CCE, 28 octobre 2009, n° 2010-35
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Concernant des aides octroyées par l'Italie pour la restructuration des coopératives de pêche et de leurs consortiums (aide d'État C 29-06)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa, après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément audit article, considérant ce qui suit:
1. PROCÉDURE
(1) L'Italie a notifié à la Commission par lettre du 17 octobre 2002 le décret législatif n° 226 du 18 mai 2001 (ci-après "le décret du 18 mai 2001") en indiquant que les mesures visées aux articles 7 et 8 de ce décret avaient été mises en œuvre.
(2) Un dispositif d'aide d'État relatif à la restructuration des coopératives de pêche et de leurs consortiums figure à l'article 8 de ce décret. Conformément à cet article, le champ d'intervention du fonds central pour le crédit à la pêche est étendu à la couverture financière des plans de restructuration des entreprises, tels que prévus par l'article 11, paragraphe 8 ter, de la loi n° 41 du 17 février 1982 (ci après "la loi n° 41 de 1982"), en faveur des coopératives et de leurs consortiums actifs dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture ainsi que dans la transformation et la commercialisation des produits de ce secteur.
(3) Puisque l'Italie avait indiqué que cette mesure avait été mise en œuvre, cette dernière avait été enregistrée comme aide illégale au sens de l'article 1er, point f), du règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du traité (1) [devenu article 88].
(4) À plusieurs reprises, des renseignements complémentaires avaient été demandés à l'Italie. Par lettre C(2005) 161 du 20 janvier 2005, la Commission lui avait même adressé une injonction de fournir des informations, conformément à l'article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659-1999. L'Italie a répondu à cette injonction par lettre du 3 mars 2005. Un autre courrier, daté du 12 juillet 2005, est ensuite parvenu à la Commission.
(5) En raison des doutes qu'elle a eus sur la compatibilité de ce régime d'aide avec le marché commun, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure formelle d'examen prévue par l'article 93 [devenu 88] du traité CE. La Commission a informé l'Italie de cette décision par lettre C(2006) 2312 du 22 juin 2006 (2).
(6) L'Italie a fait part des ses observations par lettres des 14 septembre et 31 octobre 2006.
2. DESCRIPTION
(7) Comme indiqué ci-dessus, le décret du 18 mai 2001 a pour objet d'étendre le champ d'intervention du fonds central pour le crédit à la pêche aux opérations de restructuration des coopératives de pêche et de leurs consortiums, comme prévu à l'article 11, paragraphe 8 ter, de la loi n° 41 de 1982.
(8) Le décret du 18 mai 2001 est une disposition qui, à partir de son entrée en vigueur, prévoit le financement des mesures d'aide établies par le décret du ministre des politiques agricoles du 10 février 1998 (ci-après "le décret du 10 février 1998") définissant les modalités d'application de l'article 11, paragraphe 8 ter, de la loi n° 41 de 1982.
(9) Les caractéristiques de ce régime d'aide, telles que décrites dans le décret du 10 février 1998, sont les suivantes:
- l'aide est accordée sous forme d'aide à fonds perdu dans la limite de 40 % des dépenses admissibles ou sous forme de prêt à taux bonifié dans la limite de 85 % de ces dépenses,
- le plan de restructuration doit viser à assainir la coopérative et à rétablir sa viabilité économique et financière,
- les coûts admissibles concernent: l'élaboration et la mise en œuvre du plan de restructuration; la modernisation, l'agrandissement et la reconversion productive des établissements, équipements et immeubles dans le cadre de programmes de relance et de requalification des entreprises axés sur un renforcement de l'efficacité et de la compétitivité; la couverture des moins-values patrimoniales éventuelles résultant de la cessation d'activité et des immobilisations non intégralement amorties ou la couverture des charges d'amortissement des immobilisations corporelles et incorporelles qui ne sont plus utilisées dans le processus de production; l'organisation de formations; les charges afférentes à la création et au démarrage de sociétés supportées afin de favoriser l'achat par le personnel salarié d'activités ou de secteurs de l'entreprise exclus du processus de restructuration; les indemnités de licenciement et de préretraite, l'encouragement de départs volontaires; le rééquilibrage financier et patrimonial grâce à l'apurement des dettes résultant des pertes accumulées au cours des années précédant l'adoption du plan de restructuration.
(10) Par lettre du 3 mars 2005, l'Italie avait précisé que ces aides s'adressent à des entreprises, constituées sous la forme de coopératives, répondant à la définition des petites et moyennes entreprises au sens du droit communautaire et qu'elles sont limitées à la période nécessaire à la restructuration et ne peuvent être octroyées qu'une fois par entreprise.
(11) Selon l'Italie, ce régime d'aide n'est assorti d'aucune limitation de durée. Aucune limitation ne figure dans le décret du 10 février 1998 ni dans celui du 18 mai 2001. En outre, la lettre de l'Italie du 12 juillet 2005 indique expressément que les dispositions de ce décret restent en vigueur et pourront être mises en œuvre les années suivantes.
(12) La Commission n'a eu aucune information sur le montant des aides effectivement octroyées.
3. MOTIFS JUSTIFIANT L'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE FORMELLE D'EXAMEN
(13) La Commission a estimé que ce régime d'aide d'État mettait en œuvre une aide illégale au sens de l'article 1er, point f), du règlement (CE) n° 659-1999, c'est-à-dire une aide nouvelle dispensée en violation de l'obligation de notification préalable à la Commission.
(14) Dans les lettres envoyées avant l'analyse préliminaire de la Commission, l'Italie avait soutenu que ce régime d'aide n'était pas un nouveau régime mais qu'il prorogeait le régime d'aide examiné sous le numéro NN 24-98 que la Commission avait jugé compatible avec le marché commun dans sa lettre SG (99) D/1851 du 11 mars 1999.
(15) Bien qu'elle se fût effectivement prononcée en faveur de la mesure NN 24-98 concernant le régime d'aide établi par le décret du 10 février 1998, la Commission ne pouvait suivre la position de l'Italie. En effet, la mesure d'aide qui avait été examinée par la Commission concernait la mise en œuvre des plans de restructuration relatifs aux années 1997, 1998 et 1999 et, par la décision du 11 mars 1999, la Commission avait rappelé aux autorités italiennes qu'elles devraient lui notifier, au titre de l'article 88, paragraphe 3, du traité CE, tout projet de refinancement, prorogation ou modification de cette mesure d'aide. Par conséquent, la Commission a considéré que le décret du 18 mai 2001 correspondait à une nouvelle mise en œuvre ou à un refinancement de cette mesure d'aide par recours au fonds central pour le crédit à la pêche.
(16) Par lettre du 12 mars 2003, l'Italie avait par ailleurs fait savoir que la mise en œuvre de cette mesure ne relevait plus de la compétence du ministre mais de celle des régions, auxquelles avaient été transférés, à cet effet, les fonds en provenance du fonds central pour le crédit à la pêche. L'Italie avait en outre joint à sa lettre du 1er juillet 2004 deux communications émanant des régions des Pouilles et de la Sicile et concernant les mesures d'aide mises en œuvre dans le cadre du régime en cause: pour la Sicile, un courrier du 19 juin 2004 affirmant que la mesure avait été mise en œuvre par le décret de l'assesseur à la pêche n° 158 du 3 décembre 2003; pour les Pouilles, un courrier du 19 mai 2004 indiquant qu'elle avait été mise en œuvre pour un dossier présenté à la région en 2001. Le courrier des Pouilles précisait aussi que les ressources financières relatives à l'année 2003 n'étaient parvenues qu'à la fin de cette même année. L'Italie n'avait toutefois fourni aucune information sur le montant des fonds utilisés dans le cadre de ce régime. En tout état de cause, ces courriers avaient confirmé que des fonds avaient été mis à disposition des régions, conformément à l'article 8 du décret du 18 mai 2001, et donc que ce régime d'aide avait été effectivement mis en œuvre.
(17) En outre, la Commission avait considéré que, même si, comme le prétendait l'Italie, le régime d'aide notifié était un régime d'aide existant qui n'avait pas été modifié par le décret du 18 mai 2001, il était devenu un nouveau régime d'aide le 1er juillet 2001.
(18) En effet, ce régime avait été approuvé à la lumière des lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (3) adoptées en 1997 par la Commission (ci-après "les lignes directrices "pêche" de 1997").
(19) Ces lignes directrices ont été remplacées le 1er janvier 2001 par de nouvelles lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (4) (ci-après "les lignes directrices "pêche" de 2001"). Par lettre du 21 décembre 2000, conformément au paragraphe 3.2 des lignes directrices "pêche" de 2001, la Commission avait proposé aux États membres, dans le cadre du mécanisme des mesures utiles, de modifier les régimes d'aide existants dans le secteur de la pêche au plus tard le 1er juillet 2001. Les États membres avaient été invités à marquer, par écrit, leur accord avec cette proposition pour le 1er mars 2001. Il avait été précisé qu'en cas d'absence de réponse, la Commission présumerait que l'État membre concerné avait accepté cette proposition, conformément au troisième alinéa du paragraphe 3.2 précité. Par ailleurs, le paragraphe 3.4 des lignes directrices "pêche" de 2001 établit que toute aide illégale est examinée au regard des lignes directrices applicables lors de l'entrée en vigueur de l'acte administratif établissant l'aide. L'Italie n'avait pas répondu à la lettre de la Commission du 21 décembre 2000. Par lettre du 7 mai 2001, la Commission avait rappelé à l'Italie les termes de cette lettre et l'avait informée de ce qu'elle considérerait désormais l'absence de réponse défavorable comme valant accord pour la proposition de mesures utiles. La Commission a donc estimé que l'Italie avait accepté cette proposition et que les régimes d'aide existants avaient été modifiés au plus tard le 1er juillet 2001.
(20) Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, s'agissant de la mise en œuvre de nouvelles lignes directrices acceptées par les États membres, l'acceptation de mesures utiles a pour effet de transformer certaines aides existantes en aides nouvelles. Les régimes d'aide existants doivent être adaptés conformément aux mesures utiles ou transformés en régimes d'aide nouveaux et soumis à l'obligation de notification préalable à la Commission (5).
(21) Dès lors, les dispositions figurant dans les lignes directrices "pêche" de 2001 et acceptées par l'Italie ont eu pour effet de retirer aux aides non adaptées à ces lignes directrices l'autorisation précédemment accordée et de les qualifier d'aides nouvelles. Tel a été le cas des aides à la restructuration des coopératives. En effet, les lignes directrices "pêche" de 1997 ne contenaient aucune disposition spécifique sur les aides à la restructuration des entreprises du secteur de la pêche: elles contenaient seulement, en leur paragraphe 1.3, dernier alinéa, dernier tiret, une disposition précisant que les aides au fonctionnement seraient étudiées au cas par cas pour autant qu'elles soient directement liées à un plan de restructuration. En revanche, les lignes directrices "pêche" de 2001 contenaient, en leur paragraphe 2.2.4, une disposition spécifique sur les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté prévoyant l'application des lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (6) (ci-après "les lignes directrices "restructuration" de 1999") en vigueur à cette date.
(22) Par conséquent, dès lors que, selon les termes mêmes de la première lettre de l'Italie en date du 17 octobre 2002, la mesure d'aide prévue par le décret du 18 mai 2001 a été mise en œuvre, elle est devenue, à compter du 1er juillet 2001, date limite de modification des régimes d'aide d'État existants, une mesure d'aide illégale.
(23) La Commission avait procédé à l'analyse préliminaire de ce régime d'aide illégal à la lumière des lignes directrices "pêche" de 2001 et de 2004. En application du paragraphe 5.3, deuxième alinéa, des lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (7) adoptées en 2004 (ci-après "les lignes directrices "pêche" de 2004"), ces lignes directrices s'appliquent pour les aides accordées à partir du 1er novembre 2004 et celles de 2001 pour les aides octroyées avant cette date.
(24) Tant les lignes directrices "pêche" de 2001 (paragraphe 2.2.4) que celles de 2004 (paragraphe 4.1.2) indiquent que les aides destinées au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté sont appréciées conformément aux lignes directrices "restructuration". Les lignes directrices "restructuration" de 1999 s'appliquent aux aides accordées jusqu'au 9 octobre 2004 tandis que les lignes directrices communautaires pour les aides au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (8) adoptées en 2004 (ci-après "les lignes directrices "restructuration" de 2004") s'appliquent aux aides octroyées à partir du 10 octobre 2004. S'agissant du cas particulier des entreprises dont l'activité principale est la pêche en mer, les lignes directrices "pêche" de 2001 et de 2004 précisent que ces aides ne pourront être accordées que si un plan visant à réduire la capacité de la flotte a été soumis à la Commission.
(25) Ces lignes directrices "pêche" prévoient que les aides à la restructuration ne peuvent bénéficier qu'aux entreprises en difficulté. Les critères visant à reconnaître l'existence d'une situation de difficulté sont explicités aux points 4 à 8 des lignes directrices "restructuration" de 1999 et aux points 9 à 13 de celles de 2004. La Commission avait souligné que le décret du 10 février 1998 ne permettait pas de garantir le respect de ces critères. Les aides octroyées par l'Italie pouvaient donc également bénéficier à des entreprises ne répondant pas aux critères prévus par ces lignes directrices.
(26) En outre, la Commission avait fait observer qu'elle ne disposait d'aucune information sur le respect de certains critères de mise en œuvre des plans de restructuration visés par ces lignes directrices, à savoir: les critères relatifs au rétablissement de la viabilité à long terme des coopératives bénéficiaires (points 31 à 34 des lignes directrices "restructuration" de 1999 et points 34 à 37 de celles de 2004), l'adoption de mesures compensatoires lorsque le régime d'aide bénéficie à une entreprise moyenne [point 82 b)] des lignes directrices "restructuration" de 2004) ou la contribution des bénéficiaires à la restructuration financière de l'entreprise (point 40 des lignes directrices "restructuration" de 1999 et point 43 de celles de 2004). La Commission avait aussi souligné que, pour les entreprises ayant la pêche comme activité principale, l'Italie n'avait pas présenté de plan visant à réduire la capacité de la flotte.
(27) Pour l'ensemble de ces raisons, la Commission avait décidé d'ouvrir la procédure formelle d'examen.
4. OBSERVATIONS DE L'ITALIE
(28) L'Italie souligne d'abord qu'elle a mis en œuvre l'aide en cause en toute bonne foi. Elle estime que le décret du 18 mai 2001 valait simple reconduction de la mesure NN 24-98 déjà approuvée au niveau communautaire et ne pensait pas avoir donné lieu à un régime d'aide illégal. De manière contradictoire, l'Italie souligne également que la direction générale de la pêche maritime et de l'aquaculture, ainsi que les régions, auxquelles la compétence a été transférée en 2000, n'ont en aucun cas prévu d'effectuer des interventions en application de ce décret.
(29) L'Italie précise que des critères stricts ont été définis pour la mise en œuvre de ce régime d'aide. Une contribution importante du bénéficiaire a notamment été exigée, afin de garantir que l'aide était limitée au minimum requis pour rétablir la viabilité de l'entreprise tout en réduisant au maximum la distorsion de concurrence. L'Italie ajoute qu'une large partie de l'aide concerne des programmes de formation et d'innovation technologique et que plus de la moitié des aides versées n'était pas à fonds perdu mais était liée à une obligation de restitution dans la mesure où elle prenait la forme de crédits à long terme soumis à un régime particulier de garantie. En outre, un calcul de l'intensité de l'aide montrerait que celle-ci se situe bien sous le plafond d'aide de minimis.
(30) Par ailleurs, le principe una tantum est scrupuleusement respecté. Conformément aux lignes directrices "restructuration", cette aide vise à permettre aux bénéficiaires de supporter leurs propres coûts après le rétablissement de leur capacité économique à long terme. Selon l'Italie, ce régime d'aide à la restructuration contribue au développement des activités économiques sans altérer les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun, en répondant aux conditions fixées par ces lignes directrices: assainissement des entreprises dans un délai raisonnable, prévention des distorsions de concurrence, proportionnalité de l'aide, échelonnement des paiements en fonction de l'avancement du plan de restructuration de l'entreprise concernée, contrôle de la réalisation de ce plan.
(31) L'Italie termine ses observations par une référence à la communication de la Commission du 9 mars 2006 intitulée "Améliorer la situation économique du secteur de la pêche" (ci-après "la communication du 9 mars 2006") (9) et constate que la conjoncture défavorable du secteur de la pêche a été aggravée par la flambée du prix du carburant. De surcroît, l'évolution des prix de nombreuses espèces pêchées n'a pas suivi celle des coûts de production. C'est pourquoi, selon l'Italie, il est nécessaire de conserver ce type de mesures et d'interventions qui ont pour seul objectif de soutenir un secteur économique en difficulté.
5. APPRÉCIATION
5.1. Existence d'une aide d'État illégale
(32) La Commission souligne que ce régime d'aide, qui vise à octroyer un financement pour la restructuration d'une certaine catégorie d'entreprises exerçant leur activité dans un secteur déterminé, a pour effet de conférer un avantage financier à ces entreprises. Étant donné que les produits des entreprises bénéficiaires sont vendus sur le marché communautaire, ce régime d'aide renforce la position de celles-ci tant sur le marché italien par rapport aux entreprises des autres États membres qui veulent y introduire leurs produits que sur le marché des autres États membres par rapport aux entreprises qui y vendent leurs produits.
(33) En outre, ce régime d'aide bénéficie aux entreprises d'un secteur spécifique de l'économie. Par conséquent, dès lors que les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce régime sont des ressources publiques, celui-ci constitue un régime d'aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité CE.
(34) Les observations de l'Italie transmises à la Commission en réponse à l'ouverture de la procédure formelle d'examen ne remettent pas en cause la qualification de ce régime d'aide d'État en tant que régime d'aide illégal. En effet, la Commission constate qu'en tout état de cause, quelle que soit la manière d'interpréter les observations italiennes, ce régime d'aide correspond à la réactivation du régime d'aide qui a été institué par le décret du 10 février 1998 et examiné et approuvé par la Commission sous le numéro NN 24-98. Comme la Commission l'indique dans sa décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen, cette réactivation correspond à la mise en œuvre d'un régime d'aide nouveau, c'est-à-dire d'un régime d'aide illégal. Un changement dans l'identité de l'autorité publique chargée de la mise en œuvre de ce régime n'influe pas sur la nature de l'aide ni sur la qualification que la Commission peut lui attribuer. Peu importe que ce régime d'aide, fondé sur le décret du 10 février 1998, soit réactivé par le décret du 18 mai 2001 ou par les régions en vertu d'autres dispositions ignorées de la Commission.
(35) En outre, ainsi qu'indiqué dans la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen, quand même, comme le prétendaient les autorités italiennes, le régime d'aide notifié serait un régime d'aide existant que le décret du 18 mai 2001 ne modifie pas, la Commission considère qu'il est devenu un nouveau régime d'aide le 1er juillet
2001 lorsqu'à la suite de l'adoption des nouvelles lignes directrices "pêche" entrées en vigueur le 1er janvier 2001, les régimes d'aide existants qui n'avaient pas été adaptés à celles-ci ne pouvaient plus bénéficier de l'autorisation précédemment accordée et devaient être transformés en régimes d'aide nouveaux soumis à l'obligation de notification à la Commission. Par lettre du 21 décembre 2000, conformément au paragraphe 3.2 des lignes directrices "pêche" de 2001, la Commission avait proposé aux États membres, dans le cadre du mécanisme des mesures utiles, de modifier les régimes d'aide existants dans le secteur de la pêche au plus tard le 1er juillet 2001 et avait précisé qu'en cas d'absence de réponse, elle présumerait que l'État membre concerné avait accepté cette proposition. L'Italie n'avait pas répondu à la lettre de la Commission du 21 décembre 2000 ni au rappel du 7 mai 2001 qui l'informait de ce que la Commission considérerait désormais l'absence de réponse défavorable comme valant accord pour la proposition de mesures utiles. La Commission avait donc estimé que l'Italie avait accepté cette proposition et que les régimes d'aide existants avaient été modifiés au plus tard le 1er juillet 2001.
(36) Dès lors, les dispositions des lignes directrices "pêche" de 2001 acceptées par l'Italie ont eu pour effet de retirer à certaines aides l'autorisation précédemment accordée et de les qualifier d'aides nouvelles. Tel a été le cas pour les aides à la restructuration des coopératives. En effet, à la différence des lignes directrices "pêche" de 1997, celles de 2001 contenaient, en leur paragraphe 2.2.4, une disposition spécifique sur les aides au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté prévoyant l'application des lignes directrices "restructuration" de 1999.
(37) Par conséquent, comme précisé dans la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen, ce régime d'aide d'État constitue assurément, pour les aides octroyées à compter du 1er juillet 2001, un régime d'aide nouveau que l'Italie était tenue de notifier à la Commission avant sa mise en œuvre.
5.2. Compatibilité avec le marché commun
(38) Ce régime ne peut être considéré comme compatible avec le marché commun que s'il peut bénéficier de l'une des dérogations prévues par le traité. Dans la mesure où il bénéficie aux entreprises du secteur de la pêche et de l'aquaculture, il doit être analysé à la lumière des lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture. L'analyse développée dans la décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen reste valable.
(39) La mesure est clairement présentée comme un régime d'aide à la restructuration des entreprises supposant la mise en œuvre, au sein des entreprises bénéficiaires, de plans de restructuration. Il ressort de la liste des coûts admissibles figurant dans le décret du 10 février 1998 que les opérations pouvant être financées correspondent effectivement à des opérations permettant la restructuration des entreprises bénéficiaires. Ces coûts sont liés à des investissements, à des frais financiers ou à des charges de fonctionnement des entreprises. Il s'agit de dépenses qui peuvent certainement être dues à une réorientation de l'activité des entreprises bénéficiaires ou à leur adaptation à de nouvelles conditions économiques afin de rétablir leur efficacité économique et financière.
(40) Il convient donc d'analyser ce régime d'aide au regard des dispositions pertinentes des lignes directrices "pêche".
(41) Tant les lignes directrices "pêche" de 2001 (paragraphe 2.2.4) que celles de 2004 (paragraphe 4.1.2) indiquent que les aides destinées au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté sont appréciées conformément aux lignes directrices "restructuration". Au cas où des aides auraient encore été versées après le 1er avril 2008, ce qui est possible puisque ce régime d'aide a été institué sans limitation de durée (voir considérant 2 ci-dessus), on appliquerait les lignes directrices pour l'examen des aides d'État dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture (10) adoptées en 2008 (ci-après "les lignes directrices "pêche" de 2008"), qui renvoient, elles aussi, aux lignes directrices "restructuration". Les lignes directrices "restructuration" de 1999 s'appliquent aux aides octroyées jusqu'au 9 octobre 2004 et celles de 2004 aux aides accordées à partir du 10 octobre 2004. Il y a lieu aussi de rappeler que, pour le cas particulier des entreprises dont l'activité principale est la pêche en mer, les lignes directrices "pêche" précisent que ces aides ne pourront être accordées que si un plan visant à réduire la capacité de la flotte a été soumis à la Commission.
(42) Par conséquent, il convient tout d'abord d'apprécier si les conditions de mise en œuvre de ce régime d'aide répondent à celles définies dans les lignes directrices "restructuration".
(43) Premièrement, ces lignes directrices prévoient que les aides à la restructuration ne peuvent bénéficier qu'aux entreprises en difficulté qui satisfont aux critères définis aux points 4 à 8 des lignes directrices "restructuration" de 1999 ou aux points 9 à 13 de celles de 2004. Ces critères, en vertu desquels une entreprise peut être qualifiée d'entreprise en difficulté, sont stricts. En effet, conformément au point 5 des lignes directrices "restructuration" de 1999 et au point 10 de celles de 2004, une entreprise, pour être qualifiée d'entreprise en difficulté, doit, s'il s'agit d'une société à responsabilité limitée, avoir perdu plus de la moitié de ses fonds propres dont au moins un quart au cours des 12 derniers mois, ou, s'il s'agit de toute autre forme d'entreprise, remplir les conditions de soumission à une procédure collective d'insolvabilité. Le point 11 des lignes directrices "restructuration" de 2004 indique aussi qu'au-delà de ces critères, une entreprise peut néanmoins être considérée comme étant en difficulté si l'on est en présence d'indices caractéristiques tels que le niveau croissant des pertes, la diminution du chiffre d'affaires ou la progression des charges financières. En vertu du point 18 de ces lignes directrices, les États membres peuvent également tenir compte de ces critères en ce qui concerne les aides à la restructuration octroyées aux entreprises du secteur de la pêche dans le cadre d'un régime d'aide.
(44) La Commission souligne que le décret du 10 février 1998 ne contient aucun critère de ce type ni aucun critère qui s'en rapproche. Les aides octroyées par l'Italie peuvent dès lors bénéficier à des entreprises qui ne satisfont pas aux critères définis dans ces lignes directrices et qui ne sont donc pas des entreprises en difficulté.
(45) Deuxièmement, considérant que ce régime d'aide s'adresse aux petites et moyennes entreprises, les critères définis aux points 31 à 34 des lignes directrices "restructuration" de 1999 sont applicables en vertu du point 67 a) de celles-ci. Ces critères sont repris aux points 34 à 37 des lignes directrices "restructuration" de 2004 et sont applicables en vertu du point 82 a) de celles-ci. Selon ces dispositions, le plan de restructuration doit notamment permettre de rétablir, dans un délai raisonnable et sur la base d'hypothèses réalistes, la viabilité à long terme de l'entreprise. À cet effet, il doit décrire les circonstances à l'origine des difficultés et prévoir une mutation de l'entreprise telle que celle-ci puisse couvrir tous ses coûts une fois la restructuration achevée. L'octroi de l'aide n'est possible que si le plan de restructuration présenté contient l'ensemble de ces éléments.
(46) La Commission constate que l'Italie n'a pas institué de procédure permettant de garantir le respect de ces conditions. Les informations communiquées en réponse à l'ouverture de la procédure formelle d'examen se bornent à rappeler les conditions générales énoncées dans le décret du 10 février 1998 pour l'octroi de ces aides. Toutefois, ces conditions ne définissent pas de critères objectifs qui permettent de certifier que les plans de restructuration des différentes entreprises concernées sont effectivement élaborés dans le respect des principes susmentionnés. Le respect des conditions définies aux points 31 à 34 des lignes directrices "restructuration" de 1999 ou aux points 34 à 37 de celles de 2004 n'est donc aucunement garanti.
(47) Troisièmement, conformément aux points 40 et 41 des lignes directrices "restructuration" de 1999, applicables aux petites et moyennes entreprises en vertu du point 67 c) des mêmes lignes directrices, les bénéficiaires doivent contribuer de manière importante au plan de restructuration sur leurs propres ressources, afin que l'aide soit limitée au minimum. Le même principe figure aux points 43 et 44 des lignes directrices "restructuration" de 2004, applicables en vertu du point 82 c).
(48) Conformément au décret du 10 février 1998, l'aide est accordée sous forme d'aide à fonds perdu dans la limite de 40 % des dépenses admissibles ou sous forme de prêt à taux bonifié dans la limite de 85 % de ces dépenses. Il n'y a pas de distinction selon le type de coûts admissibles (voir paragraphe 2 ci-dessus - "Description"). La Commission en déduit que cette participation peut concerner n'importe lequel des coûts en question, que ce soit les dépenses liées à la modernisation des établissements, la couverture de moins-values patrimoniales ou encore l'annulation des créances.
(49) Il est donc possible que certains bénéficiaires aient contribué de manière significative à la mise en œuvre de leur plan de restructuration. Toutefois, la Commission souligne que l'Italie n'a pas défini de critères permettant de moduler le montant de l'aide accordée en fonction de la contribution de chaque bénéficiaire. Le seul critère existant dans le décret du 10 février 1998 est un critère d'ordre d'arrivée des demandes d'aide. C'est pourquoi la Commission considère que l'Italie n'a défini, dans le cadre de ce régime d'aide, aucune procédure permettant de garantir le respect des conditions selon lesquelles les bénéficiaires doivent contribuer sur leurs propres ressources et l'aide doit être limitée au minimum. Il est donc tout à fait possible que des bénéficiaires n'aient pas respecté ces conditions.
(50) Quatrièmement, conformément au point 67 b) des lignes directrices "restructuration" de 1999, les mesures compensatoires visant à prévenir les distorsions de concurrence indues, décrites aux points 35 à 39, ne s'appliquent pas aux petites et moyennes entreprises. En revanche, en application du point 82 b) des lignes directrices "restructuration" de 2004, de telles mesures, décrites aux points 38 à 42, doivent être prises lorsque l'aide bénéficie à une entreprise moyenne. La Commission constate que l'Italie n'a pas prévu la mise en œuvre de mesures compensatoires de ce type pour les cas où ce régime d'aide bénéficie à une entreprise moyenne.
(51) Enfin, pour les cas où ce régime d'aide bénéficie à des coopératives ayant la pêche comme activité principale, l'Italie n'a pas présenté de plan visant à réduire la capacité de la flotte comme requis au paragraphe 2.2.5 des lignes directrices "pêche" de 2001, au paragraphe 4.1.2 de celles de 2004 ou encore au paragraphe 4.2 de celles de 2008.
(52) Par ailleurs, la Commission fait remarquer à l'Italie que la communication du 6 mars 2006 n'a pas modifié les critères et les conditions applicables aux régimes d'aide à la restructuration. Elle avait pour objet d'inviter les États membres à utiliser certains instruments afin de remédier aux difficultés que connaît le secteur de la pêche. La possibilité pour les États membres de mettre en place des régimes d'aide au sauvetage et à la restructuration compte effectivement parmi les instruments préconisés par la Commission. Par cette communication, la Commission entendait apporter des précisions quant à l'application des lignes directrices "restructuration" mais n'a jamais envisagé la possibilité d'y déroger, ce pourquoi elles restent pleinement applicables.
(53) Enfin, les autorités italiennes n'ont pas formulé d'autres observations ni transmis des informations complémentaires à l'appui de la compatibilité des aides en cause avec le marché commun en se fondant sur d'autres dispositions du traité CE ou sur des règles, lignes directrices ou encadrements relatifs aux aides d'État.
6. CONCLUSION
(54) La Commission constate que l'Italie a mis à exécution, illégalement, en violation de l'article 88, paragraphe 3, du traité CE, le régime d'aide à la restructuration des coopératives de pêche et de leurs consortiums.
(55) Sur la base de l'analyse développée dans la partie 5 de la présente décision, la Commission estime que ce régime d'aide est incompatible avec le marché commun.
7. RÉCUPÉRATION
(56) Conformément à l'article 14, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 659-1999, lorsqu'une aide d'État accordée illégalement est incompatible avec le marché commun, elle doit être récupérée auprès des bénéficiaires. L'objectif est atteint dès que les aides en cause, majorées le cas échéant des intérêts de retard, ont été restituées par les bénéficiaires, c'est-à-dire par les entreprises qui en ont eu la jouissance effective. Néanmoins, l'article 14, paragraphe 1, précité précise que "la Commission n'exige pas la récupération de l'aide si, ce faisant, elle allait à l'encontre d'un principe de droit communautaire". Il convient d'examiner si, en l'espèce, un principe général de droit communautaire, tel que le principe de confiance légitime ou de sécurité juridique, pourrait être invoqué afin d'exclure la récupération auprès des bénéficiaires des aides illégales et incompatibles.
(57) Rappelons qu'il appartient aux États membres de veiller à ce que les mesures nationales soient compatibles avec la législation communautaire relative aux aides d'État afin de prévenir les distorsions de concurrence. En outre, ceux-ci sont tenus de notifier toute aide d'État à la Commission, conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité CE, et doivent s'abstenir d'exécuter la mesure avant qu'elle ait fait l'objet d'un examen. Pour cette raison, en ce qui concerne la possibilité pour les bénéficiaires de se prévaloir du principe de confiance légitime pour éviter la récupération des aides illégales et incompatibles, il ressort de la jurisprudence de la Cour que le juge communautaire a exclu que "le bénéficiaire d'une aide puisse avoir une confiance légitime dans la régularité d'une aide si celle-ci a été accordée en violation des dispositions relatives à la procédure de contrôle préalable des aides d'État, sauf circonstances exceptionnelles. En effet, un opérateur économique diligent doit normalement être en mesure de s'assurer que cette procédure a été respectée" (11).
(58) Dans l'affaire C-265-85, Van den Bergh en Jurgens BV contre Commission (12), la Cour de justice a dit pour droit que "la possibilité de se prévaloir du principe de la protection de la confiance légitime est ouverte à tout opérateur économique dans le chef duquel une institution a fait naître des espérances fondées. En outre, lorsqu'un opérateur économique prudent et avisé est en mesure de prévoir l'adoption d'une mesure communautaire de nature à affecter ses intérêts, il ne saurait invoquer le bénéfice d'un tel principe lorsque cette mesure est adoptée".
(59) Afin d'adapter les aides existantes aux nouvelles lignes directrices "pêche" de 2001, la Commission a proposé aux États membres de modifier, au plus tard le 1er juillet 2001, leurs régimes d'aide existants dans le secteur de la pêche. La jurisprudence (13) a confirmé que cette proposition, présentée dans les lignes directrices, s'inscrit dans la coopération régulière et périodique dans le cadre de laquelle la Commission procède avec les États membres à l'examen permanent des régimes d'aide existants et leur propose les mesures utiles nécessaires. Dans cette optique, des accords entre la Commission et chaque État membre sur une liste complète de tous les régimes d'aide existants seraient peu pratiques. Il est donc raisonnable de laisser aux États membres la responsabilité d'adapter les régimes qui doivent l'être, d'autant plus qu'ils participent à l'élaboration des nouvelles lignes directrices et qu'ils en connaissent - avant qu'elles n'entrent en vigueur - les répercussions sur les régimes d'aide existants.
(60) L'Italie prétend avoir considéré la mesure en cause comme valant simple reconduction de la mesure NN 24-98 approuvée par la Commission le 11 mars 1999 et, partant, comme une aide existante, alors que, pour la Commission, cette mesure n'a constitué une aide existante que jusqu'au 30 juin 2001. À cet égard, comme indiqué ci-dessus, la Commission observe que l'Italie, dans le cadre du mécanisme des mesures utiles, avait accepté la proposition de modifier les régimes d'aide existants dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture, après l'adoption tant des lignes directrices "pêche" de 2001 que de celles de 2004. À partir du 1er juillet 2001, l'aide est donc devenue une aide nouvelle puisqu'elle aurait dû être adaptée aux nouvelles lignes directrices "pêche" de 2001.
(61) Sur la base de l'article 26, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 659-1999, il est concevable que, dès lors que la Commission n'a pas publié l'acceptation par le gouvernement italien des lignes directrices "pêche" de 2001, certains bénéficiaires aient estimé, de bonne foi, que la mesure nationale en question devait toujours être considérée comme une aide existante. L'article 26 prévoit en effet que la Commission doit publier "une communication succincte des décisions qu'elle prend en application [...] de l'article 18 en liaison avec l'article 19, paragraphe 1". En vertu de l'article 18, "si [...] la Commission parvient à la conclusion qu'un régime d'aide existant n'est pas, ou n'est plus, compatible avec le marché commun, elle adresse à l'État membre concerné une recommandation proposant l'adoption de mesures utiles." L'article 19, paragraphe 1, établit que, lorsque l'État membre accepte les mesures utiles proposées, la Commission "en prend acte et en informe l'État membre".
(62) La Commission n'a pas publié au Journal officiel des Communautés européennes l'acceptation par chaque État membre des mesures utiles qu'elle a proposées pour la mise en œuvre des nouvelles lignes directrices "pêche" de 2001. Il est donc difficile pour la Commission de prouver que les bénéficiaires ont été correctement informés de cette acceptation par le gouvernement italien et du changement de statut de l'aide qui s'en est suivi. En revanche, s'agissant des lignes directrices "pêche" de 2004, un avis a été publié à cet effet (14).
(63) Aussi, bien qu'il existe un principe selon lequel les opérateurs économiques ne peuvent en général se prévaloir d'attentes légitimes en matière d'aides d'État illégales, la Commission constate qu'en l'espèce, jusqu'à la publication, le 11 novembre 2005, de l'avis d'acceptation de ces mesures utiles, un opérateur économique avisé et prudent pouvait légitimement considérer que le régime d'aide d'État en cause constituait toujours un régime existant et n'était donc pas devenu un régime d'aide nouveau.
(64) Par conséquent, la Commission considère en l'espèce que la récupération des aides octroyées jusqu'au 11 novembre 2005 pourrait violer le principe de confiance légitime ou de sécurité juridique. Il en résulte que, conformément à l'article 14 du règlement (CE) n° 659-1999, la récupération n'est exigée que pour les aides octroyées à compter du 12 novembre 2005.
(65) La présente décision porte sur le régime d'aide en cause et il convient qu'elle soit mise en œuvre immédiatement, notamment en ce qui concerne la récupération de toutes les aides individuelles accordées dans le cadre de ce régime, à l'exception de celles accordées à des projets spécifiques qui, au moment de l'octroi de ces aides, remplissaient toutes les conditions définies dans le règlement de minimis ou d'exemption applicable ou dans un régime d'aide approuvé par la Commission,
A adopté la présente décision:
Article premier
Le régime d'aide institué pour la restructuration des coopératives de pêche et de leurs consortiums et mis en œuvre illégalement par l'Italie, en violation de l'article 88, paragraphe 3, du traité, est incompatible avec le marché commun.
Article 2
Les aides individuelles octroyées, au titre du régime visé à l'article 1er de la présente décision, à une coopérative de pêche ou à l'un de ses consortiums ne constituent pas des aides si, au moment de leur octroi, elles remplissaient les conditions définies dans le règlement adopté en vertu de l'article 2 du règlement (CE) n° 994-98 du Conseil (15) et applicable à ce moment-là.
Article 3
Les aides individuelles octroyées au titre du régime visé à l'article 1er de la présente décision qui, au moment de leur octroi, remplissaient les conditions définies dans un règlement adopté en vertu de l'article 1er du règlement (CE) n° 994-98 ou dans tout autre régime d'aide approuvé sont compatibles avec le marché commun jusqu'à concurrence de l'intensité maximale appliquée pour ce genre d'aide.
Article 4
1. L'Italie est tenue de se faire rembourser par les bénéficiaires les aides incompatibles visées à l'article 1er et octroyées à compter du 12 novembre 2005.
2. Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu'à leur récupération effective.
3. Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) n° 794-2004 de la Commission (16).
4. L'Italie annule tous les paiements en suspens des aides visées à l'article 1er à compter de la date d'adoption de la présente décision.
Article 5
1. La récupération des aides visées à l'article 1er est immédiate et effective.
2. L'Italie veille à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans les quatre mois suivant la date de sa notification.
Article 6
1. Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, l'Italie communique les informations suivantes:
a) la liste des coopératives de pêche et de leurs consortiums qui ont reçu une aide en vertu des articles 2 et 3, ainsi que le montant total reçu par chaque bénéficiaire;
b) le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès de chaque bénéficiaire;
c) une description détaillée des mesures déjà prises et des mesures prévues pour se conformer à la présente décision;
d) les documents démontrant que les bénéficiaires ont été mis en demeure de rembourser l'aide.
2. L'Italie tient la Commission informée de l'avancement des mesures nationales adoptées afin de mettre en œuvre la présente décision jusqu'à la récupération complète des aides visées aux articles 1er , 2 et 3. Elle transmet immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures déjà prises et sur celles prévues pour se conformer à la présente décision. Elle fournit aussi des informations détaillées concernant les montants de l'aide et des intérêts déjà récupérés auprès des bénéficiaires.
Article 7
La République italienne est destinataire de la présente décision.
Notes :
(1) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.
(2) Lettre publiée au JO C 202 du 25.8.2006, p. 11.
(3) JO C 100 du 27.3.1997, p. 12.
(4) JO C 19 du 20.1.2001, p. 7.
(5) L'effet de l'acceptation des mesures utiles par un État membre a été clairement établi dans l'arrêt du 24 mars 1993 rendu dans l'affaire C-313-90, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques et autres contre Commission des Communautés européennes, Rec. 1993, p. I-1125: "les règles énoncées dans la discipline et acceptées par les États membres eux-mêmes ont pour effet, notamment, de retirer à certaines aides, relevant de son champ d'application, l'autorisation précédemment accordée et, partant, de les qualifier d'aides nouvelles et de les soumettre à l'obligation de notification préalable" (point 35).
(6) JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.
(7) JO C 229 du 14.9.2004, p. 5.
(8) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.
(9) COM(2006) 103 final.
(10) JO C 84 du 3.4.2008, p. 10.
(11) Affaire C-5-89, Commission des Communautés européennes contre République fédérale d'Allemagne, Rec. 1990, p. I-3437, point 14; affaire C-169-95, Royaume d'Espagne contre Commission des Communautés européennes, Rec. 1997, p. I-135, point 51; affaire T-55-99, Confederación Española de Transporte de Mercancías (CETM) contre Commission des Communautés européennes, Rec. 2000, p. II-3207, point 121.
(12) Affaire C-265-85, Van den Bergh en Jurgens BV et Van Dijk Food Products (Lopik) BV contre Commission des Communautés européennes, Rec. 1987, p. I-1155, point 44.
(13) Affaire C-311-94, IJssel-Vliet Combinatie BV contre Minister van Economische Zaken, Rec. 1996, p. I-5023, points 36 à 44.
(14) JO C 278 du 11.11.2005, p. 14.
(15) JO L 142 du 14.5.1998, p. 1.
(16) JO L 140 du 30.4.2004, p. 1.