Cass. com., 16 février 2010, n° 08-21.749
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Peinture et décoration Bazin (SARL), Bazin
Défendeur :
Juan (Epoux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Tric (faisant fonction)
Rapporteur :
M. Jenny
Avocat général :
M. Bonnet
Avocats :
SCP Monod, Colin, SCP Waquet, Farge, Hazan
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 Juin 2008), que M. Bazin, propriétaire d'un fonds de commerce géré par la société Peinture et décoration Bazin, l'a cédé le 2 janvier 2003 aux époux Juan ; qu'estimant que le vendeur, en ne respectant pas les obligations de non-concurrence du contrat de cession, leur avait causé préjudice, les époux Juan ont assigné devant le tribunal de commerce la société Peinture et décoration Bazin, puis M. Bazin, pour en obtenir réparation ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société Peinture et décoration Bazin et M. Bazin font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'ils s'étaient rendus coupables d'actes de concurrence déloyale à l'égard des époux Juan et de les avoir condamnés, in solidum, à payer aux époux Juan une provision de 7 500 euro, alors, selon le moyen : 1°) qu'une demande non reprise dans les dernières écritures de première instance est réputée avoir été abandonnée et se heurte, en conséquence, à la prohibition des demandes nouvelles en appel ; que la société Peinture et décoration Bazin faisait valoir que les demandes dirigées par les époux Juan à son encontre, ayant été abandonnées devant le premier juge, étaient nouvelles et, par suite, irrecevables ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de défense tiré par la société Peinture et décoration Bazin de l'irrecevabilité des prétentions formulées à son encontre par les appelants, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si les prétentions formulées à son encontre devant les premiers juges n'étaient pas réputées abandonnées par les époux Juan, faute d'avoir été reprises dans leurs dernières conclusions, et si, en conséquence, elles n'étaient pas atteintes par la prohibition des demandes nouvelles en cause d'appel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 753 et 564 du Code de procédure civile ;
Mais attendu que la procédure devant le tribunal de commerce étant orale, les dispositions de l'article 753 (alinéa 2) du Code de procédure civile ne lui sont pas applicables ; que, par ce moyen de pur droit, suggéré par la défense, l'arrêt se trouve justifié ;
Sur le second moyen : - Attendu que la société Peinture et décoration Bazin et M. Bazin font le même grief à l'arrêt attaqué, alors, selon le moyen, que si aux termes de la stipulation claire de l'acte de vente décrivant le fonds de commerce cédé, celui-ci était constitué des éléments permettant d'exercer à la fois une activité de vente au détail de peinture, papiers peints, revêtements de sol et de mur et autres et une activité artisanale de prestations de services, la clause de non-concurrence interdisant l'exploitation d'un fonds "similaire" à celui cédé, d'un fonds "de même nature", n'était pas claire ni univoque puisque, rapprochée de la précédente, elle visait a priori un fonds qui aurait une double activité, commerciale et artisanale, et non pas un fonds qui n'aurait que l'une ou l'autre de ces deux activités ; qu'en tirant de la stipulation décrivant sans ambiguïté le fonds cédé comme ayant un objet mixte la conclusion que la clause de non-concurrence aurait elle-même une portée claire et précise et s'appliquerait à un fonds qui n'aurait pas d'activité de vente au détail mais seulement une activité artisanale et en l'opposant, par suite, à la société Peinture et décoration Bazin, dont elle constatait que son activité était limitée à des prestations de service et qu'elle ne disposait ni de magasin d'exposition ni même d'espace de réception des clients, au lieu d'interpréter cette clause de non-concurrence au regard de l'intention commune des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que le fonds cédé comprenait un commerce de vente au détail de peinture, papiers peints, revêtements de sol et de mur, d'outillage, de matériel, de fournitures générales pour peinture en gros et demi-gros et une activité de fourniture de prestations de services; qu'il retient que la cession, telle que décrite dans l'acte de vente concernait expressément non seulement l'activité commerciale de vente, mais aussi l'activité artisanale de prestation de services exercées par le cédant qualifié dans l'acte d'artisan peintre et commerçant, l'un des deux acquéreurs étant peintre en bâtiment, et que la clause de non-concurrence, limitée dans le temps et dans l'espace, ne comportait aucune disposition permettant la poursuite d'une activité concurrentielle ; qu'il en déduit qu'aucun élément ne permet d'interpréter cette clause comme autorisant une activité concurrentielle d'artisan par le vendeur s'il n'exerçait pas l'activité de commerçant ; que la cour d'appel, qui a ainsi recherché la commune volonté des parties, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.