CA Dijon, ch. civ. B, 20 octobre 2009, n° 09-00130
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SRD (SARL)
Défendeur :
Prodef industrie (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Richard
Conseillers :
Mme Vautrain, M. Plantier
Avoués :
SCP Avril & Hanssen, SCP Bourgeon-Boudy
Avocats :
Me Bouyeure, SCP Tissot-Hopgood Demont-Hopgood
Exposé de l'affaire
La SARL SRD a fait appel du jugement rendu le 8 janvier 2009 par le Tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône, qui l'a condamnée à payer avec exécution provisoire à la SARL Hygiasept la somme de 149 760,70 euro outre intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2007 plus celle de 3 000 euro au titre des frais irrépétibles et a ordonné pour le surplus une expertise confiée à Monsieur Bernard Cotelle-Gasne afin notamment de déterminer les causes de la rupture du contrat liant les parties ainsi que de faire les comptes entre elles.
Par décision du 19 mai 2009 le délégataire du premier Président de cette cour a limité l'exécution provisoire dudit jugement à la somme de 50 000 euro.
Par conclusions du 9 septembre 2009, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du Code de procédure civile, la société appelante expose qu'en ce qui concerne la rupture par elle du contrat la société intimée s'est prévalue de la commercialisation de produits prétendument concurrents ainsi que d'un encours de facturation de 177 747,10 euro à régler sans délai, que l'article 10 du contrat ne prévoit pas une exclusivité de commercialisation, que les produits vendus par la SARL Hygiasept, actuellement SAS Prodef industrie, ne sont pas concurrents des produits Biowind s'agissant d'une désinfection de l'air en continu et non d'une pulvérisation de désinfectants, que la société intimée n'a pas lors du renouvellement du contrat demandé la réduction de l'encours, qu'au contraire la SARL Hygiasept a porté atteinte au contrat de distribution en effectuant des ventes directes ainsi qu'en livrant des matériels comportant des défauts et que cette rupture abusive lui a occasionné un préjudice.
Elle conclut à la réformation du jugement, dont appel, à la condamnation de la SAS Prodef industrie à lui payer la somme de 109 750 euro à titre de dommages-intérêts plus celle de 6 000 euro au titre des frais irrépétibles, à lui reprendre un stock pour 98 878,10 euro et à la compensation avec les sommes dues à la société intimée.
La SAS Prodef industrie, qui vient aux droits de la SARL Hygiasept, par des écritures du 5 juin 2009, auxquelles il est pareillement fait référence, répond qu'au cours du second semestre 2006 la société appelante a développé un système concurrent de celui commercialisé par la SARL Hygiasept dénommé Biowind, avec utilisation du sigle DPA, que les publicités parues dans le magazine des ambulanciers démontrent l'utilisation de photographies des appareils de la société intimée sous la marque DPA, que la SARL SRD, qui devait régler les factures comptant, n'a rien versé depuis le 2 février 2007, qu'aucun accord n'a été donné concernant l'octroi de délais de paiement, qu'ainsi la rupture du contrat est parfaitement justifiée, qu'elle n'avait aucune obligation contractuelle de reprendre le stock et qu'enfin la demande reconventionnelle de la société appelante n'est pas fondée, la commercialisation en direct ou le retard dans le service après-vente n'étant pas établis.
Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SARL SRD à lui payer la somme de 149 760,70 euro outre intérêts, au débouté des demandes présentées par cette dernière et à sa condamnation à lui payer une somme de 6 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Motifs de la décision
Sur la demande principale
Attendu que les premiers juges ont relevé à juste titre que la société appelante ne discute pas devoir à la SARL Hygiasept une somme de 149 760,70 euro ; qu'il sera donc fait droit à la demande en paiement de la société intimée avec conformément à l'article 1153 du Code civil, les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 14 mars 2007;
Attendu que par application de l'article 1154 du même Code la capitalisation des intérêts est de droit, le jugement étant réformé en ce qu'il a refusé cette prétention de la société intimée;
Sur la demande reconventionnelle
Attendu que l'article 10 "Commercialisation des produits contractuels" du contrat de distribution prévoit que "le distributeur agréé s'engage à commercialiser, dans le point de vente agréé par le fabricant dans le cadre du présent contrat uniquement, les produits objets du présent contrat (diffuseurs Hygiasept et consommables) dans le respect des normes édictées par le fabricant et notamment à ne vendre lesdits produits que sous la marque Hygiasept et les conditionnements du fabricant''
Attendu que le 21 février 2007 le conseil de la SARL Hygiasept a résilié ce contrat pour les motifs suivants : "- Biowind est bien un produit concurrent à Hygiasept... Vous utilisez le point de vente Hygiasept et l'image Hygiasept pour favoriser votre produit Biowind au détriment d'Hygiasept en violation de vos obligations contractuelles. La commercialisation de Biowind ne vous a par ailleurs pas permis d'atteindre votre objectif contractuel de chiffre d'affaires.
- Il ressort clairement des échanges de correspondance que la tolérance forcée d'Hygiasept dans les conditions de paiement n'a jamais fait l'objet d'une acceptation et qu'une réduction de votre encours vous a été régulièrement demandée...";
Attendu qu'il résulte notamment des pages publicitaires de la SARL SRD dans la revue "Turbulances", le magazine des ambulanciers professionnels de décembre 2006, mars, juin et décembre 2007, que celle-ci propose des "solutions innovantes pour la désinfection des véhicules de transport sanitaire", qui ne sont pas des produits fabriqués par la SARL Hygiasept, alors que ces derniers permettent également une désinfection de ce type de véhicules;
Attendu que l'allégation de la SARL SRD selon laquelle les entreprises de transport sanitaire ont vocation à utiliser les deux types de produits (ceux de la société intimée et ceux de la SARL SRD) ne saurait être fondée sur les écritures judiciaires de la société appelante devant les premiers juges ; qu'il n'y a en effet aucun intérêt à utiliser pendant le transport les produits Biowind commercialisés par la société appelante puis ceux de la SARL Hygiasept après ce transport; que la prétendue complémentarité n'est pas démontrée et n'est pas mentionnée dans les encarts publicitaires mentionnés plus haut;
Attendu qu'ainsi le grief de concurrence déloyale invoquée par la société intimée pour rompre le contrat de distribution liant les parties est justifié ;
Attendu en outre que conformément à ladite convention et à ses annexes la SARL SRD devait non seulement reverser entre les mains de la société intimée le produit des ventes de marchandises Hygiasept mais surtout payer comptant les factures ; qu'il résulte d'un courrier de la société appelante du 12 décembre 2006, que celle-ci n'accepte pas que son cocontractant demande la réduction de son encours dans une lettre du 13 novembre 2006;
Attendu que dans ces circonstances la SARL SRD ne peut prétendre bénéficier de conditions contractuelles de fait ne pouvant être modifiées par la société intimée;
Attendu qu'en conséquence la société appelante n'a pas respecté les clauses contractuelles prévoyant que les factures de la société intimée devaient être réglées comptant à leur date; que pour ces motifs la rupture des relations contractuelles est imputable à la SARL SRD, qui sera déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts;
Attendu qu'aucune disposition contractuelle n'impose à la société intimée de reprendre le stock de produits se trouvant entre les mains de la SARL SRD ; que néanmoins lors de la rupture de la convention le 21 février 2007, il avait été fait à la société appelante une proposition, à laquelle cette dernière n'a pas donné suite : ... "Vous voudrez bien nous préciser si vous entendez restituer amiablement le stock en votre possession, dont vous voudrez bien nous adresser le détail à ce jour en application de la clause de réserve de propriété figurant au contrat"; que dans ces circonstances la SARL SRD ne peut plus de deux années et demi après, alors que les produits litigieux, souvent périssables, sont obsolètes, réclamer leur reprise;
Attendu que la somme de 3 000 euro accordée en première instance au titre de l'article 700 du Code de procédure civile sera confirmée ; que celle de 1 500 euro sera allouée de ce chef en cause d'appel;
Attendu que la SARL SRD, qui succombe, ne aurait prétendre bénéficier de ces dispositions et sera condamnée aux dépens;
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SARL SRD à payer à la SARL Hygiasept, actuellement SAS Prodef Industrie, la somme de 149 760,70 euro outre intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2007, plus celle de 3 000 euro au titre des frais irrépétibles, Emendant et ajoutant, Ordonne la capitalisation des intérêts, Déboute la société appelante de ses demandes reconventionnelles, Condamne la SARL SRD à payer à la SAS Prodef industrie une somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la même aux dépens d'instance et d'appel et autorise la SCP Bourgeon & Boudy à se prévaloir des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.