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Décisions

CA Versailles, 5e ch., 26 juin 2008, n° 07-00893

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Tremaud

Défendeur :

Alma Consulting Group (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Minini

Conseillers :

Mmes Rouaud-Folliard, Ollat

Avocats :

Mes Viandier, Hammelrath-Cazenave, Davico-Hoareau

Cons. prud'h. Nanterre, du 29 janv. 2007

29 janvier 2007

Exposé des faits et de la procédure

Médérick Tremaud a été embauché initialement par la société AP Consultants à compter du 17 janvier 2000 en qualité d'ingénieur commercial. Son contrat de travail a été transféré à la société Alma Intervention, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Alma Consulting Group, société de conseil spécialisée dans la recherche de la réduction des coûts dans les entreprises (notamment au niveau fiscal et social). Un nouveau contrat de travail a été conclu entre les parties le 12 décembre 2000 prévoyant notamment une clause de non-concurrence pendant une durée de deux années après le départ de la société et une rémunération compensatrice versée mensuellement pendant 12 mois d'un montant égal à 20 % du dernier salaire mensuel fixe.

Médérick Tremaud percevait une rémunération fixe (2 287 euro) et une rémunération variable en fonction des objectifs commerciaux fixés chaque année. La moyenne des 3 derniers mois de salaires a fait apparaître une rémunération mensuelle brute de 7 721 euro et la moyenne des 12 derniers mois de salaire une rémunération mensuelle brute de 6 182,17 euro.

La société Alma Consulting Group n'appliquant aucune convention collective, un accord d'entreprise a été signé le 26 mars 2002 entre elle et le SNEPEC CFE-CGC (Syndicat national de l'encadrement des professions des études et du conseil). Un avenant à cet accord a été conclu le 9 septembre 2003 fixant de nouvelles modalités concernant les clauses de non-concurrence.

En l'état d'un conflit opposant Médérick Tremaud à son supérieur hiérarchique, Pascal Aubrée, le directeur général, Jean-Luc Abeasis, a notifié au premier des observations écrites le 17 janvier 2005. Médérick Tremaud a sollicité l'intervention du directeur général pour régler le conflit selon courriel en date du 21 janvier 2005.

La société Alma Consulting Group a finalement convoqué Médérick Tremaud le 8 février 2005 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 17 février suivant et lui a notifié une mise à pied conservatoire. Puis, selon lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 24 février 2005 la société Alma Consulting Group a notifié à Médérick Tremaud son licenciement pour faute grave lui reprochant les griefs suivants :

- une insubordination : refus d'exécuter les instructions, obstruction systématique, mésentente avec son manager,

- un laxisme et des négligences notamment dans le traitement des dossiers Comanet et Stin et Stés,

- une attitude inadmissible concernant le dossier Prosegur et une attitude violente vis-à-vis de Sophie Uzan, collaboratrice du service marketing.

Lors de la rupture du contrat de travail, la société Alma Consulting Group a maintenu la clause de non-concurrence et a versé à Médérick Tremaud une somme mensuelle brute de 828 euro. Puis la société Alma Consulting Group a levé la clause le 30 mars 2006.

Contestant le motif de son licenciement, estimant que la clause de non-concurrence était illicite et invoquant l'application de la convention collective Syntec, Médérick Tremaud a fait convoquer la société Alma Consulting Group devant le Conseil de prud'hommes de Créteil le 22 avril 2005 afin d'obtenir le paiement de rappels de salaires et de congés payés, le paiement des indemnités de rupture du contrat de travail calculées selon les modalités de la convention collective Syntec et le paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'exécution de la clause de non-concurrence.

Le Conseil de prud'hommes de Créteil s'étant déclaré incompétent au profit du Conseil de prud'hommes de Nanterre selon jugement en date du 28 mars 2006, l'instance a été poursuivie devant cette dernière juridiction.

Par jugement en date du 29 janvier 2007 le Conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- dit que le licenciement de Médérick Tremaud est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Alma Consulting Group à payer à Médérick Tremaud les sommes de :

* 23 163 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,

* 1 497,07 euro à titre de rappel de salaire (mise à pied conservatoire) outre les congés payés afférents,

* 3 860,50 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement calculée selon l'accord d'entreprise en date du 26 mars 2002,

* 39 044,70 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

* 750 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné la remise de bulletins de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic rectifiés,

- dit que les intérêts sur les salaires sont dus à compter du 23 août 2004,

- débouté Médérick Tremaud du surplus de ses demandes au titre du licenciement abusif, de la clause de non-concurrence et du rappel de congés payés,

- débouté la société Alma Consulting Group de sa demande reconventionnelle,

- condamné la société Alma Consulting Group aux entiers dépens.

Médérick Tremaud a formé appel principal le 26 février 2007, procédure enregistrée sous le numéro 07-00893.

La société Alma Consulting Group a formé également appel principal le 6 mars 2007, procédure enregistrée sous le numéro 07-01050.

Médérick Tremaud demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :

- de faire application de la convention collective Syntec du fait de l'activité principale de conseil exercée par son employeur,

- de dire la clause de non-concurrence nulle car trop étendue dans l'espace et dans le temps alors par ailleurs que l'avenant à l'accord d'entreprise en date du 9 septembre 2003 modifiant les modalités des clauses de non-concurrence conclus dans l'entreprise ne lui est pas opposable en ce qui concerne la dénonciation par l'employeur en cours d'exécution de la clause et la réduction de la contrepartie financière,

- de condamner la société Alma Consulting Group au paiement des sommes de :

* 41 429,28 euro au titre du reliquat de l'indemnité de non-concurrence outre les congés payés afférents,

* 15 000 euro à titre de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence nulle sans remboursement de la somme déjà versée pendant les 13 mois ayant suivi la rupture du contrat de travail,

* 8 114,25 euro à titre de rappel de congés payés sur commissions,

* 1 076,40 euro au titre des congés payés sur l'indemnité de non-concurrence déjà versée,

* 7 721 euro à titre de dommages-intérêts pour non paiement des congés payés dus,

* 4 497,07 euro au titre du salaire non versé durant la mise à pied conservatoire outre les congés payés afférents,

* 23 163 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,

* 15 156,03 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement calculée selon la convention collective Syntec,

* 23 163 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

* 150 000 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation de ses préjudices financier, matériel et moral,

* 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Médérick Tremaud fait valoir pour l'essentiel qu'il s'est opposé dès 2004 à la modification de sa rémunération variable et qu'à compter de cette période il a été perçu comme étant un agitateur. Il fixe à cette date le début de ses difficultés avec son supérieur hiérarchique. Il indique qu'en début 2005 il s'est également refusé à une modification du mode de calcul de sa rémunération et que pour toute réponse la société Alma Consulting Group a entrepris à son encontre une mesure de licenciement.

Médérick Tremaud conteste tous les griefs reprochés faisant valoir que les actes d'insubordination visés dans la lettre de licenciement sont très imprécis, qu'il n'a commis aucune négligence dans le traitement de ses dossiers et qu'il n'a jamais adopté une attitude incorrecte voire agressive vis-à-vis de Sophie Uzan.

La société Alma Consulting Group conclut au rejet de toutes les réclamations présentées par Médérick Tremaud. Elle précise tout d'abord qu'elle démontre parfaitement la réalité et la gravité des griefs reprochés au salarié par la production aux débats des échanges de mails et par les observations formalisées sur les dossiers traités par le salarié. Elle estime que la clause de non-concurrence est licite dès lors qu'elle protège les intérêts légitimes de l'entreprise qui a développé une méthodologie particulièrement originale dans ses domaines de compétence et a construit des outils spécifiques et un véritable savoir-faire, qu'elle est limitée dans l'espace et dans le temps, qu'elle n'a pas interdit à Médérick Tremaud de retrouver un nouvel emploi et qu'elle comporte une contrepartie financière. Dans le cas où la cour estimerait nulle et de nul effet la clause de non-concurrence, la société Alma Consulting Group sollicite le remboursement par Médérick Tremaud de la somme de 10 764 euro.

La société Alma Consulting Group précise que Médérick Tremaud a été indemnisé au titre des congés payés. Elle conteste l'application de la convention collective Syntec en l'état de ses activités professionnelles très particulières ayant nécessité la mise en place d'un accord d'entreprise pour définir les avantages accordés aux salariés supérieurs aux avantages légaux.

Enfin elle sollicite l'indemnisation de ses frais de procédure à concurrence de la somme de 5 000 euro.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 15 mai 2008.

Motifs de la décision

Considérant qu'il convient tout d'abord, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner, sous le seul numéro 07-00893, la jonction des instances d'appel enregistrées sous les numéros 07-00893 et 07-01050;

1- Sur la rupture du contrat de travail

Considérant selon l'article L. 1232-6 alinéas 1 et 2 du Code du travail (anciens articles L. 122-14-1, alinéa 1 et L. 122-14-2, alinéa 1) que "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur";

Considérant selon l'article L. 1232-1 du même Code (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement;

Considérant enfin selon l'article L. 1235-1 (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) "qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié";

Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir de la faute grave de l'autre partie d'en rapporter seul la preuve;

Considérant au cas présent que la société Alma Consulting Group a notifié à Médérick Tremaud son licenciement pour faute grave en invoquant les motifs suivants :

- une insubordination : refus d'exécuter les instructions, obstruction systématique, mésentente avec son manager,

- un laxisme et des négligences notamment dans le traitement des dossiers Comanet et Stin & Stés,

- une attitude inadmissible concernant le dossier Prosegur et une attitude violente vis-à-vis de Sophie Uzan, collaboratrice du service marketing,

a- Sur le premier grief

Considérant que la société Alma Consulting Group a reproché à Médérick Tremaud d'être entré en rébellion vis-à-vis de son supérieur hiérarchique, Pascal Aubrée, directeur des ventes, et plus généralement d'avoir adopté à son égard une attitude d'opposition systématique et parasitaire ayant provoqué un climat délétère dans le service préjudiciable au bon fonctionnement de celui-ci;

Considérant que la mésentente entre Médérick Tremaud et Pascal Aubrée est établie; qu'il convient à cet égard de relever que des observations écrites ont été adressées à Médérick Tremaud le 14 janvier 2005 et que de son côté celui-ci a sollicité l'intervention du directeur général, Jean-Luc Abeasis, selon un courriel en date du 21 janvier 2005 définissant, selon ses propres constatations, les motifs de la mésentente ; que la société Alma Consulting Group n'a pas envisagé de régler amiablement le conflit puisqu'elle a procédé dans les jours suivants à la mise en œuvre de la procédure de licenciement;

Considérant que les échanges de courriels entre Médérick Tremaud et Pascal Aubrée (au cours du mois de janvier 2005 et notamment le 11 janvier) traduisent les difficultés professionnelles entre ces deux salariés affectés au sein du même service, chacun reprochant à l'autre les échecs dans la négociation avec certains clients (principalement sur le dossier Prosegur) et plus généralement une mauvaise gestion des contrats ; qu'il convient à cet égard de relever que les deux intéressés ont adopté l'un vis-à-vis de l'autre une grande liberté d'expression faisant une place importante à la critique de leurs actions respectives ; qu'ainsi il ne peut être reproché à Médérick Tremaud le ton assez virulent du courriel transmis à son supérieur hiérarchique le 11 janvier 2005 à 9 heures 27 alors qu'il se situe dans un échange assez vif entre les deux mêmes personnes relativement à l'échec enregistré dans la négociation d'un contrat commercial;

Considérant que la société Alma Consulting Group n'établit pas que Médérick Tremaud a refusé d'exécuter les instructions données par Pascal Aubrée;

Considérant que la seule mésentente entre Médérick Tremaud et son supérieur hiérarchique, en l'absence de toute tentative de règlement du conflit, ne peut constituer un grief suffisamment pertinent pour justifier la rupture du contrat de travail alors qu'il n'est pas établi que cette mésentente a provoqué un dysfonctionnement au sein du département social;

b- Sur le second grief

Considérant que la société Alma Consulting Group a reproché à Médérick Tremaud une mauvaise gestion des dossiers Comanet et Stin & Stés;

Considérant qu'en ce qui concerne le dossier Comanet, l'échange des courriels entre Médérick Tremaud et Pascal Aubrée ainsi que l'échange de courriels entre ce dernier et d'autres salariés de l'entreprise ne font nullement apparaître une négligence de la part de Médérick Tremaud dans le traitement de ce dossier qui ne lui a été définitivement attribué qu'à la fin du mois de janvier 2005 (soit peu de temps avant l'introduction de la procédure de licenciement);

Considérant qu'en ce qui concerne le dossier Stin & Stés les échanges de courriels entre Médérick Tremaud et Pascal Aubrée traduisent, non pas le refus du premier de fournir au second des réponses relativement à la signature du contrat commercial, mais les difficultés rencontrées avec le client concernant le montant de la prestation que celui-ci souhaitait voir réduite avant de renouveler la mission confiée à l'entreprise;

Considérant que le grief de laxisme et de négligence n'est donc pas établi;

c- Sur le troisième grief

Considérant que la société Alma Consulting Group a reproché à Médérick Tremaud une attitude inadmissible concernant le dossier Prosegur et une agressivité verbale vis-à-vis de Sophie Uzan en charge au sein du service marketing de recueillir les renseignements nécessaires à l'analyse des échecs enregistrés dans la négociation des contrats commerciaux;

Considérant qu'il résulte de l'attestation établie par Sophie Uzan qu'elle a effectivement rencontré des difficultés dans l'exécution de la mission confiée relativement au dossier Prosegur en raison principalement du conflit ayant opposé dans les jours précédents Médérick Tremaud à son supérieur hiérarchique sur la négociation de ce contrat et sur l'origine de l'échec de la négociation avec ce client;

Considérant toutefois qu'aucun propos insultant n'a été dénoncé par Sophie Uzan;

Considérant ainsi que ce dernier grief n'est pas suffisamment pertinent pour justifier la rupture immédiate du contrat de travail dès lors qu'il doit être replacé dans le contexte plus général de la mésentente entre Médérick Tremaud et son supérieur hiérarchique;

Considérant en conclusion qu'il convient de dire que le licenciement de Médérick Tremaud ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse;

Considérant que Médérick Tremaud peut prétendre au paiement du salaire impayé durant la mise à pied conservatoire et d'une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, ces sommes étant calculées sur la moyenne de la rémunération globale (fixe et variable) versée au salarié au cours des trois derniers mois;

Considérant que Médérick Tremaud revendique l'application de la convention collective nationale des personnels des bureaux d'études techniques du 15 décembre 1987, dite convention Syntec, alors que la société Alma Consulting Group précise qu'en l'absence de convention collective applicable en raison de la diversité des métiers entrant dans l'exercice de son activité professionnelle elle a conclu un accord d'entreprise en date du 26 mars 2002 complété par avenant en date du 9 septembre 2003;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société Alma Consulting Group adhère au syndicat professionnel Syntec-Conseil en management, membre de la Fédération des syndicats des sociétés d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseils et a pour activité principale la réalisation, pour le compte de ses clients, d'études techniques permettant la réduction du coût des charges fiscales et sociales (Médérick Tremaud étant affecté au département social) ; qu'ainsi l'activité de cette société la place dans le champ d'application de la convention collective Syntec même si le Code APE 748 K qui lui a été attribué correspond aux services annexes à la production et même si le personnel qu'elle emploie relève de métiers différents ; qu'enfin il convient de relever que l'application de la convention collective Syntec ne privait pas la société Alma Consulting Group de conclure un accord d'entreprise sous réserve toutefois de ne pas restreindre les avantages accordés aux salariés au titre de cette convention plus favorable;

Considérant que l'indemnité de licenciement due à Médérick Tremaud, en application des articles 18 et 19 de la convention collective Syntec, doit être calculée à partir de la moyenne des douze derniers mois ; qu'elle s'établit ainsi à la somme de 10 990,51 euro;

Considérant qu'après avoir pris en considération l'ancienneté de Médérick Tremaud dans l'entreprise, la brutalité de son éviction et la reprise par lui d'un nouvel emploi à compter du 16 mai 2005 mais avec une rémunération moindre, la cour fixe à la somme de 50 000 euro le montant des dommages-intérêts que la société Alma Consulting Group devra lui verser en réparation de l'ensemble de ses préjudices consécutifs à la perte injustifiée de son emploi;

2- Sur les autres demandes

a- Sur les congés payés

Considérant que les mentions portées sur les bulletins de salaire ne permettent pas d'identifier la part du salaire représentant l'indemnité de congés payés alors que la société Alma Consulting Group invoque les dispositions de l'avenant du 9 septembre 2003 ayant prévu que la rémunération variable serait versée "indemnité de congés payés incluse";

Considérant qu'en l'état du montant total de la rémunération versée, la réclamation présentée par Médérick Tremaud à hauteur de la somme de 8 114,25 euro est justifiée;

Considérant que les intérêts accordés à compter de la première demande en justice réparent suffisamment le non-paiement de la totalité des congés payés ; qu'ainsi toute demande complémentaire en paiement de dommages-intérêts doit être écartée;

b- Sur la clause de non-concurrence

Considérant qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives;

Considérant que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail liant les parties est ainsi libellée :

" Il vous est interdit, pendant une durée de deux ans après votre départ de la société, de participer directement ou indirectement ou d'exercer toutes fonctions dans une société située sur le territoire français et ayant une activité faisant concurrence à la société Alma Intervention et plus généralement, à toutes sociétés faisant partie du groupe Alma-PRG, du fait des connaissances que vous aurez acquises sur les activités de toutes les sociétés du groupe. Plus précisément, il vous est interdit de commercialiser toute activité de conseil en management rémunérée selon les résultats dégagés, d'entrer au service d'un des clients ou fournisseurs de la société sans autorisation expresse et écrite d'Alma Intervention... Par client, il convient d'entendre toute personne physique ou morale ayant eu recours à nos services, ainsi qu'aux firmes alliées aux clients ou placées sous leur dépendance et ce tant en France métropolitaine qu'aux Dom-Tom En contrepartie de cette clause, une indemnité compensatrice vous sera versée mensuellement pendant les douze mois suivant votre départ de la société, d'un montant égal à 20 % de votre dernier salaire mensuel fixe... "

Considérant que cette clause rédigée en termes trop généraux quant au périmètre de l'interdiction, sans limitation dans l'espace national et comportant une contrepartie financière versée pendant un temps inférieur à la durée de la clause et calculée sur une partie seulement de la rémunération, n'est pas valable;

Considérant que le salarié, qui a respecté une clause de non-concurrence illicite, n'a pas droit à une indemnité compensatrice de non-concurrence mais il peut prétendre à des dommages- intérêts en réparation du préjudice subi consécutivement à l'atteinte portée à sa liberté d'exercer une activité professionnelle;

Considérant au cas présent qu'il n'est pas contesté que Médérick Tremaud a respecté la clause de non-concurrence;

Considérant qu'il convient d'accorder à Médérick Tremaud la somme de 25 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ; que de cette somme doit être déduite l'indemnité versée par la société Alma Consulting Group au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence ; qu'aucune somme n'est due au titre des congés payés sur la somme versée dès lors que la clause de non-concurrence a été déclarée illicite;

c- Sur les frais de procédure

Considérant enfin qu'il convient d'accorder à Médérick Tremaud la somme de 3 000 euro au titre des frais de procédure non taxables exposés tant en première instance qu'en cause d'appel au sens des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et par décision contradictoire, Ordonne, sous le seul numéro 07-00893, la jonction des instances d'appel enregistrées sous les numéros 07-00893 et 07-01050, Infirme le jugement rendu le 29 janvier 2007 par le Conseil de prud'hommes de Nanterre, Statuant à nouveau sur l'ensemble des demandes, Dit que le licenciement de Médérick Tremaud est sans cause réelle et sérieuse, fait application de la convention collective Syntec aux relations professionnelles et dit que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail est nulle et de nul effet, Condamne la société Alma Consulting Group à payer à Médérick Tremaud les sommes de : • 8 114,25 euro à titre de complément de congés payés, • 4 497,07 euro au titre du salaire non versé durant la mise à pied conservatoire outre 449,70 euro au titre des congés payés afférents, • 23 163 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 2 316,30 euro au titre des congés payés afférents, • 10 990,51 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2005, • 50 000 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, • 25 000 euro à titre de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de ce jour, • 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Ordonne le remboursement par Médérick Tremaud de la somme versée au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, Ordonne en tant que de besoin la remise d'un bulletin de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic conformes à la présente décision, Déboute les parties de toutes autres demandes, Condamne la société Alma Consulting Group aux entiers dépens et aux frais d'exécution de la présente décision.