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Décisions

CA Rennes, 2e ch. com., 19 novembre 2008, n° 08-03849

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Loisirs Motoculture du Golfe (Sté)

Défendeur :

John Deere (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Guillanton

Conseillers :

Mme Cocchiello, M. Christien

Avoué :

SCP Castres-Colleu-Pérot-Le Couls-Bouvet

Avocats :

Mes Guillin, de Brosses

T. com. Vannes, du 25 avr. 2008

25 avril 2008

Pendant plusieurs années, la société LMG a entretenu des relations contractuelles avec la société John Deere.

Le dernier contrat conclu le 19 décembre 2003 pour une durée de 3 ans devait prendre fin le 31 octobre 2006.

Par courrier du 31 juillet 2006, la société John Deere a avisé la société LMG que le contrat ne serait pas renouvelé.

La société LMG a alors assigné la société John Deere en réparation du préjudice qu'elle estime subir à la suite de la rupture brutale des relations commerciales entre les parties.

Par jugement du 25 avril 2008, le Tribunal de commerce de Vannes :

- s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce d'Orléans,

- a renvoyé les parties à se pourvoir devant cette juridiction, a condamné la société LMG aux dépens.

La société LMG a formé un contredit contre cette décision. Elle demande à la cour de :

- infirmer la décision, dire que le Tribunal de commerce de Vannes est compétent, évoquer l'affaire,

- condamner la société John Deere à lui payer la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société John Deere aux "dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile".

Dans sa déclaration de contredit, la société LMG expose que sa demande de dommages-intérêts en application de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce ayant un fondement délictuel, que la clause attributive de juridiction figurant dans le contrat qui liait les parties n'est pas applicable, qu'elle a le choix, selon l'article 46 du Code de procédure civile, soit d'assigner le défendeur devant le lieu de la juridiction du fait dommageable, soit de l'assigner devant la juridiction du lieu où le dommage est subi et qu'elle peut ainsi assigner la société John Deere devant le Tribunal de commerce de Vannes.

La société John Deere demande à la cour de:

- débouter la société LMG de sa demande,

- confirmer le jugement,

- condamner la société LMG à lui payer la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société LMG aux entiers dépens qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Elle expose que la clause attributive de juridiction figurant dans le contrat et signée par des personnes ayant contracté en qualité de commerçant a force obligatoire; que le fondement délictuel de l'action ne peut écarter cette clause qui est régulière et couvre toutes les hypothèses de cessation du contrat.

Aucune note en délibéré n'ayant été autorisée, la cour n'a pas tenu compte de celle que les parties lui ont adressée, pour la rédaction de cette décision.

DISCUSSION

Considérant que la société LMG a engagé une action contre la société John Deere, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce,

Considérant que la rupture brutale de relations commerciales établies engage la responsabilité délictuelle de son auteur ; que le tribunal compétent pour connaître du préjudice qu'elle cause, est, selon l'article 46 du Code de procédure civile, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi,

Considérant que dans le contrat liant les deux parties, se trouve insérée, chapitre VII article 4, la clause suivante : "Tout différend et/ou litige relatif à la formation, l'interprétation, l'exécution, la résiliation ou la cessation du contrat sera de la compétence exclusive du Tribunal de commerce d'Orléans, qu'il s'agisse d'une demande principale, d'un appel en garantie ou en intervention forcée, d'une assignation en référé, et ce, même en cas de pluralité de défendeurs"; que cette clause n'est pas discutée dans son existence ou dans sa régularité,

Considérant, toutefois, que la société LMG ne conteste pas que la décision de ne pas renouveler le contrat ne peut donner lieu à indemnisation; qu'elle entend obtenir réparation du préjudice qu'elle dit subir en raison de la brutalité de la disparition, sans préavis d'une durée suffisante, d'une situation créée par l'existence d'affaires communes entre les parties pendant de nombreuses années, que la notion de "relations commerciales" que vise l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce dépasse la notion de "relations contractuelles"; que la "rupture des relations commerciales" n'est pas la "cessation du contrat" et n'est pas visée par la clause attributive de compétence,

Considérant que la décision du premier juge sera infirmée,

Considérant qu'il n' y a pas lieu d'évoquer, que l'affaire sera renvoyée devant le Tribunal de commerce de Vannes, en application de l'article 86 du Code de procédure civile pour y être jugé au fond,

Considérant que la société John Deere versera à la société LMG la somme de 3 000 euro au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles et supportera les frais du contredit,

DÉCISION

Par ces motifs, LA COUR, Infirmant le jugement, Statuant à nouveau, Dit que le Tribunal de commerce de Vannes est compétent pour connaître la demande formée en application de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce par la société LMG contre la société John Deere, Renvoie l'affaire devant le Tribunal de commerce de Vannes pour y être statué au fond, Condamne la société John Deere à payer à la société LMG la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société John Deere aux frais du contredit.