CA Paris, 7e ch. A, 28 octobre 2008, n° 06-08552
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Generali Assurances IARD (Sté), Axa France IARD (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Garban
Conseillers :
Mmes Le Gars-Stone, Touzery-Champion
Avoués :
SCP Arnaudy-Baechlin, SCP Autier
Avocats :
Mes Bousseau, Ceccarelli
Le 16 mars 1976, la société Zurich compagnie d'assurances, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Generali Assurances IARD, a nommé M. Antoine Aubert en qualité d'agent général de son agence de Douai.
M. Aubert a démissionné de ses fonctions à effet au 31 décembre 1999.
La société Zurich a déclaré avoir constaté que son portefeuille, qui comprenait 1189 contrats au 31 décembre 1998, avait enregistré 676 résiliations en 1999 et 253 en 2000. Elle a également fait constater par procès-verbal d'huissier du 29 septembre 2000 que M. Aubert poursuivait une activité d'assurance dans les locaux de son ancienne agence, pour le compte de la société Suisse Assurances.
Le juge des référés, saisi par la société Zurich, a, par décision du 10 octobre 2000 ordonné une mesure d'expertise, avec mission notamment d'inventorier " les contrats d'assurance souscrits auprès de la société Nationale Suisse Assurances, par l'intermédiaire de M. Aubert depuis le 1er mars 1991 en précisant (...) plus particulièrement depuis le 1er janvier 1999, les risques assurés par ces contrats préalablement assurés par Zurich avant leur résiliation. "
M. Aubert est décédé le 14 septembre 2002. La société Zurich n'a pas poursuivi son action à l'encontre de ses ayant-droits.
Autorisée par arrêté ministériel du 30 décembre 2003, la société Zurich a transféré une partie de son portefeuille de contrats d'assurance à la société Generali Dommages, elle-même ultérieurement absorbée par la société Generali Assurances IARD.
Par acte du 28 septembre 2004, la société Generali Dommages a assigné la société Nationale Suisse Assurances, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Axa France IARD, devant le Tribunal de commerce de Paris, demandant qu'il soit constaté que cette société s'est livrée à une concurrence déloyale à son encontre et qu'elle soit condamnée à lui verser diverses sommes en réparation de son préjudice.
Par jugement du 31 mars 2006, le tribunal a dit la société Generali Assurances IARD venant aux droits de la société Zurich compagnie d'assurances irrecevable en son action et l'a condamnée à payer à la société Nationale Suisse Assurances la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour se déterminer ainsi, le tribunal a retenu que la société Generali Assurances IARD, qui ne produit pas l'accord conclu entre le cédant et le cessionnaire, ne justifie pas que la société Zurich aurait cédé à la société Generali Dommages, outre le portefeuille de son agent, les droits qu'elle pouvait détenir ou revendiquer à l'encontre de ce dernier ou de la société Nationale Suisse Assurances.
LA COUR,
Vu l'appel de ce jugement interjeté par la société Generali Assurances IARD;
Vu les conclusions de l'appelante en date du 3 juin 2008 par lesquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire qu'elle est recevable et bien fondée à agir à l'encontre de la société Axa France IARD, venant aux droits de la société Nationale Suisse Assurances et de renvoyer les parties devant le Tribunal de commerce de Paris pour qu'il soit statué sur le fond du dossier;
Vu les conclusions en date du 19 mai 2008 de la société Axa France IARD, venant aux droits de la société Nationale Suisse Assurances, par lesquelles elle demande à la cour:
- de confirmer le jugement;
- si ce moyen d'irrecevabilité était écarté, de dire que l'action ne saurait prospérer si la société Generali Assurances IARD ne met en cause les héritiers de M. Aubert;
- de condamner la société Generali Assurances IARD à lui verser la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Sur ce,
Considérant que la société Generali Assurances IARD déclare qu'elle ne peut communiquer l'accord de cession dans la mesure où il est soumis à une clause de confidentialité, et soutient que l'action détenue par la société Zurich à l'encontre de la société Nationale Suisse Assurances lui a bien été transmise; qu'elle fait valoir:
- qu'elle produit deux attestations émanant de M. Paolo Ribotta, mandataire général représentant pour la France de la société Zurich, confirmant que cette dernière société lui a bien cédé le droit d'agir en justice et que le prix de cession qu'elle a payé pour acquérir le portefeuille prend en compte son droit de poursuivre la réparation du dommage correspondant à la perte de la valeur du portefeuille ;
- qu'il n'est nullement démontré que le transfert d'une action ou des droits dont elle est le support doive être matérialisé dans un acte de cession;
Mais considérant que l'article L. 324-1 du Code des assurances qui mentionne notamment en son dernier alinéa : " l'approbation rend le transfert opposable aux assurés, souscripteurs et bénéficiaires de contrat ainsi qu'aux créanciers ", prévoit le transfert d'une compagnie d'assurance à l'autre des éléments contractuels du portefeuille d'assurance mais non des actions en réparation d'un préjudice délictuel que pourrait détenir le cédant; qu'un tel transfert, personnel au cédant, doit faire l'objet d'une clause spécifique conclue entre les parties;
Considérant que la société Generali qui déclare être dans l'impossibilité de produire l'acte de cession du portefeuille compte tenu de sa confidentialité, produit deux attestations de M. Paolo Ribotta, mandataire général de la société Zurich compagnie d'assurances, selon lesquelles cette dernière société a cédé son droit d'agir en justice en réparation de tous dommages occasionnés par d'anciens agents ou par des tiers avec le concours d'anciens agents, et notamment a cédé la présente action ;
Considérant, cependant, que s'il ne peut être reproché comme le fait la société Axa à M. Ribotta en sa qualité de représentant de la société Zurich compagnie d'assurances, ne pas être un tiers à la procédure, ces attestations, qui ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile (elles ne sont pas manuscrites et ne sont pas accompagnées d'un document d'identité), ne permettent pas d'apprécier l'exacte portée de la clause invoquée et apparaissent insuffisantes pour rapporter la preuve de la cession de l'action en responsabilité que la cédante pouvait détenir à l'encontre de M. Aubert et de la société Nationale Suisse Assurances ;
Considérant que le jugement déféré doit ainsi être confirmé;
Par ces motifs, LA COUR, Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 31 mars 2006; Condamne la société Generali Assurances IARD à payer à la société Axa France IARD la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile; La condamne aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.