'informations par l'intermédiaire de la Walzstahl-Vereinigung

(405) Les considérations qui précèdent s'appliquent mutatis mutandis à l'échange d'informations auquel participaient Thyssen, Peine-Salzgitter, Hoesch, Neue Maxhuette, Saarstahl et Trade Arbed SA par l'intermédiaire de la Walzstahl- Vereinigung, au moins aux troisième et quatrième trimestres de 1990 (considérants (74) et (77)). Il est inconcevable que la Walzstahl-Vereinigung aurait pu obtenir et diffuser les chiffres des commandes reçues par les sociétés participantes et des livraisons qu'elles ont effectuées sans que celles-ci l'aient su et approuvé. La seule différence entre cet échange d'informations et le système de monitorage mis en œuvre par le secrétariat de la Commission poutrelles résidait dans le nombre plus restreint de participants.

(2) Les pratiques restrictives sur le marché allemand

(406) Comme il a déjà été indiqué, les entreprises suivantes ont pris part aux pratiques restrictives sur le marché allemand:

- Peine-Salzgitter, Thyssen et Trade Arbed SA ont conclu, à partir de décembre 1986, plusieurs accords de fixation des prix (considérants (215) et (216)) ;

- en juin 1987, Peine-Salzgitter et Trade Arbed SA ont assisté à deux réunions dont ont résulté des hausses concertées de prix (considérant (218)) ;

- lors d'une réunion tenue en janvier 1988, Peine-Salzgitter, Trade Arbed SA, Hoesch, Saarstahl et Thyssen ont adopté des recommandations communes en matière de prix et sont convenues des aspects principaux de leur future politique de prix (considérant (219)) ;

- à une date antérieure au 18 avril 1989, des prix ont été fixés par Trade Arbed SA et Hoesch (considérant (221)) ;

- à deux reprises au moins en 1989, plusieurs producteurs sont convenus de restreindre leurs livraisons sur le marché allemand dans le but de le stabiliser. Parmi ces entreprises, seule Peine-Salzgitter peut être reconnue comme ayant pris part à la première de ces pratiques concertées (considérant (222)) tandis que, à la seconde occasion, seules Peine-Salzgitter, Saarstahl et Trade Arbed SA peuvent être considérées comme figurant parmi les entreprises qui étaient d'accord pour limiter leurs livraisons (considérant (223)).

(3) Les pratiques restrictives sur le marché français

(407) En 1987, au moins Unimétal, Cockerill Sambre et Trade Arbed SA se sont concertées sur les prix qu'elles facturaient sur le marché français (considérant (225)).

(4) Les pratiques restrictives sur le marché italien

(408) Á diverses occasions, des accords ou des pratiques concertées ayant pour but de fixer les prix sur le territoire italien ont vu le jour :

- à l'occasion de la réunion du 7 avril 1987, Ferdofin, Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter et Unimétal ont reconduit ou confirmé les prix cibles qui avaient été fixés antérieurement pour le marché italien (considérant (226)) ;

- à une date non précisée, quelque temps après la réunion précitée, d'autres accords ont été conclus en matière de prix (considérants (227) à (231)). Il est établi qu'au moins Peine-Salzgitter et Ferdofin ont pris part à ces accords ;

- lors d'une réunion tenue le 25 novembre 1987, Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Unimétal, British Steel, Aristrain, Ensidesa, Ferdofin, Stefana, Thyssen, Saarstahl et Cockerill Sambre ont conclu un accord sur le prix pour le premier trimestre de 1988 (considérants (232) et (234)) ;

- au cours d'une réunion tenue le 13 mars 1988, Trade Arbed SA, British Steel, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Thyssen, Unimétal, Cockerill Sambre, Ferdofin et Stefana ont fixé les prix pour le deuxième trimestre de 1988 ;

- lors d'une réunion tenue le 3 octobre 1988, d'autres prix cibles ont été adoptés par Trade Arbed SA, British Steel, Peine-Salzgitter, Unimétal et Ferdofin (considérant (235)) ;

- au cours de la réunion du 15 mai 1990, Trade Arbed SA, Peine-Salzgitter, Saarstahl, Unimétal, Thyssen et Ferdofin ont conclu un accord de fixation des prix (considérants (248) et (249)).

(4) Conclusions

(409) Tous ces accords et pratiques concertées tendaient à restreindre la concurrence et sont donc contraires à l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

5.3.4. L'échange d'informations par l'intermédiaire d'Eurofer

(410) Un système distinct permettant l'échange d'informations a été organisé et géré par Eurofer de la manière décrite aux considérants (209) à (214). Eurofer a diffusé des informations sur les livraisons effectuées par les entreprises qui en étaient membres directement ou indirectement.

(411) Eurofer est une association d'entreprises au sens de l'article 65 du traité CECA. Le fait que la plupart de ses membres soient eux-mêmes des associations d'entreprises n'affecte en rien cette conclusion. Afin de pouvoir appliquer avec efficacité et de manière adéquate les règles de concurrence du traité CECA, la Commission se doit de tenir compte de la substance économique plutôt que de la forme juridique de l'affaire. De plus, il convient de signaler qu'une entité dont les membres (tant les entreprises que les associations d'entreprises) sont eux-mêmes soumis à l'article 65 du traité CECA ne peut être soustraite à l'application de cette disposition.

(412) L'article 65, paragraphe 1, du traité CECA mentionne les décisions d'associations d'entreprises qui sont de nature à restreindre le jeu de la concurrence. L'existence d'une telle décision peut être déduite des actes effectifs d'une association d'entreprises, de ses organes ou de ses instances subordonnées.

(413) Conformément aux statuts d'Eurofer, l'échange d'informations est l'une des fonctions que cette association doit remplir (article 2, quatrième tiret). Il y a lieu de considérer qu'Eurofer n'a pas agi sans l'accord exprès ou tacite de ses membres, comme le confirme le fait que les statistiques échangées étaient celles des sociétés qui étaient membres (directs ou indirects) d'Eurofer.

(414) Cette interprétation est conforme à la lettre, à l'esprit et à l'objet de l'article 65 du traité CECA, qui interdit d'une manière générale tous les accords, décisions et pratiques concertées qui tendent à restreindre la concurrence.

(415) La diffusion d'informations par Eurofer tendait à produire les mêmes effets préjudiciables sur la concurrence que les systèmes d'échange d'informations décrits (considérants (393) à (399)). Eurofer a fourni à ses membres (directs ou indirects) des informations relatives aux livraisons effectuées par leurs concurrents. La diffusion de ces informations, habituellement considérées comme des secrets d'affaires, a permis à chaque entreprise de déterminer quel comportement ses concurrents allaient adopter sur chaque marché. Cet échange d'informations a donc entraîné la substitution d'une coopération pratique aux risques concurrentiels ordinaires et a créé des conditions de concurrence qui ne correspondaient pas aux conditions normales du marché. Ce comportement est incompatible avec les dispositions de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

5.3.5. Les activités du groupe Eurofer/Scandinavie

5.3.5.1. La nature et la structure du groupe

(416) Á partir de 1986 au plus tard, des producteurs et distributeurs de poutrelles de la Communauté européenne du charbon et de l'acier et de Scandinavie, ainsi que certaines de leurs associations, ont pris part à une série d'accords ou de pratiques concertées décidés dans le cadre d'un système fondé sur des réunions régulières et un contact permanent.

(417) Les entreprises et les associations dont les noms suivent ont régulièrement assisté à ces réunions et/ou pris part aux accords et pratiques concertées:

- Peine-Salzgitter

- Thyssen

- Saarstahl (à partir de 1988)

- Trade Arbed SA

- Steelinter

- Unimétal

- British Steel

- Norsk Jernverk

- Ovako (au moins depuis le 1er septembre 1988)

- SSAB (jusqu'au 31 août 1988)

- Smedjebacken/Fundia Steel AB.

(418) Ces réunions portaient sur la situation sur les marchés des laminés marchands et des poutrelles en Scandinavie, c'est-à-dire en Norvège, en Suède, en Finlande et au Danemark. Comme il est mentionné aux considérants (7) et (38), la présente décision ne prend en considération l'infraction sur le marché danois que pour une période de 24 mois à compter du 1er janvier 1989.

(419) Le plan général des participants était de se réunir et de parvenir à un accord sur les prix des exportations vers le Danemark. En conséquence de ces contacts réguliers, ces arrangements ont été continuellement modifiés ou mis à jour de manière à tenir compte de l'évolution de la situation et des réactions du marché.

(420) La Commission estime que l'ensemble des programmes adoptés et des arrangements conclus dans le cadre d'un système de réunions régulières et institutionnalisées entre les producteurs visés au considérant (285) constituait un "accord" unique et permanent au sens de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(421) Il n'est pas nécessaire, pour qu'une restriction constitue un "accord" au sens de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, que les parties aient voulu passer un accord juridiquement contraignant. Un accord existe dès lors que les parties s'entendent sur un plan qui limite, ou est de nature à limiter, leur liberté commerciale en déterminant les lignes de leur action ou de leur abstention réciproque sur le marché. Aucune sanction contractuelle ni procédure d'exécution ne sont requises et l'accord ne doit pas nécessairement être écrit.

(422) Dans la présente affaire, en souscrivant à un plan commun de régulation des prix sur le marché des poutrelles, les entreprises en cause ont pris part à un accord-cadre qui s'est concrétisé par une série de sous accords plus détaillés, élaborés au fil du temps, qui seront résumés plus loin.

(423) Le fait que certaines entreprises n'aient pas assisté à toutes les réunions n'empêche pas de conclure à l'existence d'un accord unique et permanent. Cette entente s'étant poursuivie pendant un certain nombre d'années, il est indifférent que certains participants aient pu manquer certaines réunions. En tout état de cause, les absents étaient informés des décisions qui y avaient été prises.

5.3.5.2. Les accords et pratiques concertées

(424) La Commission estime que la mise en œuvre de l'entente susmentionnée constitue un "accord" au sens de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

(425) Les notions d'"accord" et de "pratique concertée" sont distinctes, mais il est des cas où la collusion présente certains éléments des deux formes de coopération interdite. Comme il est indiqué aux considérants (310) et (311), l'importance de la notion de pratique concertée tient moins à la différence entre celle-ci et un "accord" proprement dit qu'à la différence qui existe entre des formes de collusion tombant sous le coup de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA et un simple comportement parallèle dépourvu d'éléments de concertation. C'est pourquoi la forme exacte prise par les ententes collusoires n'est nullement déterminante dans la présente affaire.

5.3.5.3. L'objet et l'effet de l'entente

(426) Dans la présente affaire, en instituant un système de réunions régulières et en se livrant à une collusion permanente, les parties avaient pour objectif fondamental de convenir des prix à facturer pour les livraisons au marché danois.

(427) En poursuivant cet objectif, les parties ont tenté d'imposer au marché un mode d'organisation substituant au libre jeu de la concurrence une collusion institutionnalisée et systématique entre producteurs et distributeurs.

(428) Eu égard à l'objet manifestement anticoncurrentiel de l'accord, il n'est pas strictement nécessaire, aux fins de l'application de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, de démontrer son effet préjudiciable sur la concurrence.

(429) La Commission reconnaît que l'effet des pratiques en question a diminué vers la fin de la période considérée; l'année 1990 en particulier est marquée par des efforts visant à éviter un dérapage des prix. Toutefois, tout indique que l'entente a néanmoins produit un effet appréciable sur les conditions de la concurrence.

(430) D'abord, les participants comprennent les principaux producteurs de poutrelles de la Communauté européenne du charbon et de l'acier exportant vers le Danemark et tous les producteurs importants de poutrelles de la Norvège, de la Suède et de la Finlande. Ensuite, il convient de relever qu'il est régulièrement indiqué dans les procès-verbaux des réunions que les parties estiment que les différentes hausses de prix ont été obtenues.

5.3.5.4. Les modalités de l'entente et sa mise en œuvre

(431) Il est établi qu'au cours de la période considérée des prix cibles ont été régulièrement fixés lors des réunions du groupe Eurofer/Scandinavie pour les poutrelles vendues sur le marché danois.

(432) Il semble que ce sont les entreprises établies sur le territoire de la Communauté européenne du charbon et de l'acier qui ont, d'une manière générale, joué le rôle le plus actif dans cette coopération (considérants (254) à (259)). Cela est confirmé par le fait qu'à plusieurs reprises (voir par exemple, les réunions du 30 juillet et du 28 octobre 1986) il a été convenu que, pour toutes les catégories ou certaines d'entre elles, les prix seraient fixés par les entreprises établies sur le territoire de la Communauté européenne du charbon et de l'acier après la réunion en cause. En acceptant cette méthode, tous les participants aux réunions Eurofer/Scandinavie ont marqué leur accord sur les prix fixés par la suite.

(433) Les entreprises scandinaves font valoir que les prix ont effectivement été fixés ou dictés par les entreprises d'Eurofer. Bien qu'il soit évident que les entreprises d'Eurofer exerçaient une influence considérable, cet argument semblerait sous-estimer le rôle des participants scandinaves. Les éléments de preuve démontrent que les prix étaient fixés par les sociétés membres d'Eurofer et les producteurs scandinaves agissant de concert (par exemple considérants (259) et (267)).

(434) Les procès-verbaux des réunions organisées au cours des dernières années de la période considérée semblent avoir été rédigés avec une certaine prudence et emploient des termes tels que "prévisions" lorsqu'il est question de prix. De toute évidence, cependant, ces prétendues "prévisions" étaient en réalité des prix cibles. Cette conclusion est étayée par les paroles du président de ces réunions lui-même (considérant (288)).

(435) Á l'audition tenue du 11 au 14 janvier 1993, le représentant de SSAB et d'Ovako a confirmé que les prix convenus aux réunions étaient les prix à appliquer par les participants.

5.4. INAPPLICABILITE DE L'ARTICLE 65, PARAGRAPHE 2, DU TRAITE CECA

(436) En vertu de l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA, la Commission autorise les accords de spécialisation, les accords d'achat ou de vente en commun ou ceux qui sont strictement analogues, quant à leur nature et à leurs effets, s'ils remplissent certaines conditions. Dans la présente affaire, les accords et pratiques concertées n'auraient jamais réuni les conditions nécessaires pour obtenir cette autorisation, puisqu'ils n'appartiennent pas aux catégories d'accords qui peuvent en bénéficier. Ils ont au contraire été élaborés dans le but de répartir les marchés et de fixer ou de déterminer les prix. Toutes ces activités sont incompatibles avec le marché commun du charbon et de l'acier.

(437) En outre, il doit être souligné qu'aucune demande n'a été faite pour l'un quelconque des accords ou arrangements visés par la présente décision. De plus, aucune des parties n'a jusqu'à ce jour tenté de justifier son comportement en soutenant qu'il pouvait être autorisé au regard de l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA.

(438) Les possibilités d'exempter (ou d'autoriser) des accords sont plus limitées selon l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA que selon l'article 81, paragraphe 3, du traité CE. L'article 81, paragraphe 3, du traité CE, qui est d'application directe dans les Etats membres, n'exclut pas a priori certains types d'accords de son champ d'application. En principe, tous les accords restrictifs qui remplissent cumulativement les quatre conditions de l'article 81, paragraphe 3, du traité CECA, bénéficient de l'exemption. L'article 81, paragraphe 3, du traité CE est donc in abstracto plus favorable que l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA. Il est donc aussi approprié d'apprécier si, en l'espèce, l'article 81, paragraphe 3, du traité CE serait plus favorable que l'article 65, paragraphe 2, du traité CECA.

(439) Selon l'article 81, paragraphe 3, du traité CE, les dispositions de l'article 81; paragraphe 1; du traité CE peuvent être déclarés inapplicables aux accords, décisions ou pratiques concertées qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs ni donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.

(440) En l'espèce, il ne fait pas de doute que les accords et pratiques concertées énumérés dans la présente décision ont été élaborés dans le but de répartir les marchés et de fixer ou de déterminer les prix et donc de restreindre la concurrence. Ils n'ont ni pour objet ni pour effet de contribuer à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique. Aussi, ces accords et pratiques constituent, par définition, les restrictions les plus graves à la concurrence, restrictions dont bénéficient seulement les participants et non les consommateurs. Enfin, il doit être noté qu'à aucun moment de la procédure les personnes morales destinataires de la présente décision n'ont avancé d'argument suggérant que les conditions de l'article 81, paragraphe 3; du traité CE étaient remplies. Il n'est donc pas possible de conclure que les critères d'exemption de l'article 81; paragraphe 3; du traité CE sont remplis dans le cas d'espèce.

5.5. LE PRINCIPE NON BIS IN IDEM

(441) Dans l'affaire PVC II71, la Cour a jugé que : " 61... Le principe non bis in idem interdit uniquement une nouvelle appréciation au fond de la matérialité de l'infraction, qui aurait pour conséquence l'imposition soit d'une seconde sanction, s'ajoutant à la première, dans l'hypothèse où la responsabilité serait une nouvelle fois retenue, soit d'une première sanction, dans l'hypothèse où la responsabilité, écartée par la première décision, serait retenue par la seconde. 62. En revanche, il ne s'oppose pas en soi à une reprise des poursuites ayant pour objet le même comportement anticoncurrentiel lorsqu'une première décision a été annulée pour des motifs de forme sans qu'il ait été statué au fond sur les faits reprochés, la décision d'annulation ne valant pas alors "acquittement" au sens donné à ce terme dans les matières répressives. Dans un tel cas, les sanctions imposées par la nouvelle décision ne s'ajoutent pas à celles prononcées par la décision annulée, mais se substituent à elles. "

(442) En l'occurrence, la décision 94-215-CECA sanctionnant Arbed SA a été annulée par la Cour aux motifs que la Commission ne lui a pas adressé de communication des griefs préalablement à la décision la sanctionnant, la Cour ne s'étant pas prononcée sur le fond du litige quant à la participation d'Arbed SA à l'infraction. La Cour ne s'est donc prononcée que sur l'irrégularité de la procédure pour annuler la décision 94-215-CECA et non sur le fond de l'affaire. Aussi, conformément à la solution dégagée par la Cour dans l'arrêt PVC II, il ne fait aucun doute que la Commission est libre d'adopter une nouvelle décision sans enfreindre le principe non bis in idem.

(443) Dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, les personnes morales destinataires de la présente décision contestent le pouvoir de la Commission d'adopter une nouvelle décision afin de corriger l'irrégularité de procédure commise lors de l'adoption de la décision 94-215-CECA. En outre, elles considèrent que la Commission ne peut adopter une nouvelle décision qui sanctionnerait Arbed SA puisque la Commission s'est déjà prononcée sur le fond du litige dans sa décision 94-215-CECA en ne retenant que la seule participation de Trade Arbed, et non d'Arbed SA, aux divers accords et pratiques sanctionnés.

(444) Quant aux objections susmentionnées, il convient de souligner tout d'abord que l'annulation de la décision 94-215-CECA par la Cour ne constitue pas un " acquittement " au sens de l'arrêt PVC II. En effet, la Cour ne s'est prononcée que sur le non-respect par la Commission de son obligation de communiquer des griefs à l'entreprise à l'encontre de laquelle elle envisageait d'infliger une sanction et non sur le fond du litige, quant à la participation d'Arbed SA aux faits reprochés. Aussi, il ne fait aucun doute que la Commission peut, conformément à la jurisprudence PVC II, adopter une nouvelle décision de sanction à l'encontre notamment d'Arbed SA. Ensuite, il convient de faire remarquer que, à l'exception des griefs que le Tribunal a annulés dans l'arrêt T-137-94, la présente décision ne modifie pas l'appréciation juridique sur la matérialité de l'infraction que la Commission avait retenue dans sa décision 94-215-CECA. Ainsi, la Commission continue de considérer que " seule Trade Arbed SA a pris part aux divers accords et pratiques ", en ce sens que seuls des représentants de cette société ont assisté aux réunions, partagé des informations, etc. La responsabilité de cette participation directe et concrète de Trade Arbed SA à l'infraction peut toutefois être étendue à toute l'entreprise au sens de l'article 81 du traité CE dont cette entité juridique était membre à l'époque des faits, et notamment à Arbed SA en tant que société-mère de Trade Arbed SA, dont elle contrôle 100% du capital et sur laquelle elle exerçait effectivement une influence déterminante. De manière générale, et étant donné la marge d'appréciation dont dispose la Commission, en cas d'infractions commises par des unités économiques complexes, pour déterminer les destinataires d'une décision infligeant des amendes (72), la condamnation d'un membre d'une unité économique ne saurait être interprétée comme un acquittement d'autres membres du groupe auxquels la responsabilité de l'infraction aurait également pu être imputée. De toute manière, le fait que la décision 94-215-CECA ait été destinée à Arbed SA démontre on ne peut plus clairement que la Commission considérait déjà en 1994 que la responsabilité de l'infraction pouvait être imputée à, entre autres, Arbed SA, et exclut manifestement que cette décision puisse valoir acquittement de cette dernière personne morale. Aussi, en adressant la présente décision notamment à Arbed SA en raison des agissements fautifs de sa filiale Trade Arbed SA qui a seule participé aux infractions et en la condamnant solidairement au paiement de l'amende en raison de l'influence déterminante qu'elle a exercée sur Trade Arbed SA, la Commission ne fait que corriger l'irrégularité de procédure initialement commise sans opérer de revirement de son appréciation quant au fond qui irait à l'encontre des intérêts des sociétés destinataires.

5.6. PRESCRIPTION

(445) Dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, les personnes morales destinataires de la présente décision font valoir que ni Arbed SA ni Profil Arbed SA ne peuvent être sanctionnées dans la mesure où aucun des actes de poursuite intentés à l'encontre de la société Trade Arbed SA ne " saurait être considéré comme impliquant l'existence d'une procédure à l'encontre d'Arbed SA". Elles soutiennent par conséquent que ni Arbed SA ni Profil Arbed SA ne peuvent être sanctionnées dans la mesure où les poursuites sont prescrites à leur égard. Trade Arbed SA prétend, par contre, que " le droit de la Commission de prononcer des amendes ... à l'encontre de cette société est ... doublement prescrit en vertu des règles de prescription tant CECA que CE, d'une part par l'expiration d'un délai de cinq ans depuis le dernier acte d'instruction et d'autre part, et en tout cas, par l'expiration d'un délai de dix ans depuis la date d'infraction. "

(446) Afin de déterminer les règles de prescription applicables à la présente affaire en matière d'imposition d'amendes, il n'est pas nécessaire d'établir si les règles de prescription sont de procédure, avec pour conséquence que les dispositions en la matière du règlement (CE) n° 1-2003 seraient applicables, ou si les règles de prescription sont de fond, avec pour conséquence que les dispositions de la décision 715-78-CECA de la Commission du 6 avril 1978 relative à la prescription en matière de poursuites et d'exécution dans le domaine d'application du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier (73) seraient applicables, dans la mesure où elles sont identiques en substance. En effet, ces deux actes prévoient tous deux en substance que la prescription en matière d'imposition d'amendes est de cinq années à compter du jour où l'infraction a pris fin pour les infractions continues ou répétées. La prescription est interrompue par toute acte d'instruction ou de poursuite entrepris à l'égard de l'ensemble des entreprises ayant participé à l'infraction et l'interruption de la prescription prend effet le jour où l'acte est notifié à au moins une entreprise ou association d'entreprises ayant participé à l'infraction. Les demandes de renseignements écrites, les mandats écrits d'inspection, l'engagement d'une procédure par la Commission, une communication des griefs constituent des actes interruptifs de prescription. Conformément à l'article 3 de la décision 715-78-CECA, la prescription est suspendue à l'égard de l'entreprise ayant exercé un recours devant la Cour et pendant toute la durée d'une procédure pendante devant elle. Enfin, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai légal de dix années arrive à expiration sans que la Commission ait infligé une amende ou une astreinte. Cependant, la prescription de dix années est prorogée de la période pendant laquelle la prescription est suspendue en raison d'un recours exercé devant la Cour.

(447) Comme il a déjà été rappelé à la section 3, la Commission a entrepris des vérifications dans le secteur des poutrelles en acier le 16, 17 et 18 janvier 1991, date à laquelle elle considère que l'infraction a pris fin. Le 6 février 1992, la Commission a adressé à Trade Arbed SA une communication des griefs. Des lettres de demandes de renseignements ont été envoyées à Trade Arbed SA et au service juridique d'Arbed SA notamment le 26 novembre 1993 demandant à Arbed SA de lui communiquer le chiffre des ventes réalisées par Arbed SA dans la CECA de janvier à septembre 1993. Le 16 février 1994, la Commission a adopté la décision 94-215-CECA infligeant une amende à Arbed SA pour la participation de Trade Arbed SA aux infractions à l'article 65 du traité CECA. Le 8 avril 1994, Arbed SA a introduit un recours contre cette décision devant le Tribunal. Le 11 mars 1999, le Tribunal a rendu son arrêt dans l'affaire T-137-94 Arbed SA/Commission. Le 11 mai 1999, Arbed SA a formé un pourvoi contre cet arrêt auprès de la Cour. Le 20 octobre 2003, la Cour a annulé l'arrêt T-137-94. Le 8 mars 2006, la Commission a décidé d'ouvrir une nouvelle procédure à l'encontre du comportement anticoncurrentiel qui avait fait l'objet de la décision 94-215-CECA en adressant à Arbed SA, Trade Arbed SA et Profil Arbed SA, une nouvelle communication des griefs qui a conduit à l'adoption de la présente décision.

(448) Au vu ce qui précède, la Commission constate qu'Arbed SA ne peut se prévaloir de la prescription dans la mesure où l'adoption de la présente décision n'intervient pas en dehors du délai dans lequel la Commission peut infliger une amende conformément aux dispositions rappelées au considérant 446. En effet, sans parler des actes d'instruction et de poursuite adressés à d'autres entreprises, les lettres de demande d'information envoyées à Arbed SA le 26 novembre 1993 et la décision 94-215-CECA constituent chacun des actes interruptifs de prescription faisant courir à nouveau le délai de prescription à l'égard, de toutes les sociétés qui composent l'unité économique chapeautée par Arbed SA. Ensuite, le délai de prescription a été suspendu, conformément à l'article 3 de la décision 715-78-CECA, une première fois par l'introduction, le 11 mai 1994, d'un recours par Arbed SA contre la décision 94-215-CECA devant le Tribunal, qui a rendu son arrêt le 11 mars 1999, puis, une seconde fois, par l'introduction, le 11 mai 1999, d'un pourvoi devant la Cour, qui a rendu son arrêt le 20 octobre 2003. Postérieurement à cette suspension, la prescription de cinq ans a de nouveau été interrompue lorsque la Commission a adopté sa communication des griefs le 8 mars 2006. Ensuite, il convient de constater que la présente décision est adoptée dans le délai de prescription de dix années qui court à compter de la fin de l'infraction en 1990, celui-ci ayant été suspendu pendant les dix années qu'ont duré les procédures successivement engagées par Arbed SA devant le Tribunal et la Cour. En conséquence, et contrairement à ce que les parties soutiennent dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, il ne fait pas de doute qu'Arbed SA ne peut se prévaloir de la prescription en matière d'imposition d'amendes.

(449) En outre, les règles en matière de prescription ne font pas non plus obstacle à l'imposition d'une amende à Trade Arbed SA dans la mesure où les recours exercés par Arbed SA devant le Tribunal et la Cour contre la décision 94-215-CECA ont aussi suspendu le délai de prescription à l'égard de Trade Arbed SA. En l'espèce, le dernier acte interruptif de prescription à l'égard de Trade Arbed SA est la communication des griefs adressée le 8 mars 2006, après que le délai de prescription eut été suspendu pendant toute la durée des procédures engagées par Arbed SA devant le Tribunal et la Cour.

(450) En effet, ainsi que l'article 3 de la décision 715-78-CECA et l'article 25 du règlement (CE) n° 1-2003 le prévoient, la prescription en matière de poursuites est suspendue aussi longtemps que la décision de la Commission fait l'objet d'une procédure pendante devant la Cour.

(451) La Commission considère donc que la suspension de la prescription résultant de l'engagement par une entreprise de procédures devant le Tribunal et la Cour s'applique tant à l'entité juridique partie à l'instance qu'à toutes les autres entités juridiques qui font partie de la même unité économique, quelle que soit l'entité juridique qui a engagé ces procédures. A cet égard, il convient tout d'abord de remarquer que l'article 3 de la décision 715-78-CECA ne s'oppose pas à une telle interprétation. Ensuite, il convient de souligner que, s'il en était autrement, la Commission ne serait pas en mesure de corriger les erreurs de procédure qu'elle pourrait commettre en dépit du droit d'adopter une nouvelle décision que la Cour lui a expressément reconnu dans l'affaire PVC II. En effet, dès lors que la décision 94-215-CECA faisait l'objet d'un recours devant le Tribunal, puis devant la Cour, la Commission aurait été mal venue, en vertu du principe de bonne administration, d'adopter une nouvelle décision afin de sanctionner Trade Arbed SA alors que les procédures engagées par Arbed SA étaient pendantes. Cela est d'autant plus flagrant qu'au cours de la procédure Arbed SA ne s'est pas contentée de soulever uniquement des moyens de procédure mais a également soulevé des moyens de fond quant à la participation de Trade Arbed SA aux infractions reprochées. Il ne fait donc pas de doute que Trade Arbed SA ne peut, pour les mêmes raisons qu'Arbed SA, bénéficier de la prescription en matière d'imposition d'amendes.

(452) Enfin, il convient de relever que les arguments exposés aux considérants 449 et suivants concernant Arbed SA s'appliquent nécessairement à Profil Arbed SA, qui est le successeur économique d'Arbed SA.

5.7. DESTINATAIRES

(453) A la suite de l'annulation de la décision 94-215-CECA par la Cour pour les motifs rappelés dans la section 3 de la présente décision, la Commission a corrigé l'erreur de procédure commise en adressant le 8 mars 2006 une communication des griefs non seulement à l'entité juridique qui avait directement participé à l'infraction, à savoir Trade Arbed SA, mais aussi aux deux autres entités juridiques membres de la même unité économique, à savoir Arbed SA et Profil Arbed, à qui le comportement de Trade Arbed SA peut être imputé.

(454) En effet, la communication des griefs du 8 mars 2006 a été adressée à Arbed SA alors que cette dernière n'avait pas été destinataire de la communication des griefs du 6 février 1992. Ensuite, la communication des griefs du 8 mars 2006 a été adressée à Trade Arbed SA afin de remplacer celle qui lui avait été adressée le 6 février 1992. Enfin, la communication des griefs du 8 mars 2006 a été adressée à Profil Arbed SA qui est le successeur économique d'Arbed SA en ce qui concerne ses activités industrielles et commerciales dans le domaine des poutrelles.

(455) Les entreprises destinataires de la présente décision sont donc : Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA), Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA) Arcelor Profil Luxembourg SA (ex-Profil Arbed SA) pour les raisons exposées dans la présente section.

5.7.1. Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA)

(456) Selon les informations communiquées le 19 juillet 2006 par les entreprises destinataires de la présente décision, Trade Arbed SA a changé de raison sociale le 5 juillet 2006 pour devenir Arcelor International SA, en conservant ses fonctions de société commerciale chargée de la distribution, etc., du groupe Arcelor.

(457) Arcelor International SA est donc destinataire de la présente décision en raison de la participation directe et concrète de Trade Arbed SA à l'infraction.

5.7.2. Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA)

(458) A titre préliminaire, il convient de noter que depuis la concentration d'Arbed SA, d'Usinor et d'Aceralia au sein du groupe Arcelor en 200174, le groupe chapeauté par Arbed SA n'existe plus aujourd'hui sous la forme qui était la sienne à l'époque des faits reprochés.

(459) Conformément aux renseignements transmis à la Commission par Arbed SA le 19 juillet 2006, Arbed SA a changé de dénomination le 31 mars 2006 pour devenir Arcelor Luxembourg SA, en conservant ses fonctions de société commerciale chargée de la distribution, etc., du groupe Arcelor. Arbed SA est une filiale à 99,73% d'Arcelor SA.

(460) Selon une jurisprudence constante de la Cour75, en présence d'une détention par une société-mère de la totalité du capital de sa filiale, la Commission est en droit de considérer que la société-mère a exercé effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.

(461) S'agissant des conditions de fond justifiant une telle imputation de responsabilité, il convient de relever tout d'abord qu'à l'instar de l'interdiction de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE, celle de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA s'adresse notamment à des "entreprises". Or, il résulte de la jurisprudence du Tribunal (voir arrêt Shell/Commission, précité) que la notion d'entreprise au sens de l'article 81 du traité CE doit être comprise comme désignant une entité économique consistant en une organisation unitaire d'éléments personnels, matériels et immatériels poursuivant de façon durable un but économique déterminé, organisation pouvant concourir à la commission d'une infraction visée par cette disposition (voir également arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Hydrotherm, 170-83, Rec. p. 2999, point 11, et arrêt du Tribunal du 12 janvier 1995, Viho/Commission, 102-92. Rec. P. II-00017 point 50, confirmé par arrêt de la Cour du 24 octobre 1996, Viho/Commission, C-73-95 P, Rec. p. I-5457, points 15 à 18).

(462) En l'espèce, Trade Arbed SA est une filiale à 100% d'Arbed SA. Lors de l'audience devant le Tribunal dans l'affaire T-137-94, l'avocat de la requérante a précisé que Trade Arbed SA est une société de vente qui distribue les produits sidérurgiques, et notamment les poutrelles, produits par Arbed SA. Trade Arbed SA intervient soit comme commissionnaire, auquel cas la vente est facturée directement par Arbed SA au client, soit comme commissionnaire mandataire, auquel cas la vente est facturée au client par Trade Arbed SA, pour le compte d'Arbed SA. Dans les deux cas, Trade Arbed SA perçoit une commission sur le produit de la vente. De plus, il y avait en l'espèce des relations commerciales directes entre Arbed SA et les clients. En outre, le siège social d'Arbed SA était situé à la même adresse que celle de Trade Arbed SA, et les deux sociétés disposaient du même standard téléphonique et du même numéro de télex. L'avocat de Trade Arbed SA s'est indifféremment présenté comme étant le conseil d'Arbed SA et de Trade Arbed SA. Deux représentants d'Arbed SA ont assisté Trade Arbed SA à l'audition administrative qui a eu lieu du 11 au 14 janvier 1993. (76) Le comportement de Trade Arbed SA sur le marché des poutrelles dépendait par conséquent de sa société-mère, Arbed SA. Au moment où les infractions ont été commises, les installations de production de poutrelles en acier, qui sont le produit en cause dans la présente affaire, appartenaient à Arbed SA. Il ne fait donc pas de doute qu'Arbed SA exerçait une influence déterminante sur Trade Arbed SA.

(463) Dans leurs réponses respectives à la communication des griefs du 8 mars 2006, les personnes morales destinataires de la présente décision soutiennent que la Commission ne rapporte pas la preuve de la participation d'Arbed SA, qui justifierait que cette dernière soit sanctionnée. En outre, elles considèrent que sanctionner Trade Arbed SA et Arbed SA dans la présente décision conduirait à formuler des conclusions " totalement opposées et irréconciliables " avec celles tirées par la Commission dans la décision 94-215-CECA.

(464) A cet égard, il suffit de rappeler que le seul fait que Trade Arbed SA ait participé de façon directe et concrète à l'infraction n'exclut pas la responsabilité de sa société-mère qui exerçait une influence déterminante sur elle. Ensuite, il convient de souligner que la Commission conclut dans la présente décision que si seule Trade Arbed SA a directement pris part auxdites infractions, il n'en demeure pas moins que, comme elle l'a déjà conclu dans la décision 94-215-CECA, le comportement de Trade Arbed SA peut être imputé à Arbed SA en raison de l'influence déterminante qu'Arbed SA a exercé sur elle. Aussi, les conclusions de la Commission dans la présente décision ne sont nullement opposées ou irréconciliables avec celles de la décision 94-215-CECA.

(465) Les personnes morales destinataires de la présente décision considèrent en outre que la Commission enfreindrait le principe d'égalité de traitement si, pour déterminer l'imputabilité de l'infraction dans la présente décision, elle substituait au critère de la participation à l'infraction qu'elle a utilisé à l'égard des entreprises membres de l'entente sanctionnées dans la décision 94-215-CECA celui de l'exercice d'une influence déterminante par la société-mère.

(466) A ce sujet, il convient de rappeler tout d'abord que la Commission a déclaré, au considérant 322 de sa décision 94-215-CECA, que : "Seule Trade Arbed a pris part aux divers accords et pratiques, mais Trade Arbed est une société de vente qui distribue notamment des poutrelles moyennant une commission pour sa société-mère Arbed SA. Trade Arbed perçoit un faible pourcentage du prix de vente pour ses services. Pour assurer l'égalité de traitement, la présente décision est adressée à Arbed SA, la société productrice des poutrelles du groupe Arbed, et le chiffre d'affaires des produits en cause est celui d'Arbed, et non de Trade Arbed. ". Quant aux autres entreprises sanctionnées dans la décision 94-215-CECA, la Commission a imputé la responsabilité selon le critère suivant : " dans le cas où plus d'une société d'un groupe a pris part aux infractions décrites ci-dessus, ce sont les entreprises de production qui sont destinataires de la présente décision étant donné que ce sont elles qui ont le plus à gagner d'informations anticipées sur les prix et les volumes " (77).

(467) Selon une jurisprudence bien établie (Arrêts "Pâte de bois II" (78) et Deutsche Bahn AG/Commission (79)), " le principe d'égalité de traitement interdit de traiter d'une façon différente des situations comparables, entraînant un désavantage pour certains opérateurs par rapport à d'autres, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié " (80).

(468) En l'occurrence, il ne fait aucun doute que c'est en conformité avec le principe d'égalité de traitement que la Commission applique un critère objectif, à savoir le critère de production par les sociétés de poutrelles en acier, aux fins de déterminer les entreprises auxquelles les infractions sont imputables. Il pourrait ainsi être souligné a contrario que, si la Commission entendait imputer l'amende en fonction du seul critère de la participation directe et donc calculer l'amende en fonction du chiffre d'affaires de Trade Arbed SA, qui ne perçoit qu'un faible pourcentage du prix de vente pour ses services contrairement aux autres entreprises sanctionnées dans sa décision 94-215-CECA, elle créerait alors une discrimination à l'encontre de ces dernières. Les entreprises destinataires de la présente décision ne peuvent donc valablement se prévaloir d'une rupture de l'égalité de traitement des entreprises sanctionnées.

5.7.3. Arcelor Profil Luxembourg SA (ex Profil Arbed SA)

(469) Selon les renseignements transmis par Arcelor SA, Profil Arbed SA, qui a été renommée Arcelor Profil Luxembourg SA le 23 février 2006, est toujours une filiale à 100 % d'Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA) et poursuit les mêmes activités dans le secteur des poutrelles qu'avant la concentration (le seul changement intervenu dans la structure et les activités de Profil Arbed SA est l'acquisition d'une troisième usine de production de produits longs en acier au carbone, en 2003).

(470) Profil Arbed SA a été créée en novembre 1992, en tant que filiale à 100 % d'Arbed SA, et les installations de production de produits longs en acier au carbone, y compris les poutrelles, d'Esch/Schifflange et Dudelange, ont été transférées d'Arbed SA à Profil Arbed SA. Par conséquent, Profil Arbed SA a poursuivi les activités industrielles et économiques d'Arbed SA, qui a cessé de produire de l'acier au carbone à la suite de ce transfert. Toutefois, Arbed SA a poursuivi certaines activités de production d'autres produits, dans ses mines de fer de Lorraine. Ces activités ont cessé le 31 juillet 1997 et, à compter de cette date, Arbed SA n'a plus eu aucune activité industrielle ou commerciale.

(471) Dans la mesure où Profil Arbed SA est le successeur économique d'Arbed SA en ce qui concerne ses activités industrielles et commerciales dans le domaine des poutrelles, au sein du groupe chapeauté par Arbed SA (devenu par la suite le groupe Arcelor), la Commission est habilitée à engager une procédure à l'encontre de Profil Arbed SA au titre de sa responsabilité pour les infractions en cause dans la présente décision.

(472) En effet, dans l'affaire "Ciment" (81), la Cour a jugé que la Commission avait à juste titre tenu une société pour responsable des activités infractionnelles d'une autre société, qui appartenait au même groupe et dont les activités économiques dans le secteur du ciment avaient été transférées à la première société. Selon la Cour, le fait que la seconde société ait continué à exister en tant que personne morale après le transfert, n'invalidait en rien cette conclusion. Conformément à l'arrêt rendu dans l'affaire "Ciment"82, Profil Arbed SA ayant succédé à Arbed SA pour ce qui est des activités industrielles et économiques de cette dernière dans le secteur de la production de poutrelles, la responsabilité des infractions en cause dans la présente affaire peut lui être imputée. Le fait qu'Arbed SA existe encore en tant que personne morale n'invalide pas cette conclusion. En outre, toute autre conclusion reviendrait à permettre de contourner les règles du droit communautaire de la concurrence, puisque des entreprises pourraient ainsi éviter d'assumer la responsabilité d'infractions qu'elles ont commises en transférant les activités litigieuses à une autre société du même groupe. C'est pourquoi la présente décision est également adressée à Profil Arbed SA.

5.8. SANCTIONS

5.8.1. L'application de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA

(473) Comme il a été mentionné au considérant (303), la Commission doit, afin de calculer l'amende à infliger, appliquer les dispositions de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA quant au plafond maximum de l'amende, tout en respectant les dispositions du traité CE si ces dernières sont in concreto plus favorables à cet égard.

(474) En outre, la Commission a indiqué aux entreprises destinataires de la présente décision dans sa communication des griefs du 8 mars 2006 que : " Il y a lieu de préciser qu'en l'espèce, " l'entreprise " dont le chiffre d'affaires global sera vérifié est le groupe Arbed (les destinataires de la présente communication des griefs et toute autre société contrôlée directement ou indirectement par ceux-ci), à l'exclusion de toute autre société du groupe Arcelor, ce dernier ayant été constitué après l'époque des faits illicites. "

(475) En vertu de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, la Commission peut infliger des amendes aux entreprises qui auraient conclu un accord nul de plein droit, appliqué ou tenté d'appliquer un accord ou une décision d'association d'entreprises nuls de plein droit, ou qui se livreraient à des pratiques contraires aux dispositions du paragraphe 1. Une compétence équivalente est conférée à la Commission par l'article 23 du règlement (CE) n° 1-2003 et la Commission en fait usage aux fins de l'adoption de la présente décision. L'article 65, paragraphe 5, du traité CECA prévoit que la Commission peut infliger des amendes au maximum égales au double du chiffre d'affaires réalisé sur les produits ayant fait l'objet de l'accord, de la décision ou de la pratique concertée contraires aux dispositions de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, sans préjudice, si cet objet est de restreindre la production, le développement technique ou les investissements, d'un relèvement du maximum ainsi déterminé à concurrence de 10 % du chiffre d'affaires annuel des entreprises en cause. Aussi, en vertu de l'article 65 du traité CECA, la Commission ne peut imposer aux personnes morales destinataires de la présente décision une amende supérieure à 10 % du chiffre d'affaires annuel qu'elles ont réalisé sur les produits CECA sur le territoire de la Communauté.

(476) En l'espèce, selon les informations fournies par Arbed SA, le chiffre d'affaires réalisé par le groupe Arbed SA sur les produits qui font l'objet de la présente procédure était de 210 millions d'euro en 1990. Le double du chiffre d'affaires réalisé sur les produits ayant fait l'objet de l'accord se monte à 420 millions d'euro, montant qui constituerait en l'espèce le plafond de l'amende en vertu de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA.

(477) En vertu de l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1-2003, la Commission peut, par voie de décision, imposer des amendes aux entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles enfreignent l'article 81 du traité CE. L'amende que la Commission peut infliger à chaque entreprise partie à l'infraction ne peut alors excéder 10 % du chiffre d'affaires total qu'elle a réalisé sur tous les produits de l'entreprise au niveau mondial au cours de l'exercice précédent.

(478) En l'espèce, selon les informations transmises par Arbed SA par courrier du 6 février 2006, le chiffre d'affaires d'Arbed SA au niveau mondial pour l'exercice 2005 est de (...) d'euro. Il convient donc de calculer le plafond de l'amende sur la base de 10% du chiffre d'affaires total qu'Arbed SA a réalisé sur tous les produits de l'entreprise au niveau mondial au cours de l'exercice précédent, soit (...) d'euro.

(479) Il ressort donc de ce qui précède que l'application in concreto du traité CE en l'espèce n'est pas plus favorable que l'application du traité CECA et que c'est à bon droit que la Commission applique les dispositions de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA au calcul de l'amende.

5.8.2. La détermination du montant de l'amende

(480) Pour déterminer le montant de l'amende, la Commission appliquera les " Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA " (ci-après " lignes directrices en matière d'amendes "). (83) Il importe de remarquer que ces lignes directrices en matière d'amendes s'appliquent indifféremment aux amendes infligées au titre du traité CE et du traité CECA.

5.8.2.1. Gravité

(481) Pour déterminer la gravité de l'infraction, la Commission tient compte de sa nature, de son incidence effective sur le marché, lorsque celle-ci peut être mesurée, ainsi que de la taille du marché géographique en cause.

a) Nature de l'infraction

(482) L'infraction consistait essentiellement en une série d'accords et de pratiques concertées qui ont eu pour objet ou pour effet la fixation de prix, l'attribution de quotas et l'échange à grande échelle d'informations sur le marché communautaire des poutrelles. Ces types de restrictions horizontales figurent, par leur nature même, parmi les infractions les plus graves aux règles de concurrence sanctionnées par l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA.

b) Incidence économique des infractions

(483) Il est souvent difficile de déterminer l'incidence économique d'une infraction. Il est toujours malaisé de définir dans quelle mesure une hausse de prix donnée découle des forces normales du marché et dans quelle mesure elle est le résultat de l'action concertée des entreprises. En période de chute des prix, il est d'autant plus difficile de définir les effets des pratiques anticoncurrentielles.

(484) On peut se faire une idée de l'ordre de grandeur des avantages que les participants en ont tiré en examinant l'effet des hausses de prix au premier trimestre de 1989 qui, d'après les preuves disponibles, ont été acceptées par les consommateurs. Des hausses de prix de 25 à 40 marks allemands en Allemagne, de 50 à 100 francs français en France et de 200 à 800 francs belges dans le Benelux ont été obtenues. Le produit supplémentaire pour les producteurs qui vendaient sur ces marchés était (sur la base de la consommation apparente sur ces marchés) d'au moins 7 millions d'écus (calculé sur la base des hausses de prix les plus faibles). Au deuxième trimestre, d'autres hausses de prix en Allemagne, en France, au Benelux et en Italie ont produit une augmentation additionnelle de recettes de 6 millions d'écus. L'augmentation totale des recettes a atteint au moins 20 millions d'écus sur six mois.

(485) Bien que la proportion du bénéfice global qui résulte de la fixation des prix et des autres pratiques concertées ne puisse être établie avec précision, il est manifeste que les effets économiques étaient substantiels. Une large part des avantages est allée aux entreprises qui ont pris part à la fixation des prix parce qu'elles couvrent plus de deux tiers de la consommation de la Communauté. Il ne fait pas donc pas de doute que les pratiques anticoncurrentielles qui ont été mises en œuvre ont de ce fait nécessairement eu une incidence sur le marché, même s'il n'est pas possible d'en mesurer précisément l'importance.

c) Taille de la zone géographique en cause

(486) Aux fins de l'appréciation de la gravité, il convient de relever que l'infraction s'est étendue au territoire européen et en particulier aux territoires de l'Allemagne, du Danemark, de l'Italie et de la France ainsi que des pays scandinaves.

d) Conclusions sur la gravité de l'infraction

(487) Compte tenu de la nature de l'infraction commise et de son étendue, la Commission estime que l'infraction commise doit être considérée comme très grave, au sens des lignes directrices en matière d'amendes, que son impact sur le marché puisse ou non être mesuré. Il est clair, en tout état de cause, que les arrangements anticoncurrentiels de l'entente ont été mis en œuvre et ont eu un impact sur le marché, même si cet impact ne peut être mesuré avec précision, ce qui permet de qualifier l'infraction de " très grave ". Par conséquent, le montant de départ de l'amende doit être d'au moins 20 millions d'euro.

5.8.2.2. Durée de l'infraction

(488) Le régime de crise mis en place par la Commission en octobre 1980 et maintenu jusqu'au 30 juin 1988 influe sur la durée de l'infraction. En effet, au cours d'une partie importante de la période visée par la présente décision, la Commission a fait usage des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 58 du traité CECA pour imposer des quotas de livraison ou de production aux entreprises sidérurgiques. Ce système, instauré en octobre 1980, a pris fin dans le cas des poutrelles le 30 juin 1988. La Commission avait également imposé des prix minimaux entre 1984 et 1986 en vertu de l'article 61 du traité CECA. Ces mesures anticrise ont été prises et gérées par la Commission.

(489) La Commission considère que l'application de ces mesures au cours de la période de crise manifeste peut influer sur l'exercice de son pouvoir d'appréciation en ce qui concerne la portée de ses décisions sanctionnant des infractions à l'article 65 CECA. Le fait que la concurrence ait été limitée à certains égards par l'action de la Communauté ne permet pas aux entreprises d'imposer des restrictions supplémentaires ou de restreindre la concurrence à d'autres égards. Il est essentiel, dans ces conditions, que les entreprises et leurs associations ne prennent pas d'autres mesures pour réduire la concurrence. À aucun moment de la crise, la Commission n'a déclaré quoi que ce soit indiquant que l'article 65 du traité CECA n'était pas applicable. Ceci aurait de toute façon été incompatible avec le marché commun conformément à l'article 4 du traité CECA. L'article 65 fait partie du traité CECA et ne peut être ignoré ou rendu inapplicable.

(490) L'article 58 et l'article 61 du traité CECA ne limitent en aucune façon l'application de l'article 65 du traité CECA au-delà des mesures envisagées dans les régimes de quotas et de prix. Seule la Commission peut, temporairement et exceptionnellement, imposer des quotas et établir des prix minimaux. Le traité CECA ne laisse aux entreprises aucune latitude pour fixer des prix ou répartir des marchés.

(491) Toutefois, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, la Commission a décidé de ne pas infliger d'amendes aux entreprises destinataires de la présente décision pour leur comportement jusqu'au 30 juin 1988, date à laquelle le régime des quotas a pris fin.

(492) À compter de cette date, les entreprises destinataires de la présente décision ne pouvaient avoir aucun doute quant à l'application des règles de concurrence de la Communauté européenne du charbon et de l'acier et en particulier de l'article 65 du traité CECA.

(493) La durée des infractions qui se sont déroulées entre le 1 juillet 1988 et le 16 janvier 1991 comme il est établi précédemment, est indiquée ci-dessous en mois, sauf en ce qui concerne l'harmonisation des suppléments, pour laquelle la participation à l'infraction est indiquée par la lettre "X".

a) Échange d'informations confidentielles par l'intermédiaire du comité poutrelles et de la Walzstahl-Vereinigung (30)

b) Fixation des prix au sein du comité poutrelles (30)

c) Fixation des prix sur le marché allemand (3)

d) Fixation des prix sur le marché italien (6)

e) Fixation des prix sur le marché danois (24)

f) Partage des marchés, "système Traverso" (3+3)

g) Partage des marchés, France (3)

h) Partage des marchés, Allemagne (6)

i) Harmonisation des suppléments (x)

j) Fixation des prix sur le marché français (x)

(494) Dans sa décision 94-215-CECA, la Commission avait constaté que l'infraction était de longue durée. Au regard des lignes directrices en matière d'amendes, l'infraction ici en cause ne dépassant pas cinq ans, les entreprises destinataires sont responsables d'une infraction de moyenne durée.

(495) Les montants de départ des amendes seront par conséquent majorés de 10% par année complète d'infraction. Ces montants de départ seront en outre majorés de 5% pour toute période supplémentaire égale ou supérieure à six mois mais inférieure à un an.

(496) En l'espèce, cela conduit à une majoration de 25% du montant de départ pour les entreprises destinataires de la présente décision.

5.8.3. Circonstances aggravantes et atténuantes

(497) Aucune circonstance aggravante ou atténuante n'a été invoquée et n'est retenue à l'encontre des entreprises destinataires de la présente décision.

5.8.4. Circonstances exceptionnelles

(498) En l'espèce, la Commission entend, à titre de circonstance exceptionnelle en vue d'assurer l'égalité de traitement entre les entreprises destinataires de la présente décision et les entreprises que la Commission a sanctionnées dans sa décision 94-215-CECA, prendre en considération le fait que la Commission s'est déjà prononcée sur le montant de l'amende qu'elle entendait imposer à Arbed SA dans sa décision 94-215-CECA, qui se montait à 11,2 millions d'euro et que le Tribunal a réduit à 10 millions d'euro dans son arrêt T-137-94. Aussi la Commission, bien que l'amende eût pu s'élever à un montant beaucoup plus élevé en vertu des règles mentionnées aux considérants 487 et suivants, impose en l'espèce une amende égale à 10 millions d'euro,

A arrêté la présente décision:

Article premier

L'entreprise composée de Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA), Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA) et Arcelor Profil Luxembourg SA (ex-Profil Arbed SA) a participé, en violation de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA, à une série d'accords et de pratiques concertées qui ont eu pour objet ou pour effet de fixer les prix, d''attribution des quotas et d'échanger, à grande échelle, des informations sur le marché communautaire des poutrelles. La participation de l'entreprise ainsi composée à ces infractions est établie du 1er juillet 1988 au 16 janvier 1991.

Article 2

Une amende de 10 millions d'euro est infligée à Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA), Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA) et Arcelor Profil Luxembourg SA (ex- Profil Arbed SA) à titre solidaire pour les infractions visées à l'article 1er.

Article 3

L'amende visée à l'article 2 est versée en euro, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision sur le compte bancaire suivant : compte n°642-0029000- 95 ouvert au nom de la Commission européenne auprès de la BBVA - Banco Bilbao Vizcaya Argentaria SA, Avenue des Arts, 43 B-1040 Bruxelles (Code IBAN BE76 6420 0290 0095 ; Code SWIFT : BBVABEBB).

À l'issue de ce délai, des intérêts seront automatiquement dus au taux appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations de refinancement au premier jour du mois au cours duquel la présente décision a été arrêtée, majoré de 3,5 points de pourcentage.

Article 4

Les sociétés suivantes sont destinataires de la présente décision:

- Arcelor Luxembourg SA (ex-Arbed SA) 19 Avenue de la Liberté L - 2930 Luxembourg

- Arcelor International SA (ex-Trade Arbed SA) 19 Avenue de la Liberté L - 2930 Luxembourg

- Arcelor Profil Luxembourg SA (ex-Profil Arbed SA, 66 rue de Luxembourg L-4221 Esch-sur-Alzette.

La présente décision forme titre exécutoire conformément à l'article 256 du traité CE.

Notes :

1 JO L 1 du 4.1.2003, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1419-2006 (JO L 269 du 28.9.2006, p. 1).

2 JO L 123 du 27.4.2004, p. 18.

3 JO L 116 du 6.5.1994, p. 1.

4 Selon l'article 4 de la décision de la Commission, ces entreprises sont: British Steel plc; Unimétal SA; Saarstahl AG; Ferdofin SpA; Thyssen Stahl AG; Preussag AG; Empresa Nacional Siderúrgica SA; Siderúrgica Aristrain Madrid SL; SA Cockerill Sambre; Krupp-Hoesche Stahl AG; NMH Stahlwerke GmbH; Norsk Jernverk AS; Inexa Profil AB.

5 Arrêt du 11 mars 1999, Arbed/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303).

6 Pour un résumé des griefs annulés par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94, voir considérant (39) de la présente décision.

7 Arrêt du 2 octobre 2003, Arbed/Commission (C-176-99 P, Rec. 2003, p. I-10687, points 19 à 24).

8 Arrêt du 2 octobre 2003, Arbed/Commission (C-176-99 P, Rec. 2003, p. I-10687, point 27).

9 Communication des griefs du 8 mars 2006.

10 Voir point 6 de la communication des griefs du 8 mars 2006.

11 Voir points 208 à 218 de la communication des griefs du 8 mars 2006.

12 Pour un résumé des griefs annulés par le Tribunal dans l'arrêt T-137-94, voir considérant 39 de la présente décision.

13 Voir considérant (44).

14 Voir section 2.7.

15 Les chiffres figurant dans les tableaux 3 à 11 incluent la production de profilés pour soutènement de mines. La part représentée par ces produits est toutefois relativement modeste. La production de ces derniers n'atteignait à l'époque un pourcentage substantiel des tonnages figurant dans le tableau 4 qu'en Allemagne et au Royaume-Uni (à peu près 18 % et 10 % respectivement). Les chiffres de production pour l'Espagne, la France et le Luxembourg (les seuls autres pays de la Communauté européenne du charbon et de l'acier où ces produits sont fabriqués) sont négligeables.

16 JO L 281 du 9.10.1991, p. 17-22.

17 JO L 291 du 31.10.1980, p. 1.

18 JO L 180 du 1.7.1981, p. 1.

19 JO L 191 du 1 7.1982, p. 1.

20 JO L 208 du 31.7.1983, p. 1.

21 JO L 29 du 1.2. 984, p. 1.

22 JO L 340 du 18.12.1985, p. 5.

23 JO L 25 du 29.1.1988, p. 1.

24 JO L 373 du 31.12.1983, p. 1. Décision n° 3715-83-CECA).

25 JO L 370 du 29.12.1982, p. 1.

26 JO C 272 du 31.10.1987, p. 3.

27 JO L 212 du 5.8.1988, p. 1.

28 Le centre professionnel des statistiques de l'acier (autrefois appelé le Comptoir français des produits sidérurgiques) et ci-après dénommé "CPS" est une association d'entreprises appartenant principalement au groupe Usinor Sacilor. Il était chargé de réunir et d'établir des informations statistiques pour la Fédération française de l'acier (antérieurement dénommée la Chambre syndicale de la sidérurgie française), en association avec des entreprises dont le CPS fait partie intégrante.

29 Suite à la création d'Arcelor en février 2002, la société Trade Arbed SA n'existe plus, cette dernière s'appelant désormais Arcelor International SA. Néanmoins, la dénomination Trade Arbed SA, est utilisée dans la présente décision en référence aux événements intervenus avant février 2002.

30 Selon l'article 4 de la décision de la Commission, ces entreprises sont: British Steel plc; Unimétal SA; Saarstahl AG; Ferdofin SpA; Thyssen Stahl AG; Preussag AG; Empresa Nacional Siderúrgica SA; Siderúrgica Aristrain Madrid SL; SA Cockerill Sambre; Krupp-Hoesche Stahl AG; NMH Stahlwerke GmbH; Norsk Jernverk AS; Inexa Profil AB.

31 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 5 à 11).

32 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 439 à 447 et 668).

33 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 450 à 475 et 669).

34 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 621 à 635 et 671).

35 Arrêt du 2 octobre 2003, Arbed/Commission (C-176-99 P, Rec. 2003, p. I-10687 points 22 à 24).

36 Voir section 5.7.3.

37 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 450 à 475 et 669).

38 Arrêt du 11 mars 1999, ARBED/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p. II-303, points 621 à 635 et 671).

39 Voir considérant (44).

40 JO L 220 du 15.8.1990, p. 28.

41 Selon les besoins, les citations des documents ont été traduites par la Commission de la langue originale dans la langue de la décision. L'exactitude de ces traductions n'a pas été mise en cause au cours de la procédure administrative pour laquelle la communication des griefs contenait le texte original et, le cas échéant, la traduction dans la langue de procédure.

42 Les entreprises sidérurgiques sont tenues d'établir leur barème par rapport à un lieu géographique fixe, le point de base (généralement l'usine de production). Ces prix sont appelés "prix de base".

43 Des entreprises productrices ou distributrices de laminés marchands, qui ne sont pas mentionnées ici, assistaient également à ces réunions.

44 Voir considérant (44).

45 Voir l'avis 1-91 de la Cour du 14 décembre 1991, Rec. 1991, p. I-6079, point 21.

46 Voir arrêts de la Cour du 22 février 1990, Busseni (221-88, Rec. 1990, p. I-495, point 21) et du Tribunal du 11 mars 1999, Thyssen Stahl (T-141-94, Rec. 1999, p. II-347, points 262, 266 et 267).

47 Voir arrêt du 30 mai 2001, Barth/Commission (T-348-00, Rec. FP p. I-A-119 et II-557, point 68).

48 JO C 152 du 26.6.2002, p. 5.

49 Voir arrêts du 12 novembre 1981, Salumi e.a. (212 à 217-80, Rec. 1981, p. 2735, point 9) et du 6 juillet 1993, CT Control (Rotterdam) et JCT Benelux/Commission (C-121-91 et C-122-91, Rec. 1993, p. I- 3873, point 22).

50 Voir Communication, points 26 et 31.

51 Voir l'article 65, paragraphes 4 et 5, du traité CECA. Il est fait référence à cette base juridique maintenant expirée dans les visas de la présente décision afin que le contexte juridique justifiant le recours à la base juridique actuellement en vigueur, à savoir le règlement (CE) n° 1-2003, soit entièrement clair et transparent.

52 Voir arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a. (212 à 217-80, Rec. 1981, p. 2735, point 9) et du Tribunal du 6 juillet 1993, CT Control (Rotterdam) et JCT Benelux/Commission, (C-121-91 et C-122-91, Rec. 1993, p. I-3873, point 22).

53 Voir arrêt du 3 mai 2005, Berlusconi e.a. (C-387-02, C-391-02 et C-403-02, Rec. 2005, p. I-3565, point 69).

54 En ce qui concerne, en revanche, toutes les autres dispositions normatives, le régime CECA équivaut pour l'essentiel au régime CE. Cela résulte, en particulier, du fait qu'il n'y a aucune raison d'interpréter les notions " d'accord " et de " pratique concertée " au sens de l'article 65, paragraphe 1, du traité CECA différemment de celles " d'accord " et de " pratique concertée " au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE comme l'a expressément déclaré le Tribunal dans son arrêt du 11 mars 1999, Thyssen Stahl AG/Commission (T-141-94, Rec. 1999, p. II-347, points 258 et suivants).

55 Voir arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a. (212 à 217-80, Rec. 1981, p. 2735, point 9) et du Tribunal du 6 juillet 1993, CT Control (Rotterdam) et JCT Benelux/Commission, (C-121-91 et C-122-91, Rec. 1993, p. I-3873 point 22).

56 Voir arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a. (212 à 217-80, Rec. 1981, p. 2735, point 9) et du Tribunal du 6 juillet 1993, CT Control (Rotterdam) et JCT Benelux/Commission, (C-121-91 et C-122-91, Rec. 1993, p. I-3873, point 22).

57 Voir arrêt du 3 mai 2005, Berlusconi e.a., (C-387-02, C-391-02 et C-403-02 Rec. 2005, p. I-3565point 69).

58 À l'époque des infractions, aucun des pays scandinaves considérés, à savoir la Norvège et la Suède, n'était membre de l'UE. La Norvège ne l'est toujours pas.

59 Voir tableaux 3 et 4.

60 Arrêt du 29 octobre 1980, Van Landewyck e.a./Commission (209-78 à 215-78 et 218-78, Rec. 1980, p. 3125, point 172).

61 Voir point 7 de la communication des griefs du 8 mars 2006.

62 Affaire 48-69, Rec. 1972, p. 619.

63 Arrêt du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission (40-73 à 48-73, 50-73, 54-73 à 56-73, 111-73, 113-73 et 114-73, Rec. 1975, p. 1663).

64 Voir arrêt du 24 octobre 1991, Rhône-Poulenc SA/Commission (T-1-89, Rec. 1991, p. II-867, point 124).

65 Voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules/Commission (T-7-89, Rec. 1991, p. II-1711, point 232).

66 Septième rapport sur la politique de concurrence, point 7.

67 JO C 75 du 29.7.1968, p. 3.

68 JO C 3 du 6.1.2001, p.2.

69 Voir arrêts du 27 octobre 1994, Fiatagri UK Ltd et New Holland Ford Ltd/ Commission (T-34-92, Rec. 1994 p. II-905, point 91) et John Deere/ Commission (T-35-92, Rec. 1994, p. II-957, point 51). Voir également la décision 87-1-CEE de la Commission, Acides gras (JO L 3 du 6.1.1987, p. 17).

70 JO L 68 du 13.3.1992, p. 19.

71 Voir arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C-238-99 P, C-245-99 P, C-247-99 P, C-250-99 P à C-252-99 et C-254-99, Rec. p. I-8375).

72 Voir l'arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon/Commission (T-236-01, T-239-01, T-244-01 à T-246-01, T-251-01 et T-252-01, Rec. 2004, p. II-1181, point 279).

73 JO L 94 du 8.4.1978, p. 22.

74 Affaire COMP/CECA.1351 - Usinor/Arbed SA/Aceralia.

75 Dans l'arrêt du 16 novembre 2000, Stora/Commission (C-286-98 P, Rec. 2000, p. I-9925, point 29), la Cour a jugé que, "en présence d'une détention de la totalité du capital de [la filiale], le Tribunal pouvait légitimement supposer [...] que la société-mère exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale".

76 Voir arrêt du 11 mars 1999, Arbed/Commission (T-137-94, Rec. 1999, p.II-303, points 96 et 97).

77 Décision de la Commission du 16 février 1994, Poutrelles en acier, considérant 319, JO L116.

78 Voir arrêt du 31 mars 1993, Ahlström Osakeytiö e.a./Commission (C-89-85, C-104-85, C-114-85, C-116-85, C-117-85 et C-125-85 à C-129-85, Rec. p. I-1307).

79 Voir arrêt du 5 avril 2006, Deutsche Bahn AG/Commission (T-351-02, non encore publié au Recueil).

80 Arrêts de la Cour du 13 avril 2000, Karlsson e.a.( C-292-97, Rec. p. I-2737, point 39) et du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission (T-228-99 et T-233-99, Rec. p. II-435, point 272).

81 Arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C-204-00 P, C-205-00 P, C-211-00 P, C-213-00 P, C-217-00 P et C-219-00 P, Rec. 2004, p. I-123, points 354-361). En ce qui concerne le transfert de responsabilité en cas de continuité économique d'une entreprise, voir également l'arrêt du 28 mars 1984, CRAM et Rheinzink/Commission (29 et 30-83, Rec. 1984, p. 1679, point 9).

82 Arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C-204-00 P, C-205-00 P, C-211-00 P, C-213-00 P, C-217-00 P et C-219-00 P, Rec. 2004, p. I-123, points 354-361).

83 JO C 9, 14.1.1998, p. 3.

ANNEXE I

1. Monitorage no 20: commandes à livrer au premier trimestre de 1989, au 1er avril 1989. Télécopie d'Usinor Sacilor du 12 avril 1989.

2. Monitorage no 14: commandes à livrer au deuxième trimestre de 1989, au 3 juin 1989. Télécopie d'Usinor Sacilor à Peine-Salzgitter.

3. Monitorage no 1: commandes à livrer au troisième trimestre de 1989, au 3 juin 1989. L'exemplaire de ce tableau découvert par la Commission a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à Peine-Salzgitter le 13 juin 1989.

4. Monitorage no 13: commandes à livrer au troisième trimestre de 1989, au 26 août 1989. Un exemplaire de ce tableau a été saisi chez Thyssen.

5. Monitorage no 8: commandes à livrer au premier trimestre de 1989, au 26 janvier 1990 (daté du 5 février 1990). L'exemplaire en possession de la Commission a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à Peine-Salzgitter le 6 février 1990.

6. Monitorage no 9: commandes à livrer au premier trimestre de 1990, au 2 février 1990 (daté du 19 février 1990). La Commission a découvert un exemplaire de ce tableau qui avait été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à British Steel le 20 février 1990.

7. Monitorage no 17: commandes à livres au premier trimestre de 1990, au 30 mars 1990 (daté du 13 avril 1990). Un exemplaire de ce tableau a été découvert chez British Steel.

8. Monitorage no 18: commandes à livrer au deuxième trimestre de 1990, au 29 juin 1990 (daté du 9 juillet 1990). Un exemplaire de ce document a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à la Walzstahl-Vereinigung le 9 juillet 1990.

9. Monitorage no 4: commandes à livrer au troisième trimestre de 1990, au 29 juin 1990 (daté du 9 juillet 1990). Un exemplaire de ce tableau a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à la Walzstahl-Vereinigung le 9 juillet 1990.

10. Monitorage no "18 ter": commandes à livrer au deuxième trimestre de 1990, au 13 juillet 1990 (daté du 19 juillet 1990). Les exemplaires de ce tableau saisis par la Commission ont été envoyés par télécopieur d'Usinor Sacilor à Peine-Salzgitter et à British Steel le 20 juillet 1990.

11. Monitorage no 6: commandes à livrer au troisième trimestre de 1990, au 13 juillet 1990 (daté du 9 juillet 1990). Un exemplaire de ce tableau a été découvert chez British Steel.

12. Télécopie de Peine-Salzgitter à Usinor Sacilor du 16 janvier 1989 contenant les chiffres des livraisons de Peine-Salzgitter au quatrième trimestre de 1988.

13. Note du 1er mars 1990 du secrétariat, accompagnée de tableaux de comparaison des commandes et des livraisons pour chaque trimestre de 1989. Un exemplaire de cette note et des tableaux y annexés (à l'exception du tableau donnant les statistiques du marché espagnol) a été saisi chez Peine-Salzgitter, qui l'avait reçu le 16 mars 1990.

14. Télécopie du 2 juin 1989 du secrétariat (avec les statistiques des livraisons au deuxième trimestre de 1989).

15. Tableau du 27 juillet 1989 donnant les chiffres des livraisons au deuxième trimestre de 1989. Le tableau indique également les commandes reçues à livrer au deuxième trimestre de 1989 par chacune des entreprises et un chiffre (par société et par marché) donnant le pourcentage des livraisons calculées sur la base des commandes. Un exemplaire de ce tableau a été saisi chez Valor.

16. Télécopie du 7 décembre 1989 du secrétariat, saisie chez Peine-Salzgitter, avec un tableau daté du 5 décembre 1989 qui donne la liste des livraisons agrégées des forges italiennes au troisième trimestre de 1989, les chiffres donnent les livraisons à chacun des douze États membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier pour juillet, août et septembre 1989.

17. Note interne rédigée pour M. Meyer (Peine-Salzgitter) et datée du 12 février 1990 concernant les livraisons au quatrième trimestre de 1989.

18. Procès-verbal de la réunion de la Commission poutrelles, tenue à Milan le 16 mai 1990 (indiquant qu'un tableau comparant les commandes à livrer au premier trimestre de 1990 aux livraisons réelles au cours de cette période ainsi qu'un autre tableau comparant les livraisons au quatrième trimestre de 1989 aux livraisons au premier trimestre de 1990 ont été distribués à la réunion).

19. Monitorage no 7: commandes à livrer au troisième trimestre de 1990, au 20 juillet 1990. L'exemplaire en possession de la Commission a été envoyé par télécopie d'Usinor Sacilor à British Steel le 3 août 1990.

20. Plusieurs documents concernant le monitorage des livraisons au deuxième trimestre de 1990, rédigés par le secrétariat de la Commission poutrelles et datés du 7 septembre 1990 (saisis chez Peine-Salzgitter).

21. Monitorage no 15: commandes à livrer au troisième trimestre de 1990, au 14 septembre 1990 (daté du 25 septembre 1990). L'exemplaire en possession de la Commission a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à la Walzstahl-Vereinigung le 27 septembre 1990.

22. Monitorage no 1: commandes à livrer au quatrième trimestre de 1990 (le tableau indique erronément le troisième trimestre), au 7 septembre 1990 (daté du 25 septembre 1990).

23. Télécopie de la Walzstahl-Vereinigung à Me S. (Usinor Sacilor) donnant les livraisons des producteurs allemands au troisième trimestre de 1990 (daté du 15 novembre 1990).

24. Ordre du jour de la réunion de la Commission poutrelles du 4 décembre 1990 (envoyé par télécopie d'Usinor Sacilor à British Steel le 20 novembre 1990).

25. Tableaux datés du 3 décembre 1990 donnant les livraisons d'Arbed SA, d'Ensidesa, des producteurs allemands, d'Unimétal, d'Aristrain et des producteurs italiens.

26. Monitorage no 10: commandes à livrer au quatrième trimestre de 1990, au 16 novembre 1990. Ce document est daté du 23 novembre 1990 et a été envoyé par télécopieur d'Usinor Sacilor à la Walzstahl-Vereinigung.

27. Télécopies envoyées par la Walzstahl-Vereinigung à Usinor Sacilor, à Thyssen, à Saarstahl, à Peine-Salzgitter, à Neue Maxhuette et à Hoesch. Chacun de ces documents contient un tableau qui donne les commandes reçues par Thyssen, Peine-Salzgitter, Hoesch, Saarstahl et Neue Maxhuette. La première de ces télécopies est datée du 11 décembre 1990 et donne les commandes à livrer au quatrième trimestre de 1990 au 8 décembre 1990. Le deuxième document est également daté du 11 décembre 1990 et donne les commandes à livrer au premier trimestre de 1991, au 8 décembre 1990. Le dernier tableau est daté du 11 janvier 1991 et donne la liste des commandes à livrer au quatrième trimestre de 1990, au 5 janvier 1991.

ANNEXE II

1. Listage informatique marqué "Eurofer" et intitulé "Art. 58 - Realizations 2-89". En haut à gauche du tableau - sous le mot "Eurofer" - figure la ligne suivante: "Bru. 5/9/89 (16:08)". Peine-Salzgitter a reçu cette information par transmission automatique de données. En tout état de cause, il est manifeste que Peine-Salzgitter était en possession de cette information dès le 13 septembre 1989, voire à une date antérieure, comme l'atteste un tableau daté du 13 septembre 1989, établi par Peine-Salzgitter et qui donne la liste des livraisons à la Communauté européenne du charbon et de l'acier dans son ensemble aux premier et deuxième trimestres de 1989 de toutes les entreprises dont les statistiques figurent dans le tableau d'Eurofer.

2. Tableau d'Eurofer daté du 12 juin 1989 qui donne la liste des livraisons ("Art. 58 - Realizations") au premier trimestre de 1989, saisi chez Peine-Salzgitter. Les entreprises et marchés visés par ce tableau sont les mêmes qu'au tableau ci-dessus.

3. Note interne de Peine-Salzgitter datée du 4 décembre 1989 qui donne les livraisons de certaines entreprises.

4. Lettre d'Eurofer datée du 30 juillet 1990.

5. Tableaux datés du 16 mars 1990 (saisis chez British Steel) qui donnent les "livraisons Eurofer" de poutrelles (en tonnes par trimestre) à l'Allemagne, au Royaume-Uni, à la France, à l'Espagne, à l'Italie, aux pays du Benelux et à la CECA dans son ensemble, de même que le total des livraisons d'Eurofer dans la Communauté et des exportations vers des pays tiers. Les statistiques portent sur 1986, 1987, le premier et le second semestre de 1988 et chaque trimestre de 1989.

6. Tableau daté du 14 mars 1990, établi par Usinor Sacilor, qui donne des livraisons à la Communauté européenne du charbon et de l'acier dans son ensemble (par 1 000 tonnes par trimestre) pour 1986, 1987, 1988, 1989, les premier et second semestres de 1988 et les premier et second semestres de 1989.

7. Deux documents Eurofer datés du 11 mai 1990 (saisis chez Valor). Ces documents donnent les livraisons ("Art. 58 - Realizations") en janvier et février 1990 respectivement.

8. Tableau (saisis chez Usinor Sacilor) donnant les livraisons mensuelles moyennes des entreprises d'Eurofer en 1986, 1987, 1988 et 1989, à chaque trimestre de 1989 et aux premier et deuxième trimestres de 1990. Ces tableaux ne sont pas datés, mais semblent avoir été établis en été ou au début de l'automne 1990.

9. Document intitulé "Livraison et production" (Delivery & Production) et daté du 5 décembre 1990 (saisi chez la Walzstahl-Vereinigung), donnant les livraisons des entreprises d'Eurofer à chacun des États membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (à l'exception de la Belgique et du Luxembourg, pour lesquels il donne un chiffre combiné) au troisième trimestre de 1990.