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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 janvier 2010, n° 07-19530

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Ace Informatique (SA)

Défendeur :

Logiciels (SARL), Coaxis Informatique (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Fevre

Conseillers :

MM. Roche, Birolleau

Avoués :

Mes Huyghe, Regnier Bequet Moisan, SCP Bolling-Durand-Lallement

Avocats :

Mes Rebillaud, Perrault, Payet

T. com. Meaux, du 16 oct. 2007

16 octobre 2007

LA COUR,

Vu le jugement en date du 16 octobre 2007 par lequel le Tribunal de commerce de Meaux a débouté la société Ace Informatique venant aux droits de la société Ace Informatique Paris de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamnée à payer aux sociétés Ace Logiciels, Ace Informatique et Coaxis Informatique la somme de 750 euro au titre des frais hors dépens;

Vu l'appel interjeté par la société Ace Informatique et ses conclusions enregistrées le 10 novembre 2009 et tendant à faire:

- condamner les sociétés Ace Logiciels, inscrite au RCS de Meaux sous le numéro B 380 535 435, Coaxis Informatique, immatriculée au RCS de Saintes sous le numéro B 391 077 641, et Ace Informatique, enregistrée au RCS de Villebon, à lui verser respectivement les sommes de 100 000, 150 000 et 10 000 euro toutes causes de préjudices confondues du fait de l'usurpation de sa dénomination sociale et plus généralement d'actes de concurrence déloyale;

- enjoindre aux mêmes sociétés Ace Logiciels, Coaxis Informatique et Ace Informatique d'avoir à modifier leurs dénominations sociales de manière à éviter tout risque de confusion avec le sien et ce, sous astreinte de 1 000 euro par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir;

- permettre la publication de tout ou partie du dispositif de l'arrêt à intervenir dans trois journaux ou revues de son choix et aux frais des sociétés intimées;

- condamner chacune des sociétés intimées à lui verser une somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu, enregistrées le 20 octobre 2009, les conclusions présentées par la société Coaxis Informatique, nouvelle dénomination de la société Ace Informatique immatriculée au RCS de Saintes sous le numéro B 391 077 641, et tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelante à lui verser 2 500 euro au titre des frais hors dépens;

Vu, enregistrées le 4 novembre 2009, les conclusions présentées par la société Ace Logiciels, anciennement dénommée Ace Informatique, inscrite au RCS de Meaux sous le numéro B 380 535 435, et tendant à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelante à lui payer 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu l'assignation à personne habilitée délivrée à la société Ace Informatique immatriculée au RCS de Montereau sous le numéro B 420 625 121, laquelle n'a pas constitué avoué;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Ace Informatique, immatriculée le 8 décembre 1989 au RCS de PARIS sous cette dénomination sociale et dont l'activité est la création et la commercialisation de solutions informatiques en matière de gestion de commerces, a constaté que plusieurs autres sociétés exerçant dans le même secteur d'activité que le sien utilisaient également la même dénomination sociale et ce, en violation, selon ses dires, de ses droits concrétisés, par le dépôt de sa propre dénomination à titre de marque auprès de l'INPI le 8 avril 2005 ; que devant le refus des intéressées de procéder à la modification de dénomination qu'elle exigeait la société Ace Informatique les a, par acte du 25 octobre 2005, assignées devant le Tribunal de commerce de Meaux, lequel a rendu la décision susvisée présentement entreprise;

Considérant que la société Ace Informatique reproche, tout d'abord, à la société Ace Logiciels d'avoir commis à son détriment un acte d'usurpation de dénomination sociale " en enregistrant au RCS de Meaux le 18 janvier 1991 la dénomination sociale et le nom commercial Ace Informatique " ; qu'elle soutient, par ailleurs, que l'enregistrement par l'intéressée du nom de domaine " aceinformatique.fr " serait également constitutif d'un acte d'usurpation; qu'elle impute aussi aux autres sociétés intimées le même type de faits d'usurpation et, " plus généralement d'actes de concurrence déloyale ";

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas au demeurant utilement contesté, que de nombreuses entreprises françaises disposent d'ores et déjà d'une dénomination sociale ou d'un nom commercial comportant le sigle " Ace " et le mot " informatique ", les lettres " A C E " constituant l'abréviation habituelle et usuelle des mots " aide ", " assistance ", " conseil " ou " entreprise " ; que, de même, si l'appelante a été immatriculée en 1989, au moins une entreprise avait été précédemment immatriculée avec une dénomination sociale identique ; qu'il sera aussi relevé que la société Ace Logiciels avait fait enregistrer son site Internet dénommé "www.aceinformatique.fr" bien avant que la société Ace Informatique utilise à son tour pour son site Internet le même sigle " aceinformatique " suivi toutefois de " .com " ; que, par suite, tant la banalité même de la dénomination litigieuse, laquelle est couramment utilisée par des sociétés dont le domaine d'activité est la commercialisation de matériel informatique, que l'antériorité de son usage à la date de création de l'appelante excluent que celle-ci puisse utilement imputer aux intimées l'usurpation d'un sigle pour lequel il n'est justifié ni effort créatif ni originalité particulière de nature à fonder une volonté de parasitisme de la part de concurrents potentiels; qu'il échet, sur ce point, de souligner que le parasitisme économique présentement allégué se définit comme l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, des ses efforts, de son savoir-faire, ainsi que de sa notoriété ; qu'en l'espèce, l'absence de tout caractère particulièrement distinctif ou spécifique à l'appelante dans la dénomination qu'elle revendique empêche celle-ci d'exciper d'un quelconque risque de confusion dans l'esprit de la clientèle concernée ou de la possible création d'une distorsion de la concurrence sur le marché considéré ; que pareillement, le dépôt de sa dénomination sociale à l'INPI est, eu égard aux circonstances sus-rappelées, sans influence sur le présent débat contentieux;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence et sans qu'il soit besoin de rechercher la réalité du préjudice dont elle fait état, de débouter la société Ace Informatique de l'ensemble de ses prétentions tant indemnitaire qu'aux fins d'injonctions adressées aux intimées d'avoir à modifier leur dénomination sociale ; qu'aucune considération de fait ou de droit ne justifie davantage qu'une mesure particulière de publicité du jugement soit ordonnée; qu'il échet, par suite, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions;

Sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile :

Considérant que l'équité commande, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Ace Informatique à verser à chacune des sociétés Ace Logiciels et Coaxis Informatique la somme de 2 000 euro au titre des frais hors dépens;

Par ces motifs, Confirme le jugement. Déboute la société Ace Informatique de l'ensemble de ses prétentions. La condamne aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile. La condamne aussi à verser à chacune des sociétés Ace Logiciels et Coaxis Informatique la somme de 2 000 euro au titre des frais hors dépens.