CA Versailles, 5e ch. B, 26 juin 2008, n° 07-00889
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Baiata
Défendeur :
Alma Consulting Group (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Minini
Conseillers :
Mmes Rouaud-Folliard, Ollat
Avocats :
Mes Viandier, Hammelrath-Cazenave
Exposé des faits et de la procédure
Fabien Baiata a été embauché par la société Alma Consulting Group selon contrat à durée indéterminée en date du 12 février 2001 en qualité d'ingénieur commercial. Cette société est une société de conseil spécialisée dans la recherche de la réduction des coûts dans les entreprises (notamment au niveau fiscal et social). Le contrat de travail a stipulé une clause de non-concurrence pendant une durée de deux années après le départ de la société et une rémunération compensatrice versée mensuellement pendant 12 mois d'un montant égal à 20 % du dernier salaire mensuel fixe.
Fabien Baiata percevait une rémunération fixe (2 287 euro) et une rémunération variable en fonction des objectifs commerciaux fixés chaque année. La moyenne des 3 derniers mois de salaires a fait apparaître une rémunération mensuelle brute de 6 811,60 euro et la moyenne des 12 derniers mois de salaire une rémunération mensuelle brute de 6 755,76 euro.
La société Alma Consulting Group n'appliquant aucune convention collective, un accord d'entreprise a été signé le 26 mars 2002 entre elle et le Snepec CFE-CGC (Syndicat national de l'encadrement des professions des études et du conseil). Un avenant à cet accord a été conclu le 9 septembre 2003 fixant de nouvelles modalités concernant les clauses de non-concurrence.
Au début de l'année 2005 un conflit a opposé Fabien Baiata à la société Alma Consulting Group et plus particulièrement à Pascal Aubrée, directeur des ventes, en ce qui concerne le montant de la rémunération variable. Un dernier entretien a été prévu entre Fabien Baiata et Pascal Aubrée le 8 mars 2005 à 15 heures.
Ce même 8 mars 2005 à 12 heures 04, Isabelle Rocamora, assistante de direction au sein de la société Alma Consulting Group et partageant un bureau voisin de celui occupé par Fabien Baiata au sixième étage de l'établissement, a adressé à celui-ci le courriel suivant :
"A plusieurs reprises déjà, je t'ai demandé de changer ton comportement : il est impossible de te faire la bise sans que tu " dérapes ", ni te croiser dans les couloirs sans que tu t'agrippes à moi ou ne provoques un contact physique quelle que soit la situation ! Le fait qu'une femme puisse rire à tes blagues ne constitue en aucun cas une sollicitation de sa part à de tels comportements. Aujourd'hui lorsque tu t'es permis d'attraper la couture de mon pantalon en touchant mon postérieur, tu as dépassé les limites du tolérable, tant sur le plan humain qu'en matière de droit du travail. Dorénavant, je t'interdis formellement de rentrer dans mon bureau puisqu'a priori nous n'avons aucun motif de collaboration. Ce mail représente une mise en garde très officielle."
Isabelle Rocamora a adressé ce courriel en copie à ses supérieurs hiérarchiques : Tiphaine Verneret, directrice des ressources humaines, Michel Nave et Pascal Aubrée.
Fabien Baiata a immédiatement contesté avoir eu une attitude déplacée à l'égard d'Isabelle Rocamora selon courriel transmis le même jour à 13 heures 13 à Pascal Aubrée et à Tiphaine Verneret en mettant le message en copie à Isabelle Rocamora et à Michel Nave. Par ce courriel il a dénoncé le procédé mis en place à son encontre pour introduire une procédure de licenciement motivée par son refus de signer l'avenant à son contrat de travail.
Le même 8 mars 2005, en fin de journée, la société Alma Consulting Group a convoqué Fabien Baiata à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 15 mars suivant et lui a notifié une mise à pied conservatoire.
La société Alma Consulting Group a saisi le CHSCT des faits dénoncés par Isabelle Rocamora. Une enquête a été diligentée du 11 au 14 mars 2005 et un compte-rendu a été établi par Chantal Braleret, secrétaire.
Enfin selon lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 23 mars 2005 la société Alma Consulting Group a notifié à Fabien Baiata son licenciement pour faute grave en ces termes, après avoir longuement rappelé les échanges de courriels et l'enquête effectuée par le CHSCT :
"Le 8 mars dernier, la direction générale a été saisie par une collaboratrice de faits vous concernant, d'une gravité telle que nous avons été dans l'obligation d'envisager une sanction à votre encontre pouvant aller jusqu'à votre licenciement pour faute...
Isabelle Rocamora a toujours affirmé, témoignages à l'appui d'un certain nombre de salariés, que votre geste malheureux et inopportun du 8 mars dernier n'était que la poursuite ou l'aboutissement de votre harcèlement à obtenir ses faveurs et ce depuis presque six mois.
... il ressort clairement des enquêtes diligentées que le 8 mars dernier, vous avez adopté une attitude inacceptable en commettant ce geste très déplacé sur la personne d'Isabelle Rocamora, geste faisant suite à un cortège d'attouchements et de tentatives physiques de rapprochement dont elle vous a toujours signifié le caractère inconvenant et sommé d'y mettre un terme.
En dépit de plusieurs mises en demeure verbales de cesser vos agissements, vous n'avez pas cru devoir mettre un terme à vos actes de harcèlement sexuel, couronnés par votre geste du 8 mars dernier, vous permettant de porter votre main sur la couture de son pantalon en touchant son postérieur, geste pour le moins " déplacé ", pour vous attirer ses faveurs, alors même qu'elle repoussait systématiquement toutes vos avances.
Vous n'êtes pas sans savoir que la jurisprudence a, à plusieurs reprises, confirmé que les gestes déplacés à caractère d'attouchements sexuels sont constitutifs d'une faute grave et que le harcèlement sexuel est sévèrement réprimé par le Code du travail, comme par le Code pénal..."
Lors de la rupture du contrat de travail, la société Alma Consulting Group a maintenu la clause de non-concurrence et a versé à Fabien Baiata une somme mensuelle brute de 901 euro pendant 24 mois, soit la somme totale de 21 624 euro.
Contestant le motif de son licenciement, estimant que la clause de non-concurrence était illicite et invoquant l'application de la convention collective Syntec, Fabien Baiata a fait convoquer la société Alma Consulting Group devant le Conseil de prud'hommes de Créteil le 22 avril 2005 afin d'obtenir le paiement de rappels de salaires et de congés payés, le paiement des indemnités de rupture du contrat de travail calculées selon les modalités de la convention collective Syntec et le paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'exécution de la clause de non-concurrence.
Le Conseil de prud'hommes de Créteil s'étant déclaré incompétent au profit du Conseil de prud'hommes de Nanterre selon jugement en date du 28 mars 2006, l'instance a été poursuivie devant cette dernière juridiction.
Par jugement en date du 29 janvier 2007 le Conseil de prud'hommes de Nanterre a débouté Fabien Baiata de toutes ses demandes, débouté la société Alma Consulting Group de sa demande reconventionnelle et condamné Fabien Baiata aux entiers dépens.
Fabien Baiata a régulièrement relevé appel de cette décision.
Fabien Baiata demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau:
- de faire application de la convention collective Syntec du fait de l'activité principale de conseil exercée par son employeur,
- de dire la clause de non-concurrence nulle car trop étendue dans l'espace et dans le temps alors par ailleurs que l'avenant à l'accord d'entreprise en date du 9 septembre 2003 modifiant les modalités des clauses de non-concurrence conclues dans l'entreprise ne lui est pas opposable en ce qui concerne la dénonciation par l'employeur en cours d'exécution de la clause et la réduction de la contrepartie financière,
- de condamner la société Alma Consulting Group au paiement des sommes de:
* 27 929,28 euro au titre du reliquat de l'indemnité de non-concurrence outre les congés payés afférents,
* 15 000 euro à titre de dommages-intérêts pour clause de non-concurrence nulle sans remboursement de la somme déjà versée pendant les 24 mois ayant suivi la rupture du contrat de travail,
* 8 114,25 euro à titre de rappel de congés payés sur commissions,
* 2 162,40 euro au titre des congés payés sur l'indemnité de non-concurrence déjà versée,
* 6 811,60 euro à titre de dommages-intérêts pour non-paiement des congés payés dus,
* 4 193,77 euro au titre du salaire non versé durant la mise à pied conservatoire outre les congés payés afférents,
* 20 000 euro à titre de rappel de commissions outre les congés payés afférents,
* 20 434,80 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,
* 10 028,18 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement calculée selon la convention collective Syntec,
* 20 434,80 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
* 150 000 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation de ses préjudices financier, matériel et moral,
* 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Fabien Baiata fait valoir pour l'essentiel qu'il s'est opposé dès 2004 à la modification de sa rémunération variable et qu'à compter de cette période il a été perçu comme étant un agitateur.
Il fixe à cette date le début de ses difficultés avec son supérieur hiérarchique. Il indique qu'en début 2005 il s'est également refusé à une modification du mode de calcul de sa rémunération et que pour toute réponse la société Alma Consulting Group a entrepris à son encontre une mesure de licenciement.
Fabien Baiata conteste formellement avoir harcelé sexuellement Isabelle Rocamora depuis le mois de septembre 2004 et conteste de même avoir eu un comportement déplacé à l'encontre de cette même collègue de travail le 8 mars 2005. Il fait observer qu'il a sollicité une confrontation avec Isabelle Rocamora le jour de l'entretien préalable mais s'est vu refuser une telle mesure. Il produit aux débats les attestations de nombreuses salariées travaillant habituellement avec lui qui toutes témoignent, y compris Mme Neveu, déléguée du personnel, qu'il n'a jamais eu un quelconque mauvais comportement envers les personnes de sexe féminin. Il affirme que le grief de harcèlement sexuel est le fruit de la malveillance de son employeur, monté de toutes pièces pour justifier son licenciement sans indemnités.
La société Alma Consulting Group conclut à la confirmation du jugement déféré et au rejet de toutes les réclamations présentées par Fabien Baiata. Elle précise tout d'abord qu'elle démontre parfaitement la réalité et la gravité des griefs reprochés au salarié par la production aux débats des mails, de l'enquête du CHSCT, des attestations d'Isabelle Rocamora et d'autres salariés ayant assisté à l'incident du 8 mars 2005 ou ayant été destinataires des confidences de celle-ci. Elle estime que la clause de non-concurrence est licite dès lors qu'elle protège les intérêts légitimes de l'entreprise qui a développé une méthodologie particulièrement originale dans ses domaines de compétence et a construit des outils spécifiques et un véritable savoir-faire, qu'elle est limitée dans l'espace et dans le temps, qu'elle n'a pas interdit à Fabien Baiata de retrouver un nouvel emploi et qu'elle comporte une contrepartie financière. Dans le cas où la cour estimerait nulle et de nul effet la clause de non-concurrence, la société Alma Consulting Group sollicite le remboursement par Fabien Baiata de la somme de 21 624 euro.
La société Alma Consulting Group précise que Fabien Baiata a été indemnisé au titre des congés payés. Elle conteste l'application de la convention collective Syntec en l'état de ses activités professionnelles très particulières ayant nécessité la mise en place d'un accord d'entreprise pour définir les avantages accordés aux salariés supérieurs aux avantages légaux. Enfin elle sollicite l'indemnisation de ses frais de procédure à concurrence de la somme de 3 000 euro.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 15 mai 2008.
Motifs de la décision
1 - Sur la rupture du contrat de travail
Considérant selon l'article L. 1232-6 alinéas 1 et 2 du Code du travail (anciens articles L. 122-14-1, alinéa 1 et L. 122-14-2, alinéa 1) que "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur";
Considérant selon l'article L. 1232-1 du même Code (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement;
Considérant enfin selon l'article L. 1235-1 (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) "qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié";
Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir de la faute grave de l'autre partie d'en rapporter seul la preuve;
Considérant au cas présent que la société Alma Consulting Group a notifié à Fabien Baiata son licenciement pour faute grave lui reprochant, dans les termes ci-dessus reproduits, d'avoir harcelé sexuellement Isabelle Rocamora depuis le mois de septembre 2004 en vue d'obtenir ses faveurs et d'avoir eu à nouveau le 8 mars 2005 un comportement inacceptable envers cette même personne en "portant sa main sur la couture de son pantalon et en touchant son postérieur";
Considérant que Fabien Baiata a toujours et immédiatement contesté les faits reprochés y voyant une manipulation de son employeur pour justifier la rupture du contrat de travail alors qu'il refusait depuis plusieurs mois de signer un avenant modifiant le calcul de sa rémunération variable pour l'année 2005;
Considérant qu'il convient tout d'abord de relever la concomitance le 8 mars 2005 entre la dénonciation des faits par Isabelle Rocamora (à 12 heures 04) avec copies du courriel de protestation à trois de ses supérieurs hiérarchiques, dont Pascal Aubrée en charge de la négociation des rémunérations, et l'entretien fixé à 15 heures par ce dernier pour la signature de l'avenant contesté ; qu'il n'est toutefois pas établi qu'Isabelle Rocamora connaissait les difficultés rencontrées par Fabien Baiata relativement à la négociation de sa rémunération;
Considérant cependant qu'il résulte de l'enquête effectuée par le CHSCT antérieurement à l'entretien préalable au licenciement:
- que Fabien Baiata était connu comme ayant un comportement habituellement exubérant et extraverti, qualifié par Isabelle Rocamora elle-même "de gamin qui fait le clown", s'adonnant à des plaisanteries avec démonstrations affectueuses se manifestant de manière spontanée et identique avec toutes les femmes,
- que depuis l'installation d'Isabelle Rocamora dans un bureau à proximité de Fabien Baiata, celui-ci avait pris l'habitude, alors même que cette salariée partageait son espace professionnel avec un autre salarié, Antoine Gianelli, de venir fréquemment l'importuner (plus particulièrement la faire rire et lui emprunter des sachets de thé) provoquant l'agacement de cette jeune femme voire son irritation,
- qu'Isabelle Rocamora a déclaré qu'elle ne travaillait pas avec Fabien Baiata et que celui-ci lui avait proposé à plusieurs reprises de la rencontrer à l'extérieur, ce qu'elle avait refusé déclarant "qu'elle n'était pas libre" et qu'en toute hypothèse elle ne souhaitait pas avoir avec lui une quelconque relation,
- qu'Isabelle Rocamora a précisé qu'elle devait subir les assauts répétés de la part de Fabien Baiata et qu'elle avait le sentiment de "gestes volés" commis d'une façon furtive précisant enfin qu'elle n'avait jamais vraiment parlé de cette gêne grandissante à son entourage car elle pensait pouvoir se débrouiller toute seule,
- qu'enfin Isabelle Rocamora a indiqué que le 8 mars 2005 vers 11 heures, alors qu'elle se tenait dans le couloir à proximité de son bureau, Fabien Baiata s'est dirigé vers elle, en voulant l'embrasser puis lui a mis la main à son fessier avant de s'enfuir dans son propre bureau,
Considérant qu'Antoine Gianelli a confirmé avoir vu Fabien Baiata le 8 mars 2005 s'approcher d'Isabelle Rocamora, "badiner" avec elle en la prenant par l'épaule, être repoussé par la jeune femme et "porter alors sa main sur le postérieur de celle-ci";
Considérant que les autres personnes interrogées dans le cadre de l'enquête n'ont pas assisté à l'incident du 8 mars 2005 mais ont précisé, s'agissant de Françoise Boyer et de Guénola Allard, qu'elles avaient reçu les confidences d'Isabelle Rocamora se plaignant du comportement malsain à son égard de Fabien Baiata;
Considérant, malgré les dénégations de Fabien Baiata, qu'il résulte de cette enquête que s'il a adopté pendant plusieurs mois vis-à-vis d'Isabelle Rocamora un comportement présentant un caractère excessif provoquant une désapprobation totale de la part de cette jeune femme, pour autant il résulte de l'ensemble des déclarations de toutes les personnes interrogées qu'il n'a pas commis d'agissements dans le but d'obtenir de sa part des faveurs de nature sexuelle, Isabelle Rocamora n'ayant elle-même jamais invoqué de telles propositions après avoir fait connaître qu'elle ne souhaitait pas le rencontrer à l'extérieur de l'entreprise; qu'il est établi également que Fabien Baiata a toujours agi spontanément en présence d'autres personnes travaillant au même étage, sans provoquer d'ailleurs aucune réaction négative auprès de délégués du personnel ou de ses supérieurs hiérarchiques;
Considérant que les faits de harcèlement sexuel ne sont donc pas établis;
Considérant par contre qu'il est établi que Fabien Baiata a eu à plusieurs reprises et notamment le 8 mars 2005 des gestes inconvenants vis-à-vis d'Isabelle Rocamora malgré les remarques et protestations de celle-ci ; que ces gestes répétés constituent une faute justifiant la rupture du contrat de travail;
Considérant toutefois qu'en raison de l'absence de collaboration professionnelle entre Fabien Baiata et Isabelle Rocamora ne nécessitant pas leur rencontre pour l'exécution des missions relevant d'un même service et compte tenu de la possibilité d'imposer à Fabien Baiata la réalisation de ses missions dans un lieu distinct compte tenu de l'importance des locaux mis à la disposition des salariés de l'entreprise, il n'était pas impossible pour l'employeur de laisser Fabien Baiata effectuer son préavis;
Considérant qu'il convient donc d'infirmer le jugement déféré, d'écarter la faute grave et de dire que le licenciement de Fabien Baiata reposait sur une cause réelle et sérieuse;
Considérant que Fabien Baiata peut prétendre au paiement du salaire impayé durant la mise à pied conservatoire et d'une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, ces sommes étant calculées sur la moyenne de la rémunération globale (fixe et variable) versée au salarié au cours des trois derniers mois;
Considérant que Fabien Baiata revendique l'application de la convention collective nationale des personnels des bureaux d'études techniques du 15 décembre 1987, dite convention Syntec, alors que la société Alma Consulting Group précise qu'en l'absence de convention collective applicable en raison de la diversité des métiers entrant dans l'exercice de son activité professionnelle elle a conclu un accord d'entreprise en date du 26 mars 2002 complété par avenant en date du 9 septembre 2003;
Considérant qu'il n'est pas contesté que la société Alma Consulting Group adhère au syndicat professionnel Syntec-Conseil en management, membre de la Fédération des syndicats des sociétés d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseils et a pour activité principale la réalisation, pour le compte de ses clients, d'études techniques permettant la réduction du coût des charges fiscales et sociales (Fabien Baiata étant affecté au département social) ; qu'ainsi l'activité de cette société la place dans le champ d'application de la convention collective Syntec même si le code APE 748 K qui lui a été attribué correspond aux services annexes à la production et même si le personnel qu'elle emploie relève de métiers différents ; qu'enfin il convient de relever que l'application de la convention collective Syntec ne privait pas la société Alma Consulting Group de conclure un accord d'entreprise sous réserve toutefois de ne pas restreindre les avantages accordés aux salariés au titre de cette convention;
Considérant que l'indemnité de licenciement due à Fabien Baiata, en application des articles 18 et 19 de la convention collective Syntec, doit être calculée à partir de la moyenne des douze derniers mois ; qu'elle s'établit ainsi à la somme de 9 945,98 euro;
2 - Sur les autres demandes
a - Sur les congés payés
Considérant que les mentions portées sur les bulletins de salaire ne permettent pas d'identifier la part du salaire représentant l'indemnité de congés payés alors que la société Alma Consulting Group invoque les dispositions de l'avenant du 9 septembre 2003 ayant prévu que la rémunération variable serait versée "indemnité de congés payés incluse";
Considérant qu'en l'état du montant total de la rémunération versée, la réclamation présentée par Fabien Baiata à hauteur de la somme de 8 114,25 euro est justifiée;
Considérant que les intérêts accordés à compter de la première demande en justice réparent suffisamment le non-paiement de la totalité des congés payés ; qu'ainsi toute demande complémentaire en paiement de dommages-intérêts doit être écartée;
b - Sur la clause de non-concurrence
Considérant qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives;
Considérant que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail liant les parties est ainsi libellée :
" Il vous est interdit, pendant une durée de deux ans après votre départ de la société, de participer directement ou indirectement ou d'exercer toutes fonctions dans une société située sur le territoire français et ayant une activité faisant concurrence à la société Alma Intervention et plus généralement, à toutes sociétés faisant partie du groupe Alma-PRG, du fait des connaissances que vous aurez acquises sur les activités de toutes les sociétés du groupe. Plus précisément, il vous est interdit de commercialiser toute activité de conseil en management rémunérée selon les résultats dégagés, d'entrer au service d'un des clients ou fournisseurs de la société sans autorisation expresse et écrite d'Alma Intervention... Par client, il convient d'entendre toute personne physique ou morale ayant eu recours à nos services, ainsi qu'aux firmes alliées aux clients ou placées sous leur dépendance et ce tant en France métropolitaine qu'aux Dom-Tom... En contrepartie de cette clause, une indemnité compensatrice vous sera versée mensuellement pendant les douze mois suivant votre départ de la société, d'un montant égal à 20 % de votre dernier salaire mensuel fixe... "
Considérant que cette clause rédigée en termes trop généraux quant au périmètre de l'interdiction, sans limitation dans l'espace national et comportant une contrepartie financière versée pendant un temps inférieur à la durée de la clause et calculée sur une partie seulement de la rémunération, n'est pas valable;
Considérant que le salarié, qui a respecté une clause de non-concurrence illicite, n'a pas droit à une indemnité compensatrice de non-concurrence mais il peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi consécutivement à l'atteinte portée à sa liberté d'exercer une activité professionnelle;
Considérant au cas présent qu'il n'est pas contesté que Fabien Baiata a respecté la clause de non-concurrence;
Considérant qu'il convient d'accorder à Fabien Baiata la somme globale de 35 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ; que de cette somme doit être déduite l'indemnité versée par la société Alma Consulting Group au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence ; qu'aucune somme n'est due au titre des congés payés sur la somme versée dès lors que la clause de non-concurrence a été déclarée illicite;
c - Sur les commissions
Considérant que Fabien Baiata ne peut réclamer, postérieurement à la rupture de son contrat de travail en mars 2005, les commissions prévues par l'avenant en date du 19 mars 2004 fixant un minimum de commissions en cas de départ de la société dans l'année 2004, alors qu'il a refusé de signer le nouvel avenant au titre de l'année 2005 prévoyant de nouvelles modalités pour ce qui concerne un départ de la société dans l'année 2005;
d - Sur les frais de procédure
Considérant enfin qu'il convient d'accorder à Fabien Baiata la somme de 3 000 euro au titre des frais de procédure non taxables exposés tant en première instance qu'en cause d'appel au sens des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et par décision contradictoire, Infirme le jugement rendu le 29 janvier 2007 par le Conseil de prud'hommes de Nanterre, Dit que le licenciement de Fabien Baiata est fondé sur une cause réelle et sérieuse, fait application de la convention collective Syntec aux relations professionnelles et dit que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail est nulle et de nul effet, Condamne la société Alma Consulting Group à payer à Fabien Baiata les sommes de : 8 114,25 euro à titre de complément de congés payés, 4 193,77 euro au titre du salaire non versé durant la mise à pied conservatoire outre 419,37 euro au titre des congés payés afférents, 20 434,80 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 2 043,48 euro au titre des congés payés afférents, 9 945,98 euro à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2005, 35 000 euro à titre de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence outre intérêts au taux légal à compter de ce jour, 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Ordonne le remboursement par Fabien Baiata de la somme versée au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, Ordonne en tant que de besoin la remise d'un bulletin de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic conformes à la présente décision, Déboute les parties de toutes autres demandes, Condamne la société Alma Consulting Group aux entiers dépens et aux frais d'exécution de la présente décision.