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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 28 juin 2007, n° 05-10038

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ame (SARL)

Défendeur :

Carré Blanc Distribution (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pimoulle

Conseillers :

M. Remenieras, Mme Le Bail

Avoués :

SCP Bernabe-Chardin-Chevillier, SCP Fanet-Serra

Avocats :

Mes Arbib, Montfort, Gosme

T. com. Créteil, du 22 févr. 2005

22 février 2005

LA COUR,

Vu l'appel relevé par la SARL Ame du jugement du Tribunal de commerce de Créteil (1re chambre, n° de RG 2004F00451), prononcé le 22 février 2005 ;

Vu les dernières conclusions de l'appelante (10 août 2005);

Vu les dernières conclusions (9 mars 2006) de la SA Carré Blanc, intimée et incidemment appelante ;

Sur quoi,

Considérant que Ame, exploitant un fonds de commerce de chemiserie, bonneterie, confection en tout genre et linge de maison, a conclu le 6 août 1998 un contrat de franchise avec Carré Blanc ; que ce contrat à durée déterminée, venu à expiration le 6 août 2003, comportait notamment l'engagement du franchisé (" article 20 : droit de préférence ") d'informer le franchiseur de son éventuelle intention de céder son droit au bail ou son fonds de commerce et prévoyait ("article 22 garanties") le nantissement du fonds de commerce du franchisé en garantie de ses obligations envers le franchiseur ; que, Ame ayant cédé son droit au bail à la société Heptagone le 11 février 2004, ces deux sociétés, après avoir vainement réclamé la mainlevée du nantissement qui avait été inscrit conformément aux prévisions du contrat, ont assigné Carré Blanc à cette fin et en paiement de dommages-intérêts ; que le tribunal, par le jugement dont appel, a, entre autres dispositions, condamné Ame à payer les factures restant dues à Carré Blanc, ordonné la mainlevée du nantissement sur justification de leur paiement et, faisant droit sur ce point à la demande reconventionnelle de Carré Blanc, condamné Ame a lui payer des dommages-intérêts sur le fondement d'une rupture sans préavis de relations commerciales établies;

Considérant qu'il apparaît des écritures des parties que le jugement entrepris n'est en définitive critiqué, hormis les conditions d'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, que, premièrement, en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts présentée par Ame en réparation du préjudice que lui aurait causé Carré Blanc en refusant de donner mainlevée du nantissement, deuxièmement, en ce qu'il l'a condamnée à payer à Carré Blanc 31 704,50 euro de dommages-intérêts pour la rupture sans préavis des relations commerciales, Carré Blanc formant un appel incident sur ce dernier point en réclamant une indemnité plus forte;

Sur la mainlevée du nantissement:

Considérant que Ame ne conteste pas le montant de la somme qu'elle restait devoir à Carré Blanc, tel que retenu par le tribunal, de 23 209,10 euro;

Considérant qu'il ressort des conclusions de Carré Blanc (p. 14), non contredites sur ce point, que cette dernière a donné mainlevée du nantissement aussitôt qu'elle a été payée de sa créance ; qu'il n'est donc pas établi qu'elle aurait commis une faute en retardant abusivement cette diligence;

Considérant, par ailleurs, que Ame ne produit au débat aucun élément de nature à justifier d'un préjudice, du fait du retard allégué, équivalent à la somme de 10 000 euro qu'elle réclame ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Ame de ce chef;

Sur la rupture sans préavis des relations commerciales

Considérant qu'il est constant que le contrat de franchise, initialement prévu pour une durée de cinq ans et non renouvelé, a cessé de produire ses effets le 6 août 2003 ; que les relations commerciales qui procédaient de l'exécution de ce contrat, rompues d'accord entre les parties puisqu'aucune d'elles n'a sollicité le renouvellement du contrat, éventualité pourtant envisagée par son article 3, alinéa 2, n'entrent donc pas dans les prévisions de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce; que, s'agissant en effet d'un contrat à durée déterminée, le préavis était inscrit dans la disposition du contrat qui prévoyait, dès sa conclusion, la date à laquelle il prendrait fin; que Carré Blanc n'avait à cette date aucune raison de croire en la pérennité d'un courant d'affaire qu'elle-même n'avait pas témoigné vouloir entretenir ;

Considérant que, si de nouvelles relations ont pris naissance après la rupture du contrat, nécessairement sur de nouvelles bases, en tout cas dans un contexte entièrement différent de celui du contrat de franchise, leur durée doit seule être prise en compte pour mesurer le préavis que Ame aurait dû laisser à Carré Blanc avant de prendre l'initiative de les rompre;

Considérant que les factures produites au débat démontrent que Ame a passé des commandes à Carré Blanc de septembre 2003 à fin janvier 2004; qu'il ressort des circonstances de la cause, quoique Carré Blanc ne précise pas la date de la rupture brutale dont elle se prétend la victime, que ce nouveau courant d'affaires a cessé, au plus tard, lorsque Ame a cédé son fonds de commerce à Heptagone, soit le 11 février 2004 ; que les relations commerciales établies à prendre en compte pour l'application des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ont donc duré cinq mois;

Considérant que Ame a donné avis à Carré Blanc de la cession de son droit au bail par lettre du 16 janvier 2004 ; que cette information signifiait nécessairement la fin de son activité et celle des relations commerciales ;

Considérant, dans ces circonstances, que Carré Blanc a bénéficié d'un préavis écrit suffisant au regard de la durée des relations commerciales au sens des dispositions précédemment rappelées ; que les conditions d'un engagement de la responsabilité de Ame sur la base de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ne sont donc pas réunies, que Carré Blanc sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement entrepris réformé en conséquence;

Par ces motifs, Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SARL Ame à payer à Carré Blanc 31 704,50 euro de dommages-intérêts sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6, I 5° du Code de commerce, Statuant à nouveau de ce seul chef, Déboute la SA Carré Blanc de sa demande, Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions, Condamne la SA Carré Blanc aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.