Cass. 1re civ., 6 janvier 1971, n° 68-12.590
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Boudet
Défendeur :
Elsen
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
M. Thirion
Avocat général :
M. Blondeau
Avocat :
Me Rouvière
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 546 du Code de procédure civile, attendu que les jugements soumis à exequatur sont ceux qui ont été prononcés au nom d'une souveraineté étrangère ; - Attendu que selon les énonciations des juges du fond, Elsen a, sur le territoire d'Andorre, où il est domicilié, causé involontairement des dommages corporels et matériels à Boudet de nationalité française ; - Qu'il a, pour ce fait, été condamné par le Tribunal des Corts, siégeant en Andorre, à une amende et à payer une indemnité à Boudet ;
Que celui-ci ayant assigné devant le tribunal de son domicile Elsen et son assureur, la compagnie Le Patrimoine, en réparation du préjudice par lui subi, l'arrêt confirmatif attaqué a fait droit à sa demande, aux motifs que la principauté d'Andorre étant un pays étranger, la sentence du Tribunal des Corts ne pouvait, faute d'exequatur, avoir d'effets en France ;
Attendu, cependant, que si les vallées d'Andorre jouissent de certains privilèges et franchises et ont une organisation judiciaire distincte de celle de la France, elles ne constituent ni un Etat, ni une personne de droit international ;
Que l'Etat français y exerçant les droits qui lui sont dévolus et singulièrement celui de la justice qu'il partage avec l'évêque d'Urgel, les décisions judiciaires qui y sont rendues ne peuvent être considérées comme ayant été prononcées au nom d'une souveraineté étrangère ; d'ou il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, a par fausse application, violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen, ni sur le second moyen ; Casse et annule l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'appel de Toulouse le 6 mai 1968 ; Remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoient devant la Cour d'appel de Montpellier.