CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 28 janvier 2010, n° 07-04577
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Exan Limited (Sté)
Défendeur :
Cephalon France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Deurbergue
Conseillers :
Mmes Le Bail, Mouillard
Avoués :
SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Oudinot-Flauraud
Avocats :
Mes Rouquié, Robert
Depuis une trentaine d'années, au moins depuis le 30 décembre 1978, la société Laboratoire Louis Lafon, devenue en décembre 2001 la SAS Cephalon France (ci-après Cephalon), était en relations d'affaires, pour la commercialisation de ses produits pharmaceutiques en Afrique, avec la société Expand, devenue par la suite la société de droit britannique Exan Limited (ci-après Exan), en dernier lieu en vertu de quatre contrats de prestations de services couvrant une région géographique déterminée (1 : Sénégal, Mali et Mauritanie, 2 : Côte d'Ivoire, 3 : Burkina Faso, Niger et Togo, 4 : Cameroun) tous conclus pour une durée d'un an et reconductibles tacitement pour la même durée, sauf dénonciation trois mois avant la date d'expiration annuelle, trois d'entre eux ayant été signés le 31 décembre 1983 et le quatrième le 31 décembre 1986.
Par lettre du 11 juin 2003, Cephalon a prévenu Exan qu'elle mettrait fin à leurs relations contractuelles au 31 décembre 2003.
Revendiquant le statut d'agent commercial, Exan a, par assignation du 10 juin 2004, réclamé à Cephalon le paiement d'une indemnité compensatrice de 2 400 000 euro pour rupture de contrat, invoquant subsidiairement le préjudice subi pour rupture abusive, ou pour rupture d'une relation commerciale établie.
Par jugement du 30 janvier 2007, assorti de l'exécution provisoire sous réserve de caution bancaire en cas d'appel, le Tribunal de commerce de Créteil a condamné Cephalon à payer à Exan une somme de 288 333,50 euro pour ne pas avoir respecté un préavis de douze mois, déboutant Exan du surplus de sa demande, a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formée par Cephalon et a condamné cette dernière à payer à Exan une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
LA COUR :
Vu l'appel de ce jugement interjeté par Exan le 13 mars 2007;
Vu les conclusions signifiées le 4 novembre et le 2 décembre 2009 par lesquelles l'appelante poursuit l'infirmation du jugement et réclame à Cephalon, à titre principal, la somme de 2 882 331 euro à titre d'indemnité compensatrice de rupture des contrats d'agent commercial, à titre subsidiaire, la somme de 1 153 333 euro pour résiliation illégitime, brutale, abusive et vexatoire de ces contrats, outre 10 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
Vu les conclusions signifiées le 26 novembre 2009 par lesquelles Cephalon poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé que Exan n'avait pas la qualité d'agent commercial, mais son infirmation en ce qu'il la condamne à payer une indemnité de préavis et en ce qu'il la déboute de sa demande reconventionnelle, et demande à la cour de débouter Exan de ses demandes d'indemnisation du fait de l'absence de justification d'un préjudice effectif et de dire qu'en cas d'allocation d'une indemnité au profit de Exan, qui n'a pas fourni de caution bancaire et n'a pu pour cette raison bénéficier de l'exécution provisoire assortissant le jugement, l'arrêt emportera, en application de l'article 1153-1 du Code civil, intérêts au taux légal à compter de la décision d'appel seulement, en tout état de cause, de condamner Exan à lui payer la somme de 100 000 euro à titre de dommages et intérêts pour ses agissements fautifs, postérieurs à la résiliation, outre 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
Vu l'ordonnance de clôture du 3 décembre 2009 ;
Vu les conclusions de procédure du 8 décembre 2009, par lesquelles Cephalon demande le rejet des débats des pièces et des écritures signifiées par Exan la veille de l'ordonnance de clôture ;
Vu les conclusions en réponse, en date du 9 décembre 2009, par lesquelles Exan s'y oppose;
Sur ce :
Sur la procédure
Considérant que le comportement procédural antérieur de Cephalon, qui a tardé à conclure en dernier lieu (26 novembre 2009), tout en communiquant à cette occasion 19 pièces, ne saurait conduire la cour à passer outre l'atteinte manifeste au principe de la contradiction qui résulte du dépôt par Exan, la veille de la clôture, d'ultimes conclusions assorties de 6 pièces, dont Cephalon n'a pu prendre connaissance en temps utile et qu'elle n'a pas été mise en mesure de discuter, étant observé en outre que les parties ne demandent pas la réouverture des débats et le report du calendrier ; qu'il suit de là que ces écritures et ces pièces doivent, à ce stade de la procédure, être écartées des débats, la cour se réservant toutefois la possibilité, si ces documents - des éléments de comptabilité d'Exan correctement traduits - lui apparaissaient nécessaires pour juger les demandes qui lui sont soumises, de rouvrir les débats afin de permettre aux parties de s'en expliquer contradictoirement ; qu'il sera donc statué au vu des écritures signifiées par Exan le 4 novembre 2009, dont le dispositif tend aux mêmes fins que celles du 2 décembre 2009 ;
Sur le fond
- Sur la demande principale d'Exan :
Considérant, sur la qualité d'agent commercial statutaire revendiquée par Exan, que l'article L. 134-1 du Code de commerce dispose que "l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux";
Considérant que Exan, qui n'a jamais conclu de contrat au nom de Cephalon, soutient que son activité de prestation de services sur les territoires concernés ne se bornait pas à assurer la promotion scientifique des produits de la société Cephalon mais consistait à négocier des contrats au nom de cette dernière, soit à prendre contact avec des clients potentiels et, le cas échéant, à discuter avec eux des conditions d'un éventuel contrat, ce qui la dispense de justifier de la transmission de commandes ;
Qu'elle prétend que, dans le but de frauder la loi et de contourner le statut d'agent commercial, le Laboratoire Lafon, à la faveur des modifications contractuelles intervenues en 1983, 1984 puis en 2003, s'est efforcé de supprimer progressivement les références à une activité de ce type (la notion de "représentant exclusif', les "actes de marketing et de vente", "l'équipe de vente" devenue "le visiteur, les "commissions" devenues des "honoraires", le chiffre d'affaires à réaliser par elle qui devient le chiffre d'affaires de Cephalon) mais que, néanmoins, les derniers contrats contiennent encore des clauses révélatrices de sa qualité d'agent commercial ; qu'ainsi :
- ils lui fixent un quota minimal à réaliser durant l'année concernée, dont la non-obtention peut être sanctionnée par la résiliation,
- ils prévoient une rémunération à la commission, improprement intitulée honoraire s'agissant d'un pourcentage du chiffre d'affaires net global, dont le montant, d'ailleurs, de 23 %, était nettement plus élevé que ceux habituellement alloués en rémunération de simples prestations de promotion scientifique, de l'ordre de 7 à 13 %,
- elle bénéficiait d'une avance mensuelle, réévaluée en fonction du chiffre d'affaires à réaliser, qui augmentait sa rémunération, facilitait sa trésorerie, et illustrait l'assujettissement économique étroit entre les parties,
- en cas de résiliation pour non-réalisation des objectifs, elle pourrait poursuivre son activité pendant une année supplémentaire, à l'issue d'un préavis de trois mois, ce qui démontre que Cephalon reconnaissait le poids de son réseau et sa qualité d'agent commercial,
- l'article IV, alinéa 6, stipulait que ses honoraires étaient fixés "de façon qu'ils répondent au mieux à la politique des deux parties", ce qui prouve que son rôle ne se limitait pas à collecter des dossiers d'appels d'offres, comme le soutient Cephalon, d'autant que le tribunal lui-même a reconnu qu'elle avait consenti des efforts particuliers au titre de sa rémunération, en fonction de la situation concurrentielle, pour emporter le marché;
Qu'elle fait encore valoir, en se fondant sur des attestations de directeurs pour l'export du laboratoire de 1997 à fin janvier 2001, et sur des courriers de Cephalon, de clients, et d'elle-même, qu'elle bénéficiait d'un territoire contractuel, qu'elle garantissait à Cephalon une exclusivité territoriale, qu'elle a développé la clientèle en respectant un quota et un chiffre d'affaires précis, (passant de 50 000 euro en 1978 à plus de 2 500 000 euro en 2003), qu'elle a assuré, avec succès, une veille sur la solvabilité de la clientèle, qu'elle a apporté des conseils sur le conditionnement et l'étiquetage, qu'elle a procédé à des opérations de dédouanement, établi avec des clients des avis de réception conformes, et que Cephalon lui a proposé, le 16 octobre 2002, de participer à l'indemnisation de Tridem, son homologue pour le Gabon, le Congo, le Tchad et la RCA, en vue du transfert de ses activités à son profit, estimant que tous ces éléments caractérisent une activité d'agent commercial et non de visiteur médical comme le prétend Cephalon, d'autant plus à tort que la Convention collective de l'industrie pharmaceutique exclut de la mission du visiteur médical toute activité commerciale et interdit que figure dans un descriptif d'emploi de visite médicale des objectifs, quantitatifs ou non ;
Qu'elle vise enfin le rapport du commissaire aux comptes de Cephalon pour l'exercice clos au 31 décembre 2004 qui relate que, "pour la première fois, l'entreprise a fait appel à des contrats de prestations de service en visite médicale afin de renforcer la promotion de sa spécialité, le Spasfon, dans un environnement très concurrentiel", sans distinguer le territoire concerné, France ou Afrique, ce qui démontre qu'elle n'y avait pas recours auparavant;
Considérant que Cephalon réplique :
- qu'elle n'a pu, en 1983 et 1984, vouloir contourner un statut qui n'a été mis en place que par une loi de 1991, transposition de la directive du 18 décembre 1986 relative au statut des agents commerciaux,
- que Exan était seulement chargée d'assurer "un service de promotion médicale de ses produits", qu'elle ne peut utilement invoquer à cet égard les prohibitions figurant à la Convention collective de l'industrie pharmaceutique, qui ne concernent que les activités des visiteurs médicaux salariés,
- que l'ensemble des éléments invoqués par Exan ne sont pas caractéristiques d'une activité d'agent commercial, Exan ne démontrant pas qu'elle avait un mandat pour négocier des contrats au nom et pour son compte, y compris pour les négociations de marchés publics, son intervention étant demeurée exceptionnelle et purement administrative puisque c'est elle-même qui établissait les dossiers de réponse qu'elle lui transmettait au fins de dépôt, - qu'en fait, même si elle lui a pu lui prodiguer des conseils, Exan ne démontre pas avoir négocié avec des acheteurs publics en Afrique des contrats en son nom et pour son compte,
- que, si elle lui a transmis quelques bons de commande, c'était très occasionnellement et essentiellement dans le cadre des contrats avec les acheteurs publics à l'issue des opérations d'appel d'offres qu'elle-même avait menées,
- que les démarches réglementaires que Exan a pu effectuer auprès des autorités de santé ne suffisent pas à caractériser une activité de négociation de contrats, pas plus que la communication d'informations sur l'évolution économique du secteur, le marché, la concurrence, ou la situation politique locale,
- que le taux de commission pratiqué était conforme à celui qu'elle accordait à ses autres prestataires en visite médicale,
- que l'exclusivité prévue consistait simplement à lui garantir que le visiteur médical qui présenterait son produit majeur, le Spasfon, ne présenterait pas d'autre produit, Exan elle-même faisant état dans un courrier qu'elle lui a adressé du fait qu'elle représentait aussi des produits d'un autre laboratoire (Farge)
- qu'Exan elle-même, quand il lui est arrivé de décrire son activité, ne visait aucun élément se rattachant à celle d'agent commercial et la qualifiait elle-même de "promotion pharmaceutique";
Considérant qu'aucune conclusion ne saurait être tirée de la modification des termes employés au sein des contrats unissant les parties depuis 1978, dont rien ne permet de présumer qu'elle ne traduisait pas une évolution ou un ajustement plus précis des prestations fournies de part et d'autre, d'autant que le statut d'agent commercial n'avait pas encore été transposé en droit français lors de la conclusion de ces contrats ; qu'en tout état de cause, la cour observe que, tant dans le contrat de 1978 que dans ceux de 1983 et 1986, la mission confiée à Expand, puis, à partir de 1986, à Exan, est une mission de prospection médicale classique, précisément décrite, consistant essentiellement, précisément à partir de 1983, à faire prospecter tous les mois, dans les zones sélectionnées, des médecins, pharmaciens et autres paramédicaux (sages-femmes, infirmiers...), outre les responsables des pharmacies d'approvisionnement, des pharmacies d'hôpitaux et l'ensemble des pharmacies privées, ainsi que des infirmiers-chefs et des sages-femmes, "ces visites se faisant exclusivement sur une cible sélectionnée, établie au préalable par Exan, étudiée, corrigée et contrôlée par la direction exportation de LL" (Laboratoire Lafon) et ce dernier s'engageant en contrepartie à mettre à la disposition d'Exan les échantillons, tirés-à-part, brochures nécessaires à une prospection efficace et rentable ; que la particularité de cette mission était qu'elle incluait aussi, à l'article II, au titre des justifications, la remise d'une liste des clients visités, de rapports de chacune des visites effectuées et la présentation d'un rapport mensuel détaillé pour chaque zone visitée, habituelles pour ce type de prestations, mais qui devaient faire ressortir "les points spécifiques d'ordre technique, commercial ou économique nécessitant une réponse ou pouvant permettre de développer plus l'implantation dans le territoire prospecté ;
Considérant que l'ensemble des documents produits révèlent une activité entièrement conforme à cette mission, Exan ayant encore envoyé en 2002, peu après le rachat de Laboratoire Lafon par le groupe Cephalon, des courriers pour se plaindre amèrement de "l'indigence de la dotation 2002 de matériel professionnel, notamment en ce qui concerne les aides visuelles et les fiches posologiques" ; que ces documents démontrent aussi qu'en raison des particularismes des marchés concernés, où Cephalon n'était pas présente autrement que par l'intermédiaire d'Exan, cette dernière s'est rapidement trouvée la seule à être en mesure de renseigner le laboratoire sur la situation politique et commerciale qui prévalait dans les pays concernés, tant générale que particulière, notamment s'agissant des appels d'offres ou de la solvabilité des clients, et à prendre des initiatives localement, de sorte que sa mission ne s'est pas limitée à visiter des professionnels de santé pour promouvoir les produits de Cephalon mais s'est progressivement développée vers la fourniture de toutes sortes de renseignements et de conseils propres à assurer les meilleurs résultats possibles, gage d'une rémunération plus importante, la conduisant à préconiser diverses actions commerciales, voire à les effectuer elle-même, ou, réciproquement à répondre aux consultations et demandes d'actes du laboratoire ; que toutefois, une lecture attentive des courriers échangés entre les parties montre que, même si les conseils fournis par Exan étaient très précis voire directifs, notamment quant à l'attitude à adopter vis-à-vis de clients négligents, la décision, en définitive, revenait toujours au laboratoire ; que, de même, si Exan intervenait activement et fructueusement dans le déroulement de toutes les opérations intéressant le laboratoire dans les territoires concédés, allant même jusqu'à recueillir quelques bons de commande, aucun des éléments fournis ne permet de retenir qu'elle agissait alors en qualité de mandataire et qu'elle disposait alors d'une véritable autonomie dans la négociation, son intervention demeurant celle d'un simple intermédiaire et toutes les décisions commerciales étant soumises à l'assentiment de Cephalon ; qu'étant observé encore que, ainsi que le fait valoir Cephalon à juste titre, les autres éléments invoqués par Exan ne conduisent pas davantage a démontrer qu'elle disposait d'un pouvoir de négociation qui, seul, lui conférerait la qualité d'agent commercial, au sens de l'article L. 134-1 du Code de commerce, force est de constater que Exan ne démontre pas qu'elle exerçait une activité relevant du statut revendiqué;
Qu'il suit de là que sa demande fondée sur ce texte ne peut être accueillie et que le jugement, qui en a décidé ainsi, doit être confirmé de ce chef;
- Sur la demande subsidiaire d'Exan :
Considérant qu'au soutien de sa réclamation de 1 153 333 euro, Exan invoque plusieurs fondements juridiques, à la fois l'inexécution contractuelle, démonstration de la mauvaise foi de Cephalon qui conférerait à la rupture un caractère abusif, et le caractère prématuré de la résiliation, qui rendrait la rupture brutale, faisant valoir que cette rupture a entraîné la désorganisation de son réseau, ce qui justifie le paiement d'une indemnité, selon elle cumulable avec celle de l'article L. 134-12 du Code de commerce;
Qu'elle prétend que Cephalon a fait preuve de mauvaise foi en lui livrant parcimonieusement le matériel de promotion pendant les deux ans qui ont précédé la résiliation, de façon soit à l'empêcher d'atteindre ses objectifs, soit à la décourager et à la conduire à résilier elle-même les contrats, qu'elle ajoute que le laboratoire a entretenu le doute sur la poursuite de la relation contractuelle, l'invitant à présenter des offres, puis la félicitant, juste avant de lui notifier la dénonciation des contrats, commettant ainsi une rupture abusive des pourparlers;
Qu'elle soutient aussi que la résiliation était brutale car, si les contrats prévoyaient un préavis minimal de trois mois en cas de non-renouvellement, ils stipulaient aussi que, si la dénonciation intervenait pour non-réalisation des objectifs, le contrat se poursuivrait pendant un an pour faire face à la désorganisation de son réseau et ce, à l'issue du préavis de trois mois; qu'elle en déduit que, dans la mesure où elle n'a pas démérité, l'économie générale de ces contrats justifiait qu'elle bénéficie d'un préavis global de 18 mois au moins, et, en l'espèce, de 24 mois, compte tenu de la part importante de Cephalon dans son activité (en 2002 48 % de son chiffre d'affaires et 81 % des résultats) ; qu'elle souligne, enfin, que cette rupture a désorganisé son réseau puisque, d'une part, la désorganisation consécutive à la rupture était précisément prévue par le contrat à l'article VII, alinéa 2, et que, d'autre part, les résultats de son activité en témoignent ; qu'elle souligne enfin que, si, dès 1983, une année supplémentaire est prévue pour assurer la réorganisation du réseau, il serait normal de doubler cette période à l'issue d'une relation de plus de 20 ans;
Considérant que, s'il résulte de plusieurs courriers échangés entre les parties, au début de 2002 notamment, que Cephalon n'a pas, pendant quelques mois, été en mesure de fournir la totalité du matériel promotionnel prévu, aucun élément du dossier ne permet d'en déduire que cette inexécution, partielle et apparemment passagère, aurait été délibérément mise en place afin de nuire à Exan, ou dans le but de préparer la rupture ; qu'en outre, Exan n'établit pas quel préjudice spécifique en serait directement résulté pour elle;
Que, de même, dans ce contexte de changements majeurs, prévisibles, qui suivaient nécessairement l'achat du laboratoire par le groupe Cephalon, Exan avait été avertie de la volonté de Cephalon de n'avoir plus qu'un seul partenaire en Afrique et invitée à lui faire ses propositions dans ce sens ; qu'ayant elle-même, dans cette perspective, offert de reprendre l'activité de son homologue pour le Gabon, le Congo, le Tchad et la RCA, elle ne saurait prétendre avoir été entretenue dans l'illusion de la poursuite de la relation contractuelle, étant encore observé qu'une telle attitude de la part du laboratoire ne serait susceptible d'engager sa responsabilité que s'il était établi qu'elle avait conduit Exan à prendre des décisions ou à engager des investissements inopportuns, ce qui n'est pas le cas en l'espèce;
Considérant qu'il ne saurait être fait grief à Cephalon, par principe, de l'exercice d'une faculté contractuellement prévue ; qu'à cet égard, les contrats prévoyaient, à l'article VII intitulé "Durée du contrat", une faculté de dénonciation de la tacite reconduction 3 mois avant l'échéance ; qu'il est constant que Exan a bénéficié d'un préavis de 6 mois;
Que, s'agissant de la non-réalisation des objectifs, prévus à l'article VI "Réalisations minimum", l'article IX "Résiliation" stipulait que le laboratoire pourrait mettre fin au contrat sans préavis ni indemnité dans les cas prévus à l'article VI; que l'article VII précisait encore que "toutefois, pour le cas où LL serait amené à dénoncer le contrat en raison de la non-réalisation des objectifs minimum fixés à l'article VI du présent contrat, il est expressément convenu entre les parties que LL s'engage à verser à la société Expand, et ce pendant un an, le montant des honoraires dus en raison des prestations qu'elle fournira pendant cette année, le versement des prestations et la continuation de l'activité d'Expand ne pouvant en aucune façon être considérés par Expand comme un renouvellement du contrat mais étant une disposition prise par LL pour permettre à Expand de prendre toutes dispositions à l'égard des visiteurs médicaux, sans pour autant porter préjudice pendant cette période à la prospection qui continuera à s 'effectuer au profit de LL" ; qu'en dépit du caractère approximatif de la rédaction de ces articles, leur rapprochement révèle que l'intention des parties était de permettre au laboratoire, en cas de non-réalisation des objectifs, de résilier le contrat à tout moment, et sans autre préavis que celui de un an prévu pour permettre à Exan de se préparer à la rupture; qu'ainsi, et en tenant compte des moyens invoqués par Exan, qui, bien qu'elle n'invoque plus l'article L. 442-6, I 5° du Code de commerce, vise encore, à la fin de son argumentaire, une relation contractuelle de plus de vingt ans justifiant un préavis plus long que celui qui était stipulé, la cour estime que c'est à juste titre que le tribunal a jugé que, même si le contrat n'avait pas été résilié pour insuffisance de résultat, cette société devait bénéficier du préavis d'un an, contractuellement prévu pour lui permettre de prendre ses dispositions à l'égard de son réseau de visiteurs ;
Qu'il suit de là que le jugement doit être confirmé sur ce point également;
- Sur la demande reconventionnelle de Cephalon :
Considérant que, si les documents produits par Cephalon révèlent, ce qui était assez prévisible, une situation de tension croissante entre les parties au cours du préavis, Exan ayant accablé Cephalon de courriers divers et variés, de plus en plus vindicatifs, aucun élément en revanche ne prouve que cette mésentente aurait eu des répercussions sur la clientèle de Cephalon; qu'en admettant que Exan ait continué, après la fin des relations contractuelles et malgré l'absence de rétribution, à effectuer la promotion des produits du laboratoire, Cephalon n'explique pas, et a fortiori ne démontre pas, en quoi ces agissements lui ont directement porté préjudice ; que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il déboute Cephalon de sa demande de dommages et intérêts ;
- Sur la demande complémentaire de Cephalon :
Considérant enfin que le fait que Exan n'ait pas fait exécuter le jugement à titre provisoire, comme celui-ci lui en accordait la possibilité, ne saurait la priver du bénéfice des dispositions de l'article 1153-1 du Code civil, aux termes desquelles, en cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance ;
Et considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Par ces motifs, Déclare irrecevables les conclusions et les pièces communiquées par la société Exan Limited le 2 décembre 2009, Confirme le jugement en toutes ses dispositions, Y ajoutant, Déboute la société Cephalon France de sa demande complémentaire relative au point de départ des intérêts légaux, Rejette les demandes présentées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Exan Limited aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.