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Décisions

CA Riom, 4e ch. soc., 18 mars 2008, n° 07-00542

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Finette (Sté)

Défendeur :

Carneau

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sonokpon

Conseillers :

MM. Thomas, Ruin

Avocats :

Mes Llorca, Arsac

Cons. prud'h. Clermont-Ferrand, du 30 ja…

30 janvier 2006

Faits et procédure

M. Patrick Carneau a été embauché en qualité de représentant VRP multicartes par la société Finette, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée du 7 septembre 2001.

Le 12 juillet 2004, la société Finette a notifié à M. Carneau son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Saisi par le salarié, le Conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, par jugement du 30 janvier 2006, a déclaré le licenciement de M. Carneau pourvu d'une cause réelle et sérieuse, débouté le salarié de ses demandes à ce titre et a condamné la société Finette à lui payer les sommes de :

- 5 115 euro à titre d'indemnité de préavis,

- 511,50 euro à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 3 531 euro à titre de complément de salaire,

- 28 000 euro à titre d'indemnité de clientèle,

- 2 934,42 euro à titre de remboursement de facture d'achat,

- 17 051,25 euro au titre de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence et 9 mensualités de 1 136,75 euro au même titre,

- 700 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Finette a interjeté appel de cette décision le 9 février 2006.

Prétentions des parties

La société Finette conclut à la confirmation partielle du jugement en ce qu'il retient d'une part la validité du licenciement de M. Carneau pour cause réelle et sérieuse, et d'autre part le défaut de fondement de la demande du salarié au titre des commissions sur retour sur échantillonnage et des congés payés y afférents.

Elle fait valoir que les manquements imputables à M. Carneau aux obligations découlant de son contrat de travail, à savoir notamment la prise de commandes en dehors de son secteur contractuel, l'absence de rapports de visite et d'activité, le défaut d'implication dans les salons professionnels ainsi que dans la relance des factures impayées et même la communication de faux bons de commandes constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Elle souligne que l'absence de commande transmise par M. Carneau et son indisponibilité pour un entretien préalable au licenciement sur la période du 19 mars au 11 juillet 2004 corroborent son inactivité professionnelle sur cette période et justifient le rejet de sa prétention à des commissions sur retour sur échantillonnage dont il n'apporte pas la preuve.

Concluant à la réformation du jugement pour le surplus, elle estime ne pas devoir un rappel de salaire correspondant au 2e semestre 2004, contestant le calcul du salarié qui confondrait 2e semestre et 2e trimestre, et soutenant lui avoir versé les sommes dues après avoir procédé "par compensation" au règlement de la facturation de la collection "Hiver 2004" conservée par l'intimé.

Elle soutient être dispensée de devoir payer à M. Carneau une indemnité de préavis et une indemnité compensatrice de congés payés sur ce préavis dans la mesure où l'intéressé ne travaillait pas au cours de cette période de préavis.

Elle conteste l'achat d'une clientèle par M. Carneau ainsi que son développement en nombre et en valeur et donc le fait de lui devoir une indemnité à ce titre, dès lors que celui-ci n'apporte aucune preuve tangible des faits qu'il allègue.

Elle estime ne pas avoir à rembourser 50 % de la valeur de la facture d'achat de la collection hiver 2004 non restituée par le salarié, niant l'existence de l'usage allégué d'une remise de 50 % sur les factures d'achat des collections conservées par les VRP.

Elle conteste devoir verser à M. Carneau une contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence en faisant valoir, d'une part, que le travail de l'intimé en qualité de VRP multicartes avec d'autres employeurs et sur le même secteur était incompatible avec l'invocation d'une clause de non-concurrence, et, d'autre part, qu'elle a, par courrier du 7 décembre 2004, explicitement libéré l'intéressé de toutes obligations de non-concurrence, ce qui limite la période de calcul.

Elle sollicite de débouter le salarié de ses demandes et de le condamner au versement d'une indemnité de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M. Carneau, concluant à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer les sommes de 2 934,42 euro à titre de remboursement de factures sur l'achat des collections hiver 2004 et de 3 531 euro à titre de complément de salaire. Y ajoutant, il demande de condamner l'employeur à lui payer la somme de 353,10 euro au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante.

Il demande également la confirmation du jugement en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement et la contrepartie financière à la clause de non-concurrence sauf à augmenter le montant de la somme allouée.

Il sollicite d'infirmer le jugement pour le surplus. Il soutient avoir droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité de congés payés sur ce préavis du fait qu'il a été dispensé d'exécuter ce préavis par la lettre de licenciement.

Il prétend avoir droit au versement d'une indemnité de clientèle, dans la mesure où il estime avoir créé ou apporté toute la clientèle, non seulement par un "rachat" auprès de son prédécesseur mais aussi par son expérience sur le secteur en question.

Il fait valoir son droit à un commissionnement de retour sur échantillonnage au titre des commandes engendrées par sa prospection mais enregistrées postérieurement à la rupture de son contrat de travail. Il estime être en droit de prétendre à une contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence incluse dans son contrat de travail, en application de l'article 17 de l'accord national interprofessionnel des VRP.

Sur le licenciement, il estime que le vrai motif est la procédure prud'homale qu'il a engagée et soutient que les faits invoqués ne peuvent donner lieu à sanction en raison d'une part, de ce que la prescription de deux mois serait acquise et, d'autre part, de ce que les faits ont déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire.

Sur le fond, il conteste chacun des reproches qui lui sont adressés.

Il réclame le remboursement de factures sur l'achat de la collection "Hiver 2004" conservée par lui, dont la société a prélevé le montant total sur son salaire alors que la pratique de l'entreprise consiste à accorder au VRP une remise de 50 %.

Il demande la condamnation de la société Finette à lui payer, avec intérêts au taux légal sur les sommes autres que les dommages-intérêts à compter de la date de la convocation de l'employeur à l'audience de tentative de conciliation et avec capitalisation, les sommes de:

- 5 421,82 euro à titre d'indemnité de préavis,

- 542,18 euro à titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- 48 145,78 euro à titre d'indemnité de clientèle,

- 7 237,43 euro à titre de commissionnement de retour sur échantillonnage,

- 732,74 euro au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- 28 916,32 euro au titre de l'indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence,

- 2 891,63 euro au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- 65 067,62 à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens antérieurs des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

Discussion

Sur la recevabilité

La décision contestée ayant été notifiée le 2 février 2006, l'appel régularisé le 9 février, est recevable au regard du délai d'un mois prescrit par les articles 538 du nouveau Code de procédure civile et R. 517-7 du Code du travail.

Sur le rappel de salaire

- Sur la collection hiver 2004

Le contrat de travail prévoit que la rémunération du salarié est constituée par une commission égale à 7 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par le VRP. Il précise qu'elle n'est due qu'au fur et à mesure des encaissements et au prorata de ceux-ci.

Il s'ensuit que M. Carneau n'est en droit de prétendre aux commissions que sur les commandes ayant été suivies d'un paiement effectif et que doivent être déduites de l'assiette de calcul les commandes ayant fait l'objet d'une annulation, dès lors que cette annulation n'est pas la conséquence d'un comportement fautif de l'employeur.

Il résulte des pièces justificatives produites et, notamment, de l'attestation du comptable de l'entreprise, que le montant des commandes correspondant à la collection hiver 2004 s'est élevé à 189 771 euro et qu'après déduction des commandes annulées, des commandes non livrables et des avoirs, le montant du chiffre d'affaires commissionné s'est établi à 160 728 euro.

Alors que l'employeur justifie des demandes d'annulation de commandes émanant de clients, il ne ressort pas des éléments versés aux débats que la réduction du chiffre d'affaires servant au calcul de la commission soit due à un comportement fautif de la société Finette. M. Carneau n'est donc pas fondé à solliciter un rappel de commission sur la différence.

- Sur la collection printemps-été 2004

M. Carneau justifie que le montant des commandes prises sur son secteur s'est élevé, pour cette collection, à 156 476 euro. Il n'est pas contesté par l'employeur que la différence entre ce chiffre et le chiffre d'affaires ayant servi de base de calcul pour la commission versée à ce titre s'élève à 35 200 euro mais la société Finette n'apporte aucun élément de preuve de nature à justifier du non-paiement de la commission sur cette différence.

- Sur l'avoir de 2 859 euro

M. Carneau sollicite un rappel de commission sur cet avoir sans fournir aucun élément de preuve ni aucune explication sur une telle demande.

Il s'ensuit qu'au total, la demande de M. Carneau doit être accueillie à hauteur de 2 100 euro correspondant à la somme restant due au titre de la collection printemps-été 2004. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a alloué au salarié une somme supérieure.

La demande d'indemnité compensatrice de congés payés, formée en cause d'appel, sera accueillie à hauteur de 210 euro.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Il n'est pas contesté que la durée du préavis applicable en l'espèce est de trois mois.

La société Finette n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de son affirmation selon laquelle M. Carneau n'aurait pas travaillé pendant la période du préavis, compte tenu du caractère saisonnier de son activité.

Le contrat de travail ne fait pas état de périodes d'inactivité, indiquant seulement que le VRP s'engage à visiter les clients au moins deux fois par an. Il précise également que la collection automne/hiver est livrable de juillet à octobre et la collection printemps/été de janvier à avril. Dans la lettre de licenciement, l'employeur a informé M. Carneau que son préavis commencerait à courir à compter de la date de cette lettre, soit le 12 juillet 2004, et qu'il serait dispensé de l'exécuter. Il est, en outre, constant qu'à compter du mois de septembre 2004, M. Carneau devait démarcher les clients pour la collection été 2005.

Dans ces conditions, c'est à tort que l'employeur s'oppose au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis. Compte tenu du salaire brut moyen dont justifie le salarié en 2003, sa demande en paiement de la somme de 5 421,82 euro sera accueillie ainsi que celle au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante et le jugement sera infirmé en ce qu'il lui a alloué une somme inférieure.

Sur l'indemnité de clientèle

En application de l'article L. 751-9 du Code du travail, le VRP a droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui.

M. Carneau verse aux débats le courrier qu'il a envoyé à la société Finette le 8 mars 2001 dans lequel il indique racheter la clientèle du secteur Rhône-Alpes à M. Patrick Hozemski. Selon acte du 29 juin 2001 intitulé "compromis de reprise de clientèle", la société SD Collection a cédé à M. Carneau l'exploitation de la marque de maille "Finette" sur les départements constituant le même secteur avec l'accord de la société Finette. Il était précisé que le prix de reprise de l'indemnité de clientèle serait calculé en tenant compte uniquement des clients ayant commandé sur la saison hiver 2001 et que le règlement de cette somme interviendrait après la signature du contrat d'engagement de M. Carneau par la société Finette en tant que VRP.

Le salarié produit enfin l'attestation de la gérante de la société SD Collection selon laquelle M. Carneau et un représentant de la société ont été reçus par les représentants de la société Finette "pour finaliser la vente de la carte des tricots Finette à M. Carneau".

Alors que ces éléments d'appréciation tendent à apporter la preuve de l'apport d'une clientèle à la société Finette par M. Carneau, l'employeur n'apporte aucun élément de preuve contraire. Le contrat de travail qui indique seulement que la société "fournit" au salarié 37 clients, ne permet nullement de remettre en cause l'apport d'une clientèle par M. Carneau alors que le secteur attribué au salarié correspond précisément à celui où se situe la clientèle ayant fait l'objet de la transaction avec la société SD Collection. Il convient, en outre, de relever que le nombre de clients figurant sur les listes versées aux débats est supérieur à celui porté sur le contrat de travail.

Par ailleurs, alors que le contrat de travail fait état d'un chiffre d'affaires réalisé sur son secteur de 289 653 euro, les bulletins de salaire font apparaître un chiffre d'affaires réalisé en 2003 de 375 468,73 euro.

En l'absence de tout élément de preuve contraire, il est suffisamment démontré que M. Carneau a apporté et développé une clientèle en nombre et en valeur.

Compte tenu des pièces justificatives produites, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé le montant de l'indemnité due à la somme de 28 000 euro, cette somme étant de nature à réparer le préjudice subi du fait de la perte de clientèle.

Sur les commissions de retour sur échantillonnage

En application de l'article L. 751-8 du Code du travail, le représentant a droit aux commissions sur les commandes transmises après son départ mais qui sont la suite directe de ses démarches antérieures. L'employeur justifie par le tableau de "cadence des ventes" de M. Carneau qu'aucune commande n'a été enregistrée après le 21 mars 2004 et le comptable de l'entreprise confirme, dans une attestation du 23 mai 2005, qu'aucune commande n'a été portée à sa connaissance à partir du 18 mars 2004.

Dans ces conditions, M. Carneau n'est pas fondé à solliciter une quelconque somme à titre de commission de retour sur échantillonnage et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande à ce titre.

Sur la contrepartie financière à la clause de non-concurrence

L'article 17 de l'accord interprofessionnel du 3 octobre 1975 dont il n'est pas contesté qu'il soit applicable en l'espèce, prévoit que l'interdiction contractuelle de concurrence après la rupture du contrat de travail n'est valable que pendant une durée maximale de 2 années à compter de cette rupture et qu'en ce qui concerne les secteurs et catégories de clients que le représentant de commerce était chargé de visiter au moment de la notification de la rupture du contrat. Ce texte précise que, pendant l'exécution de l'interdiction, l'employeur versera au représentant une contrepartie pécuniaire mensuelle spéciale dont le montant sera égal à 2/3 de mois si la durée en est supérieure à un an et à 1/3 de mois si la durée en est inférieure ou égale à un an.

La clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail de M. Carneau prévoit que ce dernier est soumis à cette interdiction pendant deux ans.

M. Carneau est, en conséquence, bien fondé à soutenir qu'une telle interdiction est assortie de la contrepartie financière conventionnelle prévue par l'article 17 précité.

L'article 17 prévoit également que l'employeur peut renoncer à l'interdiction de la clause à condition que cette renonciation soit notifiée au VRP dans les quinze jours suivant la notification de la rupture du contrat de travail.

L'employeur n'est, en conséquence, pas fondé à s'opposer au paiement de la somme demandée au titre de la contrepartie financière en se prévalant de la lettre du 12 décembre 2004 par lequel il a déclaré libérer le salarié de son obligation.

Il n'est pas davantage fondé à soutenir que la clause était inapplicable en raison de la qualité de VRP multicartes du salarié ni que M. Carneau n'aurait pas respecté son obligation de non-concurrence en continuant à travailler pour ses autres employeurs.

Il convient de relever qu'aux termes du contrat de travail, M. Carneau a été embauché en toute connaissance de sa qualité de VRP multicartes, expressément mentionnée avec cette précision que le salarié a déclaré représenter les sociétés Breal, Ellogio et La Strada. Il était, en outre, précisé que ces sociétés ne commercialisent pas de produits concurrents ou similaires à ceux figurant au programme de vente de la société Finette.

Il s'ensuit que M. Carneau n'a pu se livrer à aucune activité concurrente en travaillant à la fois avec la société Finette et les autres sociétés avec lesquelles il était lié ni en continuant à travailler avec ces dernières après le licenciement.

En revanche, la clause de non-concurrence lui faisait interdiction de travailler avec une société ayant la même activité que la société Finette et il ne ressort pas des éléments versés aux débats que cette obligation n'aurait pas été respectée.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à M. Carneau une somme calculée conformément à l'article 17 de l'accord du 3 octobre 1975.

La demande d'indemnité compensatrice de congés payés, formée en cause d'appel, sera accueillie à hauteur de 1 705,12 euro.

Sur le licenciement

Il résulte de la lettre du 12 juillet 2004, qui fixe les termes du litige, que le licenciement est motivé par les griefs suivants:

- prise de commandes hors secteur,

- absence de rapports mensuels d'activité et de visite,

- absence deux jours sur quatre pendant les salons professionnels,

- absence de relance de la clientèle pour factures impayées,

- communication de faux bons de commande.

Cependant, M. Carneau fait, à juste titre, valoir que, par lettre du 17 novembre 2003, un avertissement lui avait été notifié, l'employeur lui reprochant, notamment:

- d'être intervenu hors du secteur qui lui avait été attribué,

- d'avoir surchargé des bons de commande en augmentant les quantités demandées,

- de ne participer que trois jours sur quatre aux salons du prêt-à-porter,

- de ne pas envoyer de rapports d'activité.

Il apparaît ainsi qu'à la seule exception de celui tenant à l'absence de relance des clients pour factures impayées, les griefs visés par la lettre de licenciement sont identiques à ceux ayant fondé l'avertissement.

Il s'ensuit, M. Carneau ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire, que seuls pouvaient faire l'objet d'une autre sanction des faits nouveaux commis postérieurement à la date de l'avertissement ou des faits non visés par celui-ci.

Or, l'employeur ne justifie pas qu'après l'avertissement, M. Carneau aurait persisté à prendre des commandes en dehors du secteur qui lui était attribué.

Il ne justifie pas non plus que le salarié n'aurait pas été présent pendant toute la durée des salons professionnels alors que celui-ci conteste le reproche qui lui est fait à ce titre.

Dans la lettre de licenciement, l'employeur reproche à M. Carneau la communication de faux bons de commande concernant les quantités d'articles commandés par trois clients ("La boutique", "Amélie" et "Flore") mais les pièces produites concernent des commandes litigieuses constatées le 28 octobre 2003 qui ont déjà fait l'objet de l'avertissement du 17 novembre 2003. Il n'est nullement démontré que de nouveaux bons de commande comportant des anomalies identiques auraient été constatés ultérieurement.

La société Finette ne rapporte pas non plus la preuve de factures qui seraient restées impayées postérieurement à l'avertissement et pour lesquelles M. Carneau n'aurait effectué aucune diligence. Enfin, s'agissant des rapports d'activité, le contrat de travail prévoit que "le VRP s'engage à fournir un rapport d'activité mensuel concernant les clients visités par lui, lesdits rapports permettant à la société de considérer tel ou tel client comme faisant partie de la clientèle du VRP".

Postérieurement à l'avertissement, il est établi que M. Carneau a transmis à l'employeur un rapport, le 22 janvier 2004, contenant les dates de ses rendez-vous pour la collection hiver 2004. Il ne saurait être reproché au salarié de pas avoir transmis un rapport chaque mois alors que l'activité de la société Finette est saisonnière et que l'activité de M. Carneau pour cette société était concentrée sur la période de janvier à avril en ce qui concerne la collection hiver.

M. Carneau produit un rapport daté du 20 mars 2004 indiquant la liste des clients ayant commandé avec les quantités et l'évolution des commandes par rapport à la saison précédente, la liste des clients perdus et l'analyse du VRP sur la saison.

Il est vrai que le salarié ne justifie pas que ce rapport a été envoyé à l'employeur mais ce dernier ne conteste pas l'avoir reçu. Il s'ensuit que, pour une partie, les griefs formulés dans la lettre de licenciement ne visent pas d'autres faits que ceux déjà sanctionnés et que, pour l'autre partie, ils ne sont pas justifiés.

Le licenciement ne repose donc sur aucune cause réelle et sérieuse et le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes à ce titre.

Compte tenu de la durée de la présence du salarié dans l'entreprise, de sa rémunération et des pièces justificatives produites, le préjudice résultant du licenciement sera réparé en lui allouant la somme de 15 000 euro à titre de dommages-intérêts.

Sur le remboursement des factures sur l'achat de collections hiver 2004

Il est constant que l'employeur a facturé au salarié la somme de 5 868,84 euro correspondant au coût de la collection hiver 2004 conservée par celui-ci et qu'il a déduit cette somme des commissions dues.

Il n'est pas contesté que le salarié a conservé la collection en cause.

Cependant, il résulte des courriers échangés entre les parties qu'une situation identique s'était présentée l'année précédente et que l'employeur avait alors appliqué une remise de 50 % sur le prix de la collection conservée ainsi qu'en atteste la facture du 27 novembre 2003. Dans le courrier du 17 novembre 2003, l'employeur explique que la collection, étant inutilisée depuis plus d'un mois, est considérée comme acquise par le salarié avec remise de 50 % "comme à (ses) collègues" et déduite de ses commissions.

Il est ainsi suffisamment démontré que l'usage dans l'entreprise est de pratiquer une remise de 50 % sur le prix de la collection conservée par le salarié.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à M. Carneau la somme de 2 934,42 euro en remboursement de la moitié du montant de la facture.

Sur les intérêts

Les sommes allouées à titre de salaires (rappel de salaire, indemnité de préavis et indemnité compensatrice de congés payés, contrepartie financière à la clause de non-concurrence) porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur à l'audience de tentative de conciliation valant mise en demeure, soit le 22 novembre 2004.

Les sommes allouées à titre indemnitaire (indemnité de clientèle, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, remboursement de facture) produiront intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2006, date du jugement du conseil de prud'hommes.

Les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1154 du Code civil.

Sur l'ASSEDIC

Compte tenu que le licenciement sans cause réelle et sérieuse est intervenu dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et qu'il a été prononcé à l'encontre d'un salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté, l'employeur devra rembourser à l'ASSEDIC, par application des dispositions de l'article L. 122-14-4 alinéa 2 du Code du travail et compte tenu des pièces justificatives produites, les indemnités chômage versées à M. Carneau pendant six mois.

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

En application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'employeur doit payer à M. Carneau, en plus de la somme allouée en première instance sur le même fondement, la somme de 1 500 euro au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement : En la forme, Déclare l'appel recevable, Au fond, Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. Patrick Carneau de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ses dispositions relatives au rappel de salaire, à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante, Infirmant sur ces points et statuant à nouveau, Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, Condamne la société Finette à payer à M. Patrick Carneau les sommes de: * 15 000 euro (quinze mille euro) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 2 100 euro (deux mille cent euro) à titre de rappel de salaire, * 5 421,82 euro (cinq mille quatre cent vingt et un euro et quatre-vingt douze centimes) à titre d'indemnité compensatrice de préavis, * 542,18 euro (cinq cent quarante deux euro et dix huit centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante, Y ajoutant, Condamne la société Finette à payer à M. Patrick Carneau les sommes de : * 210 euro (deux cent dix euro) au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondant au rappel de salaire, * 1 705,12 euro (mille sept cent cinq euro et douze centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondant à la contrepartie financière à la clause de non-concurrence, Dit que les sommes allouées à titre de salaires (rappel de salaire, indemnité de préavis et indemnité compensatrice de congés payés, contrepartie financière à la clause de non-concurrence) porteront intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2004 et que les sommes allouées à titre indemnitaire (indemnité de clientèle, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, remboursement de facture) produiront intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2006, Dit que les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1154 du code civil, Condamne la société Finette à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités chômage versées à M. Patrick Carneau pendant six mois, Condamne la société Finette à payer à M. Patrick Carneau la somme de 1 500 euro (mille cinq cents euro) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la société Finette à supporter les dépens de première instance et d'appel.