CCE, 3 octobre 2007, n° 37.860
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Morgan Stanley/Visa International et Visa Europe
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne et l'accord sur l'espace économique européen vu le règlement (CE) n° 1-2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité CE et, notamment, son article 7, paragraphe 1, et son article 23, paragraphe 2 (1), vu la décision de la Commission d'engager la procédure en l'espèce par l'émission d'une communication des griefs le 2 août 2004, après avoir donné aux entreprises et associations d'entreprises concernées l'opportunité de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission, conformément à l'article 27, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1-2003 et au règlement (CE) nº 773-2004 de la Commission du 7 avril 2004 relatif à la conduite de procédures par la Commission fondées sur les articles 81 et 82 du traité CE (2), opportunité à laquelle les entreprises ont renoncé, après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes (3), vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire, considérant ce qui suit :
1. LES PARTIES
1.1. Morgan Stanley
1) Morgan Stanley (ci-après : "Morgan Stanley USA"), anciennement connue sous la dénomination Morgan Stanley Dean Witter & Co., est une société de services financiers sise au Delaware (États-Unis) qui propose divers services en matière de crédit et d'investissements. Elle a été créée en 1997 à la suite d'une fusion entre Morgan Stanley Group Inc. et Dean Witter, Discover & Co (4). Avant le 22 février 1993, Dean Witter, Discover & Co. était une filiale à 100 % de Sears, Roebuck & Co (5).
2) Aux États-Unis, Morgan Stanley USA gère le réseau de cartes privatives Discover/NOVUS sur lequel elle émet sa carte Discover (6). Cette carte n'est délivrée qu'aux États-Unis (7). En ce qui concerne son acceptation, "the Discover network only operates in the United States, and to a limited extent, in relation to a small number of Canadian outlets (generally Canadian outlets of US companies, for example, hotels) and destination travel in some Puerto Rican and Caribbean islands" [le réseau Discover couvre uniquement les États-Unis ainsi qu'un petit nombre de points de vente au Canada (généralement des points de vente canadiens de sociétés américaines, tels que des hôtels, notamment) et de centres touristiques dans quelques îles de Porto Rico et des Caraïbes] (8). Le réseau Discover ne fonctionne pas dans l'Union européenne (UE) ni dans l'Espace économique européen (EEE) (9).
3) Le 23 février 1999, Morgan Stanley USA a constitué la société bancaire Morgan Stanley Dean Witter Bank Limited (aujourd'hui Morgan Stanley Bank International Limited), ci-après : "Morgan Stanley Bank", établie au Royaume-Uni (10). Le Consumer Banking Group International, une division de Morgan Stanley Bank, constitue la division de Morgan Stanley pour les activités hors des États-Unis en matière de services de crédit mondiaux de Morgan Stanley. Basée à Londres, elle est chargée des activités de carte de crédit dans l'Union européenne.
4) Le Royaume-Uni est le seul pays d'Europe où Morgan Stanley Bank exerce des activités en matière de cartes de crédit. Avant l'admission de Morgan Stanley Bank en tant que membre de Visa le 22 septembre 2006 (11), les activités de Morgan Stanley Bank dans ce domaine étaient limitées à l'émission de cartes MasterCard. Consumer Banking Group International, division de Morgan Stanley Bank, émet la "Morgan Stanley Card" au Royaume-Uni depuis août 1999 (12) en tant que membre du réseau MasterCard. La Morgan Stanley Card est une carte MasterCard qui porte le logo Morgan Stanley, et n'est pas une carte Discover. Elle est acceptée par tous les commerçants qui acceptent MasterCard.
5) Morgan Stanley Bank n'affilie pas les commerçants pour l'acceptation de la MasterCard. De l'avis de Morgan Stanley USA, il est impossible de pénétrer le marché de l'affiliation des commerçants sans être membre à la fois du réseau MasterCard et du réseau Visa (13). Or, Morgan Stanley Bank n'est devenue membre de Visa que le 22 septembre 2006.
6) En avril 2000 Morgan Stanley USA s'est plainte à la Commission de ce que "one particularly harmful impact of Visa's Rule 2.12 (b) is that it prevents MSDW from acquiring as a merchant acquirer for Visa transactions" (14) [un impact particulièrement nuisible de l'article 2.12, point b, du règlement de Visa empêche Morgan Stanley d'affilier des commerçants pour des transactions par Visa]. À partir de 2002, Morgan Stanley USA a affiné et élaboré un plan stratégique et un plan de mise en œuvre d'une activité intégrée d'émission et d'acquisition (15) (ceci entre autres pour rétribuer les titulaires de cartes Morgan Stanley Bank utilisant des commerçants affiliés par cette dernière) (16) au Royaume-Uni et dans les États membres de l'UE, activité qui deviendrait effective en mai 2005 dès lors qu'elle serait admise membre du réseau Visa (17).
7) Morgan Stanley USA et Morgan Stanley Bank ont conjointement présenté une plainte devant la Commission européenne ("la plainte" du 12 avril 2000) (18). Les plaignants seront ci-après désignés "Morgan Stanley", sauf indication du contraire.
1.2. Visa
8) Visa International Service Association (ci-après : "Visa International") est une société enregistrée en vertu de la législation de l'État du Delaware (États-Unis). Visa gère le réseau de cartes Visa. Dans ce cadre, elle gère des marques commerciales, fixe les règles du réseau et fournit aux institutions financières affiliées des services d'autorisation et de compensation via un réseau informatique et télématique mondial, appelé VisaNet. Visa ne délivre pas elle-même de cartes Visa aux titulaires et ne passe pas de contrats avec des commerçants pour l'acceptation de la carte Visa. Ces activités sont assurées par ses institutions financières affiliées ou par des banques auxquelles les membres de Visa concèdent une licence à ces fins.
9) Visa International régit et coordonne le réseau Visa, conformément à ses statuts (By- Laws) et à son règlement intérieur (Operating Regulations), qui sont adoptés par le conseil d'administration de Visa International et qui lient tous les membres de Visa, partout dans le monde (19).
10) Visa a subdivisé les territoires sur lesquels elle exerce son activité en six régions, à savoir : Asie-Pacifique ; Amérique latine et Caraïbes ; États-Unis ; Canada ; Europe centrale et orientale ; Moyen-Orient et Afrique (CEMEA) et Union européenne (ci-après : "la région UE"). Visa Europe a été constituée le 1er juillet 2004. Avant cette date, "Visa UE" était une division géographique de Visa International. Les banques actives dans chacune des six régions sont représentées par leurs délégués au conseil d'administration régional. Le conseil d'administration de Visa International a délégué aux conseils régionaux le droit de gérer les activités de leur région respective et d'adopter pour celle-ci des règles complémentaires dans certains domaines, pour autant que ces règles soient compatibles avec celles édictées par Visa International (par exemple, le conseil d'administration régional de Visa Europe Limited a adopté pour cette société un règlement intérieur et un règlement d'adhésion qui lui sont propres).
11) Avant le 1er juillet 2004 " Visa EU " était une division géographique de Visa International. Le 1er juillet 2004 Visa Europe Limited (ci-après :"Visa Europe") (20) a été constituée. Visa Europe compte plus de 4 500 membres. Visa Europe détient également la totalité d'une filiale, Visa Europe Services Inc., une société d'exploitation qui est l'employeur de tout le personnel de la région UE ainsi que le propriétaire de tous les actifs de cette région (21). Outre les États membres actuels de l'Union européenne (22), la région "Union européenne" de Visa couvre aussi l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège, la Turquie, Israël et la Suisse.
12) Avant la constitution de Visa Europe en société, le conseil d'administration régional de " Visa UE " disposait de certains pouvoirs de décision qui lui avaient été délégués par le conseil d'administration de Visa International. En vertu du mandat adopté par le conseil d'administration de Visa International pour le conseil d'administration régional de la région UE de Visa, ce dernier avait " authority [...] under the Visa International By-Laws [to decide on admission as a Visa member] of any organisation headquartered in the [Visa EU] Region ..." [était habilité à exercer l'autorité [...] conformément aux statuts de Visa International en matière [d'adhésion à n'importe quelle organisation établie dans la [Visa UE] région (...)] (23).
13) En conséquence, tout candidat à l'adhésion à Visa dont le siège d'activité principal était établi dans la région Visa UE devait adresser sa demande de candidature au conseil d'administration compétent pour cette région. Si ce candidat respectait les conditions d'adhésion définies dans les statuts de Visa International s'appliquant uniformément sur l'ensemble de la région Visa UE, le conseil d'administration régional de Visa Europe lui octroyait le statut de membre Visa (24) et l'autorisait à exercer des activités liées à la carte Visa dans l'État membre où il avait son siège d'activité principal.
14) Depuis le 1er juillet 2004, date de la constitution de Visa Europe, le conseil régional de Visa Europe a autorité exclusive pour réglementer toutes questions au sein de la région UE (25), et notamment de décider de l'opportunité d'accepter ou de refuser toute demande d'octroi de la qualité de membre de Visa Europe (26), ceci en conformité avec les statuts de Visa International (27).
15) Sauf indication contraire, il sera fait conjointement référence ci-après à Visa International et à Visa Europe sous le nom de "Visa".
2. OBJET DE LA PRESENTE PROCEDURE
2.1. La règle d'adhésion à Visa appliquée à Morgan Stanley
16) Toute institution organisée conformément aux lois régissant les banques commerciales de son propre pays et agréée pour recevoir des dépôts à vue peut, en principe, prétendre au statut de membre Visa, qui permet à des banques d'émettre des cartes Visa et d'affilier des commerçants pour l'acceptation de ces cartes.
17) Toutefois, lors d'une réunion qui s'est tenue le 4 décembre 1989, le conseil d'administration de Visa International a modifié l'article 2.12, point b), des statuts de Visa International en adoptant la règle suivante (28):
"... If permitted by applicable law, the Board (including Regional Boards and Group Members) shall not accept for membership any Applicant which is deemed by the Board of Directors to be a competitor of the corporation" [si la législation applicable le permet, le conseil d'administration (y compris les conseils régionaux et les membres du groupe) n'acceptera pas comme membre un candidat qu'il considère comme un concurrent de la société].
18) Le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration précise que cette modification a été effectuée "afin de maintenir et d'accroître la concurrence entre systèmes, mais aussi d'éviter toute concurrence déloyale" (29).
19) Au cours de la même réunion, le conseil d'administration de Visa International a arrêté la liste des organisations considérées comme des concurrentes de Visa, laquelle inclut [liste des concurrents de Visa] et Sears Roebuck (30). Lors de la réunion du conseil des 7 et 8 novembre 1994, la liste des concurrents a été modifiée en vue de refléter les changements de propriété; cette modification a consisté, entre autres, à rayer Sears Roebuck de la liste et à y inclure Morgan Stanley Dean Witter (31).
20) À l'occasion de sa réunion du 6 mars 2000, le comité exécutif du conseil d'administration de Visa International a décidé de réaffirmer les décisions consignées dans le procès-verbal du conseil d'administration du 4 décembre 1989, tel que modifié par le procès-verbal du 7 novembre 1994 (32).
21) Visa explique que, lors de la constitution de Visa Europe en société, il avait été décidé que les nouveaux statuts et le règlement d'adhésion de Visa Europe devaient refléter les statuts de Visa International (y compris les dispositions de l'article 2.12, point b). C'est ainsi que, depuis octobre 2004, la clause 5, paragraphe 3, du règlement d'adhésion de Visa Europe reproduit textuellement la disposition énoncée à l'article 2.12, point b), des statuts de Visa International (cette disposition, qui figure à la fois à l'article 2.12, point b), des statuts de Visa International et à la clause 5, paragraphe 3, du règlement d'adhésion de Visa Europe, sera désignée, ci-après, par "la règle").
22) Comme elle fait partie des statuts de Visa International et du règlement d'adhésion de Visa Europe, la règle s'applique à tous les pays de la région Visa UE. De ce fait, un candidat qui se voit refuser la qualité de membre de Visa Europe sur la base de la règle dans un pays de cette région se voit d'office refuser le droit d'émettre des cartes Visa et d'acquérir des transactions Visa (33) dans la région entière.
23) Le [date] 2006, le conseil d'administration de Visa International a approuvé des "Criteria for Assessment of risk of disloyal competition" [critères d'évaluation du risque de concurrence déloyale] dans le cadre de la règle en cause dans la présente affaire (34). Visa assimile l'adoption de ces critères à "a variation of By-Law [numéro du règle] for the Visa Europe Region" [une modification du statut [numéro du règle], pour la région Visa Europe] et précise que la nouvelle règle modifiée a pris effet le [date] 2006 (35). Toutefois, d'après l'information transmise par Visa à la Commission (36), le libellé de la règle même n'a pas changé, mais a été complété par les critères d'évaluation. Il est prévu que ces critères seront publiés en [date] 2007 dans le règlement d'adhésion de Visa Europe.
24) Selon Visa les objectifs de la règle sont (i) de renforcer et de maintenir l'intégrité et l'efficacité de Visa en tant que système de paiement par carte quadripartite, (ii) de prévenir l'émergence d'une concurrence déloyale par un parasitisme de la part de Morgan Stanley, et (iii) de maintenir et d'augmenter la concurrence entre les systèmes (37).
25) L'objet de la présente procédure n'est pas la règle en tant que telle, mais son application à Morgan Stanley (c'est-à-dire, la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley).
2.2. Les demandes d'admission de Morgan Stanley Bank et les réponses de Visa
26) En mars 2000, Morgan Stanley a demandé à obtenir la qualité de membre de Visa (38), demande qui lui fut refusée jusqu'au 22 septembre 2006, date à laquelle Morgan Stanley Bank est devenue membre de Visa Europe.
2.3. L'admission de Morgan Stanley Bank en tant que membre de Visa le 22 septembre 2006
27) Le 21 septembre 2006, Morgan Stanley et Visa ont réglé leur différend en concluant un accord en vertu duquel Visa octroyait à Morgan Stanley Bank la qualité de membre de Visa Europe de manière inconditionnelle. [...], l'adhésion à Visa se traduit notamment par [...] the right for Morgan Stanley Bank to participate in [...] Programme [...] and according to which Morgan Stanley Bank shall be eligible to issue and acquire Visa cards in all countries within the Visa Europe Region subject to the provisions of the Visa Europe Membership Regulations [...] (39) [le droit de Morgan Stanley Bank de participer au [...] programme [...] et en vertu duquel Morgan Stanley Bank aura le droit d'émettre et d'acquérir des cartes Visa dans tous les pays à l'intérieur de la région Visa Europe sous réserve des dispositions du règlement d'adhésion de Visa Europe [...].
28) Morgan Stanley est convenue de retirer la plainte déposée auprès de la Commission et [les détails d'accord]. (40)
29) Morgan Stanley est également convenue de suspendre pendant trois ans la procédure engagée contre Visa devant la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles. Si, pendant cette période de trois ans, Visa refusait à Morgan Stanley l'adhésion à Visa Europe pour certains motifs, les parties conviennent que la suspension de la procédure sera levée et Morgan Stanley pourra reprendre son action contre Visa [les détails d'accord]. (41)
3. LA PROCEDURE
30) Morgan Stanley a engagé une procédure contre Visa devant la Commission européenne (42) le 12 avril 2000, et devant la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles le 28 septembre 2000 (43) (44). Son action devant la High Court of Justice est similaire à la plainte qu'elle a soumise à la Commission, à la différence près que Morgan Stanley y réclame des dommages-intérêts contre Visa. Le 2 mai 2001, par suite de la demande de Visa en ce sens, la High Court of Justice a ordonné la suspension de la procédure en attendant le résultat de l'enquête de la Commission (45).
31) Une communication des griefs a été envoyée à Visa International et Visa Europe le 2 août 2004. Les destinataires de la communication des griefs ont eu accès au dossier de la Commission (46).
32) En vertu de l'article 6, point 1, du règlement 773-2004 (47) de la Commission, Morgan Stanley s'est vu remettre une version non confidentielle de la communication des griefs le 15 octobre 2004. Le plaignant a soumis des observations écrites sur la communication des griefs le 22 octobre 2004, auxquelles Visa a répondu par des observations écrites en date du 23 février 2005.
33) Aux termes de l'article 27, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1-2003, lu en liaison avec l'article 10 du règlement (CE) n° 773-2004 de la Commission, Visa International et Visa Europe ont présenté leurs observations écrites en réponse à la communication des griefs le 3 décembre 2004, ainsi que des observations écrites supplémentaires le 17 janvier 2005 (ci-après : "observations de Visa sur la CG"). Morgan Stanley a répondu à ces observations de Visa par des observations écrites présentées respectivement le 25 janvier 2005 et le 15 février 2005 (ci-après : "réponse de Morgan Stanley aux observations de Visa sur la CG"), auxquelles Visa a répliqué par des observations écrites datées du 20 mai 2005.
34) Dans leurs observations écrites sur la CG du 3 décembre 2004, Visa International et Visa Europe ont demandé à avoir l'occasion de faire connaître leur point de vue dans le cadre d'une audition. Initialement fixée aux 8 et 9 février 2005, cette audition a ensuite été reportée aux 5 et 6 avril 2005, à la demande de Visa. Le 5 avril 2005, Visa a renoncé à exercer son droit d'être entendue, en motivant ce renoncement par l'annonce, le 4 avril 2005, des intentions de Morgan Stanley de se défaire de ses activités de cartes de paiement (48).
35) Les services de la Commission ont, par leurs lettres du 23 décembre 2004 et du 6 juillet 2006, attiré l'attention de Visa sur la manière dont la Commission entendait utiliser certains éléments versés au dossier après l'accès au dossier auquel il est fait référence au paragraphe (30) ci-dessus et ils ont invité Visa à formuler ses observations à ce propos. Visa a répondu par lettres datées, respectivement, du 14 janvier 2005 et du 22 septembre 2006.
36) Comme expliqué à la section 2.3 ci-dessus, le 21 septembre 2006, Morgan Stanley et Visa ont conclu un accord prévoyant la résolution de tous les griefs formulés par Morgan Stanley à l'encontre de Visa dans la plainte déposée devant la Commission ainsi que le retrait de cette plainte, en contrepartie de l'acceptation de Visa d'octroyer à Morgan Stanley Bank le statut de membre inconditionnel de Visa Europe, ce statut incluant pour Morgan Stanley Bank le droit d'émettre et d'acquérir des cartes Visa dans tous les pays situés dans la région UE de Visa. La section 7 ci-dessous explique pourquoi la Commission juge nécessaire d'adopter une décision quand bien même l'infraction est terminée.
37) Le 22 septembre 2006, Morgan Stanley Bank est devenue membre de Visa Europe (49) et Morgan Stanley a retiré sa plainte devant la Commission (50).
38) Les parties ont accédé une nouvelle fois au dossier le 12 janvier 2007.
4. LE MARCHE EN CAUSE
4.1. Le marché de produits en cause
4.1.1. Le réseau, l'émission et l'acquisition considérés comme trois marchés distincts
39) Les cartes de paiement peuvent être utilisées, entre autres, pour payer à un commerçant (détaillant) des biens ou des services, ou pour retirer de l'argent au guichet d'une banque ou à un distributeur automatique de billets de banque ("DAB"). Lorsqu'un paiement est effectué au moyen d'une carte, quatre parties sont, en principe, impliquées : le titulaire de la carte, la banque émettrice (qui a délivré la carte au titulaire), le commerçant et la banque acquéreur (qui a conclu un contrat d'affiliation avec le commerçant pour l'acceptation de la carte d'une certaine marque). Pour pouvoir émettre des cartes d'une marque donnée et affilier des commerçants en vue de l'acceptation des cartes de cette marque, les banques émettrices et acquéreurs doivent être membres d'un réseau de cartes de paiement qui promeut l'utilisation des cartes de la marque en question (ex. : Visa ou MasterCard).
40) La définition du marché se fonde sur l'analyse des services fournis dans le cadre d'un réseau de cartes de paiement. Ces services peuvent être subdivisés en trois groupes distincts : a) les services fournis par un réseau de cartes de paiement à des institutions financières (généralement membres de ce réseau) (51), dans le cadre desquels les différents systèmes de cartes de paiement se font concurrence; on parle, dans ce cas, de concurrence "inter-systèmes" ou "sur le marché en amont"; b) les services fournis par des banques émettrices aux titulaires de cartes de paiement; c) les services fournis par les banques acquéreurs aux commerçants; dans ce cas, la concurrence s'exerce entre les différentes institutions financières pour l'acquisition des clientèles constituées respectivement des titulaires de cartes et des commerçants; ce type de concurrence est désigné par les expressions "concurrence intra-système" ou "concurrence sur les marchés en aval" (52).
41) En conséquence, trois marchés distincts peuvent être différenciés : a) un marché pour les services de réseaux, au sein duquel les réseaux de cartes (tels que Visa ou MasterCard) fournissent des services aux diverses institutions financières; b) un "marché de l'émission", où les émetteurs de cartes de paiement se font concurrence entre eux pour émettre des cartes et fournir des services connexes aux particuliers; c) un "marché de l'acquisition", dans lequel les acquéreurs concluent avec les commerçants un contrat couvrant l'ensemble des services requis pour que ceux-ci puissent accepter les cartes (53).
42) La règle peut avoir des effets de restriction de la concurrence sur les marchés de l'émission et de l'acquisition situés en aval, par exemple en empêchant les entrants potentiels d'émettre des cartes et/ou d'affilier des commerçants. La présente décision se concentrera uniquement sur le marché de l'acquisition en aval, dans lequel les effets restrictifs de la règle sur la concurrence ont été appréciables (section 5.3.2 infra).
43) Les services d'émission de cartes et d'acquisition représentent deux marchés distincts, étant donné que les banques émettrices et les banques acquéreurs fournissent des services à deux groupes de clients distincts et que ces services sont très différents par leur nature et ne sont pas substituables du point de vue des commerçants et des titulaires de cartes (54).
44) Les banques émettrices délivrent des cartes aux particuliers ou aux entreprises, fournissent à chaque titulaire de carte un relevé des dépenses effectuées au moyen de sa carte et collectent les paiements correspondant aux sommes dépensées. Les banques acquéreurs recrutent des commerçants pour les affilier à leurs systèmes de carte, leur fournissent des terminaux et des lecteurs de cartes, traitent les informations relatives aux transactions et les transmettent aux émetteurs, collectent l'argent auprès des émetteurs et payent les détaillants. Lorsqu'un commerçant cesse ses activités, elles sont aussi responsables des sommes impayées vis-à-vis des émetteurs.
45) De plus, les services d'émission et d'acquisition sont tarifés différemment : les principaux frais imputés au commerçant - désignés par l'expression anglaise "merchant service charge" (ou "MSC") - correspondent à une redevance par transaction, tandis que les titulaires de cartes paient généralement des redevances annuelles forfaitaires.
46) Dans un réseau quadripartite comme celui de Visa, les services d'émission et d'acquisition sont fournis par des entreprises- en principe des membres du réseau - qui sont distinctes de la société qui gère le réseau.
47) Bien que les services fournis par les banques émettrices et les banques acquéreurs ne puissent pas se substituer les uns aux autres, la demande des titulaires de carte pour des services d'émission et celle des commerçants pour des services d'acquisition sont, d'une certaine manière, intimement liées : étant dépendants des choix de leurs clients, les commerçants tendent à accepter de préférence les cartes de paiement qui sont largement utilisées par les titulaires de cartes et, inversement, ces derniers privilégient les cartes qui sont acceptées par la plupart des détaillants.
4.1.2. Non-substituabilité des services d'acquisition avec les services d'acceptation d'argent liquide et de chèques
48) Les caractéristiques des services fournis aux commerçants pour l'acceptation des cartes de paiement diffèrent de celles inhérentes aux services fournis pour l'acceptation de l'argent liquide et des chèques. Par exemple, les personnes chargées de la collecte d'argent liquide et celles chargées de l'affiliation des commerçants pour l'acceptation des cartes ne pourraient pas aisément s'échanger leurs fonctions. La collecte d'argent liquide requiert un transport de haute sécurité et implique un risque de vol, tandis que l'activité d'acquisition de cartes nécessite un équipement informatique sophistiqué, comporte des risques financiers (telles que les pertes de rétro-facturation irrécouvrables en cas de défaillance du commerçant) et implique que la banque ait une certaine taille.
49) Du point de vue du consommateur, à quelques exceptions près, l'argent liquide et les chèques ne sont généralement pas considérés comme des substituts aux cartes de paiement. Le paiement en argent liquide n'est pas toujours pratique et il peut être dangereux de transporter des montants importants. Peu indiqué pour les achats coûteux, ce type de paiement est moins intéressant que les cartes de paiement pour les transactions d'un montant important (55). Alors que beaucoup de titulaires de cartes paieront en liquide, pour de petites transactions, s'ils ne peuvent pas utiliser leur carte, il est probable que peu d'entre eux accepteront ou seront en mesure de le faire s'il s'agit de montants élevés.
50) Tandis que les cartes de paiement peuvent aisément être utilisées comme des substituts aux chèques, l'inverse est nettement moins vrai. En premier lieu, il n'est pas possible d'utiliser un chèque pour retirer de l'argent dans un guichet automatique. En deuxième lieu, quand il s'agit d'effectuer des paiements, dans un environnement où certains biens ou services ne sont délivrés ou fournis qu'après réception de paiements garantis, les faibles limites de garantie sur les chèques individuels restreignent leur usage comme solution de remplacement aux cartes de paiement. Si les commerçants acceptent des chèques au-delà de ces limites, ils perdent toute protection contre la fraude ou l'incapacité du client à payer. C'est pourquoi certains titulaires de cartes ne sont pas en mesure ou enclins à payer par chèque, en particulier pour des achats d'un montant élevé, si le commerçant n'accepte pas les cartes.
51) Les commerçants ne considèrent pas non plus l'argent liquide et les chèques comme des substituts aux cartes de paiement. La raison la plus fréquente qui les incite à accepter les cartes est l'accroissement de la demande des consommateurs pour des paiements par carte (56). Plus les titulaires utilisent leurs cartes de paiement (du fait des inconvénients du paiement en argent liquide ou par chèque évoqués ci-dessus), plus l'acceptation des cartes devient une nécessité pour les détaillants. Cette constatation indique par ailleurs que les commerçants qui reviennent sur leur décision initiale d'accepter uniquement l'argent liquide et les chèques et qui consentent à accepter aussi les cartes de paiement font ce choix après avoir pris la mesure des pertes commerciales que pourrait engendrer leur persistance à refuser d'accepter un moyen de paiement de plus en plus demandé par les clients (57).
52) Sur la base de l'analyse ci-dessus, il y a lieu de conclure que les services d'acquisition de cartes ne sont pas suffisamment substituables à ceux liés à l'argent liquide et aux chèques.
4.1.3. Non-substituabilité des cartes de crédit ou de débit différé et des cartes de débit
53) Pour le commerçant, l'acceptation d'une carte de crédit ou d'une carte à débit déféré est nettement plus onéreuse que l'acceptation d'une carte de débit (58). Toutefois, comme les clients apprécient la fonction crédit d'une carte de crédit et s'attendent à pouvoir régler leurs achats indifféremment par une carte de crédit ou une carte de débit, les commerçants sont relativement insensibles aux changements pouvant intervenir dans les frais d'acquisition des deux types de carte (ainsi, ils ne renonceraient pas à un type de carte pour passer à un autre en cas de majoration des frais imposés aux commerçants sur le premier type de carte) (59) et préfèrent accepter les cartes de crédit en plus des cartes de débit (60) plutôt que de courir le risque de manquer une vente (61).
54) Il s'ensuit que les cartes de débit ne sont pas des substituts valables pour les cartes de crédit /de débit différé (62).
4.1.4. Conclusion sur le marché de produits en cause
55) Il n'est pas nécessaire, en l'espèce, de déterminer si les cartes de débit différé constituent un marché distinct ou si elles forment un seul et même marché avec les cartes de crédit (en raison notamment du fait que les frais imputés aux commerçants du Royaume-Uni sont en principe identiques pour les transactions effectuées par cartes de crédit et celles effectuées par cartes de débit différé). Étant donné que le nombre de cartes de débit différé au Royaume-Uni ainsi que le volume et la valeur des transactions réalisées au moyen de ces cartes sont minimes par comparaison aux cartes de crédit, toute restriction de la concurrence ayant une incidence notable sur les cartes de crédit sera ressentie de la même façon, indépendamment du fait que le marché concerné englobe à la fois les cartes de débit différé et les cartes de crédit ou qu'il se limite aux cartes de crédit. En conséquence, la question de savoir si le marché de produits en cause comprend uniquement les cartes de crédit ou inclut aussi les cartes de débit différé peut rester ouverte.
56) De surcroît, il n'y a pas lieu de déterminer en l'espèce si le marché devrait être limité à certaines marques de cartes de débit différé et de crédit (c'est-à-dire les marques Visa et MasterCard considérées conjointement, voire la marque Visa prise seule, par opposition aux marques MasterCard, American Express, Diners Club et JCB) car, dans des marchés aussi restreints, l'effet de restriction de la concurrence induit par la règle - telle qu'elle est appliquée à Morgan Stanley- serait encore plus marqué.
57) Pour les raisons qui précèdent, aux fins de la présence décision, le marché de produit pertinent est le marché des services d'acquisition de cartes de crédit ou de débit différé à des commerçants.
58) Même si le marché était plus large que le marché des services d'acquisition de cartes de crédit ou de débit différé et englobait également des services d'acquisition portant sur des cartes de débit, la restriction de la concurrence qui sera décrite plus loin serait toujours appréciable sur ce marché élargi (63).
4.2. Marché géographique en cause
59) Dans sa décision du 24 juillet 2002 (Visa International - Commission d'inter-change multilatéral) la Commission a estimé que le marché géographique en cause à prendre en considération pour apprécier les aspects concurrentiels des systèmes de cartes de paiement est encore principalement national (64). En ce qui concerne le marché de l'acquisition, les faits recueillis confirment l'existence de marchés nationaux.
60) Par ailleurs, les conditions de la concurrence sur les marchés de l'acquisition ne sont pas suffisamment homogènes entre les différents États membres de l'EEE pour qu'il soit possible de conclure à l'existence d'un marché plus vaste que le territoire national. Le rapport de Retail Banking Research Ltd. "Payment Cards Western Europe 2006" (ci-après : "rapport RBR") que le niveau des commissions des commerçants varie considérablement à travers l'Europe; selon ce document, les différences observées s'expliquent, en partie, par le fait que les accords conclus entre les commerçants et les acquéreurs diffèrent selon les pays (65). Dans certains pays, les détaillants sont obligés d'acheter ou de louer des terminaux de points de vente (TPV) et de supporter tous les frais d'installation et de maintenance, alors que, dans d'autres pays, les acquéreurs restent propriétaires du terminal dans la plupart des cas et prennent en charge tous les frais y afférents (dans ces circonstances, les frais de transaction imputés au commerçant sont généralement plus élevés) (66). Le rapport fait également mention à d'autres facteurs qui contribuent à l'existence de différences entre les frais imposés aux commerçants dans les divers États membres de l'EEE; il s'agit, entre autres, du niveau de la fraude, du mode de traitement des transactions qui a été choisi, de la méthode et de la fréquence d'autorisation des transactions ou encore du niveau de service fourni par les acquéreurs, etc. (67).
61) Le fait que les banques actives sur les marchés européens de l'acquisition diffèrent d'un État membre à l'autre (à l'exception des quelques acquéreurs transfrontaliers européens mentionnés au considérant 65 infra) est sans doute une preuve supplémentaire de l'absence d'uniformité des conditions au sein de l'UE et de l'existence de marchés nationaux de l'acquisition.
62) Il convient en outre d'examiner si le développement de l'acquisition transfrontalière a eu pour effet de donner une dimension européenne plutôt que nationale au marché de la fourniture de services d'acquisition de cartes de débit différé et de crédit aux commerçants.
63) L'acquisition transfrontalière peut être définie comme un type particulier d'affiliation des commerçants, qui se caractérise par le fait qu'un acquéreur fournit des services d'acquisition à un commerçant établi dans un pays autre que celui où l'acquéreur a son siège d'activité principal.
64) Les règles de Visa liées à l'acquisition transfrontalière dans la région UE de Visa ont été progressivement libéralisées au fil du temps : au début des années 90, cette forme d'acquisition n'était autorisée que dans le cadre des transactions aériennes; les règles ont été modifiées par la suite afin d'en étendre le champ aux voyages et aux loisirs. Un nouveau changement intervenu ultérieurement a autorisé l'application des règles de Visa à tous les secteurs commerçants, à condition néanmoins que le commerçant concerné soit établi dans au moins deux pays de la région UE de Visa. Un autre changement apporté plus récemment a cependant assoupli cette condition des "deux pays", à la suite des modifications appliquées à compter du 1er octobre 2000 (68). Il s'ensuit qu'une banque établie dans un État membre et membre du réseau Visa peut, aujourd'hui, conclure un contrat avec n'importe quel commerçant établi dans un autre État membre, quel qu'il soit, sans qu'il soit exigé de ce commerçant qu'il ait des points de vente dans plusieurs États membres ou dans l'État membre où l'acquéreur est établi. L'acquisition transfrontalière sous sa forme libéralisée résulte donc d'une évolution relativement récente.
65) Au mois de mars 2004, le programme d'acquisition transfrontalière de Visa Europe (programme CBA) comptait [20-30] membres de Visa Europe (69). Les acquéreurs transfrontaliers qui exercent ce type d'activité depuis leur siège principal au Royaume-Uni sont la [banque A], [banque B] et [banque C] (70).
66) Il ressort des réponses recueillies à la suite des demandes d'information de la Commission auprès des acquéreurs transfrontaliers que ces derniers se sont principalement focalisés, jusqu'à présent, sur les commerçants multinationaux opérant dans plusieurs États membres de l'EEE (bien que, comme indiqué ci-dessus, les règles d'acquisition transfrontalière édictées par Visa permettent aux acquéreurs d'affilier n'importe quels commerçants, y compris des commerçants strictement "nationaux" qui ne disposent de points de vente que dans un seul État membre). [L'acquéreur transfrontalier A] confirme que tous les commerçants qu'elle a affiliés en 2004 dans le cadre de ses programmes d'acquisition transfrontalière (soit 342 commerçants) sont des commerçants multinationaux qui possèdent des TPV au Royaume-Uni ainsi que dans d'autres États membres (71). Cette affirmation va dans le même sens que les données fournies par les principaux acquéreurs transfrontaliers qui affilient des commerçants au Royaume-Uni, mais dont le siège d'activité principal est établi dans un autre État membre de l'EEE. Ainsi, [L'acquéreur transfrontalier B] déclare avoir affilié au Royaume-Uni, dans le cadre du programme Visa d'acquisition transfrontalière, 485 commerçants disposant de TPV dans plusieurs États membres et 161 commerçants ayant des TPV uniquement dans ce pays (données 2004) (72). Dans le cadre du programme Visa précité, [L'acquéreur transfrontalier C], qui exerce ses activités d'acquisition transfrontalière depuis la République d'Irlande, dit avoir affilié 81 commerçants établis au Royaume-Uni et ayant des TPV dans plusieurs États membres, mais aucun commerçant opérant uniquement au Royaume-Uni (73).
67) Dans l'ensemble, les commerçants affiliés dans le cadre desdits programmes d'acquisition transfrontalière sont principalement des compagnies aériennes, des sociétés de location de véhicules, des hôtels, des agences de voyages et d'autres entreprises du secteur du voyages, des entreprises dans le secteur des loisirs, des entreprises spécialisées dans la vente par correspondance/sur catalogue ou des sociétés de télémarketing (74). Il apparait en outre que l'expansion des programmes d'acquisition transfrontalière est due, dans une large mesure, à l'essor du commerce électronique (75).
68) En d'autres termes, l'acquisition transfrontalière a été, jusqu'ici, une activité axée sur un segment assez étroit du marché et s'adressant à une catégorie de clients distincte de celle de l'acquisition nationale. Cela se reflète dans la part occupée par les acquéreurs transfrontaliers dans le secteur britannique de l'acquisition, qui reste très limitée par rapport au volume d'acquisition national. Si on totalise le nombre des commerçants britanniques qui ont été affiliés par les acquéreurs transfrontaliers les plus importants au Royaume-Uni (voir le paragraphe (65) ci-dessus), en 2004, au parvient à 950 commerçants, chiffre insignifiant (0,3 %) par rapport aux plus de 365 000 commerçants affiliés dans le pays (76). Cela est également vrai de la valeur des transactions : les commerçants ayant leur siège au Royaume-Uni et acquis dans le cadre du programme d'acquisition transfrontalière Visa représentent une faible proportion de la valeur des transactions Visa au Royaume-Uni, selon les données fournies par la Plastic Card Review APACS 2005 (77), au tableau 4B (78). Considérant que les acquéreurs transfrontaliers établis dans d'autres États membres de l'EEE ne font pas concurrence aux acquéreurs britanniques strictement "nationaux" en matière d'affiliation de commerçants au Royaume-Uni et que les activités qu'ils exercent dans ce pays sont marginales au regard de l'acquisition purement britannique, il y a lieu de conclure que les activités des acquéreurs transfrontaliers au Royaume-Uni n'ont pas d'incidence sur la définition du marché géographique en cause, lequel est considéré comme national.
69) En conclusion, la Commission estime qu'aux fins de la présente décision, le marché géographique en cause pour la fourniture de services d'acquisition de cartes de crédit et de débit différé à des commerçants est national, c'est-à-dire qu'il se limite au territoire du Royaume-Uni.
5. APPLICATION DE L'ARTICLE 81, PARAGRAPHE 1, DU TRAITE CE ET DE L'ARTICLE 53, PARAGRAPHE 1, DE L'ACCORD EEE
5.1. Relation entre le traité CE et l'accord EEE - Juridiction
70) Comme indiqué à la section 1.2 supra, la règle s'applique dans tous les États membres de l'EEE, c'est-à-dire tous les États membres de l'Union européenne et les pays de l'Association européenne de libre échange (AELE) qui sont parties à l'accord EEE (Norvège, Liechtenstein et Islande).
71) Dès lors que la règle, telle qu'elle est appliquée à Morgan Stanley, empêche, restreint ou fausse le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun et affecte le commerce entre les États membres de la Communauté européenne, l'article 81 du traité CE s'applique.
72) De même, dès lors que la règle, telle qu'elle est appliquée à Morgan Stanley, a empêché, restreint ou faussé le jeu de la concurrence à l'intérieur du territoire couvert par l'accord EEE et affecté le commerce entre les États de la Communauté et ceux de l'AELE, l'article 53 de l'accord EEE s'applique.
73) Dans ce cas, la Commission est l'autorité compétente pour appliquer à la fois l'article 81 du traité CE et l'article 53 de l'accord EEE, sur la base de l'article 56 de l'accord EEE, étant donné que le commerce entre les États membres de la CE aussi bien que le commerce entre les États membres de la CE et ceux de l'AELE en ont été affectés (voir les paragraphes (275) et (276) infra)
5.2. Accord entre entreprises/décision d'une association d'entreprises
74) Visa International, Visa Europe (cette dernière depuis le 1er juillet 2004) (79) et leurs membres respectifs, qu'il s'agisse d'établissements de crédit ou d'entités détenues par des établissements de crédit, exercent une activité économique et, partant, sont des entreprises au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE. De plus, ces deux sociétés sont des organisations associatives (depuis le 1er juillet 2004 en ce qui concerne Visa Europe) dont les décisions sont prises par des conseils d'administration composés de représentants nommés par les banques qui en sont membres.
75) Dès lors, les règles et règlements qui définissent le cadre de fonctionnement du système Visa (y compris les statuts de Visa International et le règlement d'adhésion de Visa Europe qui contiennent la règle litigieuse) adopté par le conseil d'administration de Visa International ou Visa Europe, et la décision d'appliquer ces règles à une entreprise, peuvent être considérés soit comme des décisions d'une association d'entreprises, soit comme des accords entre entreprises (80).
5.3. Restriction de la concurrence
76) Les sections suivantes vont établir que
· la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley a exclu cette dernière du marché britannique de l'acquisition de cartes de crédit ou de débit différé (section 5.3.1.) ; que
· ladite exclusion a exercé des effets anticoncurrentiels sur ce marché (section 5.3.2) ; et que
· la conduite de Visa tombe dans le champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, du traité EEE (section 5.3.3)
5.3.1. Exclusion de Morgan Stanley du marché britannique de l'acquisition de cartes de crédit et de débit différé
77) Telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley, la règle n'a pas eu pour seul effet de l'exclure du marché de l'acquisition de cartes Visa (section 5.3.1.1) par le fait de ne pas appartenir au réseau Visa, car elle a également eu pour effet de l'exclure du marché des transactions de cartes de crédit et de débit différé britannique tout entier (section 5.3.1.2). Cela tient au fait que les contrats d'affiliation de commerçants sont toujours proposés et pour les cartes Visa et pour les cartes MasterCard.
78) En outre, l'affirmation selon laquelle Morgan Stanley ne se verrait pas exclue de toute entrée sur le marché pertinent dans la mesure où il lui serait possible de conclure un "accord de façade" ne résiste pas à l'examen (section 5.3.1.3).
5.3.1.1. Morgan Stanley s'est trouvée exclue de l'acquisition Visa dans le marché pertinent
79) Comme il est démontré à la présente section, par l'application de la règle à son encontre Morgan Stanley s'est trouvée exclue de l'acquisition Visa.
80) Visa détient un fort pouvoir sur le marché car la marque Visa est de loin la marque de carte de crédit la plus populaire du Royaume-Uni si l'on tient compte
· du nombre de cartes (section 5.3.1.1.1.),
· de la valeur des transactions (section 5.3.1.1.2.), et
· du nombre des commerçants qui acceptent la marque (section 5.3.1.1.3.); ainsi que du fait
· qu'elle a consolidé sa position, faisant preuve d'une croissance soutenue ces dernières années (section 5.3.1.1.4).
81) Les commerçants petits et grands considèrent Visa comme la marque de carte de crédit la plus importante, et celle qu'ils choisiraient s'ils avaient à n'accepter qu'une seule marque de carte de crédit (81).
5.3.1.1.1 Nombre de cartes émises
82) Le nombre des titulaires de cartes Visa au Royaume-Uni représente presque le double de celui des titulaires de cartes MasterCard. En 2004, Visa, avec 44,5 millions de cartes, s'adjugeait une part de 60 % de toutes les cartes de crédit et de débit différé émises au Royaume-Uni. Par rapport au nombre total des cartes de crédit/de débit différé en circulation, Visa et MasterCard détiennent plus de 97 % du marché britannique.
Tableau 1. Nombre de cartes de crédit et de débit différé en circulation au Royaume-Uni (2004)
<emplacement tableau>
Source : Rapport RBR 2006, Royaume-Uni, figure 15, à la p. 53
83) Bien évidemment, les commerçants sont le plus intéressés à accepter la marque de carte la plus répandue, et le moins intéressés à accepter des cartes qui ne sont détenues que par un petit nombre de personnes.
5.3.1.1.2 Valeur des transactions
84) Le pouvoir de Visa sur le marché est également attesté par le fait que la valeur des transactions par cartes Visa, représentant une part de 60 % du total, est presque le double de celle des transactions par carte MasterCard (34 %). En totalisant la valeur des transactions par carte de crédit et de débit différé, on constate que Visa et MasterCard s'adjugent plus de 94 % du marché britannique en termes de valeur (82).
Tableau 2. Parts de marché : transactions totales en valeur au Royaume-Uni (2002-2003)
<emplacement tableau>
Source : Pour Visa et MasterCard : demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs de mars 2004 (données 2003) ; pour Amex : observations soumises par American Express le 19 mars 2004 (données 2003 ; valeurs en USD converties en GPB aux taux de change de 1 USD = 0,5397 GBP) ; pour Diners Club : observations soumises par Citigroup le 5 mars 2004 (données 2002) et pour JCB : observations soumises par JCB le 26 mars 2004 (données 2003).
5.3.1.1.3 Nombre de commerçants acceptant la marque
85) Les réseaux Visa et MasterCard sont considérablement plus étendus que ceux d'Amex et Diners Club au niveau du taux d'acceptation par les commerçants. Sur la base des données fournies par les banques acquéreurs britanniques en réponse aux demandes d'information de la Commission de mars 2004, au 31 décembre 2003 le nombre total des commerçants britanniques qui acceptaient les cartes Visa était de 365 661, et le nombre total des commerçants britanniques qui acceptaient les cartes MasterCard était de 365 658. En ce qui concerne les autres marques de carte, le graphique de gauche sur le tableau 3 montre que les cartes Amex étaient acceptées par environ la moitié du nombre des commerçants acceptant les cartes Visa et MasterCard, tandis que la Diners était acceptée par un nombre très inférieur de commerçants (83). Ce résultat ne surprend guère si l'on pense à la base de titulaires de cartes Visa et MasterCard (section 5.3.1.1.1. ci-dessus).
Tableau 3. Parts relatives de marché : nombre de commerçants au Royaume-Uni (2003)
<emplacement tableau>
Source : Pour Visa et MasterCard : demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs de mars 2004 (données 2003) ; pour Amex : observations soumises par American Express le 19 mars 2004 (données 2003 ; valeurs en USD converties en GPB aux taux de change de 1 USD = 0,5397 GBP) ; pour Diners Club : observations soumises par Citigroup le 5 mars 2004 (données 2002) et pour JCB : observations soumises par JCB le 26 mars 2004 (données 2003).
86) La quasi-égalité que l'on constate entre le nombre des commerçants qui acceptent Visa (365 661) et celui des commerçants qui acceptent MasterCard (365 658) s'explique par le fait que les banques acquéreurs offrent généralement d'acquérir les deux marques, c'est-à-dire de pratiquer une vente liée Visa + MasterCard, afin de satisfaire la demande des commerçants qui sont demandeurs d'une telle vente liée (84). Il est remarquable que seuls cinq commerçants, sur le total des 365 662 commerçants britanniques qui acceptaient les cartes Visa et/ou MasterCard en 2003, n'acceptaient que l'une de ces deux cartes. Ils représentaient 0,001 % de la population marchande affiliée aux cartes Visa/MasterCard au Royaume-Uni.
5.3.1.1.4 La base des clients commerçants de Visa est en forte croissance
87) L'analyse de la base des clients commerçants de Visa et de MasterCard au Royaume-Uni de 2000 à 2003 (à partir des statistiques de clients commerçants fournis en réponse aux demandes d'information de la Commission de mars 2004) montre que les deux réseaux ont connu une forte croissance pendant cette période de quatre ans. Comme le montre le tableau 4, le nombre des commerçants affiliés par la Banque 1 a augmenté de 56 % et la clientèle de la Banque 2 a crû de 43 %, ce qui, respectivement, correspond à des taux de croissance annuels composés de 16 % et de 13 % (tableau 5). En ce qui concerne le nombre total des commerçants qui acceptent les cartes Visa et MasterCard au Royaume-Uni, il a connu la forte progression de 30 % pendant la période de 2000 à 2003 (tableau 4), ce qui correspond à un fort taux de croissance annuel de 9 % environ (tableau 5).
88) Tous ces chiffres témoignent de la force des deux marques et des pressions grandissantes qui s'exercent sur les commerçants pour qu'ils les acceptent. Ils montrent aussi que le commerce de l'affiliation de commerçants à ces deux marques offre toujours un potentiel de croissance au Royaume-Uni.
Tableau 4 (à gauche). Croissance absolue de la clientèle Visa et MasterCard au Royaume-Uni (2000-2003).
<emplacement tableau>
Tableau 5 (à droite). Croissance annuelle moyenne de la clientèle Visa et MasterCard au Royaume-Uni (2000 - 2003). 56%
<emplacement tableau>
Source : demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs de mars 2004. Pour la banque 5, seules des données pour 2001-2003 étaient disponibles, tandis que deux des acquéreurs, sur le total de huit, sont exclus de la comparaison en raison de l'absence de données historiques à leur sujet.
89) Outre l'analyse de la croissance des réseaux Visa et MasterCard à partir des données recueillies par la Commission, il est également possible de comparer l'évolution des réseaux Visa et MasterCard avec celle des réseaux Amex et Diners Club au cours d'une période donnée en recourant à des sources publiquement disponibles.
90) De l'analyse des données de croissance des cartes par réseau pendant la période de onze ans entre 1994 et 2004 fournies par le rapport RBR (85), il ressort que le nombre des cartes de crédit et de débit différé émises par les réseaux Visa, MasterCard, Amex et Diners Club s'est accru d'une moyenne annuelle respective de 10,7 %, 10 %, 5,9 % et 0,24 %. Ces pourcentages se traduisent par une progression qui a vu la part totale des cartes Visa et MasterCard passer de 95,3 % en 1994 à 97,1 % en 2004. En procédant à la même comparaison dans le cas des cartes Amex et Diners Club, on voit que les pourcentages correspondants étaient de 3,7 % en 1994 et de 2,5 % en 2004 pour Amex, et de 1,0 % et 0,4 % respectivement pour Diners Club.
91) Pour ce qui est du nombre des transactions, l'analyse des données contenues dans le Western European Plastic Cards Databook (86) pour la période de cinq ans entre 1998 et 2002 montre que le nombre des transactions effectuées avec la carte Diners Club ont baissé de 0,9 % par année en moyenne, à comparer avec une croissance de 4,7 % pour Amex, de 5,6 % pour MasterCard et de 10,3 % pour Visa. Reflétant l'évolution évoquée au paragraphe précédent, la part de Visa et de MasterCard dans le nombre total des transactions par carte de crédit et de débit différé en utilisant les cartes des quatre marques est restée stable, correspondant à 95,0 % en 1998 et à 95,8 % en 2002. Si l'on fait la même comparaison dans le cas des réseaux Amex et Diners Club, on obtient 4,1 % en 1998 et 3,6 % en 2002 pour Amex, et 0,8 % et 0,6 % pour Diners Club.
92) Enfin, au niveau de la valeur des transactions effectuées sur chaque réseau pendant la période de 1998 à 2002, alors qu'en 1998, 57 % de la valeur totale des transactions par cartes de crédit et de débit différé effectuées avec les quatre marques provenaient de Visa, ce pourcentage était passé à 61,1 % en 2002 (87). Dans le cas d'Amex, le pourcentage est resté pratiquement inchangé, enregistrant 7,49 % en 1998 et 7,47 % en 2002. Dans le cas de Diners Club, il a reculé légèrement, passant de 1,5 % en 1998 à 1,2 % en 2002. La part combinée de Visa et MasterCard était de 91,0 % en 1998 et de 91,3 % en 2002. Le taux de croissance annuel moyen composé pour chacune des quatre marques sur cinq ans se situe à 6,5 % pour Diners Club, 12,6 % pour Amex, 9,6 % pour MasterCard et 14,5 % pour Visa.
93) À partir de ces chiffres, on en conclut que Visa a consolidé son pouvoir sur le marché amont des services de réseaux de cartes et que sa marque est également forte dans les marchés avals au Royaume-Uni (marché de l'émission et de l'acquisition des cartes de crédit et de débit différé), enregistrant une croissance marquée ces dernières années. Par comparaison à Visa et MasterCard, Amex et Diners ont vu leurs parts de marché diminuer.
5.3.1.2. Exclusion de Morgan Stanley du marché britannique de l'acquisition tout entier
94) Du fait que les services d'affiliation pour l'acceptation de cartes Visa et MasterCard sont proposés sous la forme d'une vente liée, c'est-à-dire que les commerçants souhaitent conclure des contrats d'affiliation pour des cartes Visa et MasterCard avec une seule et même banque acquéreur (88), l'exclusion d'une entreprise de l'adhésion à Visa se traduit par son exclusion du marché britannique de l'acquisition de cartes de crédit et de débit différé tout entier, et non de la seule acquisition de cartes Visa.
95) Par les réponses qu'elle a reçues à ses demandes d'information aux banques acquéreurs de mars 2004, la Commission a appris qu'au Royaume-Uni, il n'existait que cinq commerçants (soit 0,001 % du total des 365 662 commerçants qui recevaient les cartes Visa et/ou MasterCard au 31 décembre 2003) qui acceptaient uniquement soit la carte Visa, soit la carte MasterCard. Les banques ont confirmé qu'à l'exception de ces quelques "clients à marque unique", tous les clients pour qui elles agissent en tant qu'acquéreurs demandent à bénéficier de services d'acquisition portant à la fois sur les cartes Visa et sur les MasterCard.
96) Ceci est confirmé par le consultant économique " Lexecon " dans un document annexé à la déposition de Visa du 11 décembre 2000 : " l'acquisition auprès des commerçants requiert de facto que l'acquéreur traite toutes les cartes acceptées par le commerçant " (89)
97) En outre, il ne semble pas exister au Royaume-Uni un seul commerçant qui travaille avec un acquéreur pour le traitement de transactions Visa, et avec un autre pour le traitement de transactions MasterCard (90).
98) L'existence d'un nombre aussi réduit de commerçants à marque unique au Royaume-Uni ne constituait pas un phénomène passager. Les données pour 2000-2002 fournies par les banques acquéreurs britanniques montrent que six contrats d'affiliation portant sur une marque unique ont été signés en 2000, sept en 2001, et six en 2002 (91).
99) Les réponses aux demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs en mars 2003 font état des raisons suivantes pour la conclusion de contrats d'affiliation prévoyant l'offre groupée de services d'acquisition Visa et MasterCard par la même banque : les clients souhaitent bénéficier d'une relation d'acquisition unique (un seul crédit sur leur compte en banque) et/ou des remises liées aux volumes (sous la forme de frais inférieurs) par le fait de confier leur activité d'acquisition à un fournisseur unique (92).
100) Dans leurs réponses aux demandes d'information de la Commission de mars 2003, les banques acquéreurs britanniques se sont montrées sceptiques quant à la viabilité commerciale de l'offre de services d'acquisition sur une seule marque. Priée de dire s'il serait commercialement viable de n'acquérir que sur un seul réseau de cartes de paiement, [...] a déclaré que l'acquisition de marque unique entraînerait une diminution du volume des transactions traitées et une majoration des frais imputés aux commerçants à un niveau inacceptable (93). [...] a exprimé l'avis qu'en n'acquérant que sur un réseau de cartes, un acquéreur s'empêcherait de desservir une part important du marché des cartes de paiement et "connaîtrait une rentabilité commerciale diminuée" (94).
101) C'est un point de vue qui est partagé par les prestataires tiers non bancaires qui sont engagés dans l'affiliation de commerçants en passant par diverses banques arrangeuses. Une de ces sociétés, First Data, confirme que, premièrement, les commerçants exigent souvent des services d'acquisition portant à la fois sur Visa et MasterCard et, deuxièmement, que les activités d'acquisition ne deviennent rentables qu'en supposant un certain niveau d'économies d'échelle. Cela étant, cette société considère qu'il ne serait pas commercialement sensé pour un acquéreur d'être uniquement un acquéreur de cartes MasterCard (95).
102) D'après les réponses des acquéreurs transfrontaliers actifs au Royaume-Uni (96) aux demandes d'information de la Commission de mars 2004, tous les clients commerçants concernés au Royaume-Uni, à cinq exceptions près, ont signé des contrats d'acquisition portant à la fois sur des cartes Visa et MasterCard avec une seule et même banque. Il n'est pas surprenant que les acquéreurs Visa et MasterCard aient adopté la pratique de l'offre groupée dans l'acquisition transfrontalière étant donné que le caractère de "guichet unique" de la relation entre commerçant et acquéreur revêt une grande importance pour les commerçants qui font appel aux services d'acquéreurs transfrontaliers et qu'il constitue un élément capital des services proposés par les acquéreurs transfrontaliers.
103) La permanence dans le temps de l'acquisition conjointe de cartes Visa et MasterCard par offre groupée témoigne de l'existence d'un schéma établi de l'offre et de la demande sur le marché de l'acquisition de cartes de crédit au Royaume-Uni. Depuis 1989 (97), date à laquelle les contrats d'acquisition exclusifs Visa et MasterCard ont été abolis et l'acquisition sur les deux réseaux Visa et MasterCard a été ouverte aux banques, toutes les banques qui sont entrées sur le marché de l'acquisition au Royaume-Uni se sont engagées simultanément dans des activités d'acquisition Visa et MasterCard et leurs portefeuilles d'acquisition englobent à la fois des transactions Visa et MasterCard avec des commerçants. Les prestataires tiers qui ont récemment repris les portefeuilles d'acquisition de plusieurs banques (98) continuent à assurer des services auprès des commerçants pour l'acceptation conjointe des cartes Visa et MasterCard.
104) Il est également intéressant de noter que dans la pratique générale, les commerçants supportent les mêmes frais de transaction, dans le cadre d'un contrat d'acquisition groupé, portant à la fois sur Visa et MasterCard, que leurs transactions soient effectuées via Visa ou MasterCard (99). Dans le langage des acquéreurs, cette pratique est désignée "blending" et signifie que le commerçant est imputé d'un seul tarif harmonisé sur ses transactions Visa et MasterCard.
105) Il convient d'ajouter que, du point de vue d'une banque acquéreur, les autres marques de cartes de crédit, telles qu'Amex ou Diners Club, ne peuvent pas constituer une base viable pour pénétrer le marché de l'acquisition de cartes de crédit et de débit différé au Royaume-Uni. Cela est dû, tout d'abord, au fait qu'Amex et Diners Club sont des systèmes de cartes de paiement dites "privatives", pour lesquels les activités d'acquisition sont assurées par les propriétaires du réseau et non par les banques (100). Ensuite, même si l'acquisition de ces marques privatives devait être ouverte aux banques du Royaume-Uni, la part de marché de ces marques serait trop faible pour qu'elle puisse servir de base à une activité d'acquisition suffisamment volumineuse. Toute banque qui se rangerait aux côtés des acquéreurs-propriétaires d'Amex ou de Diners Club pour exercer des activités d'acquisition dans le cadre de ces réseaux devrait se contenter de ne conquérir qu'une partie du chiffre d'affaires déjà restreint de ces réseaux. Comptant pour 94 % de la valeur totale des transactions effectuées par cartes de crédit en 2003, Visa et MasterCard sont, par contre, les deux marques de cartes de crédit et de débit différé les plus largement utilisées au Royaume-Uni et présentent toutes deux un potentiel de croissance supplémentaire. Ce sont les volumes de ce niveau qui peuvent représenter une solide base d'affaires pour de nouveaux acquéreurs.
106) Sur la base des constatations qui précèdent, il est permis de conclure qu'au Royaume-Uni, il n'y aucune demande de services d'acquisition de marque unique (Visa uniquement ou MasterCard uniquement).
107) Sur la base de ce qui précède il apparaît qu'il est impossible en pratique pour Morgan Stanley d'offrir des contrats d'affiliation portant exclusivement sur des transactions MasterCard puisqu'il n'y a pas de demande pour des services d'acquisition portant exclusivement sur des transactions MasterCard et qu'une offre de services d'acquisition concernant uniquement MasterCard ne serait pas commercialement praticable.
108) Comme on l'expliquera plus loin, Morgan Stanley ne peut avec réalisme espérer entrer sur le marché des services de cartes de paiement (voir la section 5.3.2.1 "Concurrence entre marques") en vue d'acquérir des transactions au sein de son propre réseau. Compte tenu de l'absence de possibilités réalistes d'une concurrence entre marques, le refus d'octroyer à Morgan Stanley Bank la qualité de membre de Visa a eu pour effet de l'exclure entièrement du marqué britannique de l'acquisition de cartes de crédit.
5.3.1.3. "Accords de façade"
109) En vertu du règlement intérieur de Visa, les membres de Visa peuvent conclure des accords avec des sociétés non éligibles au statut de membre de Visa afin que celles-ci fournissent des services liés à leurs programmes de cartes de crédit. Un fournisseur tiers doit satisfaire aux règles et règlements de Visa dans le cadre de ses opérations au sein du réseau Visa (101).
110) En règle générale, les banques acquéreurs qui ont des accords avec des prestataires tiers sous-traitent à ces derniers certains volets des services d'acquisition (souvent ceux qui concernent le traitement des transactions). Toutefois, il existe plusieurs cas où les banques ont, en réalité, cessé leurs activités d'affiliation de commerçants et agissent désormais comme une simple interface (ou une "façade") entre Visa et MasterCard, d'une part, et un prestataire tiers, d'autre part. C'est alors le prestataire tiers qui assume la responsabilité de presque tous les éléments du service d'acquisition et qui supporte le risque relatif au flux de revenus du commerçant. Afin de garantir le respect des règles du système Visa, les contrats conclus avec des commerçants sont généralement des contrats tripartites passés entre le commerçant, le prestataire tiers et la banque membre du réseau. Ces accords entre une banque membre de Visa/MasterCard et un prestataire tiers non bancaire sont parfois appelés "fronting arrangements" [accords de façade].
111) Visa suggère (102) que Morgan Stanley pourrait aussi exercer des activités d'acquisition dans le cadre d'un accord de façade avec un membre de Visa (c'est-à-dire sans être membre elle-même de Visa). Toutefois, un tel accord n'est pas un moyen efficace qui permettrait à une grande banque internationale comme Morgan Stanley d'entrer efficacement sur le marché des services d'acquisition de cartes de crédit ou de débit différé à des commerçants au Royaume-Uni.
112) Il y a lieu de souligner, en premier lieu, que les sociétés qui ont recours à des accords "de façade" ne sont généralement pas des institutions financières et, partant, ne sont pas éligibles à la qualité de membre de Visa (telles qu'EuroConex et First Data, par exemple). Pour ces sociétés, l'accord "de façade" est la seule solution pour s'engager dans le domaine de l'acquisition; c'est pourquoi elles sont prêtes à accepter les arrangements plus complexes inhérents à ce type d'accord (par rapport à l'acquisition exercée en son propre nom, en tant que membre de Visa) (103). En second lieu, Morgan Stanley est une institution financière et, en l'absence de l'application à son encontre de la règle litigieuse de Visa, elle pouvait à ce titre devenir membre de Visa et exercer des activités d'acquisition en son propre nom. Le fait d'assurer des services d'acquisition pour d'autres banques membres de Visa, comme le font tous les acquéreurs engagés dans les accords de façade susmentionnés, ne résout pas le problème d'une banque qui désire acquérir les transactions effectuées au moyen de ses propres cartes Visa (c'est-à-dire les paiements effectués avec des cartes de paiement qu'elle a émises et qui portent sa propre marque, à côté du logo de la marque Visa). Tel est le cas de Morgan Stanley qui souhaite poursuivre une stratégie fondée sur l'intégration des activités d'émission et d'acquisition (104).
113) En outre, comme on va l'expliquer ci-dessous, il est difficile de trouver un partenaire de façade (section 5.3.1.3.1.) et les activités d'acquisition par l'intermédiaire d'un tel partenaire sont plus complexes que celles qui son entreprises par une banque en son nom propre (section 5.3.1.3.2.)
5.3.1.3.1 La difficulté de trouver un partenaire "de façade"
114) L'accord "de façade" lie, par définition, une société qui exécute des activités d'affiliation de commerçants et une banque membre de Visa qui agit en qualité d'intermédiaire entre Visa et cette société. En d'autres termes, la banque membre de Visa joue le rôle de "façade" ou "prête-nom" pour cette société, vis-à-vis du réseau Visa. Pour qu'une société puisse entreprendre des activités d'acquisition dans le cadre d'un accord "de façade", il faut donc qu'elle trouve une banque membre de Visa qui soit disposée à conclure un tel accord. En principe, il peut s'agir soit d'une banque déjà active sur le marché britannique de l'acquisition et désireuse de vendre son portefeuille d'acquisition, soit d'une banque qui émet des cartes Visa sur le territoire du Royaume-Uni et qui souhaite parrainer une société de ce type pour qu'elle exerce des activités d'acquisition de transactions Visa.
115) À ce jour, c'est le premier scénario qui prévaut : la quasi-totalité (105) des accords "de façade" impliquent des banques acquéreurs qui ont vendu leur portefeuille d'acquisition ou qui ont confié à des tiers la gestion conjointe ou exclusive de ce portefeuille (106). En ce qui concerne les possibilités de conclusion de futurs accords de façade au Royaume-Uni, quatre banques acquéreurs [...] ont déjà conclu des accords avec des prestataires tiers (107). Parmi les quatre acquéreurs restants qui opèrent sur le territoire du Royaume-Uni (108) figurent les trois plus grands acquéreurs de ce pays [...]. Compte tenu de la récente tendance à la consolidation du marché de l'acquisition décrite à la section 5.3.2.2.3 infra, ces banques-qui représentent les acteurs les plus puissants du marché - sont les plus susceptibles de poursuivre leurs activités d'affiliation de commerçants plutôt que de quitter le marché. Le choix restant à une société qui souhaiterait trouver un partenaire de façade parmi les acquéreurs actuels du Royaume-Uni s'avère dès lors assez limité.
5.3.1.3.2. Les difficultés (travail et frais supplémentaires) engendrées par les accords de façade
116) Même si Morgan Stanley pouvait se trouver un partenaire de façade approprié et disponible parmi la communauté des membres de Visa (ce dont la Commission doute d'autant plus que Morgan Stanley est une banque à qui Visa a refusé la qualité de membre), les complexités et les coûts inhérents aux accords de façade constituent des charges supplémentaires qui ne pèsent pas sur les banques qui, en tant que membres de Visa, peuvent exercer une activité d'acquisition en leur nom propre, ces charges supplémentaires n'étant pas liées à l'objet de Morgan Stanley d'être acquéreur de transactions sur ses propres cartes.
117) S'agissant des documents à caractère commercial, [...] tous les documents qui comportent des marques détenues par Visa indiquent le nom du membre de Visa et [...] (109). Elles imposent également que ce dernier soit très clairement identifié sur lesdits documents comme étant un simple agent ou représentant de la banque membre de Visa. Afin de garantir le respect des règles du système Visa, les contrats conclus avec des commerçants sont généralement des contrats tripartites (les parties au contrat étant le commerçant, la banque membre de Visa et le prestataire/acquéreur tiers). Il s'ensuit que, pour une grande banque internationale qui prévoit de s'engager dans des activités d'affiliation de commerçants, telle que Morgan Stanley, un accord de façade n'est pas un moyen intéressant d'affirmer son nom et sa réputation en tant qu'acquéreur, et est, en tout état de cause, une solution moins séduisante à cet égard que l'acquisition en son propre nom, dans la mesure où ce type d'accord prévoit que le nom et la réputation du prestataire/acquéreur tiers viennent après ceux du membre de Visa.
118) Les accords de façade comportent en outre des obligations en matière d'administration, de surveillance et de compte rendu. [Les fournisseurs tiers doivent répondre à certaines exigences] (110). [...] (111). [Les membres Visa s'assurent que les fournisseurs tiers satisfont aux exigences fixées dans les statuts et le règlement intérieur de Visa] (112).
119) Un accord de façade implique de surcroît le paiement de redevances par le prestataire/acquéreur tiers à la banque membre de Visa qui sert de façade. Eu égard aux paiements dus en cas d'achat du portefeuille d'acquisition d'une banque membre de Visa par un prestataire tiers, un article récent fourni par Visa explique que "a substantial upfront payment is often made to "buy the exclusive rights to the asset" and exploit the bank's brand. Variations include revenue sharing and phased payments of tranches of capital when milestones are reached" [un montant important est souvent payé d'avance, pour acheter les droits exclusifs liés à l'actif et pour pouvoir exploiter la marque de la banque. Cependant, il existe aussi des formules fondées sur le partage des revenus ou des paiements échelonnés de tranches du capital, lors du franchissement de certaines étapes (113).
120) Étant déjà membre de MasterCard, Morgan Stanley ferait preuve d'un manque total d'inefficacité si elle devait conclure un accord de façade avec une autre institution financière admise comme membre de Visa, dans le but d'assurer le volet "Visa" des services d'acquisition portant sur les deux marques Visa et MasterCard, alors qu'elle gère, en même temps et en son nom propre, le volet "Mastercard" de ces mêmes services. L'inefficacité consiste pour Morgan Stanley, plutôt que de simplement gérer à elle seule en toute indépendance une activité d'acquisition portant à la fois sur des transactions MasterCard et sur des transactions Visa, à devoir consacrer des ressources supplémentaires à un accord de façade et à devoir gérer la relation avec la banque membre de Visa qui sert de façade qui demeurerait un concurrent (i) en ce qui concerne l'acquisition de transactions MasterCard (puisque Morgan Stanley continuerait d'acquérir des transactions Visa en son propre nom), et (ii) en ce qui concerne les services de banque de détail aux commerçants et aux porteurs.
121) Sur la base de l'analyse développée ci-dessus, il y a lieu de conclure que, bien que les banques qui envisagent de pénétrer le marché de l'acquisition des transactions de paiement par cartes de crédit et de débit différé auprès de commerçants puissent, en théorie, le faire sur la base d'un accord de façade, un tel accord ne garantit pas en pratique à une banque telle que Morgan Stanley l'efficacité requise pour pénétrer le marché et ne constitue pas pour elle un substitut à l'acquisition en son nom propre.
5.3.2. Effets restrictifs de l'exclusion de Morgan Stanley du marché pertinent
122) Pour qu'un accord soit restrictif par ses effets, il doit affecter la concurrence réelle ou potentielle à un point tel qu'il soit possible de prévoir avec une assez bonne probabilité qu'il aura, sur le marché en cause, des effets négatifs sur les prix, la production, l'innovation ou la diversité ou la qualité des produits et des services (114). S'agissant plus particulièrement d'une restriction de la concurrence potentielle (un problème qui se pose souvent dans les cas d'exclusion tels que celui en cause), il convient de déterminer si, compte tenu de la structure du marché et du contexte économique et juridique qui régit son fonctionnement, il existe des possibilités réelles et concrètes que les entreprises concernées se fassent concurrence, ou qu'un nouveau concurrent puisse entrer sur le marché en cause et concurrencer les entreprises qui y sont implantées (115).
123) D'après les lignes directrices de la Commission concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE (116) (alinéas 17 et 18 de celui-ci), dans l'appréciation de la nature restrictive d'un accord face à la concurrence, il est nécessaire de tenir compte de l'impact de l'accord à la fois sur la concurrence inter-marque et sur la concurrence intramarque.
124) Comme on le montrera à la section 5.3.2.1. ci-dessous, au niveau de la concurrence inter-marque, la présence de barrières à l'entrée élevées ainsi que la faiblesse du système Discover aux États-Unis ont fait que Morgan Stanley n'avait aucune possibilité réaliste d'entrer en concurrence avec Visa Europe en lançant un système concurrent dans l'EEE.
125) Selon le dernier paragraphe du considérant 24 des lignes directrices sur les accords horizontaux (117), même une coopération entre entreprises qui, en principe, ne peut pas relever de l'article 81, paragraphe 1, tombe néanmoins sous le coup de l'article 81, paragraphe 1, quand elle concerne des entreprise avec un pouvoir de marché significatif et susceptibles de fermer le marché à des tiers (118).
126) L'application de la règle à Morgan Stanley remplit les conditions des lignes directrices sur les accords horizontaux pour tomber sous le coup de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE car :
- elle a eu pour effet d'exclure Morgan Stanley du marché pertinent ; et
- Visa a un pouvoir de marché significatif du fait à la fois i) de sa part de 60% dans le nombre de cartes de crédit et de débit différé au Royaume-Uni et dans la valeur des transactions faites avec ces cartes et ii) de la pratique de satisfaire la demande des commerçants pour des contrats d'affiliation pour l'acceptation à la fois des cartes Visa et MasterCard (Sections 5.3.1.1. et 5.3.1.2.).
127) La section 5.3.2.2. ci-dessous expose l'analyse de la structure du marché de l'acquisition au Royaume-Uni ainsi que les conditions inhérentes à l'affiliation de commerçants par des banques. La conclusion est la suivante : a) une concurrence accrue pourrait être bénéfique pour le marché de l'acquisition au Royaume-Uni, sur le plan de l'acceptation des cartes de crédit; b) certaines caractéristiques du marché peuvent faciliter l'arrivée d'un nouvel entrant; c) une nouvelle entrée peut avoir un impact positif tant sur les prix que sur la qualité des services d'acquisition.
128) La section 5.3.2.3. examine les moyens et aptitudes spécifiques dont Morgan Stanley dispose et conclut que - compte tenu à la fois des caractéristiques du marché de l'acquisition au Royaume-Uni et des qualifications de Morgan Stanley - cette dernière est un acquéreur potentiel dont on peut raisonnablement s'attendre à ce que l'entrée sur le marché ait des effets positifs sur les prix, la production et l'innovation, de même que sur la diversité et la qualité des services d'acquisition.
5.3.2.1. La concurrence inter-marque
129) Il est examiné dans cette section si Morgan Stanley a jamais été un nouvel entrant potentiel dans le marché des systèmes de cartes de paiement dans l'EEE à un moment quelconque depuis sa demande en mars 2000 à être membre de Visa et son admission comme membre de Visa en septembre 2006 (119). Dans sa réponse à cette question, la Commission tient compte de ce que :
- il existe de très hautes barrières à l'entrée dans le marché des cartes dans l'EEE (Section 5.3.2.1.1.) ;
- depuis [an], considérant qu'il ne s'agit pas d'un projet commercialement viable, Morgan Stanley a exclu une expansion de Discover dans l'EEE ;
- l'argument de Visa selon lequel Morgan Stanley aurait considéré enter dans l'EEE en tant que système de carte ne saurait être sérieusement soutenu.
5.3.2.1.1. Il existe de très hautes barrières à l'entrée sur le marché des systèmes de cartes dans l'EEE
130) Les systèmes de cartes sont caractérisés par d'importants effets de réseau. Ceci implique a) que d'importants coûts échoués - constitutif de barrières à l'entrée - doivent être subis avant qu'un système de cartes soit en mesure concurrencer de façon viable les systèmes existants, et b) que les grands systèmes de cartes (c'est-à-dire les systèmes bipartites Visa et MasterCard) ont des taux de croissance et des parts de marché bien plus élevés que ceux des petits systèmes (c'est-à-dire les systèmes " accréditif " ou tripartites American Express et Diners), comme il est démontré aux paragraphes 90) à 94).
131) L'importance des effets de réseau et d'une masse critique est confirmée par, entre autres, le " Cruikshank report ", un rapport indépendant sur les services bancaires au Royaume-Uni préparé pour le Ministère des Finances du Royaume-Uni (le " UK Treasury "), selon lequel :
"Payment schemes demonstrate the benefit that each user gains from the addition of further users; these are called network effects. (120) [...] card holders gain value as more retail outlets join their particular scheme, as do retailers in relation to growing numbers of customers holding cards belonging to the scheme. [...]
Network effects also have profound implications for competition, efficiency and innovation in markets where they arise. Establishing critical mass is the first hurdle, as the benefits to customers and businesses of a network arise only gradually with increasing use. It is possible to imagine a world in which electronic cash is widely held and used, for example, but much harder to see how to get there.
Once a network is well established, it can be extremely difficult to create a new network in direct competition. [...] Where network effects are strong, the number of competing networks is likely to be small and the entry barriers facing new networks will be high" (121).
[Les systèmes de paiement illustrent l'avantage que procure à chaque utilisateur la venue d'encore davantage d'utilisateurs: [...] les porteurs profitent d'un gain de valeur à mesure que davantage de commerçants rejoignent le réseau, tout comme les commerçants à mesure que davantage de porteurs détiennent la carte du réseau auquel ils sont affiliés [...]
Les effets de réseau ont aussi des implications profondes pour la concurrence, l'efficacité et l'innovation dans les marches où ils se produisent. Atteindre une taille critique est un premier obstacle puisque les bénéfices aux consommateurs et aux entreprises n'apparaissent que graduellement avec l'augmentation de l'usage. Il est possible d'imaginer un monde où la monnaie électronique est largement répandue, par exemple, mais il est beaucoup plus difficile de voir comment y parvenir. Une fois qu'un réseau est établi, il peut être extrêmement difficile de créer un nouveau réseau en concurrence directe avec celui-ci. [...] Là où les effets de réseau sont forts, le nombre de réseaux concurrents à des chances d'être faible et les barrières à l'entrée pour les nouveaux réseau seront hautes ".]
132) La société de consultance économique " Lexecon " - dans son rapport " Barriers to Entry into Credit Card Payment Networks in the EEA " [Barrières à l'entrée dans les réseaux de paiement par cartes de crédit dans l'EEE] du 11 décembre 2000 - examine les barrières " naturelles " (effets de réseau, coûts échoués et temps nécessaire pour entrer) et les barrières " stratégiques " à l'entrée. Parmi les raisons motivant la conclusion que les risques d'une entrée sont à ce point élevés qu'ils sont dissuasifs, Lexecon mentionne :
"... [E]ntry into the networks market involves a very formidable co-ordination problem - tens of thousands of agreements must be entered into with merchants and users; and the network systems for processing payment, for authorising transactions, and for collecting bills from customers, all must be set up. These in their turn require large fixed costs before even the first transaction is entered into. It necessarily follows that the industry is characterised by large sunk costs; [...] [T]he costs incurred by Discover during the first few years of their attempts to enter in the US are measured in billions of dollars. [...] The costs of attracting millions of consumers to using a card are themselves formidable. [...] It is clear that creating a new card network necessarily takes considerable time [...] The need to provide Europe-wide market acceptance de novo is an enormous barrier both organisationally and in terms of cost." (122)
[[L'] entrée dans le marché des réseaux induit un problème de coordination tout à fait considérable - des dizaines de milliers d'accords doivent être conclus avec les commerçants et les usagers ; et les systèmes de réseau pour traiter les paiements, autoriser les transactions et collecter les factures des consommateurs, tout cela doit être mis en place. Ceux-ci à leur tour requièrent des coûts fixes importants avant même qu'il ne puisse être procédé à la première transaction. Il en suit nécessairement que l'industrie se caractérise par d'importants coûts échoués : [...] [L]es coûts subis par Discover durant les quelques premières années de leurs tentatives d'entrer aux Etats-Unis se mesurent en milliards de dollars. [...] Les coûts pour inciter des millions de consommateurs à utiliser une carte sont en eux mêmes considérables. Il est clair que de créer un nouveau réseau de cartes prend nécessairement un temps considérable [...] La nécessité d'offrir de novo une acceptation de la carte qui soit pan-européenne est une énorme barrière à l'entrée tant en terme d'organisation que de coût].
133) Le professeur John Kay (123) souligne aussi l'existence de hautes barrières à l'entrée pour pouvoir exercer les activités d'un réseau de cartes, qui résultent d'importants effets de réseau qui favorisent les réseaux déjà présents les plus importants:
"Visa is a provider of services. There are special advantages to size in network provision: other things equal, connection to a larger network is preferable to connection to a smaller one. Visa, as the largest world-wide payment network, enjoys a competitive advantage from this source in all the markets it serves. On a global basis, its market share accounts for about 60% on the basis of cards issued and transaction value. This takes on particular significance because network markets have the well recognised characteristic of 'tipping' towards the firm with largest market share."
[Visa est un fournisseur de services. La taille présente des avantages spéciaux dans l'offre d'un réseau : toutes choses égales par ailleurs, la connexion à un réseau plus grand est préférable à la connexion à un réseau plus petit. Visa, en tant que plus grand réseau de paiement à échelle mondiale, en retire un avantage concurrentiel dans tous les marchés qu'il dessert. Sur le plan mondial, sa part de marché représente environ 60% des cartes émises et de la valeur des transactions. Ceci est particulièrement significatif dès lors que les marchés ont la caractéristique bien connue d'incliner vers la firme avec la plus grande part de marché]
134) Le professeur Kay conclut que de telle hautes barrières à l'entrée rendent difficile pour Morgan Stanley d'étendre le réseau Discover en Europe d'une façon qui soit commercialement viable:
"The prospect that entry [of Discover in European network services markets] would be commercially successful is [...] low. The Discover network is the only attempt since the emergence of Visa and MasterCard to establish a proprietary network in the United States directly competitive to these organisations. Discover was established in 1985 with the backing of Sears, then the largest and best known retailer in the United States. [...]
American Express is the largest network competitor to Visa and MasterCard in Europe. In my view, if American Express cards did not already exist (and they existed before the introduction of credit cards anywhere), it would be impossible to establish them in the market place. Merchants would not accept a card with higher acquisition charges than its established competitors without the assurance that the card issuer had access to a loyal and high spending customer base. But that loyal and high spending customer base could not be established unless widespread merchant acceptance was already secured. The conditions in which American Express achieved this in the past were ones in which there was no alternative plastic payment systems. The situation today is very different. Indeed the market share of American Express had been in steady decline until the company succeeded in arresting it by offering a series of additional cards exploiting the existence of its established proprietary network. Diners has also declined in recent years.
In the light of this analysis I do not believe that the development by [Morgan Stanley] of a competitive proprietary network in Europe comparable to that of Discover in the US could be successful or profitable in any realistic time frame. [...] It is evident from this that the success of Discover in the United States is the result of the quality of its customer service and the efficiency of its processing capabilities, attributes which are more relevant to its position as a potential competitor in the card issuance and merchant acquisition market than in the network services network. In my judgement, it would not be profitable for [Morgan Stanley] to extend the Discover network to Europe and therefore the decision by [Morgan Stanley] not to extend the Discover network to Europe [...] is the correct strategic decision." (124)
[La probabilité que l'entrée [de Discover dans les marchés européens de services de réseaux] soit un succès commercial est [...] faible. Le réseau Discover est la seule tentative depuis l'émergence de Visa et de MasterCard d'établir un système tripartite aux Etats-Unis qui concurrence directement ces organisations. Discover a été établi en 1985 avec le soutien de Sears, alors le plus grand et le plus connu des entreprises de la grande distribution aux Etats-Unis. [...]
American Express est le plus grand concurrent de Visa et de MasterCard en Europe. A mon avis, si American Express n'avait pas déjà existé (et American Express existait avant même que les cartes de crédit n'apparaissent où que ce soit) son apparition sur le marché aurait été impossible. Les commerçants n'accepteraient pas une carte avec des commissions à l'acquisition plus importantes que celles de ses concurrents établis sans l'assurance que l'émetteur de cartes a accès à une base de consommateurs loyale et dépensière. Mais cette base de consommateurs loyale et dépensière n'existerait pas si une acceptation répandue parmi les commerçants n'était pas garantie au préalable. Les conditions dans lesquelles American Express a pu réaliser cela dans le passé était celles d'un temps où il n'existait pas d'alternative aux systèmes de paiement en plastique. La situation est très différente aujourd'hui. En effet, la parte de marché d'American Express était en déclin continu jusqu'à ce que la société parvienne à y mettre en terme en offrant une série de cartes supplémentaires exploitant l'existence de son réseau tripartite établi. Diners a aussi connu un déclin ces dernières années. A la lumière de cette analyse je ne pense pas que le développement par [Morgan Stanley] d'un système tripartite concurrent en Europe comparable à celui de Discover aux USA pourrait être un succès ou profitable dans un quelconque délai réaliste [...] Il ressort clairement de tout ceci que le succès de Discover aux Etats-Unis est le résultat de la qualité de son service aux consommateurs et de l'efficacité de ces capacités de traitement, attributs qui sont plus pertinents pour sa situation de concurrent potentiel dans le marché de l'émission de cartes et de l'acquisition de commerçants que dans dans le réseau des services de réseau. A mon avis, une expansion du réseau Discover en Europe ne serait pas profitable pour [Morgan Stanley] et, par conséquent, la décision de [Morgan Stanley] de ne pas étendre le réseau Discover à l'Europe [...] est la décision stratégique correcte.]
135) Visa n'a jamais contesté, dans aucune de ses observations, qu'il existe de fortes barrières à l'entrée dans le marché des réseaux des cartes dans l'EEE. En particulier, Visa ne conteste pas les rapports Cruickshank, Lexecon et du Pr. John Kay reports sur ce point.
136) L'existence de telles hautes barrières à l'entrée dans le marché des systèmes de cartes est néanmoins déterminante lorsqu'il s'agit de déterminer si Morgan Stanley a été un entrant potentiel à un quelconque moment entre sa demande à être membre de Visa en mars 2000 et son admission en septembre 2006. Ainsi que l'a jugé le Tribunal de Première Instance des Communautés européennes dans l'affaire European Night Services, il convient de tenir compte, afin d'apprécier si une concurrence potentielle est possible, de la structure du marché et du contexte économique et juridique régissant son fonctionnement. A moins qu'il n'existe une " possibilité réelle et concrète " qu'un nouveau concurrent vienne faire concurrence aux entreprises déjà établies sur le marché, il n'y a pas de concurrence potentielle ; une entrée purement hypothétique qui ne serait fondée sur aucune analyse de la structure du marché pertinent ne suffit à établir une entrée potentielle. (125)
5.3.2.1.2. Du fait des hautes barrières à l'entrée, Morgan Stanley a exclu une expansion de son réseau Discover à l'EEE
137) La Commission ne disconvient pas que Morgan Stanley avait à l'origine espéré pouvoir entrer sur l'EEE en tant qu'exploitant de système en étendant les opérations de Discover des États-Unis vers l'Europe (ainsi que vers d'autres parties du monde). Plusieurs documents remontant à [date] que Morgan Stanley a remis à la Commission indiquent qu'une extension du réseau Discover avait été envisagée (126) et que l'entrée de Discover sur le marché européen avait été prévue pour [date] (127).
138) Sur la base des éléments dont la Commission dispose, il semble que l'extension international du réseau Discover faisait partie d'un débat élargi [les documents des la stratégie commerciale].
139) Une note interne datée du 4 novembre 1996 [le nom du document], préparée par le président et Chief Executive Officer de Morgan Stanley, évalue la situation de Discover à cette époque. La note fait remarquer qu'en [la stratégie commerciale], la part du marché de ce réseau était en déclin [...] à 6 % [la stratégie commerciale]. La note fait état [la stratégie commerciale] et [la stratégie commerciale] la création des économies d'échelle indispensables pour le succès d'un réseau de cartes de paiement) en y voyant des facteurs de faiblesse [la stratégie commerciale]. La note propose donc "a serious strategic review [...]" [un réexamen approfondi des alternatives à la stratégie [...].
140) La note énumère plusieurs alternatives pour aller de l'avant, les groupant en [la stratégie commerciale].
141) [la stratégie commerciale du Morgan Stanley].
142) Bien que les options susmentionnées traitent, à des degrés divers, de la question de la couverture internationale de la carte Discover, la note examine séparément les "stratégies internationales", qui prévoient l'émission de carte dans des marchés internationaux sélectionnés sur les réseaux Visa ou MasterCard et de travailler avec des franchisés ou au moyen d'entreprises communes.
143) En bref, la note du président et Chief Executive Officer de Morgan Stanley [la stratégie commerciale] songe à nouer des partenariats avec divers autres acteurs du commerce des cartes de paiement (128), ou [la stratégie commerciale].
144) Comme le laisse entendre la note, Dean Witter, Discover and Co. a effectivement exploré les opportunités de partenariat. [la stratégie commerciale] (129). Il semble toutefois qu'aucun arrangement de partenariat satisfaisant n'ait été trouvé (130).
145) [la stratégie commerciale] Morgan Stanley a commencé à songer à pénétrer les marchés européens de la carte de paiement en travaillant sur les réseaux qui existaient déjà en Europe (131). [la stratégie commerciale] (132), [ la stratégie commerciale].
146) D'après le document intitulé [le nom du document] (133) la stratégie de pénétration en Europe allait à cette époque faire appel, pour commencer, à l'émission de cartes de crédit en utilisant des réseaux existants [la stratégie commerciale] (134). L'exposé de juin 1999 du [un représentant du Morgan Stanley] confirme que celle-ci avait formulé un plan pour émettre des cartes sur des réseaux existants en dehors de l'Amérique du Nord (135), ce plan devant aboutir au lancement, en août 1999 (136), de l'activité d'émission de cartes de crédit MasterCard par Morgan Stanley au Royaume-Uni.
147) À partir de 2002, Morgan Stanley devait affiner et élaborer un plan stratégique ainsi qu'un plan de mise en œuvre en vue d'établir un commerce intégré d'émission et d'acquisition au Royaume-Uni et dans d'autres États membres de l'UE (137), commerce nécessitant l'adhésion à la fois à Visa et à MasterCard étant donné que l'offre d'une marque unique ne constituait pas une option d'acquisition viable (138).
148) La conclusion de Morgan Stanley qu'elle ne pouvait pas s'étendre en tant que réseau de cartes en entrant dans l'EEE était fondée sur la constatation qu'il existait des barrières à l'entrée " extremely high [extrêmement élevées] " (139) : "the cost of creating a new network in the EEA are very significant and the scale of those costs and the very severe difficulties which [Morgan Stanley] envisaged in creating consumer interest in the EU in a card network where cards were not accepted by many merchants led [Morgan Stanley] to the conclusion that it was not viable for it to launch successfully the [Discover] network in the EEA. In addition, [Morgan Stanley] concluded that a proprietary network could not be established within a reasonable time frame." [le coût de la création d'un nouveau réseau dans l'EEE est très important et l'échelle des coûts et les difficultés très sévères anticipées par [Morgan Stanley] pour susciter un intérêt des consommateurs de l'UE pour un nouveau réseau de cartes dans lequel les cartes n'étaient pas acceptées par beaucoup de commerçants a conduit [Morgan Stanley] à la conclusion qu'il n'était par viable pour elle de lancer avec succès le réseau Discover dans l'EEE. De plus, [Morgan Stanley] a conclu qu'un réseau tripartite ne pouvait être établi dans un délai raisonnable]. (140)
149) Morgan Stanley explique qu'elle a tenu compte de son expérience passée - son entrée dans le marché des services de réseaux de cartes aux USA - pour conclure qu'elle ne pourrait raisonnablement surmonter les barrières à l'entrée existantes de sorte à pouvoir établir un nouveau réseau commercialement viable. Morgan Stanley est parvenue à la conclusion que "extending the [Discover] network to the EEA [...] was not a viable commercial proposition, given the very substantial barriers to establishing a new general purpose card network in the EEA, even for an undertaking with [Morgan Stanley's] resources " (141) [étendre le réseau [Discover] à l'EEE [...] n'est pas une option commerciale viable eu égard aux barrières à l'entrée tout à fait substantielles contre l'établissement d'un nouveau réseau de cartes d'usage courant dans l'EEE, même pour une entreprise avec les ressources de [Morgan Stanley]] après avoir tenu compte des éléments suivants :
- durant les deux années qui ont suivi l'introduction du réseau Discover aux USA en 1985, Sears a declaré des pertes après impôts de [150-300] million £ (142);
- de telles pertes lui ont seulement permis d'atteindre un part de marché mineure d'environ [4-10]% (143);
- Morgan Stanley ne dispose pas en Europe d'un équivalent à Sears qui - en tant que société mère de Dean Witter, Discover and Co. - a contribué de façon critique au lancement du système Discover aux USA (144). Sears, le plus grand groupe de la grande distribution aux USA et "the nation's largest single provider of revolving credit" [le plus grand pourvoyeur national de crédit permanent] avec 28 millions de carte d'enseigne privatives lors du lancement de Discover en 1985, avait une bonne connaissance du métier de pourvoyeur de crédits aux USA et, plus important encore, une base préexistante de porteurs potentiels sur laquelle s'appuyer pour développer le nouveau système de carte Discover (145) ;
- l'usage de Visa et de MasterCard était beaucoup plus répandu en Europe en 2000 (lorsque Morgan Stanley a demandé à être membre de Visa) qu'en 1985 lorsque Discover a été lancé aux USA (146); et
- les diversités tant de législation que culturelle et économique à travers l'Europe en ce qui concerne la création d'un réseau de cartes d'usage courant sont plus grandes qu'à travers les USA (147).
150) Dans son témoignage, le 25 mai 2000, devant la sous-commission sénatoriale pour les institutions financières, qui dépend de la commission sénatoriale pour les questions bancaires, de logement et urbaines, le président et Chief Executive Officer de Morgan Stanley a fait remarquer que "[t]he network business is very much a business of scale economies, with heavy infrastructure and little marginal expenses for each transaction. Thus the larger our scale, the greater our ability to compete on the network side. [...] Given our experience in the United States with the Discover network, we have determined that it is not economically sensible to attempt to expand the Discover network outside the United States." (148) "[the Discover network] has never been able to achieve anywhere close to the scale that [we] had hoped or that [we] need in order to achieve long term success". [Gérer un réseau de cartes est un métier qui requiert vraiment de travailler à une grande échelle avec des infrastructures lourdes et de faibles dépenses marginales par transaction. Donc, plus grande est l'échelle plus grande devient également notre capacité à faire concurrence au niveau du réseau. [...] Compte tenu de l'expérience acquise aux États-Unis avec le réseau Discover, Morgan Stanley a décidé qu'il ne serait pas économiquement sensé de tenter d'étendre le réseau Discover en dehors des États-Unis.] [le réseau Discover n'a jamais été en mesure d'atteindre une taille proche de celle espérée ou nécessaire pour garantir le succès à long terme] (149) "[Morgan Stanley] simply cannot afford to make comparable network investments overseas [i.e. "investments of several billion dollars"] [...] Accordingly, there will be no Discover global network [...]" [[Morgan Stanley] ne peut tout simplement pas se permettre de faire des investissements de réseau comparables outre-mer [c'est-à-dire " d'investir plusieurs milliards de dollars "][...] Par conséquent, il n'y aura pas de réseau mondial Discover] (150).
151) Pour résumer, Morgan Stanley, comme on l'a dit plus haut, songeait à procéder à une extension de Discover en direction de l'EEE dans le cadre d'une stratégie mondiale. En l'absence d'un plan réalisable d'extension du réseau Discover aux États-Unis et confrontée à des barrières à l'entrée du réseau dans l'EEE, Morgan Stanley est parvenue en [an] à la conclusion que la logique commerciale interdisait d'engager des investissements importants et risqués dans l'EEE étant donné les très grandes barrières à l'entrée dans le marché des réseaux de cartes dans l'EEE, et qu'elle devrait plutôt étendre ses activités en émettant des cartes sur les réseaux MasterCard et visa existants (151).
5.3.2.1.3. L'argument de Visa selon lequel Morgan Stanley aurait continué d'envisager d'entrer dans l'EEE en tant que réseau de carte n'est pas valable
152) Sur la base de cinq articles de presse (152) et le fait que Morgan Stanley a enregistré un nom de domaine internet www.discover-card.co.uk et une marque communautaire Discover pour des affaires d'assurance, financières et monétaires, Visa prétend que Morgan Stanley n'aurait pas exclu, à partir de [an], d'étendre le réseau Discover dans l'EEE.
153) Il convient de rappeler d'emblée que, conformément à la jurisprudence communautaire, afin de déterminer si une entreprise est un nouvel entrant potentiel à moment quelconque de l'infraction soupçonnée (dans le cas présent à un moment quelconque entre la demande de Morgan Stanley en mars 2000 de se voir reconnaître membre de Visa et son admission comme membre de Visa en septembre 2006) il ne convient pas de formuler de simples suppositions dépourvues de tout fondement consistant en une analyse de la structure du marché mais, au contraire, de fonder l'appréciation sur les réelles possibilités concrètes pour une entreprise de pénétrer le marché pertinent et de concourir avec les entreprises qui y sont déjà établies (153).
154) L'argument de Visa n'a pas trait à la structure du marché ou à la façon dont Morgan Stanley pourrait effectivement surmonter les barrières à l'entrée. Il a plutôt trait, comme il est expliqué plus bas, à l'interprétation faite par certains journalistes des intentions de Morgan Stanley et à des inférences sans fondement concernant l'enregistrement d'un nom de domaine et d'une marque, qui ne permettent pas d'établir, conformément à la jurisprudence, que Morgan Stanley avait des possibilités réelle et concrètes d'entrer le marché des services de réseaux de cartes dans l'EEE.
155) Par soucis de complétude, la Commission a néanmoins analysé l'argument de Visa. En particulier, la Commission a relevé les points suivants :
a) Soit les articles mentionnés par Visa ne contiennent aucune citation de représentants de Morgan Stanley (ils reflètent plutôt la compréhension des développements par les journalistes), ou ils se réfèrent au lancement d'un "credit card business" [une activité de carte de crédit] par Morgan Stanley - ce qui ne veut pas dire que le réseau Discover serait étendu à l'EEE, mais que Morgan Stanley a des plans pour émettre des cartes de marque Morgan Stanley sur les réseaux Visa et MasterCard. Si référence est faite au lancement d'une carte Discover, elle est faite dans un contexte qui montre que le journaliste ne distingue pas (on ne saurait attendre de lui qu'il soit en mesure de le faire) entre entrer dans un marché en tant que réseau de cartes et entrer en tant qu'émetteur ou acquéreur sur un autre réseau. (154) D'autres articles non invoqués par Visa montrent que lorsque les journalistes se réfèrent à une expansion internationale de Discover, ils ne se rapportent en fait à une expansion de Discover en tant que réseau, mais à l'émission de cartes Morgan Stanley sur d'autres réseaux tels que celui de MasterCard. (155)
b) Il n'y a pas de déclaration de presse officielle de Morgan Stanley pour annoncer son entrée en tant que réseau dans l'EEE. Telle aurait la façon normale de procéder si Morgan Stanley avait voulu faire part d'une telle entrée à la presse. L'absence de déclaration de presse officielle aide à replacer les articles mentionnés par Visa dans leur véritable contexte.
c) De tels articles sont de peu de poids comparés aux documents stratégiques préparés par des experts indépendants à des fins strictement internes à Morgan Stanley - à savoir les présentations de [date] et de [date], et les plans stratégiques et de mis en application de [date] - sur lesquels la Commission se fonde pour conclure que Morgan Stanley a exclu une expansion de Discover dans l'EEE. La nature interne et stratégique de tels documents de Morgan Stanley est fondamentalement différente de celle des articles de presse invoqués par Visa ; ces documents, basés sur les conclusions d'experts indépendants et approuvés par Morgan Stanley, reflètent fidèlement les décisions stratégiques fondamentales de Morgan Stanley. A l'inverse, l'interprétation par certains journalistes de ce que des représentants de Morgan Stanley auraient prétendument dit n'a qu'une très faible valeur probatoire dans un contexte où, en raison de l'usage en public d'expressions ambigües telles que "expansion of Morgan Stanley's credit card business" [expansion des affaires de cartes de crédit de Morgan Stanley], l'acquisition de transactions et l'émission de cartes de marque Morgan Stanley envisagées par Morgan Stanley sont comprises erronément comme signifiant une expansion de la marque Discover.
d) Visa elle-même relève (i) que, lorsque Morgan Stanley se réfère à l'extension de ses activités de cartes de crédit dans l'EEE elle se réfère aux cartes de marque Morgan Stanley, non au système Discover (156) et (ii) que les articles de presse qu'elle invoque sont contredites par les déclarations directes et officielles de Morgan Stanley (157).
e) Les articles en question (dont le premier date de 1999 et le dernier d'octobre 2003) sont contredits non seulement par les déclarations mentionnées au paragraphe 150) ci-dessus du président et Chief Execituve Officer de Morgan Stanley devant le Sénat américain en mai 2000, mais aussi par des documents datant de depuis le 26 novembre 2003 selon lesquels Morgan Stanley "has no plans to expand the Discover network to the EEA" [n'a pas de plans pour étendre le réseau Discover à l'EEE] (158). Ceci a été réitéré en 2005 (159).
f) Le fait de se réserver un nom de domaine internet et une marque n'indique pas que Morgan Stanley est à même d'étendre son réseau Discover network dans l'EEE, car c'est une pratique courante des grandes sociétés de se réserver des sites internet et des marques par mesure de précaution (c'est-à-dire pour éviter que leur nom de marque ne soit " squatté " par des domaines internet ou des enregistrements de marques par d'autres sociétés sur un nouveau). Le domaine internet www.discover-card.co.uk renvoie au site internet américain et en mentionne aucun pays de l'EEE parmi ceux où la carte est utilisable (et il n'y a aucune annonce que cela sera possible à l'avenir).
156) Dans l'affaire de concentration BaByliss c. Commission le Tribunal de Première Instance des Communautés européennes a examiné si BaByliss était un entrant potentiel dans le marché du petit électroménager de cuisine affecté par la concentration, qui était un marché oligopolistique caractérisé par des barrières à l'entrée élevées résultant de la grande fidélité à la marque ainsi que de la difficulté d'accès au commerce de détail. Avant de conclure que BaByliss ne pouvait être décrite comme un entrant potentiel au regard de sa position dans le marché voisin des appareils de soins personnels et de l'expérience de sa société mère " Conair ", le Tribunal s'est fondé sur les éléments de preuve suivants qui démontrent que, au début de l'année 2001, BaByliss a effectivement commencé à mettre en œuvre sa stratégie d'entrée sur le marché européen du petit électroménager de cuisine :
- une première étude du marché;
- une étude technique sur l'adaptation du voltage des produits BaByliss à lancer en Europe;
- un contrat de partenariat de triennal avec une entreprise européenne;
- la finalisation de la stratégie et du budget 2002 pour le lancement des produits en Europe;
- négociation avec les principaux clients français ;
- un lancement officiel dans la presse française; et, finalement;
- l'annonce de la date officielle du lancement des produits en France en présence d'une cinquantaine d'invités.
157) De plus, la Cour a relevé que, avant même que les produits de BaByliss ne soient effectivement mis en vente sur les marchés, cette dernière s'est trouvée en rapport de concurrence directe avec SEB-Moulinex pour le référencement de ses produits par les principaux clients distributeurs (160).
158) A l'inverse, dans la présente affaire, il n'y a aucune preuve que Morgan Stanley aurait effectivement commencé à mettre en œuvre une stratégie d'entrée sur le marché des services de réseaux de cartes dans l'EEE. Il n'ya pas eu d'annonce d'un lancement officiel, d'études techniques sur les implications pratiques d'une d'entrée sur le marché des services de réseaux de cartes, pas de négociation avec les principaux clients, etc.
159) Pour ces raisons, la Commission est d'avis que ni les articles de presse mentionnés par Visa, ni l'enregistrement de "Discover" comme marque et domaine internet au Royaume-Uni ne sont des indications suffisantes pour attribuer à Morgan Stanley le statut d'entrant potentiel dans le marché des services de réseaux de cartes dans l'EEE.
5.3.2.1.4. Conclusion sur la possibilité d'une concurrence inter-marque par Morgan Stanley
160) Eu égard (i) aux barrières à l'entrée très élevées sur le marché des services de réseaux de cartes dans l'EEE - que Visa n'a pas contesté - et (ii) à l'absence de possibilité réelle et concrète pour Morgan Stanley de surmonter ces barrières d'une façon commercialement viable (en particulier en tenant compte du fait que Morgan Stanley ne peut effectuer les lourds investissements nécessaires, ou atteindre l'échelle minimum indispensable pour introduite avec succès un nouveau système de cartes viable dans l'EEE), Morgan Stanley ne pouvait être qualifié d'entrant potentiel sur le marché des réseaux à un moment quelconque entre sa demande en mars 2000 de se voir reconnaître membre de Visa et son admission comme membre de Visa en septembre 2006.
5.3.2.2. Structure du marché britannique de l'acquisition
5.3.2.2.1. Caractéristiques spécifiques du marché : les intervenants
161) Le Royaume-Uni compte actuellement huit banques engagées, sous une forme ou sous une autre, dans l'affiliation de commerçants pour l'acceptation de cartes de crédit : [...] (161) Certaines d'entre elles exercent cette activité en leur nom propre, tandis que d'autres font appel à des prestataires tiers. Toutes sont membres à la fois de Visa et de MasterCard et toutes affilient (ou permettent à des prestataires d'affilier) des commerçants pour l'acceptation de cartes Visa et MasterCard.
162) Le marché britannique de l'acquisition a été le théâtre d'une consolidation croissante. L'opération la plus importante des dernières années fut le rachat, en mars 2000, de la National Westminster Bank plc- premier acquéreur du Royaume-Uni à l'époque - par le Royal Bank of Scotland Group est le principal regroupement intervenu au cours de ces dernières années et qui a eu une incidence sur le marché de l'acquisition. Les activités d'acquisition de ces deux banques ont été fusionnées au sein d'une seule et même société prestataire, Streamline Merchant Services. Une nouvelle concentration a eu lieu en 2002, avec le rachat par Streamline des activités d'acquisition de National Australia Group Europe Limited (NAG), laquelle assurait des services d'affiliation de commerçants par l'intermédiaire de ses filiales [...] (162). La dernière banque à entrer sur le marché britannique en tant qu'acquéreur national a été Alliance & Leicester en 1996; EuroConex a cependant acheté les activités d'acquisition d'Alliance & Leicester en 2004 et a conclu un accord de façade avec elle en 2004.
163) Une autre tendance observée au Royaume-Uni dans le domaine de l'affiliation nationale de commerçants a été la participation de prestataires tiers non bancaires à ce type d'activités.
164) Les accords ont conclus entre [les banques et les prestataires tiers] suscitent un certain nombre de remarques concernant la participation, dans le cadre de ces accords, de prestataires tiers au marché britannique de l'acquisition de transactions par cartes de crédit et cartes de débit différé. D'un côté, le fait que des prestataires tiers assurent des services d'acquisition peut contribuer à l'amélioration de ces services et permettre de réduire les coûts, comme Visa l'a fait observer. D'un autre côté, dans tous les cas susmentionnés, les activités d'acquisition des prestataires tiers ont remplacés celles de leurs partenaires de façade (c'est-à-dire celles des banques membres de Visa) et n'ont donc pas fait croître le nombre d'acquéreurs actifs sur le marché. De plus, les entrées sur le marché [deux prestataires tiers] ont conduit, dans une certaine mesure, à une plus grande concentration du marché de l'acquisition au Royaume-Uni, dans la mesure où chacune de ces deux sociétés a acheté/conclu des accords avec deux banques acquéreurs. Par exemple, [le prestataire tiers] gère, de fait, les activités d'acquisition à la fois d'A&L et de la BOI, deux acquéreurs autrefois concurrents.
165) S'agissant des banques sises dans d'autres États membres de l'EEE, la Commission a souligné à la section 4.2, paragraphes (65) et (66) supra que les activités exercées dans le cadre du programme d'acquisition transfrontalière de Visa ont été, jusqu'à présent, essentiellement axées sur un segment particulier du marché et demeurent relativement restreintes par rapport aux activités d'acquisition nationale.
5.3.2.2.2. Caractéristiques spécifiques du marché : la concentration
166) Il ressort des données recueillies par la Commission à ses demandes d'information aux banques acquéreurs en mars 2004, que le coefficient de concentration (CR2) (163) des deux plus grandes entreprises, mesuré sur la base de la clientèle (commerçants affiliés) des banques acquéreurs s'élevait à 61 % en 2003, tandis que les quatre plus grands acquéreurs représentaient 90 % du marché sur cette même base (le coefficient CR4 étant de 90 %) (voir tableau 6 infra). Il s'ensuit que les quatre acquéreurs restants fournissaient des services à seulement 10 % des commerçants du Royaume-Uni et que chacun d'eux avait une part de marché inférieure à 5 %.
167) Calculé d'après les parts de marché des huit banques acquéreurs, elles-mêmes déterminées sur la base de leur clientèle de commerçants affiliés (voir le tableau 6 ci-dessous), l'indice Herfindahl-Hirshman ("HHI") s'élevait à 2,405, un chiffre caractéristique d'un degré de concentration élevé (164).
Tableau 6 (à gauche) - Clientèle des banques, exprimée en % de commerçants acceptant les cartes Visa et MasterCard (2003)
Tableau 7 (à droite) - Chiffre d'affaires des banques pour l'ensemble des transactions Visa et MasterCard, exprimé en % du chiffre d'affaires total Visa et MasterCard au Royaume-Uni (2003)
<emplacement tableau>
Source : enquête de la Commission de mars 2004 sur les banques acquéreurs au Royaume-Uni
168) En termes de valeur des transactions Visa et MasterCard, les transactions effectuées aux TPV du Royaume-Uni en 2003 (section 5.3.1.1.2.) ont atteint un montant total de 102 milliards de livres sterling. Le HHI calculé sur la base de la part des acquéreurs dans la valeur totale des transactions Visa et MasterCard se situait à 3,119, ce qui témoigne - à l'instar du HHI calculé sur la base de la clientèle totale (commerçants affiliés au Royaume-Uni) des acquéreurs d'une concentration élevée du marché (voir le tableau 7 supra). Les CR2 et CR4 mesurés sur la base de la valeur totale des transactions Visa et MasterCard s'élevaient respectivement à 76 % et 93 %.
5.3.2.2.3. Caractéristiques spécifiques du marché : la concurrence potentielle
169) L'évolution du marché britannique de l'acquisition au cours de ces quelques dernières années révèle l'amorce d'une tendance des grands acquéreurs et des sociétés de traitement agissant en qualité de tiers à dominer le marché. Plusieurs exemples d'acquéreurs de moindre taille ont été cités : certains ont vendu leurs activités à des banques de plus grande envergure ou à des prestataires tiers, tandis que d'autres ont confié à ces derniers la gestion intégrale de leurs activités d'acquisition en vertu d'accords à long terme. Parmi les exemples évoqués figurent notamment la vente du portefeuille de [la banque A] à la RBS, la reprise par EuroConex des activités d'acquisition [la banque B] et de [la banque C], ainsi que l'accord par lequel la [banque D] a confié à First Data la responsabilité intégrale de la gestion de ses activités d'acquisition. La décision [banque E] de renoncer à développer ses propres activités d'acquisition et d'opter plutôt pour une alliance stratégique avec RBS Streamline, qui assure désormais des services d'acquisition auprès des petites entreprises clientes [banque E], confirme aussi la tendance susmentionnée (165).
170) Celle-ci peut s'expliquer par le fait que, pour exercer des activités d'acquisition et être rentables, les entreprises doivent pouvoir travailler sur des volumes substantiels et réaliser d'importantes économies d'échelle. Dans le communiqué de presse annonçant la vente de ses activités d'affiliation de commerçants en Norvège à Nova/EuroConex SEB (Skandinaviska Enskilda Banken), un grand groupe bancaire établi en Suède explique que sa décision de vente résulte du fait que l'environnement concurrentiel qui prévaut actuellement en Europe impose des volumes d'affaires et des économies d'échelle considérables pour atteindre un niveau de rentabilité suffisant dans le domaine de l'acquisition (166).
171) En matière d'acquisition de transactions par cartes de crédit, il est essentiel que le chiffre d'affaires, en termes de transactions acquises, soit élevé, car le principal revenu des acquéreurs, à savoir les frais imputés aux commerçants ("merchant service charge" ou MSC), est calculé sous la forme d'un pourcentage de la valeur des transactions effectuées par cartes de crédit. Plus la valeur totale des transactions traitées par un acquéreur est élevée, plus celui-ci pourra tirer profit de l'effet de levier des coûts fixes liés à la gestion des activités d'acquisition. Plus un acquéreur peut exploiter efficacement ses coûts fixes, plus il lui sera aisé de diminuer les frais imputés aux commerçants, tout en préservant le niveau existant de ses recettes. La diminution des frais aura à son tour pour effet d'accroître le nombre de transactions générées par les commerçants et, partant, les recettes de l'acquéreur. Le fait que les petits acquéreurs n'enregistrent qu'un faible chiffre d'affaires en termes de transactions représente pour eux un désavantage concurrentiel par rapport aux grands acteurs du marché.
172) À la lumière de cette caractéristique des activités d'acquisition, il appert que les acteurs présents sur le marché de l'acquisition du Royaume-Uni doivent affrontés la concurrence potentielle des grandes banques ou des grandes sociétés de traitement internationales qui sont en mesure d'atteindre l'ampleur requise pour devenir des concurrents des acquéreurs actuels.
173) Outre Morgan Stanley, la liste des acquéreurs potentiels fournie par Visa (167) inclut plusieurs autres grandes banques, telles que Capital One, Citigroup, JP Morgan Chase et MBNA. Toutes ces banques émettent des cartes de paiement, et Citibank et JP Morgan Chase fournissent de surcroît des services d'acquisition par l'intermédiaire des entreprises communes créées avec First Data Corporation (168).
174) La Commission a demandé à toutes le banques figurant sur la liste des acquéreurs potentiels fournie par Visa (à l'exception de National Australia Group qui a décidé en 2002 de se retirer du marché et de vendre toutes ses activités d'acquisition de transaction auprès des commerçants au Royaume-Uni à Streamline (169)) si elle avait envisagé d'entrer sur le marché de l'acquisition au Royaume-Uni. Citibank et Abbey National ont expliqué qu'elles y avaient songé mais qu'elles ont préféré finalement y renoncer (170) tandis que toutes les autres banques ont répondu qu'elles n'avaient jamais envisagé cette hypothèse (171). Dans le cercle assez étroit des entrants potentiels, la Commission ne dispose d'aucun élément permettant de penser que des banques autres que Morgan Stanley ont songé à entrer sur le marché britannique de l'acquisition.
5.3.2.2.4 Caractéristiques spécifiques du marché : la nature des services
175) Le prix est une variable de concurrence importante dans la fourniture de services d'acquisition. Onze des treize grands commerçants et dix des vingt-et-un petits commerçants avec lesquels la Commission a pris contact ont mentionné le niveau des frais comme un facteur qu'ils prennent en considération avant de conclure un contrat avec une banque acquéreur (172).
176) Cependant, le prix n'est pas la seule variable entrant en ligne de compte dans la concurrence que se livrent les acquéreurs pour affilier des commerçants. Premièrement, les services d'acquisition dépendent fortement de la technologie et de l'innovation, deux domaines qui présentent des perspectives d'amélioration continue de divers composants de ces services. Deuxièmement, les acquéreurs peuvent se différencier non seulement par les développements technologiques mais aussi par le niveau du service qu'ils proposent (dont la qualité des ventes et la gestion des relations).
177) À la question de savoir quels sont les éléments autres que le prix qui constituent des variables de la concurrence dans le domaine de l'acquisition, tous les acquéreurs du Royaume-Uni ont répondu en énumérant une liste de variables qu'ils estiment importantes dans le cadre de leurs activités (173). Le tableau 8 ci-dessous présente les variables autres que le prix qui ont été mentionnées le plus fréquemment, en regroupant, d'une part, celles basées sur les produits et, d'autre part, celles liées au niveau de service.
Tableau 8 - Variables de la concurrence autres que le prix
Variables basées sur les produits
· Disponibilité et format des rapports analytiques (rapports de gestion)
· Qualité du matériel et des logiciels fournis par l'acquéreur (ex. : terminaux)
· Dates de règlement et de valeur
· Fonctions supplémentaires (ex. : acquisition multidevises, acquisition transfrontalière, environnement sécurisé pour l'acceptation des cartes de paiement électronique, service complémentaire de téléphonie mobile)
Variables liées au niveau de service
· Qualité des ventes et de la gestion des relations (ex. : gestionnaires des relations)
· Qualité des opérations de traitement (ex. : taux d'erreurs)
· Qualité du service après-vente (ex. : centres de traitement des appels et des transactions; traitement des demandes; conseils en matière de rétro-facturation)
178) [Banque A], la dernière banque acquéreur à avoir pénétré le marché britannique (en 1996), confirme avoir exercé une concurrence à la fois sur les prix et sur la qualité du service, pour tenter de conquérir des commerçants lors de la période de lancement de ses activités d'acquisition (174).
179) Concernant la tarification, le plan d'affaires [banque A] reposait sur deux plans : l'imputation aux commerçants de frais inférieurs [de 10 à 20 %] (175) à ceux appliqués par les autres acquéreurs déjà présents sur le marché et la qualité du service. En ce qui concerne la qualité du service, [banque A] a essayé de se différencier des acteurs déjà en place en développant des logiciels plus sophistiqués, capables de gérer plus efficacement la procédure de rétro-facturation, en se proposant de fournir des informations complémentaires (plus détaillées/plus complètes) aux commerçants, en conseillant les clients sur les équipements technologiques à utiliser et en offrant une gestion intégrée des relations et un programme de règlement journalier pour chaque système de cartes (176).
180) [Banque A] explique que les banques en place savaient qu'elle prévoyait de pénétrer le marché près de 18 mois avant la date prévue car elle devait devenir membre de Switch et de MasterCard bien avant le lancement de ses activités d'acquisition (177). Durant cette période de "préavis", les acquéreurs présents sur le marché ont, selon [banque A], étendu la durée des contrats d'affiliation de leurs clients, afin d'empêcher que ceux-ci ne passent chez elle (178).
181) Pour retenir les clients après l'entrée [banque A] sur le marché, les acteurs du marché ont baissé leurs prix (179). De l'avis d'un dirigeant [banque A] responsable des projets stratégiques pour la banque commerciale, les prix en vigueur sur le marché de l'acquisition connaissaient à cette époque une phase de déclin et l'entrée [banque A] a eu pour effet d'accélérer ce déclin (180). [Banque A] souligne que la valeur ajoutée, sur le plan de la qualité du service, était basée en majeure partie sur la technologie et que les autres acteurs n'ont pas manqué, par la suite, de copier [banque A] sur ce terrain après environ quatre ans (181).
182) Compte tenu de la nature du service d'acquisition et, plus particulièrement, du rôle majeur joué par le développement technologique et l'innovation dans les activités d'acquisition, il y a lieu de conclure que les banques acquéreurs peuvent se livrer concurrence sur toute une série d'aspects liés au service d'acquisition, et pas seulement sur les prix. L'exemple d'[banque A] montre en outre que la possibilité de concurrencer les autres acteurs tant sur l'aspect des prix que sur celui de la qualité du service offert est précieuse aux yeux d'un nouvel entrant.
5.3.2.2.5. Caractéristiques spécifiques du marché : le changement d'acquéreur
183) Certains commerçants changent de banque acquéreur.
184) D'une part, cela pourrait indiquer qu'il existe bel et bien une concurrence entre les banques acquéreurs : le commerçant quitte son acquéreur actuel parce que d'autres acquéreurs lui font de meilleures offres. En conséquence, un faible taux de rotation des commerçants signifierait que la concurrence est peu élevée sur le marché.
185) D'autre part, les banques acquéreurs, qui savent pertinemment que la procédure de changement d'acquéreur est simple, rapide et peu coûteuse, peuvent décider d'améliorer constamment leurs offres, afin de veiller à satisfaire en permanence leurs clients et, par là même, les dissuader de se tourner vers un autre acquéreur. Dans ce cas, un faible taux de rotation des commerçants ne serait pas le signe d'une concurrence peu élevée sur le marché.
186) Les procédures simples et peu coûteuses de changement d'acquéreur- tout comme la possibilité (évoquée dans la section précédente) d'exploiter de multiples aspects des services d'acquisition pour exercer une concurrence sur le marché - sont propices au succès d'un nouvel entrant. L'entrée d'[banque A] sur le marché britannique de l'acquisition démontre que, si elles sont utilisées en combinaison avec une offre plus avantageuse sur le plan de la qualité du service ou du prix, ces caractéristiques peuvent être mises à profit pour gagner des parts de marché et asseoir notablement sa présence sur le marché. Pour recruter des clients dans le cadre de ses nouvelles activités d'affiliation de commerçants, [banque A] a ciblé les commerçants pour lesquels elle assurait déjà des services de transfert de fonds et qui, avant le lancement des activités d'acquisition d'[banque A], étaient affiliés auprès d'autres banques pour l'acceptation de cartes de paiement (182). En 2003, la part de marché d'[banque A] s'élevait à 7 %, et 99 % de sa clientèle d'acquisition étaient des commerçants qui étaient affiliés auparavant chez d'autres acquéreurs et qui avaient changé au profit d'[banque A]. (183)
5.3.2.2.6 Structure du marché de l'acquisition au Royaume-Uni : conclusion
187) L'analyse de plusieurs caractéristiques du marché britannique de l'acquisition (telles que l'éventail d'acteurs présents sur le marché, la concentration du marché, les concurrents potentiels et les variables de la concurrence liées aux services d'acquisition et au changement d'acquéreur) démontre qu'il est possible d'intensifier la concurrence sur ce marché.
188) Les principaux acteurs du marché sont huit banques acquéreurs britanniques, dont quatre utilisent deux prestataires tiers auxquels elles ont délégué les activités d'acquisition. Les activités d'acquisition transfrontalière au Royaume-Uni par des banques des autres pays de l'EEE sont marginales. Le marché a fait l'objet de diverses opérations de concentration : des petits acquéreurs l'ont quitté et ont vendu leur portefeuille d'acquisition à de plus grands acquéreurs. Le marché peut être qualifié de concentré, puisque les quatre plus grands acquéreurs détiennent près de 90 % du marché. Vu la tendance générale à la concentration des activités d'acquisition, aucune des banques internationales (hormis Morgan Stanley) peu nombreuses qui ont les moyens d'être en principe des entrants efficaces ne songera, selon toute attente réaliste, à entrer sur ce marché.
189) L'entrée d'[banque A] sur ce marché indique que les procédures simples et peu coûteuses de changement d'acquéreur, de même que la possibilité de faire jouer la concurrence tant sur les prix que sur d'autres aspects du service d'acquisition, sont favorables à un nouvel entrant.
5.3.2.3. Morgan Stanley en tant qu'entrant potentiel efficace sur les marchés européens de l'acquisition
190) Morgan Stanley est engagée dans les activités liées aux cartes de paiement depuis le lancement du réseau Discover, c'est-à-dire depuis 1985 (184). Morgan Stanley envisageait d'étendre ses activités dans ce domaine au-delà des États-Unis (territoire couvert par Discover) et ses projets d'expansion ont toujours inclus l'Europe. Comme on le verra plus en détail à la section 5.3.2.1, infra, Morgan Stanley a finalement décidé de ne pas axer son expansion sur l'élargissement des activités du réseau Discover, mais de lancer plutôt des activités en matière de cartes de paiement au sein des réseaux déjà existants en Europe, à savoir Visa et MasterCard. Au Royaume-Uni, Morgan Stanley émet déjà des cartes MasterCard depuis 1999.
191) Eu égard à l'affiliation de commerçants (domaine dans lequel Morgan Stanley ne peut pas s'engager tant qu'elle n'a pas la qualité de membre Visa, compte tenu de la pratique de "double marque" décrite à la section 5.3.1.2. supra), Morgan Stanley a préparé en [date] un plan stratégique d'entreprise pour pénétrer le marché européen de l'affiliation de commerçants. Le plan a été élaboré par un grand cabinet-conseil, en collaboration avec un groupe de travail interne de Morgan Stanley, composé de cadres supérieurs issus de sa branche "cartes de crédit" (185). Il prévoit de pénétrer plusieurs marchés européens de l'acquisition, dont le Royaume-Uni, qui est décrit comme le plus grand marché des cartes de crédit en Europe et comme présentant un important potentiel de croissance. Morgan Stanley a également défini un programme de mise en œuvre de cette stratégie pour le Royaume-Uni, qu'elle prétend pouvoir lancer après qu'elle aura obtenu une licence Visa (186).
192) Cela démontre que Morgan Stanley entend toujours entrer sur le marché de l'acquisition. Inversement, l'affirmation de Visa selon laquelle Morgan Stanley n'a "jamais eu le désir ou l'intention" de poursuivre une activité d'acquisition (187) n'est pas appuyée par des éléments de preuve. Le fait que, le jour où elle a finalement eu le droit de présenter une demande d'adhésion, Morgan Stanley [information fournie par Morgan Stanley lors de sa demande d'adhésion à Visa Europe] (188), ne prouve pas que Morgan Stanley n'ait jamais eu l'intention dans le passé de poursuivre une activité d'acquisition et qu'elle ne le fera pas à l'avenir. La présentation de ce [...] a eu lieu plus de six ans après que Morgan Stanley eut présenté sa première demande d'adhésion et plus de [numéro] ans après l'élaboration de son plan stratégique d'entrée sur le marché européen de l'affiliation de commerçants. À cela s'ajoute le fait que, selon Visa, [les membres de Visa sont habilités à émettre et à acquérir des cartes] (189).
193) S'agissant des qualifications de Morgan Stanley en tant qu'acquéreur potentiel, son atout le plus précieux est sa longue expérience en matière d'affiliation de commerçants, un domaine dans lequel elle est active depuis le lancement du réseau Discover. Par contre, seules deux banques (JP Morgan et Citibank), parmi les sociétés que Visa considère comme pouvant être des acquéreurs potentiels sérieux, disposent d'une expérience de l'affiliation de commerçants. Or, comme on l'a déjà noté, ces deux banques n'envisagent pas d'entrer sur ce marché au Royaume-Uni.
194) De plus, Morgan Stanley peut aussi faire valoir l'expérience de son adhésion à un réseau quadripartite lui permettant d'émettre des cartes MasterCard au Royaume-Uni. Dans le cadre de ces activités, elle s'est familiarisée avec les règles et procédures propres à un réseau quadripartite, telles que les règles de rétro-facturation des frais et les procédures d'arbitrage pour le règlement des différends au sein d'un système quadripartite. Pour ce qui est des spécificités du traitement des données dans un réseau quadripartite, Morgan Stanley peut compter sur la très vaste expérience dans le domaine du traitement qu'elle s'est forgée aux États-Unis, où elle agit à la fois en tant que société de traitement et banque acquéreur. Elle pourrait en outre envisager de sous-traiter les activités de traitement à un prestataire tiers ou de s'associer avec un tel prestataire.
195) Parmi les autres caractéristiques particulières d'un réseau quadripartite, Visa mentionne aussi l'absence de contrôle exclusif de divers aspects des activités liées aux cartes de crédit et la nécessité de rivaliser avec les autres membres du système (190). Cependant, Visa n'explique pas en quoi ces caractéristiques désavantagent Morgan Stanley en tant qu'acquéreur Visa potentiel. Il suffit de relever, d'une part, que Morgan Stanley avait conscience de ces spécificités d'un réseau quadripartite lorsqu'elle a décidé de pénétrer les marchés européens des cartes de paiement, en exerçant des activités sur les réseaux Visa et MasterCard, et, d'autre part, qu'elle a pu mener des activités d'émission sur le réseau MasterCard.
196) En émettant des cartes sur le réseau MasterCard, Morgan Stanley s'est familiarisée avec les technologies Chip et PIN utilisées au Royaume-Uni. Qui plus est, elle dispose aux États-Unis d'un réseau de débit Pulse PIN, qui repose sur la technologie PIN et qui couvre des distributeurs automatiques et des terminaux points de vente installés dans des magasins de détail (191).
197) L'expérience acquise par Morgan Stanley aux États-Unis en matière d'acquisition et de traitement, combinée à son expérience en tant qu'émetteur sur le réseau MasterCard au Royaume-Uni, constitue une base solide pour entreprendre des activités d'acquisition sur les réseaux Visa et MasterCard en Europe.
198) Dans le contexte de la concentration des marchés de l'acquisition évoqué à la section 5.3.2.2.3 supra, Morgan Stanley figure en outre parmi les rares banques internationales de grande envergure qui peuvent être considérées comme des acquéreurs potentiels sérieux à l'échelon européen (192). Cette société a manifesté son intention de pénétrer les marchés de l'acquisition nationale de plusieurs États membres de l'EEE (193) ainsi que son intérêt pour l'acquisition transfrontalière (194), un domaine qui lui est également interdit en l'absence de licence Visa (195).
199) Visa prétend (196) que le refus d'accepter Morgan Stanley comme membre ne saurait être qualifié de restriction de concurrence dès lors que la concurrence sur le marché pertinent serait très efficace, ce que démontrerait, en particulier, la chute spectaculaire des MSCs.
200) La Commission ne considère pas que la concurrence soit inefficace sur le marché pertinent. Néanmoins, la concurrence constitue une dynamique et elle peut encore être intensifiée sur le marché pertinent, tant en ce qui concerne les prix que la qualité (197). Le fait que le marché a été privé de la concurrence supplémentaire qu'aurait pu apporter un acquéreur efficace, important et expérimenté tel que Morgan Stanley a eu des effets restrictifs appréciables.
5.3.2.4. Effets restrictifs de l'exclusion de Morgan Stanley : conclusion
201) En conséquence, il y a lieu de conclure que, compte tenu des caractéristiques du marché de l'acquisition au Royaume-Uni ainsi que de l'expérience et des qualifications de Morgan Stanley, l'entrée de cette société sur ce marché devrait vraisemblablement contribuer à rendre plus efficace la concurrence qui y est exercée entre les marques, et devrait avoir un impact positif sur les prix et sur la qualité des services d'acquisition. De ce fait, son exclusion a eu un effet restrictif appréciable sur la concurrence au sein de ce marché.
5.3.3. Le comportement de Visa relève du champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE
202) Après avoir conclu que la règle, telle qu'elle a été appliquée à l'égard de Morgan Stanley, a des effets restrictifs appréciables au sein du marché en cause, la Commission a analysé les arguments de Visa visant à démontrer que son refus d'accorder la qualité de membre Visa à Morgan Stanley était objectivement justifié, et qu'il ne relève donc pas du champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.
203) Visa fait valoir que la règle vise à prévenir un risque de parasitisme par des réseaux de cartes de paiement concurrents et sert à maintenir et à renforcer la concurrence inter-systèmes. (198)
204) Dans le cas de Morgan Stanley, Visa prétend (199) que Morgan Stanley, en tant que propriétaire de Discover, est un concurrent actuel de Visa au niveau des systèmes de cartes aux Etats-Unis et un concurrent potentiel dans l'UE/EEE. Elle fait référence à des préoccupations de parasitisme qu'elle aurait au sujet de Morgan Stanley et fait valoir que la règle, qui vise à répondre à ces préoccupations, contribue en fin de compte à une plus concurrence entre les systèmes de carte.
205) En particulier, avant d'accepter Morgan Stanley comme membre de Visa le 22 septembre 2006, Visa se disait préoccupée par le fait que Morgan Stanley, si elle se voyait reconnaître le statut de membre de Visa, aurait accès à des informations confidentielles qu'elle pourrait ensuite utiliser au profit de son réseau de paiement Discover. Visa a identifié certaines catégories de telles informations confidentielles (200). Selon visa, la préoccupation de mauvais usage de l'information confidentielle importe particulièrement dans le cas d'aspirants au statut de membre qui appartiennent à des réseaux tripartites fermés tels que Discover du fait de l'absence d'un " filtre " entre le membre de Visa et l'opérateur du système concurrent. (201)
206) De plus, Visa a fait valoir que Morgan Stanley pourrait utiliser les contacts avec les commerçants et les porteurs et les données sur les transactions acquises sur le réseau Visa comme un " tremplin " pour lancer son réseau Discover en Europe.
207) Selon Visa des mesures moins restrictives que la règle, telles que des murailles de Chine (" Chinese walls ") ou des mesures de contrôle de l'utilisation des informations confidentielles, ne serait pas adoptées pour prévenir un mauvais usage des informations confidentielles de Visa par Morgan Stanley (202). Visa fait également valoir que, dès lors que le risque que les contacts avec les commerçants et les porteurs et les données sur les transactions acquises sur le réseau Visa soient utilisés comme un " tremplin " serait inhérent à l'admission d'un concurrent dans le système Visa, il n'existe aucune mesure autre que la règle pour prévenir comme il convient ces risques de mauvais usage (203). Par ailleurs, Visa fait valoir qu'elle ne pourrait traiter Morgan Stanley autrement qu'elle ne traite les autres membres dans le but de tenir compte des particularités de l'espèce, "as the cohesion of the joint venture depends upon equality" [la cohésion de l'entreprise commune dépendant de l'égalité]. (204)
208) Visa reconnaît qu'elle a admis comme membre Citigroup, qui est le propriétaire et l'opérateur du réseau Diners Club, et plusieurs actionnaires de JCB Co. Ltd. qui détient le réseau de cartes JCB. Toutefois, Visa fait valoir qu'il existe des différences matérielles entre Discover et Diners Club ou JCB. Selon Visa ces différences expliquent pourquoi, contrairement à Citigroup et à JCB Co. Ltd., qui se sont vus reconnaître le statut de membres de Visa, Morgan Stanley s'est vu refuser ce statut. Selon les propres termes de Visa, "situations involving the admission of an established head-to-head competitor to the organisation are not comparable with the situation of members that present a comparatively minor competitive threat." [les situations impliquant l'admission d'un concurrent au coude-à-coude avec l'organisation ne sont pas comparables avec la situation de membres qui présentent une menace concurrentielle comparativement mineure].
209) Visa ajoute que les situations impliquant l'admission d'un nouveau candidat au statut de membre de l'organisation ne sont pas comparables à celle des membres existants qui ont investi dans le système Visa depuis plus d'une décennie, et que par conséquent Visa n'aurait pas été dans l'obligation de traiter Morgan Stanley de la même façon que ses membres existants.
210) À la lumière de la jurisprudence des tribunaux communautaires (section 5.3.3.1), la prétention de Visa à ce sujet ne résiste pas à l'analyse, comme on l'a expliqué plus haut (sections 5.3.1.1. et 5.3.1.2). Visa détient un pouvoir important sur le marché en cause et sa pratique de l'application de la règle aux autres membres (section 5.3.3.2) démontre que sa conduite à l'égard de Morgan Stanley était discriminatoire et injustifiée.
211) En particulier, le comportement de Visa n'était pas nécessaire pour empêcher tout acte de parasitisme de la part de Morgan Stanley (section 5.3.3.3.).
212) En outre, le fait que Visa ait fini par admettre Morgan Stanley en septembre 2006 sans évoquer le moindre changement pour ce qui est des sujets de préoccupation invoqués par Visa pendant les six années où elle a refusé l'adhésion à Morgan Stanley (section
5.3.3.4) démontre que ces préoccupations étaient dénuées de fondement.
5.3.3.1. Jurisprudence des tribunaux communautaires (205)
213) Visa estime que l'application de la règle à Morgan Stanley ne tombe pas dans le champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE, sur le fondement d'arrêts tels que ceux qui ont été rendus dans les affaires Gøttrup-Klim (206), Metropole Television (207) et Elopak/Metalbox-Odin (208) (209).
214) De l'avis du Tribunal de première instance dans l'affaire Métropole Télévision, peut être considérée comme échappant à l'application de l'article 81, paragraphe 1, toute restriction qui est directement liée et nécessaire à la réalisation d'une opération principale (210).
215) Dans l'affaire Gøttrup-Klim, qui concernait une disposition statutaire d'une association coopérative d'achat interdisant à ses membres de faire partie d'autres formes de coopération organisée en concurrence directe avec elle, la Cour a estimé que cette disposition ne tombait pas sous l'interdiction prévue par l'article 81, paragraphe 1, du traité, dès lors qu'elle était limitée à ce qui est nécessaire afin d'assurer le bon fonctionnement de la coopérative et de soutenir sa puissance contractuelle vis-à-vis des producteurs. La décision Elopak/Matalbox-Obin analyse diverses dispositions de l'accord d'entreprise commune visant à prévenir l'emploi d'un savoir-faire confidentiel par des concurrents de la société mère ou de l'entreprise commune. Elle parvient à la conclusion que de telles dispositions sont nécessaires pour éviter de compromettre ou de saper l'objet et l'existence de l'entreprise commune, raison pour laquelle elle échappe à l'application de l'article 81, paragraphe 1. Dans l'affaire Métro (211), la Cour européenne de justice a statué que des dispositions restrictives contenues dans un système de distribution sélectif étaient susceptibles d'échapper à l'application de l'article 81, paragraphe 1, dans la mesure où elles satisfont à des critères objectifs et qualitatifs et où elles sont appliquées d'une manière non discriminatoire.
216) S'il est vrai que, selon Visa, "in general the same applies to admission to membership of an open trade association" (212) [en général, cela s'applique également à l'admission en tant que membre d'une organisation associative ouverte], Visa prétend que le présent cas constitue une exception et que l'arrêt Metro n'y est pas applicable. En effet Visa fait valoir qu'en appliquant une règle dont le but était d'exclure des concurrents présentant "un risque inacceptable de parasitisme", l'appréciation faite par elle "comportait nécessairement un élément de jugement subjectif", ce qui implique que la jurisprudence Metro n'est pas applicable en l'espèce (213).
217) Alors que ni les affaires invoquées par Visa (Gøttrup-Klim, Metropole Television et l'arrêt Elopak/Metalbox-Odin), ni l'affaire Metro ne correspondent exactement aux faits de la présente affaire, la Commission estime que la jurisprudence peut y être appliquée par analogie. Metro concerne une situation semblable à celle en l'espèce. Dans l'affaire Metro, l'admission à un système de distribution verticale avait été refusée sur la base de certains critères dont il était affirmé qu'ils étaient nécessaires pour le bon fonctionnement du système, ce qui est semblable à la situation en l'espèce, dans laquelle seuls les membres de Visa ont le droit d'acquérir des transactions Visa aux points de vente des commerçants et par ce moyen de contribuer à la concurrence inter-marque.
218) S'agissant de l'exigence de Metro comme quoi l'application de critères d'adhésion ne sont pas faits d'une manière discriminatoire, le fait que l'application de la règle Visa implique l'évaluation du respect par le candidat des critères d'adhésion ainsi que de ses objectifs ne distingue par la présente affaire de celle de Metro.
219) En outre, contrairement aux assertions de Visa, l'objet de la règle ne serait pas affecté par l'exigence que la règle soit appliquée sans discrimination (214). À cet égard, la Commission est d'avis que l'appréciation de la question de savoir si un candidat à l'adhésion à Visa est un concurrent de Visa présentant un risque de parasitisme ne peut être compromise par l'exigence que cette appréciation soit menée d'une façon non discriminatoire, car l'application non discriminatoire d'une règle n'empêche pas Visa de tenir compte des spécificités de chaque situation.
220) À la lumière de la jurisprudence évoquée ci-dessus, l'application de la règle à Morgan Stanley échapperait à l'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE si cette règle était directement liée et nécessaire (proportionnée et non discriminatoire) au bon fonctionnement du réseau quadripartite Visa de cartes de paiement (215).
221) Dans les sections ci-dessous de la présente décision, il est procédé à une analyse semblable pour savoir si, en raison des préoccupations de Visa concernant un risque de parasitisme portant sur l'obtention d'informations confidentielles et d'autres questions, l'usage qui a été fait de la règle à l'encontre de Morgan Stanley échappe à l'application de l'article 81, paragraphe 1. La conclusion tirée est que cela n'est pas le cas.
5.3.3.2. La pratique de Visa dans l'application de la règle
222) L'analyse de la pratique de Visa dans l'application de la règle a montré que les propriétaires ou actionnaires d'autres réseaux de paiement - à savoir, Citigroup (section 5.3.3.2.1.) et JCB (section 5.3.3.2.2) - ont été admis en tant que membres de Visa. L'admission de ces sociétés au système Visa met en cause la légitimité des préoccupations de Visa concernant les dommages que l'admission de Morgan Stanley à la qualité de membre étaient susceptibles de causer et indique par là que la conduite de Visa vis-à-vis de Morgan Stanley était discriminatoire et non nécessaire.
5.3.3.2.1. Citigroup
223) Citigroup, exploitant du réseau de cartes privatives Diners Club, est membre de Visa (216). L'adhésion de Citigroup à Visa a précédé son acquisition de l'entité commerciale Diners Club en 1981 (217). Comme Visa l'explique, "By-Law 2.12(b) was not in existence [in 1981] and therefore no issue arose" [l'article 2.12, point b), des statuts n'existant pas (en 1981), aucun problème n'a été soulevé] (218). La règle a été introduite en 1989; cependant, "Visa did not seek to apply the rule to Citicorp but to "grandfather" its position" [Visa n'a pas cherché à l'appliquer à Citicorp, mais à maintenir sa position inchangée] (219). Bien que Visa affirme que, lors de l'introduction de la règle, elle a évalué le risque d'une concurrence déloyale de la part de Citigroup (220), le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration au cours de laquelle la règle a été adoptée ne fait mention d'aucune discussion quant au statut de Citibank (221). De plus, Visa n'a fourni aucune pièce de nature à prouver que le risque en question a été évalué à l'époque.
224) Néanmoins, il ressort clairement des observations de Visa que le statut de Citigroup en tant que membre de Visa à la date où la règle a été adoptée ainsi que ses investissements dans les activités du réseau Visa à cette même date ont joué un rôle décisif dans la décision de Visa de maintenir inchangée la position de Citigroup. Le témoignage du General Counsel (directeur des affaires juridiques) de Visa International et de Visa USA dans l'affaire MountainWest est éloquent à cet égard : "...Personally I thought it would be unfair at this juncture after someone had come in and had been a Visa member and had invested millions and millions of dollars in the Visa system when we knew already that they were in Diners and Carte Blanche and now to ask them to divest themselves of something five, six, maybe eight years after we ha[d] already let them spend millions of dollars in Visa would be totally unfair" [(...) Personnellement, j'ai pensé qu'il serait déloyal, à ce stade, de demander à une société déjà membre de Visa de se retirer, après qu'elle eut investi des millions et des millions de dollars dans le système Visa, alors que nous savions déjà qu'elle faisait partie du réseau Diners et Carte Blanche. Demander maintenant à ce membre de se retirer, quelque chose comme cinq, six, voire huit ans après son adhésion, alors que nous l'avons laissé dépenser des millions de dollars dans Visa serait complètement injuste] (222).
225) De fait, Visa allègue que Citigroup n'est pas dans la situation d'un nouveau candidat, tel que Morgan Stanley, puisque Citigroup avait investi dans le système Visa avant l'adoption de la règle et qu'il pouvait donc légitimement s'attendre à avoir droit au rendement du capital investi et à ce que les autres membres de Visa ne soient pas autorisés à tirer indûment profit de cet apport (223).
226) Cet argument pourrait être invoqué pour empêcher l'adhésion de n'importe quel nouveau membre au système Visa : si un membre potentiel de Visa ne pouvait y être admis que si, à l'instar de Citibank, il avait déjà investi dans Visa avant l'adoptionde la règle, alors aucun nouveau membre ne pourrait plus être admis dans Visa après l'adoption de la règle. De plus, cet argument ne répond en aucune façon à la question des risques potentiels de l'adhésion de Citigroup ou de Morgan Stanley à Visa, dans la mesure où cette dernière ne produit aucune preuve concrète de nature à étayer son affirmation selon laquelle "it is not likely that [...] MSDW will not unduly and unfairly profit from the years of investment from other members" (224) [il est peu probable que (...) Morgan Stanley ne tente pas de tirer indûment et abusivement profit des investissements consentis durant des années par d'autres membres], à la différence de Citigroup, dont la "clear loyalty" [loyauté patente] et la "track record of establishing its own system through its independent efforts" [réputation de société qui a su établir son propre système en ne comptant que sur ses propres efforts] sont reconnues dans le monde entier (225). La seule conclusion qui peut être tirée de cet argument aux fins de la présente décision est que, s'il est possible de préserver un concurrent de l'application à son encontre de la règle au motif qu'il était déjà membre avant l'introduction de celle-ci, il y a lieu de douter de l'opportunité de la règle pour atteindre les avantages allégués.
227) Il convient d'examiner à présent les deux autres arguments avancés par Visa dans ses observations, afin d'établir une distinction entre la situation de Diners Club de celle de Morgan Stanley.
228) Dans le cadre du premier de ces deux arguments, Visa différencie Diners Club de Discover sur la base du poids relatif global et de l'étendue de ces réseaux.
229) Lorsque la règle a été adoptée en 1989, la position de Citigroup a été protégée en tant que droit acquis et pour cette raison Citigroup n'a pas été exclue de la qualité de membres de Visa. En 1989 (comme aujourd'hui), le réseau Diners Club était un réseau mondial actif dans quelque 200 pays, notamment en Europe, tandis que Discover était un réseau régional dont les cartes n'étaient émises qu'aux États-Unis et acceptées principalement aux États-Unis, et dans une moindre mesure au Canada, au Mexique, et dans certaines îles portoricaines et antillaises.
230) Bien que le nombre de cartes Diners Club en circulation fût inférieur au nombre de cartes Discover, les premières étaient acceptées dans un nombre beaucoup plus élevé de points de vente que les autres. De plus, la carte Diners Club était acceptée dans le monde entier, alors que la carte Discover n'avait qu'une portée régionale.
231) À la lumière de ces faits, il y a déjà lieu de se demander pourquoi l'accès de Citigroup aux informations confidentielles de Visa et leur éventuelle utilisation abusive par Citigroup n'ont nullement inquiété Visa, alors que l'adhésion de Discover était écartée car jugée dangereuse pour le fonctionnement du système Visa. Une telle conclusion apparaît d'autant plus douteuse si l'on songe que la marque Diners Club est soutenue par Citigroup, qui était et est toujours une banque chef de file au monde en matière de services financiers (226).
232) Dans le domaine des réseaux de cartes, où seules cinq marques se font concurrence à l'échelle mondiale (et Discover n'en fait pas partie), Diners Club -dont la puissance financière par l'intermédiaire de Citigroup est sans équivalent - ne peut en aucun cas être écartée de la liste des marques concurrentes de Visa. Cette observation est, du reste, confirmée par un exemple tiré de la pratique commerciale actuelle de Visa à l'égard du réseau Diners Club: ce dernier figure parmi les concurrents de Visa dans l'accord conclu entre celle-ci et le [identité de l'autre partie de l'accord], en vertu duquel le statut de [...] est octroyé à Visa dans le cadre du programme [le nom du programme] (227).
233) Même s'il est vrai, comme le suggère Visa (228), que Citigroup n'a pas "poussé" Diners au cours de ces dernières années, Visa ne disposait pas et n'aurait pas pu disposer de cette "assurance" au moment de l'introduction de la règle. Cet élément, ainsi que les diverses rationalisations opérées a posteriori concernant le développement du réseau Diners Club ces dernières années (dont un récent accord de "co-marquage" entre MasterCard et Diners Club aux États-Unis), ne sont pas des faits pertinents pour évaluer le risque que l'adhésion de Citigroup à Visa pouvait éventuellement représenter à la date où la règle a été adoptée.
234) De même, la justification avancée par Visa, selon laquelle l'adhésion de Citigroup est fondée sur le fait que Diners Club est spécialisée dans les cartes d'affaires et de sociétés et a, de tous temps, été orientée vers le secteur des voyages et des loisirs, apparaît douteuse, dans la mesure où [le nom de l'entreprise considère par Visa d'être son concurrent] par -dont le profil est similaire à celui de Diners Club -est considéré par Visa comme un "concurrent" devant être exclu de l'adhésion à Visa.
235) Le second argument invoqué par Visa est le suivant : la structure organisationnelle de Citigroup permet de poser un "filtre" entre sa participation dans Visa et ses activités dans le cadre du réseau Diners; ce filtre est représenté par les franchisés Diners Club qui n'appartiennent pas à Citigroup (229).
236) Pour répondre à cet argument, il convient de souligner en premier lieu que Diners Club est un système fermé de cartes privatives, au même titre que Discover. Or, si Visa prétend être particulièrement vulnérable aux systèmes fermés tels que Discover, en raison du fait que les informations se transmettent dans un seul sens (depuis les systèmes ouverts tels que Visa vers les systèmes fermés), elle devrait en principe être également préoccupée par les flux d'informations qui s'écoulent de Visa vers Citigroup, en tant que membre de Visa.
237) En deuxième lieu, les considérations suivantes sur la structure organisationnelle du réseau Diners Club et la répartition des responsabilités entre le titulaire de la marque et les franchisés sont utiles en vue de déterminer à quel niveau de la structure de Diners Club les inquiétudes de Visa concernant la confidentialité pourraient être pertinentes. C'est ce niveau que le "filtre" mentionné par Visa pour bloquer tout flux potentiel d'informations confidentielles devrait être placé.
238) La marque Diners Club est détenue par Diners Club International Ltd, une filiale de Citigroup (via Citibank, État de New York) (230). Le réseau Diners Club compte [...] franchisés, sous-franchisés et agences dans le monde. [...] d'entre eux sont intégralement ou partiellement détenus par Citigroup. Cette organisation possède la franchise Diners Club aux États-Unis. En Europe, elle a racheté et possède désormais des franchisés au Royaume-Uni, en Belgique, en France, en Grèce, en Allemagne, en Irlande, en Italie, au Luxembourg et aux Pays-Bas (231). Chaque franchisé opère sous licence délivrée par Diners Club International.
239) Il résulte de l'analyse comparative des responsabilités de Diners Club International et de celles accordées à ses franchisés que le titulaire de la marque a pour mission d'assurer le développement de la marque Diners Club, en développant de nouveaux produits, en améliorant la notoriété et l'acceptation de la marque, et en définissant des normes, politiques et procédures d'exploitation du réseau. Les franchisés, quant à eux, ont pour seule tâche de mettre en œuvre les nouveaux produits et les nouvelles règles que le titulaire de la marque introduit (232).
240) Compte tenu de cette répartition des responsabilités, il est clair que c'est au niveau du titulaire de la marque, Diners Club International, plutôt qu'au niveau des franchisés, que Visa devrait avoir davantage de craintes pour la confidentialité de ses informations. En conséquence, le fait que certains franchisés ne sont pas détenus par Citigroup ne revêt guère d'importance en ce qui concerne le contrôle du flux des informations confidentielles de Visa vers le réseau Diners Club.
241) Comme cela a été souligné précédemment, le titulaire de la marque Diners Club - à savoir Diners Club International - est une filiale de Citigroup. En outre, Citigroup possède de nombreuses sociétés membres de Visa. Si Visa a des craintes légitimes que Morgan Stanley puisse parasiter ses informations confidentielles, on perçoit mal pourquoi les mêmes craintes ne seraient pas ressenties à l'égard de Diners Club.
5.3.3.2.2. JCB
242) JCB Co. Ltd est une société japonaise de cartes de crédit qui propose la marque internationale JCB. La carte JCB est émise dans 19 pays, dont plusieurs États membres de l'UE (parmi lesquels figure le Royaume-Uni (233)), et elle est acceptée dans 190 pays (234). À la fin de l'année 2004, 53,6 millions de cartes JCB étaient en circulation et elles étaient acceptées dans 12,2 millions de points de vente de par le monde (235). La marque JCB occupe la deuxième place sur le marché japonais, avec un peu plus de 26 % de la valeur totale des transactions en 2001; elle vient derrière Visa, le chef de file du marché japonais des cartes de crédit, qui représente plus de 48 % de la valeur totale des transactions enregistrées au cours de cette même année (236).
243) Si l'on considère JCB Co. Ltd uniquement en tant qu'acteur de premier plan du marché japonais des cartes de crédit, cette société apparaît tout autant comme un concurrent de Visa au Japon que Morgan Stanley peut l'être aux Etats-Unis : JCB Co. Ltd et Morgan Stanley possèdent toutes deux leur propre marque de cartes et gèrent des réseaux de cartes de paiement qui font concurrence au réseau Visa sur certains marchés régionaux. De plus, JCB Co. Ltd est aussi un concurrent de Visa en Europe, alors que Morgan Stanley ne l'est pas.
244) Le fait est, cependant, que plusieurs actionnaires de JCB Co. Ltd sont membres de Visa
245) Resona Bank, UFJ Bank Ltd and Sumitomo Mitsui Banking Corporation sont les principaux actionnaires de JCB Co. Ltd. (237). Ensemble, ces sociétés détiennent 22 % du capital social de JCB Co. Ltd, le reste du capital étant réparti entre les 121 autres actionnaires (238). Chacun des trois principaux actionnaires précités est représenté au sein du conseil d'administration de JCB Co. Ltd, ce qui n'est pas le cas des 121 actionnaires restants.
246) Dans le même temps, les trois sociétés en question sont membres de Visa, [l'information sur l'adhésion par les propriétaires du JCB] (239). Par exemple, Sumitomo Mitsui Card Co. Ltd, qui est une filiale de Sumitomo Mitsui Banking Corporation et un membre principal de Visa, est aussi représentée au conseil d'administration de Visa International (240). Elle a été la première société à introduire Visa sur le marché japonais et elle s'impose actuellement comme le plus grand émetteur de cartes Visa, non seulement au Japon mais aussi en Asie (241).
247) Hormis les trois principaux actionnaires de JCB Co. Ltd, plusieurs autres actionnaires sont aussi membres de Visa, [l'information sur l'adhésion par les propriétaires du JCB] (242).
248) Le fait que plusieurs actionnaires de JCB Co. Ltd [l'information sur l'adhésion par les propriétaires du JCB] soient membres de Visa, directement ou par l'intermédiaire de leurs filiales, offrirait, si la thèse de Visa était correcte, de multiples possibilités d'acheminer des informations confidentielles de Visa à la société JCB Co. Ltd, qui détient et exploite le réseau JCB. Cependant, il est un fait que les craintes relatives à la confidentialité de ces informations n'ont pas empêché les actionnaires du réseau JCB de devenir membres de Visa, alors que Visa soutient que des craintes de même nature ont empêchées Morgan Stanley d'en devenir membre. Comme dans le cas de Citigroup, le manque de cohérence qui apparaît dans la pratique de Visa illustre la manière indéterminée et discrétionnaire dont la règle a été appliquée à Morgan Stanley.
249) Visa rétorque que les actionnaires de JCB qui sont membres de Visa ne sont pas incités à utiliser les informations de Visa au profit du système JCB, étant donné que tous les bénéfices éventuels qu'ils pourraient en retirer seraient partagés avec tous les autres actionnaires (243). Cet argument s'avère difficilement compréhensible au regard du prétendu souci de Visa de protéger ses informations confidentielles. Si cette préoccupation était réelle, Visa devrait, selon toute logique, utiliser des mécanismes pour éviter la transmission non désirée d'informations confidentielles, plutôt que de se fier au seul critère de l'incitation (ou de l'absence d'incitation) d'un membre à faire un usage abusif de ces informations.
5.3.3.2.3. Pratique de Visa en matière d'application de la règle : conclusion
250) L'analyse de la manière dont la règle a été appliquée à Morgan Stanley par comparaison à son application à d'autres sociétés démontre que la règle a été appliquée de manière incohérente. Pour justifier son comportement dans chacun des cas relatifs à Morgan Stanley, à Citigroup et aux actionnaires de JCB Co. Ltd, Visa avance des critères différents et leur donne en outre des interprétations parfois contradictoires : dans le cas de Morgan Stanley par exemple, Visa fait valoir qu'elle est particulièrement vulnérable vis-à-vis des systèmes fermés, mais elle ne semble pas accorder la moindre importance à ce critère dans son appréciation du cas de Citigroup.
251) Il demeure difficile de comprendre pourquoi le risque d'usage abusif des informations confidentielles de Visa n'a pas empêché Citigroup ou les actionnaires de JCB Co. Ltd de devenir membres de Visa, alors que ce même risque a entraîné le rejet de Morgan Stanley du réseau pour plus de six ans. Cette incohérence jette le doute sur la légitimité du risque de parasitisme allégué par Visa pour justifier son application de la règle.
252) De surcroît, l'admission de Morgan Stanley le 22 septembre 2006 apporte un élément de preuve supplémentaire de l'invalidité des arguments avancés par Visa à l'appui du refus d'admettre Morgan Stanley en tant que membre du réseau (section 5.3.3.4.).
5.3.3.3. Les préoccupations relatives au parasitisme ne peuvent justifier l'application de la règle à Morgan Stanley
253) Comme l'analyse ci-après le démontrera, il est impossible d'établir les risques que la divulgation à Morgan Stanley d'informations qualifiées par Visa de confidentielles pourrait représenter pour le bon fonctionnement du système Visa (section 5.3.3.3.1), et ce d'autant plus que Discover n'est pas un entrant probable sur le marché européen (section 5.3.2.1 supra). Le risque que Morgan Stanley fasse usage de données accumulées de titulaires/commerçants et de données de transaction afin de s'en servir comme d'un "tremplin" au lancement du réseau Discover en Europe est également infondé (section 5.3.3.3.2.). Même si ce risque était justifié, il pourrait être écarté par des moyens moins restrictifs qu'un refus total de l'adhésion à Visa (section 5.3.3.3.3.).
5.3.3.3.1 Accès à de l'information confidentielle
254) La présente section examine la thèse de Visa selon laquelle elle se serait rendue vulnérable si elle avait mis à la disposition de Morgan Stanley certaines catégories d'informations jugées confidentielles par Visa.
255) Il convient de remarquer tout d'abord que la divulgation à Morgan Stanley de certaines informations spécifiques à la région européenne de Visa (244) ne devrait pas fausser le jeu de la concurrence entre Visa et Discover, puisque cette expansion serait dépourvue d'intérêt pour les activités de Discover aux États-Unis. Visa elle-même a fait une remarque semblable lorsqu'elle a contesté les qualifications de Morgan Stanley pour prétendre être un acquéreur potentiel sérieux au Royaume-Uni en soutenant que "experience from the US is not necessarily transferable to the UK where there are different trade practices and customary preferences" [l'expérience acquise aux États-Unis n'est pas nécessairement transposable au Royaume-Uni, car les pratiques commerciales et les préférences des clients y sont différentes] (245).
256) Dans les paragraphes suivants, la Commission examinera les catégories spécifiques d'informations que Visa affirme ne pas devoir être divulguées à Morgan Stanley en raison du risque de parasitisme. Comme l'analyse ci-dessous le montrera, ces informations 1) seraient, dans tous les cas, accessibles à Morgan Stanley si cette dernière exerçait des activités d'acquisition dans le cadre d'un accord de façade (ce à quoi Visa dit n'avoir aucune objection), ou 2) sont spécifiques à la région UE de Visa et ne revêtent dès lors aucun intérêt pour Discover aux États-Unis, ou 3) sont devenues des normes du secteur. Même à supposer que les informations relatives aux nouveaux produits ou aux stratégies commerciales de Visa en Europe présentent un certain intérêt pour Discover aux États-Unis (compte tenu des différences géographiques et des modèles d'entreprises différents), ces informations ne seraient, en tout état de cause, pas accessibles à tous les membres de Visa. De plus, Visa pourrait garantir la confidentialité de ces informations vis-à-vis de Morgan Stanley en optant pour des mesures moins restrictives que le refus de lui octroyer la qualité de membre, ce qu'elle a finalement fait en admettant Morgan Stanley en tant que membre le 22 septembre 2006. À la lumière de ces constatations, l'assertion de Visa selon laquelle elle aurait été vulnérable à la divulgation à Morgan Stanley de certaines catégories d'informations qu'elle jugeait confidentielles ne résiste pas à l'examen.
(i) Statuts et règlement intérieur
257) De l'avis de Visa, ses statuts et son règlement intérieur constituent le fondement du système Visa (246), puisqu'ils déterminent le fonctionnement détaillé du système et les conditions techniques d'exploitation qui sont imposées aux membres. Visa explique que son règlement intérieur représente plus de trente ans de connaissances accumulées et d'expérience acquise à travers des activités et des investissements effectués dans le passé par Visa et par ses membres d'hier et d'aujourd'hui (247). Ce savoir-faire est régulièrement actualisé et perfectionné; les membres sont informés des évolutions récentes au moyen des [informations détaillées sur les modes de diffusion des informations actualisées aux membres de VISA] (248). Visa fait valoir que, si elle conférait à Morgan Stanley la qualité de membre Visa, ce qu'elle a finalement fait, Morgan Stanley aurait accès à la toute dernière mouture du système Visa ainsi qu'à ses méthodes d'exploitation testées et éprouvées.
258) Toutefois, en vertu de la section 2.10 du règlement intérieur régional de Visa Europe, ["organisations de vente indépendantes" sont oblige de se conformer aux statuts et au règlement intérieur de Visa]: [les détails du règlement intérieur régional de Visa Europe] (249)
259) Cette obligation imposée aux "organisations de vente indépendantes" de se conformer aux statuts et au règlement intérieur de Visa implique que celles-ci aient connaissance de toutes les dispositions contenues dans ces documents.
260) La nécessité d'imposer une telle obligation à ces organisations est compréhensible : dans la mesure où les "organisations de vente indépendantes", telles qu'EuroConex ou First Data, exercent des activités d'acquisition par elles-mêmes, sans aucune intervention ou presque de la banque membre de Visa avec laquelle elles ont conclu un accord de façade (250), il est normal qu'elles respectent les règles et les règlements de Visa qui sont nécessaires au bon fonctionnement du volet "acquisition" du système Visa.
261) Visa soutient que les sociétés de traitement agissant en qualité de tiers et d'autres partenaires de façade ne peuvent être considérées comme des organisations de vente indépendantes ("ISO"). [les détails du règlement intérieur régional de Visa Europe].
262) Pourtant, les critères énumérés dans la définition de l'organisation de vente indépendante qui figure dans le règlement intérieur régional de Visa Europe n'excluent aucunement des acquéreurs agissant en qualité de tiers dans le cadre d'un accord de façade : [les détails du règlement intérieur régional de Visa Europe].
263) [Les organisations de distribution autonomes fournissent des informations à Visa en ce qui concerne les autres services de soutien liées aux cartes, que ces organisations entendent offrir]. (251)
264) Enfin, la pratique confirme que les prestataires tiers reçoivent les statuts et le règlement intérieur de Visa de la part de membres de Visa. Cette dernière a elle-même reconnu dans sa réponse du 22 septembre 2006 à la lettre d'exposé des faits de la Commission en date du 6 juillet 2006, citant un dirigeant d'Alliance & Leicester, responsable des projets stratégiques pour la banque commerciale, que : "A&L is a mere interface between the networks and EuroConex and its duty is to inform EuroConex of all the network rules and procedures necessary to run the acquiring business" ["qu'A&L est une simple interface entre les réseaux et EuroConex et que son devoir est d'informer EuroConex de toutes les règles et procédures du réseau qui sont nécessaires pour gérer les activités d'acquisition"].
265) En conséquence, même si Morgan Stanley devait conclure un accord de façade en tant que prestataire tiers (ce à quoi Visa dit n'avoir aucune objection), elle serait tenue de connaître le contenu des statuts et du règlement intérieur de Visa.
(ii) Technologies Chip & PIN
266) En 2005 Visa a fait observer que les technologies Chip & PIN ont été reconnues comme représentant la pratique sectorielle privilégiée et qu'indépendamment des informations relatives à l'"application spécifique" de ces technologies aux systèmes de cartes individuelles, les informations en question ne sont pas considérées comme confidentielles par Visa (252).
267) S'agissant des informations relatives l'application de ces technologies, Visa explique qu'elle a adopté une série de règles pour la région européenne et que ces règles sont définies dans le règlement intérieur régional de Visa Europe (253). Comme cela a déjà été souligné au point (i) ci-dessus, si Morgan Stanley devait exercer des activités d'acquisition en tant que prestataire tiers agissant dans le cadre d'un accord de façade, elle devrait aussi connaître ce règlement pour être à même de s'y conformer.
268) Visa souligne également la valeur commerciale des informations relatives à l'interopérabilité des technologies Chip & PIN dans un contexte paneuropéen (254). Cependant, étant donné que Discover n'est pas actif en Europe et qu'il est peu probable que ce réseau entre sur le marché européen, une telle information n'aurait guère d'intérêt pour Morgan Stanley, si ce n'est dans le cas où elle deviendrait un membre de Visa en mesure d'étendre le commerce de ce réseau.
(iii) Technologie utilisée pour le commerce électronique
269) Visa reconnaît que, pour garantir la sécurité des paiements en ligne dans le cadre du commerce électronique, elle utilise une technologie fondée sur ce qui constitue désormais une norme du secteur [les détails de la technologie électronique du Visa] (255).
(iv) Technologies de prévention des fraudes
270) De l'avis de Visa (256), certains aspects de la détection et de la prévention des fraudes échappent aux normes du secteur; ces aspects sont des caractéristiques concurrentielles qui différencient les systèmes de cartes concurrents. Visa explique qu'elle collecte les données des membres relatives aux fraudes [les détails de la prévention des fraudes technologie]. Les informations ainsi enregistrées sont utilisées pour informer les membres [les détails de la prévention des fraudes technologie], pour renforcer les mesures de prévention des fraudes de Visa et pour aider les membres à mettre au point leur propre système de lutte contre la fraude. Visa fait également observer que ces données lui ont permis de développer deux programmes spécifiques de gestion des fraudes, à savoir le [les détails de la prévention des fraudes technologie], qui sont décrits en détail dans le règlement intérieur régional de Visa Europe.
271) Il y a lieu de noter que, même si certains aspects particuliers de la prévention des fraudes peuvent être considérés comme spécifiques aux systèmes de cartes, la fraude liée aux cartes de paiement est une préoccupation commune à l'ensemble des activités économiques.
272) Eu égard aux mesures de la prévention des fraudes qui sont propres à Visa, Morgan Stanley aurait à les appliquer si elle s'engageait dans une activité de façade (257). En outre, les données collectées à cet égard par cette société couvrent toute la région UE de Visa. Il s'ensuit qu'elles n'ont qu'une valeur limitée pour Discover, puisque cette société n'exerce pas et n'est pas susceptible de commencer à exercer des activités en Europe. Il en est de même pour les mesures de prévention de la fraude spécifiques à l'Europe qui ont été élaborées par Visa sur la base de ces données. Qui plus est, ces mesures sont reprises dans le règlement intérieur régional de Visa Europe que Morgan Stanley serait tenue de respecter et, a fortiori, de connaître si elle devait exercer des activités d'acquisition dans le cadre d'un accord de façade.
(v) Nouvelles stratégies commerciales en cours d'élaboration
273) Les informations analysées dans les considérants précédents concernent, dans une large mesure, les règles et les normes établies de Visa. En plus de cela, Visa fait référence à une autre catégorie d'informations - des informations concernant les nouveaux produits ou les nouvelles stratégies commerciales qui sont en cours d'élaboration par Visa - dont la divulgation à Morgan Stanley pourrait porter préjudice à Visa. En particulier, Visa allègue qu'elle serait moins motivée à innover si Morgan Stanley devait avoir accès à ces informations.
274) Selon Visa, des stratégiques spécifiques sont mises à l'épreuve dans le cadre d'une [l'information sur les initiatives spécifiques du Visa] (258). Il découle de cette explication que Visa pourrait empêcher Morgan Stanley d'avoir accès à ces informations simplement en l'excluant des [l'information sur les initiatives spécifiques du Visa]. Alors que les banques affiliées ont besoin de connaître les règles Visa établies pour pouvoir les respecter et les appliquer dans le cadre de leurs activités, la connaissance des informations relatives aux produits ou aux stratégies commerciales en cours d'élaboration n'est pas indispensable pour exercer des activités d'émission et/ou d'acquisition. Sur cette base, et même en admettant que les informations relatives aux innovations en cours présentent un quelconque intérêt pour le réseau Discover (compte tenu des différences géographiques et des modèles d'entreprises différents), l'exclusion de Morgan Stanley du réseau Visa pour des motifs de confidentialité et de risque de "free-riding" ou parasitisme ne se justifie pas, car Visa pourrait prendre des mesures pour empêcher Morgan Stanley d'avoir accès à ces informations, ce qu'elle a fini par faire dans le cadre de l'accord de règlement du 21 septembre 2006.
(vi) Conclusion
275) La thèse de Visa concernant le danger allégué de voir Morgan Stanley accéder à une information confidentielle pour Visa n'est donc pas recevable.
276) L'analyse des différentes catégories d'information que Morgan Stanley pourrait, aux dires de Visa, utiliser au profit du système Discover, montre que :
soit Morgan Stanley aurait accès à ces informations si cette société devait exercer des activités d'acquisition dans le cadre d'un accord de façade ;
soit il s'agit d'informations spécifiques à la région "Europe" de Visa, qui ne présentent donc pas d'intérêt pour Discover aux États-Unis, ou d'informations qui sont devenues des normes sectorielles ;
à supposer que les informations relatives aux nouveaux produits et aux nouvelles stratégies commerciales de Visa qui sont en cours d'élaboration en Europe puissent intéresser Discover aux États-Unis (compte tenu des différences géographiques et des modèles d'entreprises différents), Visa pourrait préserver ses intérêts en utilisant les dispositions existantes pour restreindre l'accès de Morgan Stanley à ces informations ; et
l'admission de Morgan Stanley à la qualité de membre de Visa infirme la thèse de Visa, car des dispositions telles que celles évoquées ci-avant ont effectivement été mises en place (259).
5.3.3.3.2. Autres avantages (données de transactions, de commerçants et de titulaires)
277) Visa fait valoir que Morgan Stanley pourrait utiliser les informations acquises en sa qualité de membre de Visa (les coordonnées des commerçants et des titulaires de cartes et les données relatives aux transactions) comme un tremplin pour lancer Discover dans l'Union européenne, notamment en "détournant" les titulaires de cartes Visa et les commerçants affiliés à Visa vers le système Discover. À l'appui de son argument, Visa invoque la procédure engagée devant le Department of Justice aux États-Unis, dans le cadre de laquelle Morgan Stanley aurait, selon les dires de Visa, affirmé que "it could expand acceptance of Discover through its Visa acquiring business" [elle pourrait amplifier l'affiliation de commerçants à Discover grâce à ses activités d'acquisition au sein du réseau Visa] (260).
278) Comme cela a été démontré précédemment, Morgan Stanley n'est pas susceptible d'étendre le réseau Discover à l'Europe. La stratégie européenne de Morgan Stanley en matière de cartes de paiement vise plutôt à opérer sur les réseaux Visa et MasterCard. Cette simple constatation suffit déjà à rendre infondé l'argument de Visa.
279) De plus, même si Morgan Stanley envisageait d'étendre son réseau Discover en Europe, il est peu probable que les titulaires de cartes et les commerçants passent de Visa à Discover, étant donné que Visa s'impose comme la première marque de cartes de crédit au Royaume-Uni. Le risque de "détournement" allégué par Visa semble dès lors purement théorique (261).
280) S'agissant des observations de Morgan Stanley déposées dans le cadre de la procédure devant le Department of Justice, le mémoire d'amicus curiæ présenté par Discover - auquel Visa fait référence lorsqu'elle cite la déclaration de Morgan Stanley- relève qu'aux États-Unis (comme au Royaume-Uni), les commerçants préfèrent passer un contrat avec une banque qui est en mesure d'offrir un ensemble complet de services d'acquisition, couvrant toutes les principales marques de cartes de crédit (y compris Visa et MasterCard), plutôt qu'une seule carte, telle que Discover. Il s'ensuit que, si Morgan Stanley était en mesure de proposer des cartes Visa et MasterCard, elle pourrait aussi convaincre davantage de commerçants. D'après la source citée comme référence, c'est dans ce contexte qu'il y a lieu de placer l'affirmation de Morgan Stanley selon laquelle son adhésion à Visa l'aiderait dans son activité aux États-Unis. Le mémoire d'amicus curiæ de Discover ne fait nullement référence au "détournement" des titulaires de cartes Visa vers le réseau Discover.
281) Enfin, il convient de noter que les coordonnées des commerçants et des titulaires de cartes que Morgan Stanley pourrait acquérir dans le cadre de ses activités sur le réseau Visa ne sont pas des informations considérées comme confidentielles par Visa. Il s'agit plutôt d'une information qui concerne les relations des banques avec leurs clients. Or, selon certains propos rapportés de Visa, elle n'est aucunement intéressée par les relations que les banques entretiennent avec leurs clients (262). Visa ne dispose pas de règles se rapportant aux relations et données des banques avec leurs clients quant à l'émission de cartes ou à l'acquisition de commerçants.
5.3.3.3.3. Proportionnalité - le contraste dans les approches de Visa et MasterCard face à l'admission de Morgan Stanley
282) Bien que les prétendus risques que l'admission de Morgan Stanley en tant que membre de Visa ferait peser sur le bon fonctionnement du système Visa n'aient pas été établis, la Commission examinera dans la présente section si, dans l'hypothèse où ces risques seraient démontrés, il n'aurait pas existé des moyens moins restrictifs d'y remédier.
283) La confidentialité des informations de Visa auxquelles Morgan Stanley aurait accès en tant que membre pourrait être assurée par des engagements de non-divulgation de la part de Morgan Stanley. Les membres de Visa semblent coutumiers de cette pratique, [les détails du règlement intérieur régional de Visa Europe] (263).
284) On perçoit mal pourquoi cette approche commerciale usuelle des problèmes de confidentialité n'aurait pas pu être suffisante dans le cas de Morgan Stanley, [l'information sur l'adhésion du Morgan Stanley].
285) Morgan Stanley est devenu membre MasterCard au Royaume-Uni en 1999. Comme tout autre membre MasterCard, elle est soumise aux obligations de confidentialité définies dans les règles de MasterCard ainsi que dans un accord de confidentialité standard que tous les membres MasterCard doivent signer. MasterCard confirme qu'elle [...] (264).
286) Les paragraphes ci-dessous (265) fournissent des informations sur les circonstances de l'admission de Morgan Stanley en qualité de membre MasterCard au Royaume-Uni et apportent une preuve supplémentaire que les craintes de Visa quant à l'adhésion de Morgan Stanley- dans l'hypothèse où celles-ci s'avéreraient légitimes (ce qui n'a pas été établi) - auraient pu être apaisées en usant de moyens moins restrictifs que le refus pur et simple d'admettre Morgan Stanley en tant que membre.
287) Constituant toutes deux des systèmes quadripartites ouverts et organisés de façon très similaire, Visa et MasterCard devraient en principe avoir des préoccupations semblables quant à la protection des informations confidentielles. Visa le confirme, du reste, lorsqu'elle déclare que : "Visa, like MasterCard, is a non-profit making organisation, whose members have a common interest (...) in protecting and exploiting the system which they have built up through their investment, contribution and activities (in issuing cards, signing up merchants and contributing to product developments and the like). They have no incentive to put that asset at risk by disclosing their proprietary know-how and competitive strategy to a competitor. There is a common acceptance among members of a system that they need to protect the joint venture of which they are a member." [Comme MasterCard, Visa est une organisation sans but lucratif, dont les membres ont un intérêt commun (...) à protéger et à exploiter le système qu'ils ont créé par leurs investissements, leur contribution et leurs activités (en émettant des cartes, en affiliant des commerçants, en contribuant au développement des produits et en exerçant d'autres activités similaires). Ils ne sont nullement enclins à prendre le risque de compromettre cet atout en divulguant leur savoir-faire confidentiel et leur stratégie concurrentielle à un concurrent. Les membres de ce système s'accordent tous à reconnaître qu'ils doivent protéger l'entreprise commune dont ils font partie] (266).
288) Aux termes du règlement MasterCard, [...]. Comme l'a expliqué Morgan Stanley, celle-ci a également mis en place des procédures internes pour garantir la protection d'informations confidentielles. [l'information sur les obligations de la confidentialité] (267).
289) Bien qu'ils soient comparables en ce qui concerne leur souci de protéger leurs informations confidentielles, les réseaux Visa et MasterCard ont traité la demande d'adhésion de Morgan Stanley au Royaume-Uni de manière différente. Tandis que Visa a platement refusé la demande de Morgan Stanley, en prétextant que ce refus était le seul moyen possible de protéger ses informations confidentielles, MasterCard a admis Morgan Stanley en tant que membre (268), [...].
290) Il semble en réalité que les discussions qui ont eu lieu au sein de MasterCard lorsque Morgan Stanley a introduit sa demande de MasterCard au Royaume-Uni aient porté essentiellement sur la question de [...]. [...] (269). [...] (270).
291) De fait, rien n'indique que l'adhésion de Morgan Stanley à MasterCard ait nui d'une quelconque manière à l'implantation et au bon fonctionnement du réseau MasterCard. Au contraire, il a été démontré à la section 5.3.1.1.4 que la part de MasterCard sur le marché des cartes de crédit au Royaume-Uni a connu une croissance constante.
292) Visa a fait référence au fait que Morgan Stanley s'est vu refuser l'accès au réseau MasterCard aux États-Unis (271). En ce qui concerne le marché américain, MasterCard a expliqué que [...] (272). Comme on l'a dit plus haut (273), MasterCard [...] (274).
293) Il s'ensuit que, même si des raisons légitimes étaient susceptibles de justifier un refus d'accorder à Morgan Stanley une licence d'exploitation MasterCard aux États-Unis et au Canada (affaire qui échappe au champ d'application de la présente décision), la licence octroyée par MasterCard à Morgan Stanley au Royaume-Uni démontre qu'il existe des moyens moins restrictifs de répondre aux problèmes de confidentialité allégués par Visa (mais non prouvés) que le refus catégorique d'octroyer la qualité de membre.
294) Visa prétend être particulièrement vulnérable à la concurrence de réseaux privatifs fermés tels que le réseau Discover. Elle affirme que le chef de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley, qui regroupe les opérations de Discover aux États-Unis et les activités d'émissions de carte MasterCard au Royaume-Uni, aurait pu servir de canal pour la transmission d'informations relatives à Visa de la division britannique des services de crédit de Morgan Stanley à la division américaine des services de crédit de Morgan Stanley, chargée de l'exploitation du réseau Discover.
295) Morgan Stanley a fourni des explications selon lesquelles ses activités de crédit britanniques et américaines ont des structures de direction séparées (275). Les décisions courantes relatives aux activités de cartes de crédit au Royaume-Uni sont prises par la direction britannique. Ce n'est que pour les questions d'orientation stratégique générale que la direction britannique dépend du chef de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley (276). En ce qui concerne l'adhésion de Morgan Stanley à MasterCard, MasterCard confirme que [...] (277).
296) À partir de l'analyse qui précède, on en conclut que des moyens moins restrictifs que le refus total de l'adhésion étaient disponibles pour sauvegarder les objectifs déclarés de l'application de la règle à Morgan Stanley (dont la pertinence n'a pas été établie).
5.3.3.4. Admission de Morgan Stanley non justifiée par un quelconque changement concernant les préoccupations invoquées par Visa durant six ans et demi pour motiver son refus d'octroyer à Morgan Stanley la qualité de membre
297) Le 22 septembre 2006, après plus de six années et demi de refus (278), Visa a accepté Morgan Stanley Bank en tant que membre de Visa Europe (279).
298) Toutefois, le dossier de la Commission ne contient aucun élément donnant à penser qu'il y a eu un changement quelconque dans les causes que Visa a invoquées tout au long de la procédure à l'appui du refus d'admission de Morgan Stanley à Visa Europe, et en particulier pour ce qui est du risque allégué de parasitisme (à savoir, l'abus possible d'informations confidentielles appartenant à Visa dans le but d'en faire profiter le réseau Discover de Morgan Stanley, et l'usage possible par Morgan Stanley de données de contact de commerçants et de titulaires de cartes ainsi que de données de transaction acquises grâce à ses activités sur le réseau Visa afin des utiliser comme "tremplin" pour le lancement du réseau Discover en Europe).
299) En particulier, alors même que, selon les dires de Visa, aucun accord de confidentialité ne pourrait stopper l'abus toujours possible d'informations confidentielles, et que par conséquent elle était fondée à admettre Morgan Stanley en tant que membre de Visa, l'accord de règlement du 21 septembre 2006 prévoit des dispositions de confidentialité (280). Cela démontre que, contrairement à ce que Visa avait prétendu (281), des mesures moins restrictives que l'exclusion pure et simple de Morgan Stanley auraient pu adéquatement répondre aux préoccupations de Visa concernant des actes de parasitisme prenant la forme de l'abus d'informations confidentielles relevant de Visa.
5.3.3.5. La règle en cause a été appliquée à Morgan Stanley jusqu'au moment où celle-ci a été admise en tant que membre de Visa le 22 septembre 2006
300) Comme on l'a mentionné plus haut (282), le [date] 2006 le conseil d'administration de Visa International a adopté des "Criteria for assessment of risk of disloyal competition" [Critères d'évaluation du risque de concurrence déloyale] dans le cadre de la règle en cause dans la présente affaire.
301) Visa présente ces critères d'évaluation comme "a variation of By-Law [numéro du règle] for the Visa Europe Region" [une modification du statut [...], pour la région Visa Europe" selon l'information qu'elle a transmise à la Commission. Il reste que le libellé de la règle n'a pas varié ; il a seulement été complété par les critères d'évaluation (283).[...] (284).
302) Cependant, rien n'indique qu'entre le [date] et le 22 septembre 2006, date de l'admission de Morgan Stanley à la qualité de membre de Visa, ces "critères d'évaluation" aient été pris en compte en ce qui concerne Morgan Stanley. En particulier, le libellé de l'accord de règlement du 21 septembre 2006 prévoyant l'admission de Morgan Stanley au réseau Visa montre que la demande d'adhésion, vieille de six ans, de Morgan Stanley [...] en tenant compte des nouveaux critères d'évaluation. [les détails de l'accord entre Morgan Stanley et Visa].
303) Il s'ensuit que la règle en cause a été appliquée pendant toute la durée de l'infraction, c'est-à-dire jusqu'à ce que Morgan Stanley ait finalement été admise, le 22 septembre 2006, en tant que membre de Visa Europe.
304) Enfin, avant de conclure cette section concernant les actes de restriction de la concurrence commis dans le contexte de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE, la Commission fait remarquer que Visa a avancé un certain nombre d'arguments sans aucune pertinence en l'espère et qui n'appellent donc pas à des réponses particulières de la part de la Commission. Visa note par exemple que la Commission ne se penche pas sur les questions d'émission, qu'elle n'invoque aucune infraction possible au niveau d'activités d'acquisition dans des États membres de l'EEE autres que le Royaume-Uni, et qu'elle n'a pas étudié la position d'American Express. Or, le devoir de la Commission est de veiller à ce que le traité CE et l'accord EEE, notamment en ce qui concerne leurs articles respectifs 81 et 53, ne soient pas enfreints. Cela ne signifie pas qu'il appartient également à la Commission de démontrer que ces dispositions n'ont pas été enfreintes sur des marchés de produits et/ou des marchés géographiques autres que ceux sur lesquels les infractions ont eu lieu, ou par des entreprises non impliquées dans l'infraction.
5.3.4. Compatibilité de l'application par Visa de la règle à Stanley Morgan aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe1, de l'accord EEE : conclusion
305) En résumé des constatations présentées à la section 5.3 et à la lumière de la jurisprudence des tribunaux communautaires, la Commission conclut que l'application de la règle à Morgan Stanley viole l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.
5.4. Effets sur le commerce entre les États membres de l'UE et entre les parties contractantes de l'EEE
306) Selon une jurisprudence constante de la Cour, un accord ou une pratique, pour être susceptible d'affecter le commerce entre États membres, doit, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'il puisse exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres (285). L'effet sur les échanges intracommunautaires résulte en général de la conjonction de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants (286).
307) L'application de la règle :
- a exclu Morgan Stanley - une banque constituée et établie au Royaume-Uni - des activités d'acquisition de cartes Visa dans d'autres États membres de l'EEE dans lesquels elle envisageait d'entrer (287), car les statuts de Visa International et le règlement d'adhésion de Visa Europe sont applicables, entre autres, dans tous les États membres de l'EEE.
- a exclu Morgan Stanley des activités d'acquisition auprès des commerçants du Royaume-Uni non seulement en ce qui concerne les paiements auprès d'eux avec des cartes Visa et MasterCard émises au Royaume-Uni (étant donnée la pratique consistant à lier la vente des services d'acquisition relatifs aux deux cartes (288), dont il a résulté que Morgan Stanley a été exclu de l'acquisition tant des transactions avec des cartes Visa que de celles avec des cartes MasterCard) mais aussi en ce qui concerne les paiement avec des cartes Visa et MasterCard émises dans d'autres États membres de l'EU et de l'AELE ; et
- a exclu Morgan Stanley des activités d'acquisition transfrontalière, sur des cartes Visa émises au Royaume-Uni, auprès de commerçants établis dans d'autres États membres de l'UE et de l'AELE. Comme l'explique la section 4.2, au considérant (63), les règles Visa autorisent les acquéreurs disposant d'un établissement dans un pays de la région Visa UE de proposer des services d'acquisition à des commerçants actifs dans d'autres pays de ladite région, alors même que le plan d'affaires de Morgan Stanley envisageait des activités d'acquisition transfrontalière de ce type.
308) Il découle de ce qui précède que l'application de la règle contenue dans les statuts de Visa International et dans le règlement d'adhésion de Visa Europe à Morgan Stanley a eu un effet sur les échanges commerciaux au sein de l'EEE (y compris entre les États membres de la CE et de l'AELE, voir le paragraphe (72) ci-dessus). Dans la procédure engagée devant la juridiction du Royaume-Uni et liée à l'espèce (289), Visa a reconnu que "its rules affect trade between Member States and thus fall within the jurisdiction of the EC competition rules" [ses règles affectent les échanges commerciaux entre les États membres et relèvent dès lors de la législation de la Communauté européenne en matière de concurrence] (290).
6. APPLICATION DE L'ARTICLE 81, PARAGRAPHE 3, DU TRAITE CE ET DE L'ARTICLE 53, PARAGRAPHE 3, DE L'ACCORD EEE
309) Les accords entre entreprises ou les décisions d'associations d'entreprises qui tombent sous le coup de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE peuvent faire l'objet d'une exemption s'ils satisfont à l'ensemble des quatre conditions exposées à l'article 81, paragraphe 3, du traité CE et à l'article 53, paragraphe 3, de l'accord EEE. Les deux conditions positives requièrent que l'accord ou la décision (a) contribue à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, (b) tout en préservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte. En revanche, les deux conditions négatives prévoient que l'accord ou la décision ne doit pas (c) imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs, et (d) donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.
310) Selon l'article 2 du Règlement n° 1-2003, la charge de la preuve que les conditions de l'article 81 (3) du traité CE sont réunies pèse sur Visa.
6.1. Première condition : pas de gains d'efficacité
311) Aux termes du traité CE (291), c'est l'accord restrictif ou la décision d'une association d'entreprises qui devrait contribuer à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique.
312) La Commission ne conteste pas le fait que Visa, en tant que système, génère raisonnablement des gains d'efficacité, mais elle souligne que l'accord entre entreprises ou la décision d'une association d'entreprises qui est en cause dans la présente décision ne concerne pas le système Visa lui-même, mais la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley. Il s'agit donc de savoir si les dispositions prévues à la section 2.12, point b, des statuts de Visa International, et au paragraphe 3, clause 5 du règlement d'adhésion de Visa Europe Limited, telles qu'elles ont été appliquées à Morgan Stanley, génèrent des gains d'efficacité compensant leurs effets anticoncurrentiels.
313) Visa devrait, d'une part, identifier (c'est-à-dire déterminer la nature spécifique des) les gains d'efficacité générés par la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley (autrement dit, Visa devrait démontrer qu'il existe un lien de cause à effet entre la règle et les gains d'efficacité) et, d'autre part, démontrer comment et quand chacun des gains d'efficacité allégués devrait être obtenu. Afin d'établir que les gains d'efficacité générés compensent leurs effets anticoncurrentiels, Visa devrait déterminer la probabilité et l'ampleur de ces gains (292).
314) En conséquence, les arguments de Visa, sur la base desquels elle conclut que (en tant que système et en tant que société considérée dans son ensemble) elle génère des gains d'efficacité (293), ne démontrent pas que la première condition de l'article 81, paragraphe 3, est remplie en ce qui concerne la règle en cause dans la présente décision.
315) La Commission n'a trouvé aucun élément indiquant que la règle, telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley, a généré ou générerait des effets favorables à la concurrence. Les effets négatifs sur l'offre de services d'acquisition à des commerçants, sur l'innovation au sein du marché de référence et sur Morgan Stanley elle-même n'ont donc pas été compensés par des gains d'efficacité.
316) Visa estime qu'il existe des justifications objectives à l'exclusion de Morgan Stanley au titre de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE. Selon elle, la principale raison pour laquelle la règle et la manière dont elle a été appliquée (qui a eu pour conséquence d'exclure Morgan Stanley) étaient nécessaires, tient au fait qu'il fallait empêcher que Morgan Stanley et d'autres ne livrent à Visa une concurrence déloyale, en la parasitant.
317) Bien que cette observation n'ait pas été formulée par Visa à l'appui de l'argument avancé au sujet de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE, selon lequel l'exclusion de Morgan Stanley était nécessaire pour générer des gains d'efficacité compensant et, partant, justifiant la restriction de la concurrence que cette exclusion a engendrée, la Commission estime qu'il convient de prendre cet argument en considération.
318) En affirmant que la règle et son application (l'exclusion de Morgan Stanley) sont/étaient nécessaires, Visa met essentiellement l'accent sur le risque de parasitisme qui découragerait les banques actuellement membres de Visa d'investir dans le système et, par voie de conséquence, nuirait à l'innovation et aux gains d'efficacité.
319) Cet argument est irrecevable. Comme l'analyse développée à la section 5.3.3.3 supra le montre, il n'existe aucun risque de parasitisme. Cette absence de risque s'explique notamment par le fait que les informations confidentielles dont Visa craint la divulgation seraient sans intérêt pour le réseau Discover de Morgan Stanley (en raison de la spécificité géographique des deux réseaux ou des différences entre les réseaux tripartites et quadripartites) ou seraient, de toute façon, mises à la disposition de Morgan Stanley par un prestataire tiers dans le cadre d'un accord de façade (auquel Visa dit n'avoir aucune objection). Dans la mesure où il n'existe aucun risque de parasitisme, il ne peut pas y avoir de gains d'efficacité générés par un accord qui consiste à éviter un risque prétendu de parasitisme préjudiciable pour Visa.
320) En conséquence, la Commission conclut que la première condition de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE n'est pas remplie.
6.2. Deuxième condition : pas de part équitable des gains d'efficacité aux consommateurs
321) Comme la Commission conclut que la première condition de l'article 81, paragraphe
3, CE n'est pas remplie, la seconde condition du même article ne peut, de même, être remplie : il n'y a pas de gains d'efficacité dont une part équitable pourrait revenir aux consommateurs.
6.3. Troisième condition : pas de caractère indispensable
322) En vertu des lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE, pour que la troisième condition de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE, puisse être satisfaite :
1) l'accord restrictif doit être raisonnablement nécessaire pour réaliser les gains d'efficacité (294);
2) chacune des restrictions de concurrence qui découlent de l'accord doit être raisonnablement nécessaire à la réalisation des gains d'efficacité (295); et
3) l'accord restrictif et les restrictions individuelles doivent permettre de réaliser l'activité en cause plus efficacement que ce n'aurait vraisemblablement été le cas en leur absence (296).
323) Comme mentionné ci-dessus, l'accord/la décision d'une association d'entreprises qui est en cause dans la présente décision ne concerne pas le système Visa lui-même, mais la règle telle qu'elle est appliquée à Morgan Stanley.
324) La troisième condition de l'article 81, paragraphe 3, n'est pas remplie pour trois raisons au moins :
- Premièrement, "une restriction est indispensable si son absence supprimait ou réduisait substantiellement les gains d'efficacité résultant de l'accord" (297). Comme indiqué précédemment (298), les gains d'efficacité allégués sont - selon les propres termes de Visa - générés par le système Visa considéré d'une manière générale et dans sa globalité (299). Comme il n'existe pas de gains d'efficacité qui sont spécifiques (300) à la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley, la règle telle qu'elle a été appliquée à Morgan Stanley n'a pas engendré de gains d'efficacité spécifiques. Plus simplement dit, comme il n'y a pas de gains d'efficacité, la restriction n'était pas indispensable pour réaliser des gains d'efficacité.
- Deuxièmement, Visa a finalement admis Morgan Stanley en tant que membre le 22 septembre 2006 et rien n'indique que l'absence de la restriction depuis le 22 septembre 2006 a éliminé ou sensiblement réduit des gains d'efficacité quelconques, ou a réduit sensiblement la probabilité que de tels gains se réalisent.
- Troisièmement, comme l'analyse développée à la section 5.3.3.3.3. l'a montré, même si l'admission de Morgan Stanley en tant que membre de Visa aurait fait planer une menace sur Visa (ce qui n'est pas le cas étant donné que Morgan Stanley ne peut pas entrer en concurrence avec Visa Europe au niveau inter-marque de la concurrence, comme le montre la section 5.3.2.1 supra), des moyens d'action moins restrictifs qu'un refus de l'adhésion peuvent être envisagés, notamment sous la forme d'engagements de confidentialité. Une approche de ce type avait été adoptée et appliquée avec succès par MasterCard. Comme l'explique le paragraphe (267) ci-dessus, Visa a également décidé d'accepter des engagements de confidentialité en admettant finalement Morgan Stanley à la qualité de membre.
325) En outre, Visa estime que la règle du "caractère indispensable" devrait être appliquée avec clémence à la restriction de la concurrence car une telle restriction ne serait que relativement mineure. L'exclusion pure et simple d'un entrant potentiel tel que Morgan Stanley n'est pas "at most, a relatively minor restriction" [tout au plus, une restriction de la concurrence relativement mineure], comme Visa le soutient pour étayer sa demande de clémence quant à l'application du critère relatif au caractère indispensable. Il s'agit, au contraire, d'une restriction appréciable de la concurrence, comme cela a été démontré à la section 5.3.2. supra.
6.4. Conclusion concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 3, de l'accord EEE
326) En conclusion, Visa n'a pas démontré que la règle en cause satisfait aux trois premières conditions visées à l'article 81, paragraphe 3, du traité CE et à l'article 53, paragraphe 3, de l'accord EEE. Comme les conditions de l'exemption sont cumulatives, il n'est pas nécessaire d'examiner la question de savoir si la quatrième condition de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE et de l'article 53, paragraphe 3, de l'accord EEE sont remplies.
6.5. Destinataire de la décision
327) La règle en vertu de laquelle Morgan Stanley s'est vu refuser le statut de membre de Visa Europe est une règle de Via International (section 2.12 b des statuts de Visa International) et une règle de Visa Europe (Clause 5 du Règlement intérieur de Visa Europe) (301).
328) Visa Europe a été constituée le 1er juillet 2004 (302).
329) Selon les statuts de Visa Europe, "The authority to regulate matters within the EU Region resides exclusively with the Board [of Visa Europe]" [Le pouvoir d'administrer les affaires à l'intérieur de la région UE revient exclusivement au Conseil de direction [de Visa Europe] (303). En particulier, "The Board [of Visa Europe] shall decide, in its sole discretion [...] whether to accept or reject any application for membership of [Visa Europe]" [Le Conseil de direction [de Visa Europe] décide, discrétionnairement, [...] d'accepter ou de rejeter la candidature au statut de membre de [Visa Europe]] (304).
330) Visa a aussi souligné que :
"The International Board [of Visa International] has delegated to the [Visa Europe] Board [i.e. the Board of Visa Europe] the right to manage the activities of the Region and adopt additional rules for [its] Region on certain matters, provided they are consistent with the pertinent rules of Visa International. Broadly, the Regions have responsibility for all intra-regional matters, while the International Board has responsibility for matters with an inter-regional effect. Thus, three key areas in which the International Board has retained competence are international strategy, trademarks and systems interoperability.
[...]
Following incorporation [of Visa Europe] the Board of Visa Europe has the power to determine membership applications in its own right further to its Membership Regulations, albeit in accordance with the Visa International By-Laws."
[Le Conseil de direction international [de Visa International] a délégué au Conseil de direction de [Visa Europe] le droit de gérer les activités de la Région et d'adopter des règles supplémentaires pour [sa] Région sur certaines questions, à la condition qu'elles soient en accord avec les règles pertinentes de Visa International. De manière générale, les Régions sont responsables de toutes les questions intra-régionales, alors que le Conseil de direction international est responsable des questions à effet interrégional. Par conséquent, trois domaines clés dans lesquels le Conseil de direction international a une compétence retenue sont la stratégie internationale, les marques et l'interopérabilité des systèmes.
[...]
A la suite de la constitution de [Visa Europe] le Conseil de direction de Visa Europe a, par un droit qui lui est propre, le pouvoir de décider des candidatures au statut de membre conformément à son règlement intérieur, sous réserve de conformité avec les statuts de Visa International.]
331) Visa a exposé, le 3 décembre 2004, après la constitution de Visa Europe, que "the exclusion of [Morgan Stanley] under Rule 2.12 (b) is [...] a decision of Visa International. At all material times the adoption of and implementation of the Rule were and remain decisions of Visa International. As of 1 July 2004 Visa Europe considers applications pursuant to Clause 5 of its Membership Regulations, but is still bound by the Visa International By-Laws and, specifically, the designation of "competitors" made the reunder." [L'exclusion de [Morgan Stanley] en vertu de la règle 2.12 (b) est [...] une décision de Visa International. L'adoption et l'application de la règle ont toujours été et sont toujours des décisions de Visa International. A compter du 1 juillet 2004 Visa Europe traite les candidatures en vertu de la Clause 5 de son règlement intérieur, mais demeure liée par le statut de Visa International et, spécialement, la désignation comme " concurrent " sur la base de celui-ci.] (305).
332) Tant Visa International que Visa Europe sont parties à (et ont signé) l'accord de règlement du 21 septembre 2006 en vertu duquel Morgan Stanley doit se voir reconnaître le statut de membre de Visa Europe : [les détails de l'accord entre Morgan Stanley et Visa], ce sont à la fois Visa International et Visa Europe qui sont simultanément désignées par le terme de " Visa ".
333) Visa a fait valoir que la demande de Morgan Stanley à être admise comme membre de Visa Europe le 18 septembre 2006 (dans le contexte de l'accord de règlement) a été faite sous la forme d'un formulaire consistant en trois documents : [l'information fourni par Morgan Stanley]. Alors que [l'information fourni par Morgan Stanley] a été conclu et signé par Visa Europe, [l'information fourni par Morgan Stanley] a été conclu et signé par Visa International. (306)
334) Au regard des éléments qui précèdent, la Commission a analysé la question de la responsabilité de l'infraction en distinguant la période jusqu'à la constitution de Visa Europe (période au titre de laquelle il est clair que Visa International est seule responsable de l'infraction, puisque Visa Europe n'existait pas) et la période à compter de la constitution de Visa Europe jusqu'à l'admission de Morgan Stanley.
335) Il peut être conclu à la responsabilité de Visa Europe pour avoir refusé le statut de membre à Morgan Stanley pour la période du 1er juillet 2004 (constitution de Visa Europe) au 22 septembre 2006 (admission de Morgan Stanley) pour les raisons suivantes :
- le refus d'admettre Morgan Stanley - qui a continué après le 1er juillet 2004 - relevait, selon les statuts de Visa Europe, de l'autorité et de la discrétion du Conseil de direction de Visa Europe ;
- Visa Europe est partie à l'accord de règlement qui a prévu que le statut de membre de Visa Europe serait reconnu à Morgan Stanley ; et
- [l'information fourni par Morgan Stanley] déposé par Morgan Stanley comme partie à sa demande d'admission comme membre de Visa Europe est un accord entre Visa Europe et Morgan Stanley.
336) Il peut être conclu à la responsabilité conjointe de Visa International pour avoir refusé la qualité de membre à Morgan Stanley durant la même période (en plus de la période allant du 22 mars 2000 au 30 juin 2004, au titre de laquelle elle est seule responsable) pour les raisons suivantes :
- les statuts de Visa International lient Visa Europe et cette dernière a déclaré qu'elle était spécifiquement liée par la désignation comme " concurrent " faite en vertu de ceux-ci ;
- dès lors que le Conseil de direction de Visa International a délégué à Visa Europe le droit de gérer les activités de la Région, et dès lors que Visa Europe doit se conformer aux statuts et règlement intérieur de Visa International et aux décisions prises en vertu de ces derniers, Visa International pouvait décider libérer Visa Europe de son obligation de se conformer à la désignation de Morgan Stanley comme concurrent (voir le paragraphe 331) ci-dessus) ;
- Visa International est partie à l'accord de règlement qui a prévu que le statut de membre de Visa Europe serait reconnu à Morgan Stanley ; et
- afin de pouvoir devenir un membre de Visa Europe Morgan Stanley a du conclure, comme partie à sa demande d'admission, [l'information fourni par Morgan Stanley] avec Visa International.
337) Visa Europe ne peut prétendre, et ne prétend pas, que la décision de refuser d'admettre Morgan Stanley en tant que membre a été imposée par Visa International de sorte que Visa Europe ne saurait être considérée comme responsable de ce refus. Visa Europe a l'obligation de respecter les articles 81 du traité CE et 53 de l'accord EEE en dépit de toute décision ou autre forme d'autorité allant dans le sens contraire de la part Visa International. Visa Europe ne fournit aucune preuve qu'elle aurait tenté de se conformer aux articles 81 du traité CE et 53 de l'accord EEE en admettant Morgan Stanley, ou d'une quelconque pression exercée par Visa International sur Visa Europe ayant eu pour effet que celle-ci a du refuser, contre son gré, d'admettre Morgan Stanley en tant que membre.
338) Au regard de ce qui précède, la Commission considère que :
- jusqu'au 30 juin 2004 (constitution de Visa Europe le lendemain) Visa International a violé les articles 81 du traité CE et 53 de l'accord EEE ;
- durant la période allant du 1er juillet 2004 au 22 septembre 2006 (admission de Morgan Stanley) Visa Europe et Visa International ont conjointement violé les articles 81 du traité CE et 53 de l'accord EEE.
7. INTERET LEGITIME
339) S'il est vrai qu'il a été mis fin à l'infraction objet de la présente décision, la Commission juge nécessaire d'adopter une décision pour les raisons suivantes :
- Visa continue à nier que son comportement était en infraction de l'article 81, paragraphe 1;
- il est très important, pour le bon fonctionnement du marché unique des paiements, que les pratiques anticoncurrentielles des acteurs sur ce marché ne soient pas tolérées;
- comme l'explique la section 8 infra, la Commission a le pouvoir d'infliger des amendes dans la présente affaire et souhaite le faire. Il est de jurisprudence constante que le pouvoir express d'infliger des amendes entraîne nécessairement un pouvoir de constater une infraction (voir GVL/Commission (307), paragraphe 23, cité au paragraphe 36 de Sumitomo (308)), et que le pouvoir de la Commission d'infliger des amendes n'est aucunement affecté par le fait que la conduite constituant l'infraction a pris fin (voir ACF Chemiefarma (309), paragraphe 175, cité au paragraphe 37 de Sumitomo)
8. AMENDES
340) En vertu de l'article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1-2003, la Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d'entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 81 du traité CE. Pour chaque entreprise et association d'entreprises participant à l'infraction, l'amende n'excède pas 10 % de son chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent.
8.1. La Commission peut infliger des amendes
341) La Commission peut infliger des amendes dans la présente affaire parce que :
l'infraction n'a pris fin que le 22 septembre 2006, c'est-à-dire à l'intérieur de la période de limitation prescrite à l'article 1 du règlement n° 2988-74 (310) (311) ; et
l'immunité d'amende a pris fin à la date d'entrée en vigueur du règlement n° 1-2003 (312). En tout état de cause, Visa ne peut faire valoir une attente légitime d'immunité d'amende pour la période postérieure au 2 août 2004, étant donné que la Commission a clairement déclaré, dans sa communication des griefs datée de cette même date, qu'elle "envisage d'émettre une décision [...] infligeant des amendes au titre de l'article 23, paragraphe 2, point a, du règlement 1-2003"
342) De l'avis de Visa (313), la Commission ne peut imposer d'amendes pour la période postérieure au 1er mai 2004 parce que le retard de la Commission à s'occuper de la notification de Visa et de la plainte de Morgan Stanley est ce qui a occasionné la perte de l'immunité d'amende de Visa en vertu du règlement 17 (314).
343) En réalité, la Commission n'a pas encouru de retard dans l'instruction de cette affaire. La Commission a commencé à instruire l'affaire bien avant le 1er mai 2004 afin de préparer la communication des griefs signifiée à Visa le 2 août 2004. Cela est attesté en particulier par les demandes d'information qui ont été envoyées à Visa (315) et aux commerçants (316). En outre, l'infraction de Visa a perduré au moins deux ans après la délivrance de la communication des griefs, qui exprimait l'intention de la Commission d'infliger des amendes à Visa. Pour cette raison, l'argument de Visa ne tient pas.
8.2. Durée de l'infraction
8.2.1. Date du début de l'infraction
344) En mars 2000, Morgan Stanley à écrit à Visa à deux occasions. À la première de ces occasions, le 1er mars 2000, Morgan Stanley à écrit à Visa International pour demander la qualité de membre de Visa et pour inviter Visa à bien faire comprendre que Morgan Stanley n'était pas exclue de l'adhésion à Visa au Royaume-Uni (317). À la seconde occasion, le 13 mars 2000, Morgan Stanley a écrit à Visa UK pour lui demander de lui envoyer un formulaire de demande d'adhésion (318).
345) Bien que ces deux lettres soient restées sans réponse, Visa informa Morgan Stanley oralement le 22 mars 2000 qu'elle n'était pas éligible à la qualité de membre de Visa et que Visa entendait ne pas lui remettre un formulaire de demande d'adhésion (319). Depuis cette date, Visa se refusa à admettre Morgan Stanley en tant que membre de son réseau. Le 18 août 2000, Visa a confirmé à la Commission que Morgan Stanley n'était pas éligible à la qualité de membre de Visa (320).
346) En retenant ce qui précède, il y a lieu de fixer la date du début de l'infraction au 22 mars 2000.
8.2.2. Date de cessation de l'infraction
347) Le [date] 2006, le conseil d'administration de Visa International a adopté des "critères pour l'évaluation du risque de concurrence déloyale" dans le cadre de la règle en cause dans la présente affaire (321).
348) Cependant, comme l'expliquent les sections 5.3.3.4 et 5.3.3.5 ci-dessus, l'exclusion de Morgan Stanley de la qualité de membre Visa s'est poursuivie jusqu'au 22 septembre 2006. Si l'admission de Morgan Stanley a eu lieu, ce n'est pas grâce à un réexamen par Visa de la demande d'adhésion de Morgan Stanley, [les détails de l'accord entre Morgan Stanley et Visa].
8.2.3. Conclusion concernant la durée de l'infraction
349) Bien que l'infraction a duré six ans et six mois (du 22 mars 2000 (322) jusqu'à l'admission de Morgan Stanley comme membre de Visa le 22 septembre 2006), aux fins de calculer le montant de l'amende, la période à prendre en compte est celle qui s'est écoulée entre le 2 août 2004, date de la communication des griefs (voir le paragraphe (296) ci-dessus) et le 22 septembre 2006.
8.3. Le montant de l'infraction
350) La méthodologie définie dans les lignes directrices de 1998 pour le calcul des amendes (lignes directrices de 1998 sur les amendes (323)) est applicable à la présente affaire puisque la Communication des griefs a été notifiée le 2 août 2004 (324).
351) Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération toutes les circonstances pertinentes et particulièrement la gravité et la durée de l'infraction. De plus, l'amende infligée doit refléter toutes circonstances aggravantes ou atténuantes.
8.3.1. Montant de base de l'infraction
352) Le montant de base de l'infraction est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction.
8.3.1.1. Gravité
353) En évaluant la gravité de l'infraction, la Commission tient compte de sa nature, de son impact effectif sur le marché - lorsque cet impact peut être mesuré - et de la taille du marché géographique pertinent.
8.3.1.1.1. Nature de l'infraction
354) Visa a refusé de reconnaître à Morgan Stanley Bank International Limited le statut de membre Visa Europe Limited. De la sorte, Visa a empêché Morgan Stanley d'acquérir des commerçants (c'est-à-dire de conclure avec des commerçants des contrats d'affiliation permettant à ces derniers d'accepter les paiements par carte) non seulement en ce qui concerne Visa mais aussi - du fait que les commerçants du Royaume-Uni demandent que les contrats d'affiliation leur soient toujours proposés par les banques acquéreurs et pour les cartes Visa et pour les cartes MasterCard - en ce qui concerne les cartes de crédit et de débit différé en général (325).
355) Ce type d'infraction à l'article 81 ne tombe pas dans la catégorie des infractions généralement considérées comme très sérieuses ("cartels de prix" et de quotas de répartition des marchés) il est expliqué plus loin, l'infraction ne tombe pas non plus dans la catégorie des infractions mineures au regard de son impact sur le marché et de la taille du marché géographique pertinent.
356) Par sa nature cette infraction est donc sérieuse.
8.3.1.1.2. Impact effectif de l'infraction sur le marché
357) Bien qu'il ne soit pas possible de mesurer précisément l'impact effectif sur le marché, la décision excluant Morgan Stanley a été mise en œuvre et il est donc raisonnable de tenir pour probable que l'infraction a eu un grand impact sur le marché.
358) La marque Visa est la marque de carte de crédit et de carte de débit déféré la plus répandue du Royaume-Uni, et l'exclusion d'une entreprise de la qualité de membre de Visa entraîne l'exclusion de cette entreprise de toute activité d'acquisition de transactions par cartes de crédit et cartes de débit différé sur le marché britannique de l'acquisition (c'est-à-dire, relatif à la totalité des marques de cartes de crédit et cartes de débit différé) (326).
359) Il s'ensuit qu'en n'admettant pas Morgan Stanley à la qualité de membre de Visa Europe, Visa a empêché Morgan Stanley d'affilier des commerçants, c'est-à-dire de conclure avec eux des contrats devant leur permettre d'accepter des cartes de crédit et de débit différé.
360) Comme l'explique la section 5.3.2 supra :
- il y a toujours des perspectives pour la concurrence sur le marché britannique de l'acquisition (327) ;
- en revanche, le nombre d'acquéreurs potentiels efficaces au Royaume-Uni est extrêmement bas (328)
- l'entrée de Morgan Stanley à une date plus ancienne aurait pu avoir un impact positif aussi bien sur le prix que sur la qualité des services d'acquisition, et aurait conduit à une concurrence intramarque plus efficace (329) ;
- Morgan Stanley est un acquéreur potentiel particulièrement bien qualifié en raison de sa longue expérience (dans l'affiliation et le traitement de commerçants aux États-Unis, l'exploitation de réseaux quadriparties via ses activités d'émission de cartes MasterCard au Royaume-Uni, ainsi que dans l'usage de la technologie Chip and PIN au Royaume-Uni).
361) Outre qu'il a fait obstacle à la prestation par Morgan Stanley de services d'acquisition sur le marché britannique, le comportement de Visa a également fait obstacle au marché plus efficace et concurrentiel de l'affiliation de commerçants que Morgan Stanley aurait pu contribuer à réaliser.
8.3.1.1.3. Taille du marché géographique pertinent
362) Dans la présente affaire, comme l'explique le paragraphe (68) supra, la Commission considère que le marché géographique de référence est limité au territoire du Royaume-Uni. Étant donné que le Royaume-Uni constitue un marché majeur pour les cartes de paiement, le comportement de Visa a eu des effets restrictifs de concurrence sur un important marché pour l'acquisition de cartes de crédit et de débit différé dans l'EEE (330).
8.3.1.1.4. Conclusion sur la gravité
363) Pour les raisons qui précèdent, la Commission est d'avis que l'infraction doit être qualifiée de sérieuse, et fixe le point de départ de l'amende à 8 500 000 euro.
8.3.1.2. Majoration du fait de la durée de l'infraction
364) La période en question, qui est de deux ans, un mois et vingt jours, correspond, dans la pratique de la Commission, à une infraction de durée moyenne. Les infractions de durée moyenne sont en général des infractions qui durent de un à cinq ans. Dans le cas d'infractions de durée moyenne, la Commission applique une majoration, pouvant aller jusqu'à 50 % du montant déterminé sur la base de la gravité de l'infraction. En l'espèce, le point de départ de l'amende est relevé de 20 %.
8.3.1.3. Détermination du montant de base
365) Compte tenu des considérations qui précèdent, la Commission fixe le montant de base de l'amende à 10 200 000 euro.
8.3.2. Circonstances aggravantes et atténuantes
366) Dans la présente affaire, il n'y a pas de circonstances aggravantes.
367) Visa invoque (331) les circonstances atténuantes suivantes :
(i) la règle telle qu'appliquée à Morgan Stanley n'est pas un "cartels de prix", un quota de répartition des marchés, ou une clause appartenant à la liste noire (" black-listed clause "). Elle ne constituerait qu'une infraction mineure parce qu'elle n'aurait que des effets mineurs sur le marché et les consommateurs finaux ;
(ii) l'infraction serait limitée au Royaume-Uni ;
(iii) dans la présente affaire la Commission ne devrait pas " faire de Visa un exemple " à des fins dissuasives ;
(iv) la croyance de bonne de foi de Visa que la règle était justifiée constituerait un facteur atténuant ;
(v) Visa a toujours et continuellement coopéré loyalement avec la Commission dans ce qui a trait à la concurrence depuis 1977.
368) A titre de remarque préliminaire générale sur d'éventuelles circonstances atténuantes, la Commission souhaite rappeler que Visa n'a pas mis fin à l'infraction avant le 22 septembre 2006, c'est-à-dire plus de deux ans après la Communication des griefs du 2 août 2004.
369) De plus, la Commission ne considère aucun de ces éléments comme valable pour les raisons suivantes :
(i) conformément aux lignes directrices de 1998 sur les amendes, le fait que l'infraction en cause ne soit pas un "cartels de prix" ou un quota de répartition des marchés et ne puisse donc être qualifiée de très grave ne saurait être considéré comme une circonstance atténuante. La Commission a précisément pris en compte la nature de l'infraction - entre autres facteurs - pour qualifier l'infraction de grave;
(ii) à supposer que les effets de l'infraction se limitent strictement au Royaume-Uni - ce qui n'est pas certain dès lors que Morgan Stanley est également intéressée à entrer dans d'autres marchés domestiques de l'acquisition dans d'autres Etats membres et dans l'acquisition transfrontalière (332) - la Commission considère que le comportement de Visa a eu un grand impact sur le marché dès lors que le Royaume-Uni est un marché majeur pour les cartes de paiement. En tout état de cause, une limitation de l'infraction au Royaume-Uni ne constitue pas une circonstance atténuante mais, là encore, l'un des éléments pris en compte par la Commission pour définir la gravité de l'infraction;
(iii) l'absence alléguée d'une nécessité de " faire un exemple " à des fins dissuasives n'est pas un comportement attribuable à Visa pouvant être considéré comme une circonstance atténuante;
(iv) la prétendue croyance de bonne foi de Visa que la règle est justifiée ne saurait être considérée comme une circonstance atténuante car l'objet de la présente affaire n'est pas la règle en elle-même mais son application à Morgan Stanley. Visa ne saurait prétendre non plus qu'elle croyait de bonne foi que l'application de la règle à Morgan Stanley était justifiée puisqu'elle a continué à refuser d'admettre Morgan Stanley en tant que membre plus de quatre ans après que la Commission eut notifié sa Communication des griefs;
(v) la coopération de Visa avec la Commission n'est pas suffisante pour être considérée comme une circonstance atténuante dans une affaire où Visa n'a pas mis à l'infraction dès que la Commission est intervenue.
8.3.3. Conclusion concernant le montant de l'amende
370) En l'absence de circonstances aggravantes ou atténuantes, le montant de l'amende à infliger pour l'infraction visée dans la présente Décision est de 10 200 000 euro.
A arrêté la présente décision :
Article premier
Visa International Service Association et Visa Europe Limited ont violé - la première durant la période allant du 22 mars 2000 au 22 septembre 2006, et la second de sa création le 1er juillet 2004 au 22 septembre 2006 - l'article 81, paragraphe 1, du traité CE et l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, en refusant le statut de membre de Visa à Morgan Stanley Bank International Limited (anciennement Morgan Stanley Dean Witter Bank Limited).
Article 2
Pour l'infraction mentionnée à l'article 1er, une amende de 10 200 000 euro est infligée conjointement et solidairement à Visa International Service Association et à Visa Europe Limited.
Article 3
L'amende infligée à l'article 2 est à payer en euro dans un délai de trois mois à compter de la date de notification de la présente Décision sur le compte bancaire suivant:
N° de compte: 001-3953713-69 de la Commission des Communautés européennes auprès de Fortis Bank S.A. Rue Montagne du Parc, 3 B-1000 Bruxelles Code IBAN: BE71 0013 9537 1369 Code SWIFT: GEBABEBB
A l'expiration de ce délai, des intérêts seront automatiquement dus au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement le premier jour du mois au cours duquel la présente décision a été adoptée, majoré de 3,5 points de pourcentage.
Article 4
Visa International Service Association 900 Metro Center Boulevard Foster City, CA 94404 États-Unis
VISA Europe Nr 1, Sheldon Square London W26WH Royaume-Uni
sont destinataires de la présente décision.
La présente décision forme titre exécutoire en vertu de l'article 256 du traité.
Notes :
1 JO L 1 du 4.1.2003, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 411-2004 (JO L 68 du 6.3.2004, p. 1).
2 JO L 123 du 27.4.2004, p. 18.
3 Réunions du comité consultatif des 17 et 28 septembre 2007.
4 Plainte, p. 3 (cote 460).
5 Ibid.
6 Le réseau Discover/Novus a été établi aux États-Unis par Sears en 1985, mais devint par la suite une division de Dean Witter, Discover & Co, (la Plainte, p. 3), (cote 460).
7 Observations de Morgan Stanley du 18 septembre 2000, p. 2 (cote 840) et du 20 janvier 2003, p. 8 (cote 3146).
8 Observation de Morgan Stanley du 18 septembre 2000, p. 2 (cote 840). Voir également le témoignage du Directeur principal de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley devant la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles, le 17 janvier 2001, p. 5 (cote 1689).
9 Observations de Morgan Stanley du 18 septembre 2000, p. 3 (cote 841), et du 11 décembre 2000, p. 4 et 11 (cotes 1562 et 1569).
10 Témoignage du Directeur principal de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley devant la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles, du 17 janvier 2001, p. 5 (cote 1689). En 2004, la Morgan Stanley Dean Witter Bank Limited a changé de dénomination sociale et est devenue la Morgan Stanley International Limited.
11 Lettre de Visa à la Commission du 27 novembre 2006 (cotes 12328-12344).
12 Ibid
13 Comme Morgan Stanley le fait remarquer à la page 5 de son plan stratégique (cotes 10768-10769), contenu dans les observations de Morgan Stanley du 18 septembre 2000, à la page 8 (cote 846).
14 Section 2.3, p. 4 de la plainte (cote 461).
15 Déclaration du Directeur principal de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley du 20 mai 2005, paragraphes 10 et 13 (cotes 10975-10976). Voir également la présentation de Morgan Stanley pour l'audition (annexe 57 à la lettre d'exposition des faits, cotes 10081-10130) qui maintes fois fait référence à la mise en place d'une "activité d'émission et d'acquisition intégrée".
16 Déclaration d'un dirigeant de l'activité cartes de crédit de Morgan Stanley au Royaume-Uni (Consumer Banking Group International), du 20 mai 2005, paragraphe 7, p. 4 (cote 10947).
17 Déclaration d'un Dirigeant de l'activité cartes de crédit de Morgan Stanley au Royaume-Uni (Consumer Banking Group International), du 20 mai 2005, paragraphe 6, p. 3 (cote 10946).
18 La plainte, p.1 (cote 458).
19 Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphe 101 (cote 8471).
20 Communiqué de presse de Visa du 1er juillet 2004 (www.visaeurope.com/pressandmedia/press193_pressreleases .html consulté en juillet 2004) (cote 7204).
21 Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphe 106 (cote 8473).
22 Avec l'élargissement de l'Union européenne en mai 2004 et en janvier 2007, dix nouveaux États membres de l'Union européenne ont été transférés de la région Visa CEMEA à la région Visa Europe (Malte et Chypre avaient déjà été inclus dans la région Visa Europe avant leur accession à l'UE).
23 Statuts de Visa International et mandats des conseils d'administration régionaux du 15 mai 2004, p. 2 à 15, section I, partie A (cote 460).
24 Avant la constitution de Visa Europe en société, toute adhésion à Visa devait, au sens strict du terme, être interprétée comme une adhésion à Visa International.
25 "The authority to regulate matters within the EU Region resides exclusively with the Board [...]" [Le pouvoir de réglementer toutes questions au sein de la région UE appartient exclusivement au Conseil d'administration ]" (Article 89.2 des statuts de Visa Europe) (cote 7960).
26 "The Board [of Visa Europe] shall decide, in its sole discretion [...] whether to accept or reject any application for membership of [Visa Europe]" ; "[...] the Board [of Visa Europe] shall be authorised to establish polities and promulgate rules and regulations regarding the administration (including, but not limited to, the [...] conditions of membership [...] of any organisation headquartered in the EU Region), operation and development of Visa International's programmes within the EU Region [...]" (Articles 4.1 et 88 des statuts de Visa Europe) [Le conseil d'administration (de Visa Europe) dispose du pouvoir discrétionnaire [...] d'accepter ou de refuser toute admission à [Visa Europe]" ; "[...] Le conseil d'administration (de Visa Europe) est habilité à établir des politiques et à édicter des règles et règlements concernant l'administration (relative, mais non exclusivement, aux [...] conditions d'admission à la qualité de membre [...] de toute organisation qui a son siège dans la région UE), l'exploitation et le développement des programmes de Visa International dans la région UE [...] (Articles 4.1 (cote 7938) et 88 (cote 7959) des statuts de Visa Europe).
27 "Following incorporation, the Board of Visa Europe has the power to determine membership applications in its own right further to its Membership Regulations, albeit in accordance with the Visa International By- Laws" [Une fois la société constituée, le conseil d'administration de Visa Europe a la faculté de déterminer de plein droit la suite à donner aux demandes d'adhésion, mais ce en conformité avec les statuts de Visa International ] (Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphe 107, p.33) (cote 8473).
28 Observations de Visa du 28 juillet 2000, p. 1 (cote 563).
29 Ibid., p. 1 et 3 (cotes 563 et 565).
30 Ibid., p. 1 (cote 563).
31 Ibid., p. 2 (cote 564).
32 Observation de Visa du 3 décembre 2004, point 148 (cote 8483).
33 [les détails d'accord enter Visa et Morgan Stanley].
34 [les détails d'obligations venant du Visa statut et son règlement intérieur].
35 Lettre du 12 décembre 2006. [les détails des décisions de le comité exécutif du conseil d'administration de Visa International et Visa Europe concernant le Visa statut et son règlement intérieur].
36 Lettre du 12 décembre 2006 (cote 12421-12432).
37 Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphe 382, p. 121 (cote 8561).
38 [communication entre Morgan Stanley et Visa concernant son d'adhésion].
39 Accord de règlement entre Visa et Morgan Stanley du 21 septembre 2006, p. 3 (cote 12243).
40 Accord de règlement entre Visa et Morgan Stanley du 21 septembre 2006, p. 4 (cote 12244).
41 Accord de règlement entre Visa et Morgan Stanley du 21 septembre 2006, p. 4 (cote 12244).
42 Dans sa plainte à la Commission aux termes des articles 81 et 82 du traité CE (p. 2) (cote 459), Morgan Stanley demande à la Commission : "to take all necessary steps and to exercise its powers pursuant to Regulation 17-1962 to prevent Visa from maintaining and applying [the anti-competitive terms of Visa's membership rules in the EEA, as set out in its By-Laws and Operating Regulations] in such a way as to exclude MSDW from Visa membership, to ensure that Visa applies its membership criteria in a fair, transparent, proportionate and non-discriminatory manner and to enjoin Visa from enacting any new rules which have the object or effect of excluding MSDW from its membership" [de prendre toutes les mesures nécessaires et d'user des pouvoirs qui lui sont conférés aux termes du règlement n° 17-1962, pour empêcher Visa de maintenir et d'appliquer, [dans l'EEE, les conditions anticoncurrentielles des règles d'adhésion de Visa définies dans ses statuts et dans son règlement intérieur], en vue d'exclure MSDW du réseau Visa; de veiller à ce que Visa applique ses critères d'adhésion de manière équitable, transparente, proportionnée et non discriminatoire; et d'interdire à Visa d'adopter toutes nouvelles règles ayant pour objet ou pour effet d'exclure MSDW en tant que membre].
43 Aux termes des articles 81 et 82 du traité CE et des dispositions correspondants de la loi britannique sur la concurrence.
44 Observation de Morgan Stanley du 20 octobre 2000 (cotes 909-933).
45 Minute de l'ordonnance de la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles du 2 mai 2001 (jointe à la lettre du Juge Toulson du 19 juillet 2001 à la Commission) (cotes 2049-2051).
46 Les 1 et 2 septembre 2004. Un nouvel accès au dossier a été accordé le 19 novembre et le 17 décembre 2004.
47 Règlement (CE) n° 773-2004 de la Commission du 7 avril 2004 relatif à la conduite de procédures par la Commission au titre des articles 81 et 82 du traité CE, JO L123 du 27.4.2004, p. 18.
48 Communiqué de presse de Stanley Morgan du 1er mai 2005 diffusé sur leur site web (cotes 10276-10277): http ://www.morganstanley.com/cgi-bin/morganstanley.com/pressroom.cgi?action=load&uid=405
49 Lettre des avocats de Visa à la Commission du 27 septembre 2006 (cote 12190).
50 Lettre de Morgan Stanley à la Commission du 22 septembre 2006 (cote 12188).
51 Ces services incluent l'acheminement des autorisations, la conversion monétaire, les opérations de compensation, la gestion des risques et l'habilitation en matière de règlement, de même que la création et la gestion de la marque du réseau et des marques y associées, le développement de produits et l'élaboration de règles couvrant les divers aspects de l'exploitation du réseau, y compris des dispositions régissant l'adhésion au réseau.
52 Décision de la Commission du 9 août 2001, considérant 34 (JO L 293 du 10.11.2001, p. 24) et décision de la Commission du 24 juillet 2002, considérant 43 (JO L 318 du 22.11.2002, p. 17).
53 Décision de la Commission du 24 juillet 2002, considérant 45 (JO L 318 du 22.11.2002, p. 17).
54 Dans ses décisions précédentes concernant diverses autres règles édictées par Visa, la Commission a mis en exergue la distinction existante entre les marchés en aval de l'émission et de l'acquisition (voir les décisions de la Commission du 9 août 2001 (JO L 293 du 10.11.2001, p. 24) et du 24 juillet 2002 (JO L 318 du 22.11.2002, p. 17). Deux affaires relatives à des fusions entre banques ont également considéré le marché de l'émission et celui de l'acquisition comme deux marchés de produits distincts, bien qu'économiquement liés (affaire COMP/M.23980, FöreningsSparbanken/SEB, et affaire COMP/M.2567, Nordbanken/Postgirot).
55 Décisions communiquées à Visa International (Décision de la Commission du 9 août 2001, JO L 293 du 10.11.2001, p. 24, paragraphe 38 et décision de la Commission du 24 juillet 2002, JO L 318 du 22.11.2002, p. 17, paragraphe 49).
56 Voir les réponses des commerçants (petits et grands) interrogés par la Commission aux questions 6 et 19 des questionnaires de la Commission (du 20.01.03 aux commerçants importants et des 14.03.03 et 15.05.03 aux petits commerçants) (cotes 3477-5361).
57 Voir aussi la décision de la Commission du 24 juillet 2002, considérant 48 (JO L 318 du 22.11.2002, p. 17).
58 Les cartes de crédit et de débit différé d'un côté, et les cartes de débit de l'autre côté, présentent des caractéristiques différentes. Alors que sur les paiements par cartes de débit, les frais imputés aux commerçants britanniques sont calculés à partir d'une redevance fixe par transaction ("x pence par transaction"), sur les paiements par cartes de crédit et de débit différé, ils sont calculés à partir de la valeur des transactions ("x % de la valeur de la transaction"). Alors que les achats effectués à l'aide d'une carte de crédit sont débités immédiatement du compte courant du titulaire, les cartes de crédit/de débit différé sont assorties d'une facilité de paiement différé autorisant le titulaire de financer ses achats à partir de fonds empruntés et portés au débit d'un compte séparé de carte de crédit. La possibilité d'emprunter de l'argent au moyen de cartes de crédit/de débit différé constitue la caractéristique clé qui les distingue des cartes de débit et détermine leur usage par les titulaires. En outre, les frais imputés aux détaillants britanniques sur les transactions par cartes de crédit/de débit différé sont sensiblement plus élevés que ceux relevant de transactions (de même montant) par cartes de débit. Dans le cas de grands commerçants britanniques, une transaction pour le montant de 36,00 £ donne lieu à des frais de 0,12 % à 0,36 % si le règlement est effectué par carte de débit, et de 1,01 % à 1,2 % s'il est effectué par carte à débit déféré Visa ou MasterCard. En prenant la moyenne des frais imputés aux commerçants, l'acceptation de cartes de crédit/de débit différé Visa et MasterCard leur est plus onéreuse, à raison de 340 % à 550 % environ, que l'acceptation de cartes de débit. En ce qui concerne les petits commerçants britanniques, un détaillant doit acquitter, sur un achat de 36,00 £, des frais situés entre 0,08 £ et 0,35 £ si l'achat est effectué à l'aide d'une carte de débit, et des frais situés entre 0,43 £ et 1,08 £ s'il l'est par carte de débit déféré Visa ou MasterCard. En termes de pourcentage, ces chiffres reviennent à une redevance de 0,22 % à 0,97 % pour une transaction par carte de débit, et à une redevance de 1,2 à 3 % pour une transaction par carte de crédit. La différence de coût devient encore plus prononcée pour les transactions de montant plus élevé. Dans le cas des grands commerçants, une transaction par carte de débit déféré Visa et MasterCard de 55,00 £ s'est avérée plus onéreuse, à raison de 570 à 900 % en moyenne, qu'une transaction équivalente par carte de débit. Dans le cas des petits commerçants, une transaction de 55,00 £ par carte de crédit leur coûte entre 0,66 £ et 1,65 £ (0,92 £ en moyenne), tandis qu'une transaction de même montant leur coûte entre 0,08 £ et 0,35 £ (0,24 £ en moyenne) si elle est réglée par carte de débit. En termes de pourcentage, cela correspond à une redevance de 0,14 à 0,64 % (moyenne de 0,43 %) pour les cartes de débit contre 1,2 % à 3 % (moyenne de 1,67%) pour les cartes de crédit. (La Commission a envoyé des demandes d'information à des échantillons représentatifs de commerçants britanniques les 20 janvier 2003 (grands commerçants) et 14 mars et 15 mai 2003 (petits commerçants) relatives aux valeurs moyennes des transactions par carte de débit et carte de crédit (36,00 £ et 55,00 £ respectivement), en 2002 au Royaume-Uni (cotes 3477-5361).
59 Aucun commerçant n'a répondu en disant qu'il cesserait d'accepter des cartes de crédit si les frais imputés sur toutes les marques de carte de crédit étaient majorés de 5 à 10 %. De manière analogue, tous les commerçants qui ont répondu à l'enquête, à deux exceptions près, ont dit qu'ils ne cesseraient pas d'accepter les cartes de débit si les frais imputés sur toutes les cartes de débit étaient majorés de 5 à 10 % (voir les observations du petit commerçant 10 du 27 mai 2003 et du petit commerçant 12 du 12 juin 2003) (cotes 5327-5336).
60 Tous les commerçants britanniques (acceptant des cartes) contactés par la Commission ont dit accepter tant les cartes de crédit que les cartes de débit. Priés de dire si n'accepter que des cartes de crédit ou que des cartes de débit (aux côtés de l'argent liquide et de chèques) leur paraissait une option viable, tous les commerçants sauf un ont répondu par la négative. L'explication la plus fréquemment avancée était que les clients s'attendent à pouvoir régler leurs achats tant avec la carte de crédit qu'avec la carte de débit. Comme raisons d'accepter respectivement les cartes de crédit et les cartes de débit, la plupart des répondants ont, dans chaque cas, fait état de la demande du consommateur à pouvoir régler leurs achats avec ces cartes. Ces constatations de la Commission sont appuyées par le rapport de l'organisation Retail Banking Research Ltd., "Payment Cards Western Europe 2006" (ci-après : "le rapport RBR") (section consacrée au Royaume-Uni, figure 25, p. 71 (cote 12148)), selon lequel le nombre de points de vente acceptant les cartes de crédit et les cartes de débit Visa de marque Visa Electron était identique en 2004. De l'avis même de Visa (observation du 10 janvier 2003 (cotes 3098-3102), les points de vente qui n'acceptent que des cartes de débit représentent moins de [0-5] pour cent du total des points de vente qui acceptent des cartes Visa au Royaume-Uni, et un pourcentage sensiblement moindre en termes de chiffre d'affaires.
61 Un grand détaillant [pays] ayant décidé depuis peu d'accepter des cartes de crédit a confié ce qui suit : "There were several reasons why we felt we were compelled to change our policy and to accept generic credit cards [in addition to debit cards which were previously accepted], in particular, the demand by our customers and the impact that the non-acceptance of credit cards was having on our business. The development of our online trading operation was also effectively linked to credit card acceptance. It was felt that the acceptance of credit cards was vital to the ongoing success of our business in an increasingly competitive retail market. ... once the decision to accept credit cards was taken, it was recognised that this decision would be very difficult, if not impossible, to reverse" [Plusieurs raisons expliquent que nous nous soyons sentis contraints de changer de politique et d'accepter les cartes de crédit générales (outre les cartes de débit que nous acceptions déjà auparavant). Parmi ces raisons figurent notamment la demande exprimée par nos clients et l'incidence de la non-acceptation des cartes de crédit sur nos activités. De plus, le développement de nos activités de commerce en ligne dépendait, de fait, de l'acceptation de ces cartes. Nous avons donc estimé que, dans le marché de plus en plus concurrentiel de la vente au détail, il était vital pour maintenir le cap de la réussite de notre entreprise que nous acceptions les cartes de crédit. (...) Dès que nous avons pris cette décision, nous avons compris qu'il serait très difficile, voire impossible, de faire marche arrière.] [la source de la citation].
62 En raison des différences sensibles qui existent entre les États membres de l'EEE dans l'organisation de leurs marchés nationaux des cartes de paiement, il se peut que la définition de marché de produit puisse être différente à cet égard sur ces marchés autres que le marché britannique.
63 Au Royaume-Uni, les cartes de crédit/de débit différé représentent 60 % du nombre des cartes de paiement en circulation (99,3 millions sur un total de 166,1 millions), 47 % de la valeur totale des paiements par carte (196 milliards d'euro sur un total de 417 milliards d'euro) et 37 % du volume total des paiements par carte (2,2 milliards sur un total de 5,9 milliards). Presque tous les détaillants qui acceptent les cartes de débit acceptent également les cartes de crédit (Rapport RBR 2006, section consacrée au Royaume-Uni, pp. 1, 53, 55, 57 et 71)
64 Décision de la Commission du 24 juillet 2002 (JO L 318 du 22.11.2002, p. 17), paragraphe 53.
65 Rapport de RBR, 2006, International Overview, p. 32 (cote 12149).
66 Ibid.
67 Ibid.
68 Observations de Visa du 7 février 2003 (cotes 3161-3163bis).
69 Observations de Visa du 16 avril 2004, p. 6 (cote 7175).
70 Ibid.
71 [...].
72 [...].
73 [...].
74 Réponses des banques aux demandes d'information de la Commission sur les banques acquéreurs menées en septembre 2005 et en mai et juin 2006 (cotes 5362-5695) et réponse de Visa du 16 avril 2004 (cotes 7169-7180). Selon la réponse de Visa, fin mars 2004 (p. 7175 du dossier de la Commission), sur un total de 1163 commerçants, les demandes commerçants par secteur commerçant se répartissaient comme suit: restaurants [...]; hôtels [...]; marketing direct [...]; ordinateurs [...]; grand magasins et magasins de prêt à porter [...]; agences de voyages [...]; vente par correspondance [...]; téléphonie [...]; location de voitures [...]; compagnies aériennes [...]; compagnies de croisière [...]; etc.). Le rapport de RBR 2006 (cote 7175) (Cartes de paiement Europe de l'Ouest) souligne par ailleurs que les acquéreurs paneuropéens trient sur le volet les commerçants dans les segments de marché qu'ils jugent les plus adéquats, tels que les compagnies aériennes, les chaînes d'hôtels internationales, les sociétés de location de véhicules et les revendeurs de carburants (section "International Overview", p. 32) (cote 12149).
75 Observations de Visa du 16 avril 2004 (cotes 7169-7180).
76 Voir la section 5.3.1.1.3, paragraphe (83), infra.
77 Association for Payment Clearing Services, c'est-à-dire l'association professionnelle britannique des systèmes de paiement proposés aux clients par les institutions financières.
78 Annexe 42 à la lettre d'exposé des faits du 6 juillet 2006 (cote 12150).
79 Avant la constitution de Visa Europe, son prédécesseur, Région Visa UE, était une division géographique de Visa International et faisait donc partie de cette société.
80 Voir la décision de la Commission du 24 juillet 2002 (Visa International - Multilateral Interchange Fee), JO L 318 du 22.11.2002, p. 17, considérant 55, et la décision de la Commission du 9 août 2001 (Visa International), JO L 293 du 10.11.2001, p. 24, considérant 53. La conclusion de la Commission est étayée par l'arrêt de l'United States Court of Appeal, qui a estimé que Visa USA est un "consortium of competitors" [consortium de concurrents] qui accepte de se soumettre à certaines dispositions restrictives (cf. arrêt de l'United States Court of Appeal for the Second Circuit (cour d'appel du second circuit) dans l'affaire United States of America/Visa USA Inc., Visa International Corp. et MasterCard International Incorporated du 8 mai 2003, p. 20).
81 Voir les réponses à la demande d'information adressée par la Commission à des commerçants (cotes 3477 - 5361).
82 Comme les données exactes concernant les trois réseaux d'importance secondaire du tableau 4 sont confidentielles, il est possible d'obtenir des statistiques publiquement disponibles sur les parts d'Amex et de Diners Club concernant la valeur des transactions au Royaume-Uni en utilisant les données du Western European Plastic Cards Databook (tableau 229, p. 213) selon lesquelles les transactions par Diners Club et Amex se sont respectivement élevées à 1,429 milliards d'euro et 9,062 milliards d'euro en 2002, tandis que celles de Visa et Mastercard se sont respectivement élevées à 74,096 milliards d'euro et 36,678 milliards d'euro. Sur la base de ces chiffres, les parts respectives des quatre réseaux au Royaume-Uni sont de 1,2 % pour Diners Club, 7,5 % pour Amex, 30,2 5 pour MasterCard et 61,1 % pour Visa. La part totalisée de Visa et MasterCard s'élevait à 91,3% en 2002, ce qui est en bonne correspondance avec la part totale Visa et MasterCard de 94 % présentée au tableau 4.
83 Comme les données d'acceptation de la carte JCB recueillies auprès de plusieurs sources n'ont pas pu être conciliées, elles sont exclues de l'analyse dans cette section.
84 Pour plus de détails, voir la section 5.3.1.2 infra.
85 Le rapport RBR, 2006, Royaume-Uni, figure 16 à la p. 55 ( cote 12445).
86 Western European Plastic Cards Database, 2003, tableau 228, à la p. 213 (cote 12448).
87 Ibid, tableau 229, à la p. 213 (cote 12448).
88 Il arrive que des détaillants fassent appel à des acquéreurs différents pour des types de carte différents (à savoir, cartes de crédit et de débit) ou pour différentes branches de leurs activités (par exemple, magasins de détail et stations-service), mais ils ne répartissent pas leur usage de services d'acquisition parmi plusieurs banques pour des marques de carte différentes.
89 "Barriers to Entry into Credit Card Networks in the EEA" by Lexecon Ltd, 11 décembre 2000, §33, p. 11, Annexe 3 aux observations de Morgan Stanley sur les commentaires de Visa du 18 août 2000 sur la plainte, et sur la réponse de Visa du 28 juillet 2000 à la demande d'information du 7 juin 2000 (cotes 1426-1440).
90 Les cinq commerçants mentionnés plus haut n'acceptent des cartes que de l'une des deux marques.
91 Réponses aux demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs de mars 2004 (cotes 6296 - 6837).
92 [...].
93 [...].
94 [...].
95 Recours devant le Tribunal de première instance des communautés européennes en annulation de la décision par la Commission des communautés européennes du 9 août 2001 (affaire n° COMP/29.373 - Visa International) aux termes de l'article 230 du traité CE par First Data Corporation, FDR Limited et First Data Merchant Services Corporation, paragraphes 70 à 71, à la p. 21 ( cotes 12678).
96 [...].
97 Voir les réponses à la demande d'information de la Commission aux banques acquéreurs du Royaume-Uni de mars 2004 (cotes 6296 - 6837).
98 Pour plus d'informations, voir la section 5.3.1.3 infra.
99 Réponses des commerçants grands et petits contactés par la Commission (cotes 3477 - 5361).
100 À la différence de Visa et MasterCard, qui sont parfois appelés des systèmes "quadripartite" pour souligner le fait que l'émission et l'acquisition n'y sont pas assurées par le système même de diffusion de cartes, mais par les banques, membres du système.
101 Chapitre 2, point 10 du règlement intérieur régional de Visa Europe (cote 12443). [...].
102 Paragraphes 326 à 331 (pages 103 à 105) des observations écrites de Visa du 3 décembre 2004 en réponse à la communication des griefs ; paragraphe 22, p. 6, et paragraphes 121 à 128, pages 47 à 49, des observations supplémentaires de Visa, en date du 20 mai 2005, en réponse aux observations de Morgan Stanley des 25 janvier et 15 février 2005 (cotes 10712 et 10213 - 10215).
103 [...].
104 Voir par exemple le témoignage, daté du 20 mai 2005 (paragraphe 5, p. 3) (cote 1046), d'un responsable de la division cartes de crédit de Morgan Stanley au Royaume-Uni (Consumer Banking Group International) : "...we have a market leading rewards programme, where we currently offer up to 2 % Cashback on all purchases. [...] [Nous avons un des programmes de rétribution les plus intéressants du marché : nous offrons actuellement jusqu'à 2 % de remise sur tous les achats. [...] [la stratégie commerciale du Morgan Stanley].
105 [...].
106 Dans une telle situation, si une nouvelle activité d'acquisition lancée par une banque en son nom propre (soit, par Morgan Stanley) introduisait une concurrence nouvelle sur le marché, une nouvelle activité d'acquisition par le biais d'un accord de façade liant un participant sur le marché (Morgan Stanley, en supposant qu'elle pourrait devenir un prestataire tiers) aurait, elle, pour seul effet de remplacer un autre participant (la banque acquéreur).
107 [...].
108 Le Royaume-Uni compte au total huit acquéreurs. Voir le considérant 142 infra.
109 Chapitre [...] du règlement intérieur régional de Visa Europe (cote 12443). L'exemple d'A&L/EuroConex confirme que cette règle de Visa est appliquée dans la pratique : selon un article paru dans le Regulatory News Service du 30 avril 2004 (intitulé "Alliance and Leicester sells its merchant acquisition business to Nova Information Systems" [Alliance & Leicester vend ses activités d'affiliation de commerçants à Nova Information Systems]), les services d'acquisition ont continué à être commercialisés sous la marque A&L après que cette dernière eut vendu ses activités d'acquisition à EuroConex.
110 Chapitre 2.10 du règlement intérieur régional de Visa Europe (cote 12443).
111 Ibid.
112 Ibid.
113 Article intitulé "Processors from Mars, Bankers from Venus" écrit par le directeur de Payment Systems Europe Ltd, et daté du 15 septembre 2004 (annexe 11 des observations de Visa du 3 décembre 2004 - 8820 - 8826-).
114 Lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité, paragraphe 24.
115 Affaires jointes T-374/94 et autres, European Night Services, Recueil 1998, p. II-3141, point 137.
116 Paragraphe 17-18.
117 OJ C 3, 6.1.2001, pp.2-30.
118 Dans l'affaire Eirpage, la Commission a considéré qu'un accord instituant une entreprise commune en Irlande pour établir un service de téléappel interconnecté à l'échelle nationale entre Bord Telecom Eiremann, la société nationale de poste et de télécommunication, et Motorola, un des plus grands fabricants d'équipement de téléphonie mobile, pourrait avoir une effet dissuasif sur des entrants potentiels sur le marché et restreindre en cela la concurrence (décision de la Commission CEE-91-562 du 18 octobre 1991, JO 07.11.1991 L 306/22). Dans l'affaire Screensport/Membres de l'UER, la Commission a considéré qu'une entreprise commune pour établir une chaine de télévision sportive transfrontalière couvrant la majeure partie de l'Europe occidentale violait l'article 81 (1) du fait entre autres de ses effets d'exclusion à l'encontre des tiers (décision de la Commission CEE-91-130 du 19 février 1991, JO 09.03.1991 L 63/32).
119 L'existence d'une concurrence potentielle entre marques est un aspect relevé dans l'analyse sur l'impossibilité pour Morgan Stanley d'entrer concurrence sur le marché (voir paragraphes (108) et (123) ci-dessus).
120 À la fin de cette phrase, le rapport Cruickshank, dans une note de bas de page, fait reference à "deux études sur l'importance des externalités de réseau dans les systèmes de paiement, à savoir "Network Issues and Payment Systems" de James Andrews, Federal Reserve Bank of Philadelphia Business Review, nov./déc. 1997, et "Efficiency in the payment system - a network perspective" de Gabriela Guibourg, Sverige Riksbank Working Paper, 1998" (dossier de la Commission p. 1218).
121 "Competition in UK banking - A report to the Chancellor of the Exchequer - Don Cruickshank - March 2000", publié par The Stationary Office (cote 1206-1282), voir http://www.hm-treasury.gov.uk/documents/financial_services/banking/bankreview/fin_bank_reviewfinal.cfm Voir § 3, paragraphe 3.44 et 3.45, p.65.
122 Voir note de bas de page 89 ci-dessus.
123 Rapport du Pr. John Kay "The Economic Effects of VISA's Exclusion of MSDW" du 4 juillet 2001 communiqué à la Commission européenne, § 3.3.3., p.13 (cote 7744); Présentation du 19 juillet 2001 sur le rapport du 4 juillet 2001 (cote 2015).
124 Rapport du Pr. John Kay du 4 juillet 2001, § 3.1.1. et 4.3.2. - 4.3.4., pp.11 et 18-19 (cote 7742 et 7749- 7750).
125 Arrêt du 15 septembre 1998 dans les affaires jointes T-374-94, T-375-94, T-384-94 et T-388-94, European Night Services c. Commission, [1998] ECR II-3141. (voir notamment les considérants 137, 142 et 144).
126 [la stratégie commerciale].
127 [la stratégie commerciale].
128 [les documents des la stratégie commerciale].
129 [les documents des la stratégie commerciale]
130 [les documents des la stratégie commerciale].
131 [les documents des la stratégie commerciale].
132 [les documents des la stratégie commerciale].
133 [les documents des la stratégie commerciale].
134 [les documents des la stratégie commerciale].
135 [les documents des la stratégie commerciale].
136 [les documents des la stratégie commerciale].
137 [les documents des la stratégie commerciale].
138 [les documents des la stratégie commerciale].
139 Voir la lettre de Morgan Stanley du 20 février 2002, paragraphe 1.5., p. 3 (cote 3044) ou il réfère a 6.8 du plainte (cote 506).
140 Plainte, § 2.4, p.4 (cote 461). Voir aussi les observations de Morgan Stanley du 20 janvier 2003- réponse a question 7, p. 6; cote 3144).
141 Plainte, § 2.3, p.3 (cote 460).
142 Plainte, § 2.3, p.3 (cote 460) et observations de Morgan Stanley du 20 janvier 2003, p. 5 (cote 3144).
143 [les documents des la stratégie commerciale].
144 Plainte, §2.3, p.4 (cote 461). En outré, en réponse à la question de savoir si elle avait envisagé d'étendre à l'EEE le réseau Discover en nouant des contacts avec des groupes de la grande distribution, Morgan Stanley a répondu qu'elle "does not believe that there is any possibility of expanding its Discover network to the UK. [...] In addition, the current barriers to entry into the EEA look even more daunting then they appeared in the US in 1985; and dealing with third parties adds additional difficulties not present with Sears" [ne croit pas qu'il existe une possibilité d'étendre son réseau Discover au Royaume-Uni [...] de plus, la barrières actuelles à l'entrée dans l'EEE sont encore plus décourageantes qu'elles ne l'étaient aux USA en 1985 ; et d'avoir à faire à des tiers ajoute encore des difficultés supplémentaires qui n'existaient pas avec Sears] (souligné par nous; réponse de Morgan Stanley du 20 janvier 2003 à la demande de renseignements de la Commission du 4 décembre 2002 - réponse à la question 7, p.6; cote 3144).
145 "The real ace up Sears' sleeve is its data base on more than 28 million active Sears cardholders. Over the next 17 months, Sears plans to mail pre-approved Discover applications to 26 million USA households, primarily holders of its store card. Although most of the credit lines it will offer will range from $1,400 to $2,200 per household, they would add up to a staggering $35 billion in new revolving credit if everyone accepts the card and uses it to the hilt." [Le véritable atout dans la manche de Sears c'est sa base de 28 millions de porteurs actifs de cartes d'enseigne privatives Sears. Au cours des 17 prochains mois Sears prévoit d'envoyer des formulaires pré-approuvés de souscription à 28 millions de ménages américains, principalement déjà porteurs de sa carte privative. Bien que la plupart des lignes de crédit qu'elle va proposer seront comprises entre 1.400 $ et 2.200 $ par ménage, elles se traduiront par un chiffre cumulé de 35 milliards de dollars en nouveaux crédits permanents si tous acceptent la carte et l'utilise à fond.] ("Mighty Sears tests its clout in credit cards", article de presse du 2 septembre 1985 dans "Business Week"; cote 3125).
146 Voir les observations de Morgan Stanley du 20 janvier 2003, p. 4 (cote 3142).
147 Plainte p. 4 (cote 461).
148 Témoignage, le 25 mai 2000, devant la sous-commission sénatoriale pour les institutions financières, qui dépend de la commission sénatoriale pour les questions bancaires, de logement et urbaines, du président et Chief Executive Officer de Morgan Stanley, pp. 10-12., annexe 55 à la " lettre de faits " du 6 juillet 2006 (cotes 12103 à 12105).
149 Ibid (cote12106).
150 Ibid, p. 12 (cote 12105). Cette section du témoignage est aussi incluse au § 2.3 et à la note de bas de page 3, p.2, de la " Summary of Issues " [résumé des questions en suspend] de Morgan Stanley à la Commission du 26 novembre 2003 (cote 6193).
151 Observations de Morgan Stanley des 20 janvier 2003 (cotes 3137-3157) et 25 janvier 2005 (cotes 9444- 9623).
152 Dans article du 26 avril 1999 dans "Fortune 500" (cotes 2288 à 2295), un article du 2 janvier 2001 dans "American Banker" contenant des citations d'un interview du 26 décembre 2001 (cotes 8712 à 8717), deux courts articles dans "cardline" de 2003 (cotes 8718 à 8719) et un article dans le Financial Times du 29 octobre 2003 (cote 8720); voir Section 4 des observations de Visa du 3 décembre 2004, §§ 170 à 174, pp. 48 à 50 (cotes 8488 à 8490).
153 Voir l'arrêt du Tribunal de Première Instance des Communautés européennes dans l'affaire European Night Services c. Commission, considérants 137, 142 et 144 (arrêt du 15 septembre 1998 dans les affaires jointes T-374-94, T-375-94, T-384-94 et T-388-94, [1998] ECR II-3141).
154 Plus spécifiquement:
- L'article de Fortune 500 (cotes 2288 à 2294), daté du 26 avril 1999, ne contient aucune déclaration de représentants de Morgan Stanley selon laquelle Discover étendrait son réseau à l'Europe. Il se réfère au souhait de Morgan Stanley et du Chief Executive Officer (CEO) de Dean Witter de "take [...] their credit card overseas" [porter [...] ses cartes de crédits outre-mer] (citation de la p. 2 de l'article proprement et non pas d'une déclaration du CEO de Dean Witter, cote 2289). L'article rapporte que "Morgan Stanley's plan, now, therefore, is to take the Discover card abroad" [le plan de Morgan Stanley, maintenant, est de porter la carte de crédit Discover outre-mer], mais ne contient aucune déclaration d'un représentant de Morgan Stanley dans ce sens ;
- Le paragraphe de l'article dans "American Banker" (du 2 janvier 2002) sur lequel Visa s'appuie ("We have slowed down international expansion a bit because we really wanted to focus on growing the United Kingdom and focus on the economic challenges at home with credit quality [...] we certainly intend to go into additional countries, but not in the next few months" [nous avons ralentit un peu l'expansion internationale parce que nous voulons vraiment nous concentrer sur la croissance au Royaume-Uni et nous concentrer sur le défis économiques dans notre pays avec une plus grande qualité du crédit [...] nous avons bien l'intention d'entrer dans d'autres pays, mais pas dans les prochains mois], cote 8715) ne contient aucune référence au réseau Discover. Il fait suite à un paragraphe sur la croissance des cartes de marque Morgan Stanley au Royaume-Uni sur le réseau MasterCard existant. Par conséquent, l'expansion dans de nouveaux pays doit être comprise comme la suite de la croissance actuelle des activités de cartes de Morgan Stanley au Royaume-Uni qui s'appuie sur les réseaux existants tels celui de MasterCard;
- Le premier article de "Cardline" (de 2003, cote 8718) ne fait référence à aucune déclaration de Morgan Stanley en commençant prudemment avec les mots "According to "Cardline" [...]" [Selon Cardline [...]]. Il contient également des indications que l'expansion du réseau Discover en Europe est douteuse: "it may take a while for Discover to truly expand globally"; "Ironically, Morgan Stanley actually decided to issue a MasterCard product in the UK [...] rather than investing in the Discover brand and developing its own acceptance network" [cela pourrait prendre du temps avant que Discover s'étende réellement mondialement. Ironiquement, Morgan Stanley a en fait décidé d'émettre un produit Mastercard au Royaume-Uni [...] plutôt que d'investir dans la marque Discover et de développer son propre réseau d'acceptation];
- Le second article dans "Cardline" (également de 2003, cote 8719) ne fait pas référence à l'expansion du réseau Discover en Europe mais au lancement d'un "credit card business" [d'affaires de cartes de crédits] en Europe et en Asie. Dans ce contexte, lorsque le CEO de Morgan Stanley est cité comme ayant dit : "...when we do expand from the UK (United Kingdom) to other countries..." [... quand nous nous étendrons du Royaume-Uni à d'autres pays], cela ne pouvait à l'époque que faire référence à une expansion des activités de Morgan Stanley au moyen de réseaux appartenant à des tiers puisque Morgan Stanley n'était actif au Royaume-Uni qu'en émettant des cartes MasterCard] ;
- L'article du Financial Times du 29 octobre 2003 (cote 6147) est imprécis et contradictoire. La mention dans cet article de ce que "Asia could be next in line after the launch of a Discover card in a European country" [l'Asie pourrait être la prochaine sur la liste après l'émission d'une carte Discover dans un pays d'Europe] (citation de l'article et non pas du CEO de Morgan Stanley) fait suite à une déclaration de Morgan Stanley selon laquelle elle considérerait une expansion "from the UK" [depuis le Royaume-Uni] et que Morgan Stanley aurait été encouragée par son expérience au Royaume-Uni. Comme dans le second article dans Cardline, l'activité de Morgan Stanley au Royaume-Uni consist en une activité MasterCard d'émettre des cartes sous la marque Morgan Stanley sur le réseau MasterCard: selon l'interprétation la plus raisonnable il faut comprendre que c'est à l'expansion de cette activité qu'il est fait référence dans l'expression "expansion from the UK". De plus, le même article indique à sa fin que le CEO de Morgan Stanley "had been encouraged by the experience in the UK, where Morgan Stanley's card has gained 1m customers since its launch four years ago" [a été encouragé par l'expérience au Royaume-Uni, où la carte Morgan Stanley a gagné 1 million de consommateurs depuis son lancement il y a quatre ans]. Encore une fois, cette carte Morgan Stanley est une carte du réseau MasterCard.
155 Par exemple:
- selon un article du 2 mai 2001 dans "Credit card management" rapportant des déclarations de M. Scott - Président de Morgan Stanley USA - et de M. Nelms - Président et Chief Operating Officer (COO) de Discover Financial Services Inc. (une filiale de Morgan Stanley USA) - ("A year of growth for Discover"; cotes 12679 à 12680): "[...] Discover launched its first international card in September 1999 in the United Kingdom. The U.K. card is issued under the Morgan Stanley name and employs the Europay/MasterCard network for merchant acceptance. Discover is going forward with overseas expansion but it may be "stretched out over a slightly longer period of time," Scott says. Discover is "still focused on entering a number of additional markets in Europe as well as potentially several in Asia," he adds. Nelms says that Discover's growth in the U.K. is "within our expectations," but won't give details. "We're continuing to look at some other markets as well, but primarily the international focus has been in the U.K. because it's the largest market both in volume and loans," he says. [...] ". [Discover a lancé sa première carte internationale en septembre 1999 au Royaume-Uni. La carte au Royaume-Uni est émise sous le nom de Morgan Stanley et utilise le réseau Europay/MasterCard pour l'acceptation auprès des commerçants. Discover va de l'avant avec l'expansion outre-mer mais cela pourrait être " étendu sur une période légèrement plus longue " à dit Scott. Discover " continue de se concentrer sur l'entrée dans un certain nombre de marchés en Europe ainsi que, potentiellement, plusieurs en Asie " ajoute-il. Nelms dit que la croissance de Discover au Royaume-Uni " fait partie de nos attentes " mais ne donne pas davantage de détails. " Nous continuons de regarder également vers d'autres marchés, mais la concentration internationale a été principalement au Royaume-Uni parce qu'il s'agit du plus grand marché tan en volume qu'en prêts " dit-il [...]]. De ce qui précède il est clair que la déclaration que "Discover is going forward with overseas expansion" [Discover va de l'avant avec l'expansion outre-mer] ne concerne pas en fait l'expansion de Discover en tant que réseau mais, bien au contraire, le fait " d'aller de l'avant " s'agissant des activités de Morgan Stanley consistant en l'émission de cartes, en ayant recours à d'autres réseaux tels que Mastercard, comme cela est déjà le cas au Royaume-Uni lorsqu'a été écrit cet article. Même la référence de M. Nelms à "Discover's growth in the UK" [la croissance de Discover au Royaume-Uni] ne fait pas référence à Discover proprement dit, laquelle n'était pas présente au Royaume-Uni;
- selon un article du 22 mars 2001 dans "CardFAX", rapportant une déclaration de M. Scott ("Discover card looking to Asia"; cote 12681): "[...] Speaking to analysts yesterday about Morgan Stanley's first-quarter earnings, Scott said that Discover is "still focused on entering a number of additional markets in Europe as well as potentially several in Asia." He did not elaborate. Discover launched its first international card in September 1999 in the United Kingdom. The U.K. card is issued under the Morgan Stanley name and employs the Europay/MasterCard/Visa network for merchant acceptance. Discover is going forward with overseas expansion even though the economic slowdown in the U.S. may mean that the expansion may be "stretched out over a slightly longer period of time," Scott says. [...]".
[[...] En parlant à des analystes hier des revenus de Morgan Stanley pour le premier trimestre, Scott a dit que Discover "continue de se concentrer sur l'entrée dans un certain nombre de marchés en Europe ainsi que, potentiellement, plusieurs en Asie. Il n'en a pas dit plus. Discover a lancé sa première carte internationale en septembre 1999 au Royaume-Uni. La carte au Royaume-Uni est émise sous le nom de Morgan Stanley et utilise le réseau Europay/MasterCard pour l'acceptation auprès des commerçants. Discover va de l'avant avec l'expansion outre-mer, bien que le ralentissement économique aux Etats-Unis puisse signifier que l'expansion pourrait être " étendue sur une période légèrement plus longue " a dit Scott [...]] Là encore, il ne fait aucun doute que la référence à Discover ne se rapporte pas à l'expansion de Discover en tant que réseau. La phrase "Discover launched its first international card in September 1999 in the United Kingdom" [Discover a lancé sa première carte internationale en septembre 1999 au Royaume-Uni] le démontre clairement puisqu'au Royaume-Uni Morgan Stanley émet des cartes sur le réseau MasterCard.
156 "[Morgan Stanley] constantly elides any distinction between cards issued by [Morgan Stanley] and those issued by Discover. In its annual report, [Morgan Stanley] clearly considers the MSDW [i.e. the Morgan Stanley-branded MasterCard] card as an extension of its credit card business in the US." [[Morgan Stanley] évite toujours de distinguer entre les cartes émises par [Morgan Stanley] et celles émises par Discover. Dans son rapport annuel [Morgan Stanley] considère clairement la carte MSDW [c'est-à-dire une carte MasterCard portent la marque Morgan Stanley] comme une expansion de ses activités de cartes de crédit aux Etats-Unis]. (Cote 8490).
157 Voir les observations de Visa du 3 décembre 2004, §§171 à 173, pp. 48 et 49 (cotes 8488 à 8489), qui fait référence à :
(i) la plainte de Morgan Stanley devant la Commission européenne (cote 460 et suivantes);
(ii) les observations de Morgan Stanley du 11 décembre 2000 sur les commentaires de Visa du 18 août 2000 sur la plainte, et sur la réponse de Visa du 28 juillet 2000 à la demande d'informations de la Commission du 7 juin 2000 (cotes 1558 à 1620);
(iii) la réponse de Morgan Stanley à la demande d'informations de la Commission du 4 décembre 2002 (cotes 3137 à 3157); et (iv) le "Summary of Issues" [résumé des questions en suspend] de Morgan Stanley à la Commission, du 26 novembre 2003 (cote 6193). Visa cite les documents (i), (iii) and (iv) qui précèdent:
- "As the Commission is aware, prior to entering the EEA market [Morgan Stanley] gave consideration to the possibility of extending the Novus network to the EEA but concluded that this was not a viable commercial proposition, given the very substantial entry barriers to establish a new general purpose card network in the EEA, even for an undertaking with [Morgan Stanley's] resources." [Comme la Commission le sait bien, avant d'entrer dans le marché de l'EEE, [Morgan Stanley] a envisage d'étendre son réseau Novus à l'EEE mais a conclu que ce n'était pas une option commerciale viable eu égard aux barrières à l'entrée tout à fait substantielles contre l'établissement d'un nouveau réseau de cartes d'usage courant dans l'EEE, même pour une entreprise avec les ressources de [Morgan Stanley]] (Document (i) ci-dessus);
- "[Morgan Stanley] does not believe that there is any possibility of expanding its Discover network to the UK or elsewhere in the EEA in the same manner as it has set up the network in the US. In addition, the current barriers to entry into the EEA look even more daunting than they appeared in the US in 1985; and dealing with third parties adds additional difficulties not present with Sears. Accordingly, drawing an analogy with the Sears-Discover co-operation in 1985 is unrealistic, since no such equivalent opportunity exists or is ever likely to exist in the EEA. Further, as explained in the Introduction, replicating what [Morgan Stanley] has accomplished with the Discover network in the US would not be an attractive commercial opportunity." [[Morgan Stanley] ne croit pas qu'il existe une possibilité d'étendre son réseau Discover au Royaume-Uni ou ailleurs dans l'EEE de la même façon qu'elle a créé son réseau aux Etats- Unis. De plus, les barrières actuelles à l'entrée dans l'EEE sont encore plus décourageantes qu'elles ne l'étaient aux USA en 1985 ; et d'avoir à faire à des tiers ajoute encore des difficultés supplémentaires qui n'existaient pas avec Sears. Par conséquent, faire une analogie avec la coopération Seras-Discover en 1985 n'est pas réaliste puisqu'il n'existe aucune opportunité équivalente à celle-ci dans l'EEE et qu'aucune n'est susceptible de s'y présenter. De plus, comme il a été expliqué dans l'Introduction, répliquer ce que [Morgan Stanley] a accompli avec le réseau Discover aux Etats-Unis ne constituerait pas une opportunité commerciale attractive] (Document (iii) ci-dessus); "[Morgan Stanley] has no plans to expand the Discover network to the EEA since there is currently no possible commercial rationale for making a large and risky network investment in the EEA." [[Morgan Stanley] n'a aucun projet d'expansion du réseau Discover dans l'EEE dès lors qu'il n'y a aucun sens commercial possible à effectuer un investissement de réseau important et risqué dans l'EEE] (Document (iv) ci-dessus).
158 Voir § 2.3 et note de bas de page 3, p.2 du " Summary of Issues " [résumé des questions en suspend] de Morgan Stanley à la Commission du 26 novembre 2003 (cote 6193).
159 Voir les observations de Morgan Stanley sur la réponse de Visa à la Communication des griefs, §§ 1.7 et 3.3.5 à 3.3.10 (cotes 9450 et 9482 à 9484).
160 Arrêt BaByliss c. Commission du 03 avril 2003, affaire T-114-02, [2003] Rec. II p.1279, considérants 100 à 103.
161 Demandes d'information de la Commission aux banques acquéreurs britanniques de mars 2004 (cotes 6296 - 6837).
162 [...].
163 Selon les lignes directrices sur l'applicabilité de l'article 81 du traité CE aux accords de coopération horizontale, le coefficient de concentration des plus grandes entreprises, qui correspond à la somme des parts de marché respectives des principaux concurrents peut être utilisé comme indicateur pour mesurer la concentration du marché. L'autre indicateur mentionné dans lesdites lignes directrices est l'indice Herfindahl-Hirschman ("IHH"), qui est égal à la somme des carrés des parts de marché détenues par chaque concurrent (paragraphe 29).
164 Ibid. paragraphe 29.
165 [...].
166 Communiqué de presse du 19 août 2004, intitulé "SEB sells Norwegian merchant acquiring business to Nova" (cote 8106) [SEB vend ses activités norvégiennes d'affiliation de commerçants à Nova]. [...].
167 Selon Visa, les acquéreurs potentiels étaient Abbey National, Capital One, Citigroup, Co-operative Bank, JP Morgan Chase, MBNA, National Australia Group, Nationwide and Standard Chartered (voir Frontier report, c'est-à-dire l'annexe 9 aux observations écrites de Visa du 3 décembre 2004 à la communication des griefs, paragraphe 46, p. 13 ( cote 8782), et l'annexe 3 (p. 44) à ce document (cote 8663).
168 [...].
169 [...].
170 [...].
171 [...].
172 Réponses des grands et petits commerçants du Royaume-Uni aux demandes d'information de la Commission de 2003(cotes 3477 -5361).
173 [...].
174 [...].
175 [...].
176 Ibid.
177 Ibid.
178 Ibid.
179 Ibid.
180 Ibid.
181 Ibid.
182 [...].
183 Ibid.
184 Ce réseau a été géré par Dean Witter, Discover and Co., jusqu'en 1997, date de fusion de la société avec Morgan Stanley Group Inc.
185 Déclaration du chef de la division mondiale des services de crédit Morgan Stanley, du 20 mai 2005, paragraphe 12 (cote 10976).
186 Déclaration d'un dirigeant de l'activité cartes de crédit britannique de Morgan Stanley (Consumer Banking Group), du 20 mai 2005, paragraphe 8 (cote 10947).
187 Lettre de Visa du 15 février 2007, p. 2(cote 12557).
188 Lettre de Visa du 24 avril 2007 [...] du 18 septembre 2006 (cotes 12627 à 12649).
189 Voir par exemple l'article [...], point 2, de l'accord de règlement entre Visa et Morgan Stanley du 21 septembre 2006 (cote 12243): [...].
190 Voir les observations supplémentaires de Visa du 20 mai 2005, paragraphes 131 et 132, page 39 (cote 8479).
191 Observations de Morgan Stanley du 25 janvier 2005, point 3.3.38 (cote 9494).
192 Comme cela a été souligné à la section 5.3.2.1.3, considérant (155), aucune des autres grandes banques internationales considérées par Visa comme des acquéreurs potentiels ne semble envisager de pénétrer le marché britannique de l'acquisition.
193 [stratégie commerciale].
194 [stratégie commerciale].
195 Voir la section 5.3.1.2.
196 Voir les observations de Visa du 3 décembre 2004, §230 et s., p.69 et s. (cote 8509).
197 Voir les sections 5.3.2.2.4. et 5.3.2.2.6., paragraphes (175) à (189) ci-dessus.
198 Le compte-rendu de réunion du le conseil d'administration de Visa International du 4 décembre 1989 (cote 582) indique que la règle a été adoptée "in order to maintain and enhance intersystem competition as well as to avoid unfair competition" [afin de maintenir et de renforcer la concurrence inter-systèmes ainsi que d'éviter une concurrence déloyale]. Selon Visa l'objectif de la règle est "to protect the independence and integrity of the Visa system itself and to promote inter-system competition on a fair and sustained basis" [de protéger l'indépendance et l'intégrité du système Visa lui-même et de promouvoir une concurrence inter-systèmes sur une base juste et soutenue] (memorandum annexé aux observations de Visa du 21 février 2003, section 3.3 - cote 3195). Visa fait valoir que la règle "is designed to prevent competition-distorting free-riding in the interests not only of Visa but also of the public and the economy at large" [vise à éviter un parasitisme distordant la concurrence dans l'intérêt non seulement de Visa mais aussi de la population et de l'économie en général] (observations de Visa du 18 août 2000, section V, p. 16 - cote 635).
199 Voir les observations de Visa du 3 décembre 2004, §§ 388 à 391, pp.124 à 126 et s.
200 Voir les observations de Visa du 21 février 2003, pp. 5 à 7 (cote 3175-3177) où elle a identifié les principales catégories suivantes d'informations confidentielles communiquées à ses membres : [...]. Voir aussi les observations de Visa du 3 décembre 2004, § 398 a), p.128 (cote 8568) où elle soutient que "MSDW will obtain unlimited access to [...] Visa's confidential know-how [which] extends to its By-Laws and Operating Regulations and supplementary documentation which are a complete blue-print of the Visa system and include details of its latest technological initiatives such as Chip & PIN, e-commerce and fraud prevention technologies. Moreover, members are given advance notification of new commercial strategies, technical advice, risk management manuals and access to the Visa web-site" [MSDW obtiendra un accès illimité aux [...] savoir-faire confidentielle de Visa [qui] s'étend à ses statuts et à son règlement intérieur et à la documentation supplémentaire qui constituent un modèle complet du système Visa et inclut les détails de ses dernières initiatives technologiques telles que les technologies Chip & PIN, de commerce électronique et celles utilisées pour prévenir la fraude. De plus, les membres se voient notifier en avance les nouvelles stratégies commerciales, les conseils techniques, les manuels de gestion des risques et l'accès au site internet de Visa].
201 Voir les observations de Visa du 3 décembre 2004, § 397, pp.127 à 128 (cotes 8567 et 8568).
202 Ibid, § 404 (cote 8572).
203 Ibid, § 404 (cote 8572).
204 Ibid, § 405 (cote 8572).
205 La jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal de première instance concernant l'interprétation de l'article 81 du traité CE s'applique également à l'article 53 de l'accord EEE. Voir les quatrième et quinzième considérants ainsi que l'article 6 de l'accord EEE, l'article 3, paragraphe 2, de l'accord relatif à l'institution d'une Autorité de surveillance et d'une Cour de justice. En conséquence, les références contenues dans ce document à l'article 81 du traité CE s'appliquent aussi à l'article 53 de l'accord EEE.
206 Arrêt de la Cour du 15 décembre 1994 dans l'affaire C-250-92, Gøttrup-Klim/Dansk Landbrugs Grovvareselskab, Recueil 1994, p. I-5641, point 45. Le cas Gøttrup-Klim - à l'inverse de Metro - n'a pas soulevé les questions de ce qui pouvait éventuellement être une application discriminatoire des règles d'adhésion en question et n'a dès lors pas imposé l'évaluation de clarté et de transparence de ces règles.
207 Arrêt du Tribunal de première instance du 18 septembre 2001 dans l'affaire T-112/99, Métropole Télévision, Recueil 2001, p. II-2459, point 104.
208 Décision 90-410-CEE de la Commission du 13 juillet 1990, JO L 209, p. 15.
209 Observations de Visa du 18 août 2000, pp. 22 et 23 (cotes 643-642) ; observations de Visa du 3 décembre 2004, section VIII, paragraphes 333 à 453, pp 107 à 147(cote 8547 - 8587) ; observations supplémentaires de Visa du 20 mai 2005, section 5 (C), paragraphes 155 à 253, pp 64 à 94 (10260 -10320). Il est en particulier fait référence à Métropole Télévision et Elopak/Metalbox-Odin dans les observations de Visa du 3 décembre 2004, au paragraphe 350, page 111 et au paragraphe 357, page 114 (cote 8551 et 8554).
210 Par. 104.
211 Arrêt du 25 octobre 1977 dans l'affaire 26-76, Metro SB/Grossmärkte, [1977] Recueil 01875, paragraphe 20.
212 Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphe 367, p. 117(cote 8557).
213 Observations de Visa du 3 décembre 2004, paragraphes 368 à 369, pp. 117-118 (cotes 8557- 8558).
214 Ibid.
215 La thèse de Visa (observations du 3 décembre 2004 sur la communication des griefs, paragraphe 365, p. 107 - cote 8547), selon laquelle la jurisprudence née de Pronuptia ou de Nungesser est différente de celle née de Métropole Télévision en ce sens qu'elle n'exige pas que la restriction soit directement liée et nécessaire pour "la totalité de l'opération principale", laquelle ne tombe pas en tant que telle dans le champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, mais qu'elle exige plutôt un "but légitime" (donnant éventuellement lieu à un seuil inférieur à celui prévu par l'arrêt Métropole Télévision) ne tient pas : La finalité d'un contrat de franchise est, d'une part, de permettre au franchiseur d'exploiter financièrement, sans engager de capitaux propres, un ensemble de connaissances et, d'autre part, d'ouvrir au franchisé dépourvu de l'expérience nécessaire l'accès à des méthodes qu'il n'aurait pu acquérir qu'après de longs efforts de recherche et de le faire profiter de la réputation du franchiseur. Dans l'arrêt Pronuptia, la Cour a estimé que, sans les clauses qui sont indispensables, d'une part, pour empêcher que le savoir-faire transmis et l'assistance apportée par le franchiseur profitent à des concurrents et, d'autre part, pour préserver l'identité et la réputation du réseau qui est symbolisé par l'enseigne, le contrat de franchise n'aurait pas été conclu. La finalité d'un accord de concession de technologies sous licence est de diffuser une nouvelle technologie capable de concurrencer les produits existants sur le marché. Dans l'arrêt Nungesser, la Cour de justice a été d'avis que, sans une licence exclusive, le titulaire de la licence pourrait être amené à ne pas accepter le risque de la culture et de la commercialisation du nouveau produit, résultat qui serait nuisible à la diffusion d'une nouvelle technologie et qui porterait ainsi atteinte à la concurrence entre le nouveau produit et les produits existants semblables.
216 De nombreuses personnes morales appartenant à Citigroup (qui est elle-même une société holding) détiennent une licence d'exploitation au sein du réseau Visa (voir les observations de Citigroup du 18 avril 2003, p. 1 - cote 3433, et les observations de Visa du 28 juillet 2000, p. 15 et 16 - cotes 577-578-). Pour plus de facilité, la Commission se référera à "l'adhésion de Citigroup à Visa".
217 Observations de Visa du 28 juillet 2000, p. 17 (579).
218 Observations de Visa du 21 février 2003, p. 4 (cote 3174).
219 Observations de Visa du 21 février 2003, p. 4 (cote 3174).
220 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 221 (cote 10256), et observations de Visa du 3 décembre 2004 sur la Communication des griefs, point 416, sous (a) (cote 8575).
221 Observations de Visa du 28 juillet 2000, p. 17 (cote 579).
222 Observations de Visa du 3 décembre 2004 sur la Communication des griefs, point 419 (cote 8577). Une déclaration similaire figure dans d'autres observations de Visa. "Given the length of time Citibank had been a member of Visa, and the length of item it had owned a part of Diners Club franchise, it is quite possible that a decision was made to "grandfather" Citibank's position" [compte tenu du fait que Citibank était membre de Visa depuis de nombreuses années et qu'elle avait acquis une part de la franchise de Diners Club depuis longtemps également, il est tout à fait possible qu'une décision ait été prise pour préserver la position de Citibank] (observations de Visa du 28 juillet 2000, p. 17 - cote 579).
223 Observations de Visa du 3 décembre 2004 sur la Communication des griefs, point 419, p.137 (cote 8577).
224 Ibid.
225 Ibid., point 422 (cote 8578).
226 Avec quelque 200 millions de comptes clients dans plus de 100 pays, plus de 275 000 collaborateurs et un revenu net de 21 538 milliards de dollars US en 2006 (voir le site web de Citigroup : http ://www.citigroup.com/citigroup/about/index.htm) (cotes 12675-12677).
227 [...].
228 Observations de Visa du 3 décembre 2004 sur la communication des griefs, point 416, (sous c) ( cote 8576).
229 Observations de Visa sur la communication des griefs du 3 décembre 2004, point 423 (cote 8578).
230 Observations de Citigroup du 18 avril 2003, p. 1 (cote 3433).
231 Courrier électronique de Citigroup du 27 juillet 2004 en réponse au courrier électronique de la Commission de la même date (cote 6474).
232 Observations de Citigroup du 18 avril 2003, p. 2 (cote 3434).
233 Les cartes JCB sont également émises en Autriche, France, Allemagne, Grèce, Italie et Espagne.
234 Rapport RBR 2006, International Card Organisations, JCB International (Japan Card Bureau), pages 50 et 53 (cote 12447).
235 Ibid.
236 Annexe 2 des observations de Morgan Stanley, intitulée "Note on JCB Shareholders" [note sur les actionnaires de JCB] du 10 octobre 2003, p. 1.
237 Business Information Report de Dun & Bradstreet sur JCB Co. Ltd du 19 juillet 2004, p. 4 (cote 7234); observations de JCB du 25 septembre 2003.
238 Business Information Report de Dun & Bradstreet sur JCB Co. Ltd du 19 juillet 2004, p. 4 (cote 7234).
239 Observations de Visa sur la Communication des greifs du 3 décembre 2004, point 430 (cote 8580). Auparavant, les institutions financières qui exerçaient des activités de cartes de crédit au Japon étaient souvent amenées, pour des raisons réglementaires, à déployer ces activités dans le cadre de divisions "cartes de crédit" au travers de personnes morales distinctes, contrôlées par l'institution financière mère. Les règlements qui justifiaient ces distinctions ont été abrogés en avril 2004.
240 Business Information Report de Dun & Bradstreet sur Visa International Service Association du 20 juillet 2004, p. 6.
241 Annexe 2 des observations de Morgan Stanley, intitulée "Note on JCB Shareholders" [note sur les actionnaires de JCB] du 10 octobre 2003, p. 3 (6027).
242 Observations de Visa du 30 octobre 2003 (6143 - 6147).
243 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 227, sous c) (cote 10258).
244 Il s'agit, par exemple, des informations liées aux transactions multidevises et multilingues (observations de Visa du 20 mai 2005, point 193 - cote 10243).
245 Observations de Visa sur la Communication des griefs du 3 décembre 2004, point 312, (sous e) (cote 8538).
246 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 188 (cote 10241).
247 Ibid., point 192 (cote 10243).
248 Ibid.
249 Règlement intérieur régional de Visa Europe, chapitre 2.10, partie A, paragraphe 1, point a (cote 12443).
250 [...].
251 Annexe A-3 du règlement intérieur régional de Visa Europe (cote 12443).
252 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 197 (cote 10245).
253 Chapitres 3.2, partie A, à 3.2, partie G, et 4.3, partie D, du règlement intérieur régional de Visa Europe (cote 12443).
254 Ibid.
255 Ibid., point 199.
256 § 200 (page 80) des observations de Visa du 20 mai 2005 (cote 10246).
257 Voir le paragraphe (118) ci-dessus [...].
258 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 194 (cote 10244).
259 Ibid.
260 Observations de Visa du 3 décembre 2004 sur la Communication des griefs, point 312, (sous e), p. 98 (cote 8538).
261 La question ici est de savoir si les porteurs et les commerçants sont susceptibles de changer de marque de cartes (c'est-à-dire si les commerçants refuseraient les cartes Visa si ils commençaient à accepter des cartes Discover : ils ne les refuseraient pas). Cette question est différente de celle de la section 5.3.2.2.5., paragraphes 183) et 186), de savoir si les commerçants changeraient de banques acquéreur tout en continuant d'accepter les mêmes marques de cartes de la part de leurs clients.
262 Devant le Department of Justice des Etats-Unis, M. ou Mme Beindorff de Visa USA ont déclaré (points 263 à 265) que "cardholder relationship belongs to banks, not Visa" [les relations avec les titulaires appartiennent aux banques, pas à Visa]).
263 Observations de Visa du 20 mai 2005, point 205, p. 84 (cote 10250).
264 Observations de MasterCard du 5 septembre 2005 (cotes 11064-11070) et du 4 novembre 2005 (11077- 11081).
265 Les paragraphes (288)-(209).
266 Observations de Visa du 21 février 2003, p. 4 (cote 3174).
267 Déclaration du dirigeant de la division cartes de crédit de Morgan Stanley au Royaume-Uni (Consumer Banking Group International), du 20 mai 2005, , § 21 (cote 10951).
268 MasterCard explique [...] (voir les observations de MasterCard du 4 novembre 2005, réponse à la question 4) (cote 11079).
269 Observations de MasterCard du 5 septembre 2005 (cotes 11064-11070) .
270 Ibid.
271 Observations de Visa du 3 décembre 2004, point 451 (cotes 8585-8586) .
272 Réponse de MasterCard du 28 juillet, 17 août et 13 septembre 2005 (version non-confidentielle, réponse a question n° 6) (cotes 11067-11068).
273 Paragraphe (285).
274 Observations de MasterCard du 5 septembre 2005 et du 4 novembre 2005 (cotes 11077-11081).
275 Déclaration du chef de la division mondiale des services de crédit de Morgan Stanley, du 20 mai 2005, point 6 (cote 10973).
276 Déclaration du dirigeant de la division cartes de crédit de Morgan Stanley au Royaume-Uni (Consumer Banking Group International), du 20 mai 2005, point 3 (cote 10945).
277 Observations de MasterCard du 5 septembre 2005 (cotes 11064-11070).
278 S'agissant de la durée de l'infraction, voir la section 7.2.1.2.1 ci-dessous.
279 Voir la lettre de Visa à la Commission du 27 septembre 2006 (cote 12190) et la lettre de Morgan Stanley à la Commission du 22 septembre 2006 cote (12188).
280 [...].
281 Voir les observations écrites de Visa du 3 décembre 2004 en réponse à la communication des griefs, paragraphe 404 ci-dessus (cote 8572).
282 Voir le paragraphe (23) ci-dessus.
283 Lettre du 12 décembre 2006 (cote 12421)
284 Lettre du 12 décembre 2006. [...].
285 Voir, entre autres, l'arrêt de la Cour du 11 juillet 1985 dans l'affaire 42-84, Remia/Commission, Recueil 1985, p. 2545, point 22.
286 Voir, entre autres, l'arrêt de la Cour du 15 décembre 1994 dans l'affaire C-250-92, Gøttrup-Klim/Dansk Landbrugs Grovvareselskab, Recueil 1994, p. I-5641, point 54.
287 Note de bas de page 172 supra.
288 Section 5.3.1.2. supra
289 Voir la section 3, point 29 supra.
290 Témoignage du vice-président aux affaires juridiques et de réglementation de Visa Europe devant la High Court of Justice d'Angleterre et du Pays de Galles, daté de novembre 2000, p. 23, point 87(cote 1341).
291 Cette règle est également énoncée dans les lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE (voir la section 3.3).
292 Voir le point 51 des lignes directrices concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE.
293 Point 465 des observations de Visa sur la communication des griefs du 3 décembre 2004 (cotes 8591) et point 247 page 99 des observations de Visa du 20 mai 2005(cote10265).
294 Point 73 des lignes directrices.
295 Idem.
296 Point 74 des lignes directrices.
297 Point 79 des lignes directrices (soulignement ajouté par la Commission).
298 Paragraphe (314).
299 En plus des observations de Visa citées dans la note de bas de page 261 supra, Visa a fait valoir, dans une section de ses observations du 3 décembre 2004 paragraphe 465, page 151(cote 8596) sur la communication des griefs, sous le titre "(c) Troisième condition : le caractère indispensable", que : "Si l'on applique la première partie de ce critère à deux volets, concernant le caractère indispensable de l'accord, il ne peut y avoir de doute que :
(a) le système Visa dans son ensemble est raisonnablement nécessaire pour réaliser les gains d'efficacité du réseau Visa [...]
(b) en outre, comme le système Visa dans son ensemble produit de par sa nature d'importantes externalités positives, il devrait également bénéficier de la présomption selon laquelle il est raisonnablement nécessaire pour les réaliser".
300 Le paragraphe 75 des lignes directrices : "le premier critère dans la troisième condition de l'article 81, paragraphe 3, exige que les gains d'efficacités soient spécifiques à l'accord en question ".
301 Voir le paragraphe(21) ci-dessus.
302 Voir le paragraphe (11) ci-dessus.
303 Article 89.2 des statuts de Visa Europe (cote 7960).
304 Article 4.1 des statuts de Visa Europe (cote 7938). Voir aussi l'article 88 des statuts de Visa Europe (cote 7959) "[...] the Board [of Visa Europe] shall be authorised to establish policies and promulgate rules and regulations regarding the administration (including, but not limited to, the [...] conditions of membership [...] of any organisation headquartered in the EU Region), operation and development of Visa's International's programmes within the EU Region [...]" [le Conseil de direction [de Visa Europe] est autorisé à établir les politiques et à promulguer les règles et règlements d'administration (y compris, mais pas seulement, les [...] conditions à la reconnaissance du statut de membre [...] à toute organisation dont le siège se trouve dans la région UE].
305 Observations de Visa du 3 décembre 2004, § 199, p.56 (cote 8496).
306 Voir la réponse de Visa du 24 avril 2007 à la demande d'information de la Commission du 3 avril 2007, [l'information fourni par Morgan Stanley].
307 Affaire 7-82, GVL/Commission, [1983] ECR p. 483.
308 Voir les affaires jointes T-22-02, Sumitomo Chemicals Co. Ltd et tiers/Commission du 6 octobre 2005, Recueil [2005].
309 Affaire 41-69 ACF Chemiefarma NV/Commission du 15 juillet 1970, Recueil [1970], p. 661.
310 OJ L 319, 29.11.1974, p. 1-3.
311 Par conséquent, la présente affaire est toute différente de l'affaire Sumitomo dans laquelle la Commission s'est vu priver du droit d'infliger des amendes parce que l'infraction avait pris fin cinq ans avant que la Commission n'eut engagé la procédure et dans laquelle le Tribunal de première instance a annulé l'arrêt au fondement que la Commission avait omis de considérer, dans sa décision, si elle avait un intérêt légitime à adopter la décision. En l'espèce, contrairement à la situation qui se présente dans Sumitomo, la période de limitation prescrite à l'article 1 du règlement n° 2988-74 n'interdit pas à la Commission d'infliger des amendes car l'infraction a pris fin le 22 septembre 2006, c'est-à-dire, après que la Commission eut envoyé une communication des griefs (le 2 août 2006) et une lettre d'exposé des faits (le 6 juillet 2006). (Voir les affaires jointes T-22-02, Sumitomo Chemicals Co. Ltd. et tiers/Commission, du 6 octobre 2005, Recueil [2005] ; affaire 7-82 GVL/Commission du 2 mars 1983, Recueil [1983], p. 483 ; et affaire 41-69 ACF Chemiefarma NV/Commission, du 15 juillet 1970, Recueil [1970], p. 661.)
312 La Commission convient avec Visa du faite que la règle appliquée à Morgan Stanley a été notifiée au début de 1990. Sur le fondement de cette règle, Morgan Stanley s'est vu refuser l'adhésion à Visa Europe pendant plus de six ans (du 22 mars 2000 au 22 septembre 2006, comme expliqué au paragraphe (308) infra). De ce fait, Visa bénéficie de l'immunité d'amende pour la période antérieure au 1er mai 2004, c'est*à- dire, la date d'entrée en vigueur du règlement n° 1-2003.
313 Observations de Visa du 3 décembre 2004, point 39, page 14.
314 "EEC Council: Regulation No 17: First Regulation implementing Articles 85 and 86 of the Treaty", OJ L 13, 21.02.1962, p. 204-211.
315 Des demandes d'information ont été envoyées à Visa le 13 décembre 2002 (cotes 3073-3089), le 14 mars 2003 (cotes 3226-3240), le 15 octobre 2003 (cotes 6067-6080) et le 19 mars 2004 (cotes 7155-7162).
316 La Commission a envoyé des demandes d'information à environ 90 commerçants britanniques grands et petits en 2003.
317 Lettre annexée à la plainte, à l'annexe 10. Voir la note de bas de page 38, supra.
318 Lettre annexée à la plainte, à l'annexe 10. Voir la note de bas de page 38, supra.
319 Note téléphonique du 22 mars 2000, annexée à la plainte, à l'annexe 10. Voir la note de bas de page 38, supra.
320 Voir la note de bas de page 38, supra.
321 Voir le paragraphe (23) et la section 5.3.3.5 supra.
322 Le 22 mars 2000 Visa a informé Morgan Stanley qu'elle n'était pas éligible au statut de membre de Visa et a refusé de lui faire parvenir un formulaire d'inscription.
323 OJ C 9, 14.01.1998, p. 3-5.
324 Selon le paragraphe 38 des lignes directrices de 2006 sur les amendes, ces nouvelles lignes directrices ne s'appliquent qu'aux affaires pour lesquelles une communication des griefs a été notifiée après le 1er septembre 2006.
325 Voir la section 5.3.1.2, paragraphes (92) à (105) ci-dessus.
326 Voir la section 5.3.1.2, paragraphes (93) à (105) ci-dessus.
327 Voir les sections 5.3.2.2.4. à 5.3.2.2.6., paragraphes (175) à (189) supra.
328 Voir les sections 5.3.2.2.1 à 5.3.2.2.3., paragraphes (161) à (174) ci-dessus.
329 Voir la section 5.3.2.3, paragraphes (185) à (193) ci-dessus.
330 Voir la valeur des transactions, le nombre de commerçants acquis et la croissance du nombre de commerçants acquis au Royaume-Uni, paragraphes (84) à (88) supra.
331 Observations de Visa du 3 décembre 2004 en réponse à la Communication des griefs, pp.167-168 (cotes 8607-8608).
332 Voir paragraphe (198) et les notes de bas de page 193 et 194 ci-dessus.