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Décisions

CA Versailles, 14e ch., 27 janvier 2010, n° 08-08996

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bonhommet-Boterel

Défendeur :

Bonapace, Editions Jab Inc.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fedou

Conseillers :

Mme Andrich, M. Boiffin

Avocats :

SCP Tuset-Chouteau, SCP Fievet-Lafon, Mes Laugier, Sauphanor

TGI Versailles, prés. ord., du 9 juill. …

9 juillet 2008

Faits et procédure

Madame Julie Bonapace a mis au point au début des années 1990 une méthode nouvelle de préparation à la naissance, orientée vers le couple, et destinée à atténuer la douleur des femmes lors des accouchements, dénommée " méthode Bonapace "; la diffusion de cette méthode est assurée par des stages de formation que Madame Bonapace dispense aux professionnels intéressés.

Après s'être inscrite en juin 1999 au premier stage organisé en France par Madame Bonapace, Madame Sylvie Bonhommet-Boterel a, le 21 mars 2002, signé avec Madame Julie Bonapace un contrat de licence de savoir-faire, d'une durée d'un an reconductible par tacite reconduction, qui faisait d'elle le distributeur exclusif en France, Suisse et Belgique, et plus généralement dans tous les pays francophones hors le Canada, des ouvrages didactiques relatifs à la méthode Bonapace.

Par courrier recommandé de son conseil en date du 18 février 2004, Madame Bonapace a informé Madame Bonhommet-Boterel qu'elle mettait fin au contrat de licence liant les parties, ce dont cette dernière a pris acte par lettre du 5 avril 2004.

Faisant grief à Madame Bonhommet-Boterel d'avoir, postérieurement à la résiliation du contrat, continué à utiliser son nom et à enseigner sa méthode au moyen de stages rémunérés, et consécutivement à une mise en demeure en date du 23 mai 2006 restée infructueuse, Madame Julie Bonapace a, par acte du 4 juin 2008, assigné en référé Madame Sylvie Bonhommet-Boterel, aux fins de cessation immédiate et sous astreinte de tout usage et exploitation du nom de la demanderesse, de la méthode Bonapace et, plus généralement, du savoir-faire qu'elle avait pu acquérir au titre de sa collaboration avec elle, et de condamnation au paiement de provisions sur dommages-intérêts.

Par ordonnance du 9 juillet 2008, le Président du Tribunal de grande instance de Versailles a :

- rejeté les fins de non-recevoir opposées par Madame Bonhommet-Boterel;

- ordonné à Madame Bonhommet-Boterel de cesser immédiatement tout usage et exploitation du nom de Madame Julie Bonapace, de la méthode Bonapace, et plus généralement, du savoir-faire qu'elle a pu acquérir au titre de sa collaboration avec Madame Bonapace, sous peine d'astreinte de 100 euro par jour de retard à l'expiration du délai de huit jours à compter de la signification de l'ordonnance;

- condamné Madame Bonhommet-Boterel à payer à Madame Bonapace et la société Editions Jab Inc. la somme de 2 000 euro le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

- dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus, et rejeté toute autre demande;

- mis les dépens de l'instance de référé à la charge de Madame Bonhommet-Boterel.

Madame Sylvie Bonhommet-Boterel a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses écritures récapitulatives en date du 2 décembre 2009, auxquelles il convient de se reporter par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, elle soulève à titre principal l'irrecevabilité des demandes adverses tirées de leur indétermination, et la fin de non-recevoir pour défaut d'intérêt et de qualité à agir, d'une part au motif que Madame Bonapace ne justifie pas de sa qualité à représenter la société Editions Jab, seule titulaire des droits revendiqués, d'autre part parce que la " méthode Bonapace " n'est pas protégeable.

A titre subsidiaire, contestant les faits de concurrence déloyale qui lui sont reprochés, et estimant que c'est en réalité Madame Bonapace qui s'insinue dans son sillage, l'appelante demande à la cour de constater l'absence de démonstration d'un trouble manifestement illicite, de constater l'existence d'une contestation sérieuse et, en conséquence, de débouter les intimées de toutes leurs prétentions.

Reconventionnellement, elle sollicite la condamnation, au besoin par provision, de Madame Julie Bonapace et de la société Editions Jab, in solidum, à lui payer les sommes suivantes :

- 12 155 euro à titre de dommages et intérêts pour rupture unilatérale fautive du contrat de licence de savoir-faire,

- 10 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices tirés des faits de concurrence déloyale commis par Madame Bonapace,

- 3 000 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

et à supporter les entiers dépens.

Aux termes de ses écritures récapitulatives en date du 4 décembre 2009, auxquelles il convient de se reporter par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, Madame Julie Bonapace et la société Editions Jab répliquent que les demandes présentées par elles sont suffisamment précises et déterminées et que Madame Bonapace a qualité à agir puisqu'elle est l'actionnaire unique de la société Editions Jab et que le contrat de licence a été passé entre elle-même à titre personnel et Madame Sylvie Bonhommet-Boterel.

Elles font valoir que Madame Bonapace a également intérêt à agir, dès lors que son action tend à démontrer que l'appelante a pillé son savoir-faire et sa réputation en vue d'exploiter, en dehors de tout contrat, une méthode dont elle n'est pas l'auteur.

Elles considèrent que la concurrence déloyale reprochée à la partie adverse est caractérisée par l'usage et l'exploitation par cette dernière, postérieurement à la résiliation du contrat, du nom et du savoir-faire de l'intimée en vue de s'approprier sa clientèle.

Aussi, elles concluent à la confirmation de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a:

- dit qu'elles sont parfaitement recevables à agir;

- énoncé que l'usage et l'exploitation par l'appelante du nom et du savoir-faire de Madame Bonapace sont constitutifs d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme, en conséquence, ordonné sous astreinte à la partie adverse de cesser immédiatement tout usage et toute exploitation du nom de Madame Julie Bonapace, de la méthode Bonapace et, plus généralement, du savoir-faire qu'elle a pu acquérir au titre de sa collaboration avec l'intimée, l'astreinte devant être productrice d'intérêts au taux légal, et la cour se réservant le pouvoir de liquider ladite astreinte;

- débouté Madame Bonhommet-Boterel de toutes ses prétentions.

Se portant incidemment appelantes de la décision de première instance, elles demandent à la cour de :

- condamner Madame Sylvie Bonhommet-Boterel à leur payer la somme de 11 430 euro à titre de provision, somme qui portera intérêt au taux légal à compter du 23 mai 2006, date de la mise en demeure;

- condamner Madame Sylvie Bonhommet-Boterel à leur payer la somme de 3 000 euro en réparation du préjudice moral subi.

En tout état de cause, elles sollicitent la condamnation de Madame Sylvie Bonhommet-Boterel à leur payer la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et à prendre en charge les entiers dépens de la présente instance.

Motifs de l'arrêt :

Sur les fins de non-recevoir soulevées par Madame Bonhommet-Boterel:

Considérant que, se fondant sur les dispositions de l'article 122 du Code de procédure civile, Madame Sylvie Bonhommet-Boterel fait valoir que les prétentions de Madame Bonapace ne décrivent nullement les mesures de nature à faire cesser le prétendu trouble dont elle se plaint, et que la décision de première instance ne permet pas de saisir les actes qui seraient prohibés pour l'appelante;

Mais considérant qu'en première instance, Madame Julie Bonapace et la société Editions Jab Inc. ont demandé qu'il soit ordonné à Madame Sylvie Bonhommet-Boterel sous astreinte la cessation immédiate de tout usage et de toute exploitation du nom de Madame Julie Bonapace, de la méthode Bonapace et, plus généralement, du savoir-faire qu'elle a pu acquérir au titre de sa collaboration avec Madame Julie Bonapace;

Considérant que cette demande, accueillie quasiment dans les mêmes termes par le premier juge, était suffisamment précise et déterminée pour permettre à la défenderesse de comprendre la nature et l'étendue de l'interdiction sollicitée et prononcée à son encontre;

Considérant que le moyen soulevé par l'appelante, au demeurant non invoqué devant le premier juge, tiré de l'indétermination des demandes, doit donc être écarté;

Considérant que, pour conclure au défaut de qualité à agir de Madame Bonapace et de la société Editions Jab, Madame Bonhommet-Boterel expose que la " convention de respect des droits de propriété intellectuelle et d'engagement de non-concurrence " a été conclue entre les Editions Jab et l'appelante, et qu'à défaut de produire les statuts et l'avenant de la société les Editions Jab ainsi que la modification de son immatriculation, Madame Bonapace ne justifie pas de sa qualité à représenter la société demanderesse;

Mais considérant que, d'une part, la qualité pour agir de Madame Bonapace ne peut être valablement discutée, puisque le contrat de licence de savoir-faire, sur lequel cette dernière se fonde au soutien de la présente instance, a été régularisé entre elle-même, désignée comme étant " le concédant ", et Madame Bonhommet-Boterel, dénommée le " licencié ";

Et considérant que, d'autre part, si la convention de respect des droits de propriété intellectuelle et d'engagement de non-concurrence a été conclue entre les Editions Jab Inc. et Madame Sylvie Bonhommet-Boterel, il est justifié par un certificat établi le 12 octobre 2007 par une étude notariale du Québec que Madame Julie Bonapace est le seul actionnaire et le seul administrateur des Editions Jab Inc.;

Considérant qu'au demeurant, ladite convention a été signée respectivement par Madame Sylvie Bonhommet-Boterel et par Monsieur Yves Morisset, en tant que représentant dûment autorisé par délégation de signature, sans que l'existence et la validité de cette délégation aient été mises en cause;

Considérant que, dès lors, le moyen soulevé par l'appelante, tiré du défaut de qualité pour agir de Madame Bonapace et de la société Editions Jab Inc., ne peut prospérer et doit être écarté;

Considérant que, par ailleurs, Madame Sylvie Bonhommet-Boterel conteste l'intérêt à agir des intimées, au motif que ces dernières prétendent lui interdire le droit d'enseigner une méthode d'accouchement, alors que l'appelante ne dispose plus d'aucun matériel pédagogique distribué par les Editions Jab, et alors qu'il résulte du contrat de licence de savoir-faire que la méthode Bonapace n'est pas protégeable;

Mais considérant que, ainsi que le relèvent les intimées, la restitution physique du matériel pédagogique par Madame Bonhommet-Boterel, à la demande du conseil de Madame Bonapace, n'a pas nécessairement empêché une utilisation illégitime de son contenu postérieurement à la résiliation du contrat et à la restitution de ce matériel;

Et considérant que, si le contrat de licence de savoir-faire mentionne expressément qu'aucun élément de ce savoir-faire contractuel n'est couvert par un droit de propriété industrielle du concédant, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité des demandes formées dans le cadre de la présente instance par Madame Bonapace et la société Editions Jab Inc., sur le fondement de la responsabilité délictuelle, des chefs de concurrence déloyale et parasitisme;

Considérant qu'au regard de ce qui précède, les fins de non-recevoir soulevées par Madame Sylvie Bonhommet-Boterel, tirées du défaut de qualité pour agir et de l'absence d'intérêt à agir, doivent être rejetées.

Sur l'existence d'un trouble manifestement illicite:

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 809 du Code de procédure civile que le Président du Tribunal de grande instance peut toujours, même en présence d'une constatation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite;

Considérant que Madame Sylvie Bonhommet-Boterel conteste les faits de concurrence déloyale et de parasitisme invoqués à son encontre, tirés de la prétendue diffusion par elle de publicités similaires à celles qu'elle pouvait diffuser durant le temps où elle était contractuellement liée à Madame Bonapace, alors que lesdites publicités ont été établies par elle personnellement et pour ses propres besoins, qu'elles portent son logo et qu'elles ont évolué avec le temps et à la mesure de l'expérience acquise et de la formation dispensée par elle;

Qu'elle relève que la prise en compte de références faites sur son site Internet à la méthode Bonapace n'est pas probante, dans la mesure où Madame Bonapace ne peut lui interdire de mentionner sa méthode comme un élément historique de l'évolution dans le temps des méthodes d'accouchement et d'accompagnement des parturientes;

Qu'elle précise que ne peut lui être sérieusement reprochée la publication dans une revue d'une interview donnée par elle et décrivant la méthode Bonapace, au motif que cette publication serait postérieure à la rupture du contrat, alors qu'elle n'est pas responsable de la date de parution de ladite publication, et alors qu'en toute hypothèse elle ne disposait plus du matériel pédagogique qui lui avait été initialement attribué, et alors qu'elle n'est plus en adéquation avec cette méthode aujourd'hui dépassée;

Qu'elle ajoute que le risque de confusion dans l'esprit du public n'existe pas, dans la mesure où la clientèle commune aux deux parties est celle des sages-femmes pour lesquelles la méthode Bonapace est une méthode parmi d'autres, ne pouvant être exclusive du savoir-faire propre à la sage-femme qui accompagne la parturiente, et alors que son actuel livret de formation diffère radicalement du matériel pédagogique des Editions Jab;

Mais considérant que, ce qui est reproché à Madame Bonhommet-Boterel, c'est, non pas d'avoir copié un modèle de publicité comparable à celui qu'elle pouvait diffuser du temps de sa collaboration avec Madame Bonapace, mais de s'être, en dehors de tout contrat et sans la moindre autorisation, approprié le savoir-faire de cette dernière postérieurement à la rupture des relations contractuelles entre les parties;

Or considérant qu'il est suffisamment démontré par les offres de formation proposées depuis lors par l'appelante que cette dernière a continué à utiliser le nom de Julie Bonapace et à enseigner sa méthode au moyen de stages rémunérés;

Considérant qu'il résulte notamment de la consultation de son site Internet que Madame Bonhommet-Boterel propose encore aujourd'hui des stages de préparation à l'accouchement s'inspirant clairement de la méthode Bonapace, même s'il n'est désormais plus fait référence expresse à cette méthode;

Considérant qu'à cet égard, les visualisations du contenu du site " bebea2.com " exploité par l'appelante, auxquelles a procédé Maître Guerrier, huissier de justice, suivant procès-verbal de constat en date des 29 et 30 septembre 2009, mettent tout particulièrement en évidence les similitudes existant entre les offres de formation de Madame Bonhommet-Boterel, telles qu'elles sont présentées le 15 octobre 2002 soit en cours d'exécution du contrat liant les parties, et celles objet des consultations en date des 2 septembre 2004, 6 décembre 2004, 20 février 2006 et 6 novembre 2007, donc parfaitement situés dans le temps et toutes postérieures à la résiliation de ce contrat;

Considérant que, si l'appelante fait plaider que ses interviews dans la presse sont antérieures à la date de résiliation du contrat et qu'elle ne peut être tenue pour responsable de leur date de parution, du moins elle ne peut contester que les articles de presse correspondants étaient accessibles sur son site même après que cette résiliation eut été effective,

Considérant qu'au demeurant, le risque de confusion dans l'esprit du public entre les deux offres de formation apparaît d'autant plus manifeste que ces offres de formation s'adressent en réalité à une même clientèle constituée de la profession des sages-femmes;

Considérant que, dès lors, le juge des référés a à bon droit retenu que la référence par Madame Bonhommet-Boterel postérieurement au 18 février 2004, date de la résiliation du contrat de licence, à la méthode Bonapace et à Madame Bonapace lors d'une interview dont il pouvait être pris connaissance sur son site Internet, et la diffusion par elle sur ce même site des offres de formation sur le modèle des formations de l'intimée, étaient de nature à entraîner une confusion dans l'esprit du public avec la formation proposée par Madame Bonapace et à affaiblir la position de cette dernière et de la société Editions Jab Inc. sur le marché de la formation des sages-femmes et futures mères;

Considérant qu'au surplus, les documents produits aux débats mettent en évidence une utilisation par Madame Bonhommet-Boterel, lors des stages organisés par elle, des techniques de relaxation, de massages et de respiration impliquant le père lors de l'accouchement, et ayant été mises au point par Madame Julie Bonapace sous le vocable " méthode Bonapace ";

Considérant qu'une telle utilisation caractérise de manière suffisamment évidente l'exploitation, sans autorisation, du travail d'autrui afin de tirer profit de son savoir-faire notamment dans la présentation des offres de formation et du contenu des stages proposés à la clientèle des sages-femmes;

Considérant que, de surcroît, le moyen soulevé par Madame Bonhommet-Boterel, suivant lequel la méthode Bonapace ne présente pas d'originalité, ne résulte pas d'expérimentations scientifiques rigoureuses et ne constitue que la reprise de connaissances acquises non susceptibles d'ouvrir droit à une protection juridique, ne peut être utilement opposé aux intimées, lesquelles fondent la présente action, non sur la méconnaissance d'un droit de propriété intellectuelle à ce jour non revendiqué par elles, mais sur les agissements fautifs de l'appelante de nature à engager sa responsabilité délictuelle;

Considérant que l'ordonnance entreprise doit donc être confirmée en ce qu'elle a énoncé qu'il convenait de mettre fin au trouble manifestement illicite résultant de ces actes constitutifs de concurrence déloyale et de parasitisme en ordonnant à Madame Bonhommet-Boterel, sous astreinte, de cesser immédiatement tout usage et exploitation du nom de Madame Bonapace, de la méthode Bonapace et, plus généralement, du savoir-faire qu'elle avait pu acquérir dans le cadre de sa collaboration avec Madame Bonapace;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, en référé, d'assortir l'astreinte prononcée par le premier juge des intérêts au taux légal, ni de réserver à la cour le pouvoir de liquider ladite astreinte.

Sur la demande de provision:

Considérant qu'il résulte de l'article 809 second alinéa du Code de procédure civile que c'est seulement si l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable que le Président du Tribunal de grande instance peut accorder une provision au créancier;

Considérant qu'en l'occurrence, Madame Julie Bonapace et la société Editions Jab Inc. font valoir que, dans la mesure où Madame Sylvie Bonhommet-Boterel agit depuis cinq ans comme si le contrat n'avait pas été résilié sans pour autant verser la commission contractuelle de 10 %, leur préjudice matériel jusqu'au prononcé de la décision de première instance peut être évalué au manque à gagner dont elles estiment avoir été victimes, soit l'équivalent de 10 % sur la somme de 114 300 euro, montant des revenus illicites prétendument perçus par la partie adverse, à parfaire en raison de la poursuite des formations illicites depuis que cette décision a été rendue;

Qu'elles précisent que Madame Bonapace a subi un préjudice moral incontestable, résultant de l'utilisation parfaitement indue par l'appelante de la méthode Bonapace, et justifiant d'ores et déjà l'allocation d'une provision de 3 000 euro à valoir sur ce chef de préjudice;

Mais considérant que si, ainsi que le rappelle le premier juge, la concurrence déloyale et le parasitisme causent nécessairement à celui qui en est victime un préjudice de nature à lui ouvrir droit à réparation, les éléments sur lesquels les intimées se fondent au soutien de leurs réclamations, et qui portent sur le chiffre d'affaires réalisé par Madame Bonhommet-Boterel et calculé à partir du nombre de stagiaires formés et du nombre de stages globaux organisés par elle depuis la date de résiliation du contrat, constituent un mode de détermination insuffisant précis du manque à gagner qui serait directement résulté pour elles des agissements reprochés à l'appelante;

Considérant que c'est donc à bon droit que l'ordonnance entreprise a réservé au juge du fond l'appréciation de ce préjudice et dit n'y avoir lieu à référé de ce chef.

Sur les demandes reconventionnelles en dommages-intérêts:

Considérant que Madame Bonhommet-Boterel expose que les conditions de la résiliation du contrat de licence de savoir-faire, qui lui a été notifiée par lettre du 18 février 2004, ne sont pas régulières, de telle sorte que c'est un nouveau contrat d'un an qui a vu le jour, ce qui justifie sa réclamation à hauteur de la somme de 12 155 euro à titre de dommages-intérêts, par référence au chiffre d'affaires de l'année 2003;

Qu'elle soutient que c'est en réalité Madame Bonapace qui, ayant besoin d'elle pour s'insérer sur le marché de la formation en France, a profité de son expérience et de son savoir-faire en matière de publicité, allant même jusqu'à usurper le numéro d'existence personnel qui lui avait été attribué, dans le but de profiter déloyalement de sa clientèle et de nuire à son image, de tels agissements étant constitutifs de concurrence déloyale lesquels justifient l'allocation à son profit de la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts;

Mais considérant qu'en premier lieu, il s'infère de l'article 15 du contrat de licence de savoir-faire liant les parties que:

" Le présent contrat prendra normalement fin à l'expiration de la durée prévue à l'article 6, sans qu'aucune indemnité de fin de contrat puisse être réclamée par l'une ou l'autre des parties.

La résiliation interviendra par lettre recommandée avec accusé de réception en respectant un délai de préavis d'un mois ";

Considérant qu'en l'occurrence, il est acquis aux débats que Madame Julie Bonapace a, par l'intermédiaire de son conseil, notifié à Madame Sylvie Bonhommet-Boterel la résiliation du contrat par courrier recommandé du 18 février 2004, soit un mois avant l'échéance du contrat à durée déterminée d'une année conclu le 21 mars 2002;

Considérant qu'en second lieu, il apparaît que l'incident relatif à l'usurpation alléguée du numéro d'existence personnel attribué à Madame Bonhommet-Boterel a été évoqué lors d'une réunion de la Commission de conciliation de l'ordre départemental des sages-femmes des Yvelines, et, en l'état des éléments d'information communiqués dans le cadre de la présente instance, la juridiction des référés ne dispose pas d'éléments suffisants pour déterminer quelle a été la nature ou l'ampleur de cet incident, et si, ainsi que le prétendent les intimées, le différend ayant opposé de ce chef les parties au présent litige a fait l'objet d'un règlement, amiable ou autre;

Considérant qu'il s'ensuit que les prétentions indemnitaires formées par l'appelante, tant pour rupture brutale et abusive que pour concurrence déloyale, se heurtent à l'existence de contestations sérieuses dont la juridiction des référés ne saurait connaitre sans excéder ses pouvoirs;

Considérant que l'ordonnance entreprise doit donc être confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles présentées par Madame Bonhommet-Boterel.

Sur les demandes accessoires:

Considérant qu'en l'absence de preuve que la procédure dont Madame Bonapace et la société Editions Jab Inc. ont pris l'initiative caractérise de leur part une intention de nuire ou un abus du droit d'agir en justice de nature à ouvrir droit à indemnisation en sa faveur, Madame Bonhommet-Boterel doit, ainsi que l'a à bon droit retenu le premier juge, être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive;

Considérant que l'ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu'elle a condamné Madame Bonhommet-Boterel à payer à Madame Bonapace et la société Editions Jab Inc. la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance;

Considérant que l'équité commande d'allouer à Madame Bonapace et à la société Editions Jab Inc. la somme complémentaire de 2 000 euro en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par ces dernières en cause d'appel;

Considérant que Madame Bonhommet-Boterel doit être condamnée aux dépens d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant contradictoirement et en dernier ressort, Déclare recevable l'appel interjeté par Madame Sylvie Bonhommet-Boterel, le dit mal fondé ; Déclare mal fondé l'appel incident de Madame Julie Bonapace et de la société Editions Jab Inc.; Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 9 juillet 2008 par le Président du Tribunal de grande instance de Versailles; Y ajoutant, Condamne Madame Sylvie Bonhommet-Boterel à payer à Madame Julie Bonapace et la société Editions Jab Inc. la somme complémentaire de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile; Condamne Madame Sylvie Bonhommet-Boterel aux dépens d'appel, et autorise la SCP Fievet-Lafon, avoués, à recouvrer directement la part la concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Code de procédure civile.