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Décisions

CA Paris, 18e ch. E, 18 septembre 2008, n° 06-13223

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Flamme

Défendeur :

Institut Aéronautique de Paris (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Froment

Conseillers :

Mmes Thevenot, Cantat

Avocats :

Mes Abecassis, Rouge-Bardet

Cons. prud'h. Paris, du 10 oct. 2006

10 octobre 2006

Faits, procédure et prétentions des parties :

Monsieur Flamme a travaillé pour la SAS Institut Aéronautique de Paris, entre le 18 juin 2001 et le 6 janvier 2006, dans le cadre de divers contrats à durée déterminée, en qualité de formateur spécialisé. Les relations contractuelles ont définitivement cessé le 7 janvier 2006.

Monsieur Flamme a saisi le Conseil de prud'hommes de Paris, le 18 avril 2006, lequel par jugement de départage, du 10 octobre 2006, a :

- requalifié la relation de travail en un contrat à durée indéterminée

- condamné l'employeur au paiement des sommes de :

- 250 euro au titre de la prime de décembre 2005

- 2081,69 euro au titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 208,17 euro au titre des congés payés y afférents ces sommes avec intérêts à compter du 26 avril 2006

- 2 081,69 euro à titre d'indemnité de requalification cette somme avec intérêts à compter du jugement.

Monsieur Flamme a fait appel et demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- requalifié la relation contractuelle en un contrat de travail à temps partiel et non à temps complet

- limité l'indemnisation de ses préjudices

- requalifier son contrat de travail en un contrat à durée indéterminée à temps complet, ou, à titre subsidiaire, à temps partiel

- condamner l'employeur au paiement des sommes de :

- 42 850,63 euro à titre de rappel de salaires pour un temps complet

- 4 285 euro au titre des congés payés y afférents

- 6 000 euro à titre d'indemnité de requalification pour un temps complet, ou, à titre subsidiaire, 4 163,38 euro pour un temps partiel

- 6 012,18 euro au titre d'indemnité de préavis pour un temps complet, ou, à titre subsidiaire, 4 163,38 euro pour un temps partiel

- 601 euro au titre des congés payés y afférents pour un temps complet, ou, à titre subsidiaire, 416 euro pour un temps partiel

- 3 006,09 euro à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement pour un temps complet, ou, à titre subsidiaire, 2 081,69 euro pour un temps partiel

- 25 551,76 euro à titre d'indemnité pour licenciement abusif

- 2 404,87 euro à titre d'indemnité légale de licenciement pour un temps complet, ou, à titre subsidiaire, 1 665,35 euro pour un temps partiel

- 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SAS Institut Aéronautique de Paris demande à la cour de débouter le salarié de ses demandes et de le condamner au paiement des sommes de :

- 250 euro au titre du trop-perçu pour la prime de 2005

- 60 000 euro à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale

- 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les moyens oralement présentés au soutien de ces prétentions sont ceux que les parties ont énoncés dans les écritures, communiquées entre elles, déposées à l'audience et auxquelles il y a lieu de se référer pour plus ample exposé.

Motifs de la décision :

Sur la prime de décembre 2005 :

Considérant que Monsieur Flamme sollicite le versement d'une prime de 250 euro pour le mois de décembre 2005, au motif qu'il percevait régulièrement cette prime exceptionnelle depuis le mois de juillet 2004 ;

Considérant que la SAS Institut Aéronautique de Paris répond qu'elle a versé cette prime deux fois pour le mois de décembre 2005, la première conformément à une ordonnance de référé du 5 avril 2006 et la seconde en exécution du jugement déféré du 10 octobre 2006 ;

Considérant que les bulletins de paye produits démontrent que le salarié a régulièrement perçu une prime mensuelle de 250 euro, quelle que soit la durée du travail effectuée dans le mois, sauf en décembre 2005 et en janvier 2006 ;

Considérant, qu'ainsi, ladite prime lui était due en décembre 2005 et en janvier 2006, mois au cours duquel il avait travaillé six jours ;

Considérant que l'employeur a été condamné au paiement d'une prime de 250 euro, tout d'abord par l'ordonnance précitée du 5 avril 2006, au titre du mois de janvier 2006, puis par le jugement précité du 10 octobre 2006 au titre du mois de décembre 2005 ; qu'ainsi la prime n'a pas été payée deux fois pour ce dernier mois ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qui concerne la prime pour le mois de décembre 2005 ;

Sur la requalification de la relation contractuelle :

Sur la requalification des contrats en un contrat à durée indéterminée :

Considérant que Monsieur Flamme affirme que la majorité de ses contrats à durée déterminée n'a pas donné lieu à l'établissement de contrats écrits et que ceux qui ont été signés ne comportaient pas les mentions légales obligatoires ; qu'il demande, en conséquence, la requalification de l'ensemble de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée ;

Considérant que la SAS Institut Aéronautique de Paris répond que le salarié effectuait des vacations ponctuelles qui faisaient l'objet d'un contrat de travail écrit, à temps partiel et à durée déterminée, conformément aux dispositions de l'article L. 122-1-1 3° du Code du travail, relatif aux contrats d'usage auxquels les entreprises de formation peuvent recourir ;

Considérant que le recours au contrat durée déterminé d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif, conformément aux dispositions de l'article L. 1242-12 du Code du travail qu'en l'espèce, celui-ci ne produit pas l'intégralité des contrats pour toute la période considérée ;

Considérant que le contrat de travail à durée déterminée, daté du 16 juillet 2001, qui a été produit, ne prévoit, ni terme précis, ni durée minimale, conformément aux dispositions de l'article L. 1242-12 du Code du travail ;

Considérant que les divers bulletins de paye versés aux débats couvrent des périodes comprises entre le 18 juin 2001 et le 6 janvier 2006 ;

Considérant, en conséquence, qu'il y a lieu de requalifier l'ensemble de la relation contractuelle, intervenue entre le 18 juin 2001 et le 6 janvier 2006, en un contrat à durée indéterminée, conformément aux dispositions de l'article L. 1245-1 du Code du travail et de confirmer le jugement déféré ;

Sur la requalification en contrat à temps plein ou à temps partiel :

Considérant que Monsieur Flamme demande à voir requalifier la relation contractuelle en un contrat à temps plein, faisant valoir qu'en l'absence d'écrits et de plannings connus suffisamment à l'avance, il était en permanence à la disposition de son employeur ;

Considérant qu'en l'absence de contrat écrit, faisant présumer que l'emploi est à temps complet, il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel et, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ;

Considérant que la SAS Institut Aéronautique de Paris justifie que le salarié occupait, concomitamment, d'autres emplois, notamment dans des instituts où il prodiguait une formation identique, et a été le gérant, jusqu'au 4 mars 2004, de la SARL Altitude Plus située à Lyon, dont l'activité était la formation professionnelle ; qu'elle produit également les plannings d'activité du salarié de 2001 à 2005 faisant apparaître des temps partiels ;

Considérant que les éléments produits démontrent que le salarié travaillait à temps partiel et connaissait nécessairement par avance son emploi du temps les mois où il travaillait, compte tenu notamment du fait qu'il gérait une société à Lyon et qu'il devait venir en région parisienne pour y dispenser une formation au sein de l'Institut Aéronautique de Paris ;

Considérant, au surplus, que Monsieur Flamme n'a jamais contesté sa rémunération pendant toute la période pendant laquelle il a été salarié et n'a demandé des rappels de salaires, sur la base d'un temps complet que le 18 avril 2006, lors de l'engagement de la procédure prud'homale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de débouter le salarié de sa demande de requalification à temps plein ; qu'il peut prétendre à une indemnité de requalification égale à au moins un mois de salaire ; que, compte tenu de la moyenne des salaires des 12 derniers mois, il y a lieu de lui allouer la somme de 2 081,69 euro, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, et de confirmer le jugement déféré, cette somme n'étant pas inférieure au dernier mois travaillé ;

Considérant qu'il y a également lieu de débouter le salarié de sa demande de rappel de salaires et de congés payés y afférents, sur la base d'un temps plein, et de confirmer le jugement déféré ;

Sur la rupture du contrat de travail, l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et l'indemnité pour licenciement abusif ;

Considérant que la relation contractuelle a été rompue sans respect de la procédure de licenciement ; que l'employeur soutient que le salarié a, de lui-même, arrêté d'assurer les formations qui lui étaient attribuées à la rentrée de janvier 2006 ; que le salarié répond que la date d'échéance de son dernier contrat de travail avait été fixée au 6 janvier 2006 ;

Considérant que s'agissant d'un contrat à durée indéterminée la procédure de licenciement devait être respectée par l'employeur ; qu'en l'absence d'une telle procédure, le licenciement est irrégulier et que, faute de lettre de licenciement, il est sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que Monsieur Flamme avait une ancienneté de 4 ans et 6 mois au moment de la rupture de la relation contractuelle ; qu'il y a lieu de lui allouer, compte tenu de sa rémunération, la somme de 13 000 euro au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement déféré;

Considérant que le salarié peut également prétendre à une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement pour un montant de 2 081,69 euro; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement déféré ;

Sur l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents

Considérant que le salarié, dont l'ancienneté est supérieure à deux ans, peut prétendre à un préavis de deux mois qu'il y a lieu de lui allouer les sommes de 4 163,38 euro à titre d'indemnité de préavis et de 416 euro au titre des congés payés y afférents, ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'infirmer le jugement déféré sur les quantum ;

Sur d'indemnité de licenciement :

Considérant que le salarié, dont l'ancienneté est supérieure à deux ans, peut prétendre à une indemnité de licenciement égale à 1/5e de mois par année d'ancienneté; qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 1 665,35 euro et d'infirmer le jugement déféré ;

Sur les dommages et intérêts pour agissements déloyaux et concurrence déloyale :

Sur les agissements en cours d'exécution du contrat de travail :

Considérant que la SAS Institut Aéronautique de Paris sollicite la condamnation du salarié au paiement de dommages et intérêts, au motif qu'il aurait commis des agissements déloyaux en cours d'exécution du contrat de travail, en tenant compte, pour la notation des élèves, du fait que certains devaient le suivre dans sa propre société de formation, en vendant des livres d'enseignement, propriété de l'institut, aux élèves dans les locaux de celui-ci entre février et décembre 2005, en détournant de la clientèle et en débauchant d'anciens salariés ;

Considérant que l'employeur n'apporte aux débats aucun élément prouvant ses allégations, étant observé que les attestations produites ne font pas état de faits datés, précis et circonstanciés, concernant les faits reprochés ; qu'il y a lieu de le débouter de sa demande ;

Sur les agissements après la rupture du contrat de travail :

Considérant que la SAS Institut Aéronautique de Paris invoque, également, des faits de concurrence déloyale, au motif que le 31 janvier 2006 celui-ci aurait créé une société concurrente, la société Aéro Challenge ;

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'au mois de février 2006 les deux parties n'étaient plus liées par des relations contractuelles ;

Considérant que, si dans le cadre de l'exécution du contrat de travail le salarié est tenu à l'égard de son employeur au respect d'une obligation de loyauté et de fidélité, à l'issue de celui-ci il est libéré de cette obligation, à laquelle se substitue une interdiction de concurrence déloyale ;

Considérant que les litiges relatifs au respect ou au non-respect de l'interdiction de concurrence déloyale, elle-même relative par définition à des faits commis postérieurement à la cessation du contrat de travail, ne sont pas de la compétence des juridictions prud'homales, sauf si le contrat de travail stipulait une clause de non-concurrence ;

Considérant, qu'en l'espèce, le salarié n'était soumis à aucune clause de non-concurrence en raison de l'absence de tout contrat écrit en stipulant une ;

Considérant qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré par lequel le conseil des prud'hommes de Paris s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle de l'employeur ;

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a : - requalifié la relation de travail en un contrat à durée indéterminée, - condamné la SAS Institut Aéronautique de Paris au paiement à Monsieur Flamme des sommes de : - 250 euro (deux cent cinquante euro) au titre de la prime de décembre 2005, - 2 081,69 euro (deux mille quatre vingt un euro et soixante neuf centimes) à titre d'indemnité de requalification, - débouté Monsieur Flamme de sa demande de rappel de salaires et de congés payés y afférents, sur la base d'un temps plein, -débouté la SAS Institut Aéronautique de Paris de sa demande reconventionnelle, Condamne la SAS Institut Aéronautique de Paris au paiement à Monsieur Flamme des sommes suivantes : - 4 163,38 euro (quatre mille cent soixante trois euro et trente huit centimes) au titre du préavis, - 416 euro (quatre cent seize euro) au titre des congés payés y afférents, - 13 000 euro (treize mille euro) à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, - 1 665,35 euro (mille six cent soixante cinq euro et trente cinq centimes) à titre d'indemnité de licenciement, - 2 081,69 euro (deux mille quatre vingt un euro et soixante neuf centimes) à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, - 2 500 euro (deux mille cinq cents euro) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toutes les autres demandes, Condamne la SAS Institut Aéronautique de Paris aux dépens de première instance et d'appel.