Cass. com., 23 mars 2010, n° 09-14.114
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Frédéric Magnien (Sté)
Défendeur :
Pierre Bourée fils (SA), GFA Vignoble Bernard Bourée
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Mandel
Avocat général :
M. Mollard
Avocats :
SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Thomas-Raquin, Bénabent
LA COUR : - Donne acte à la société Frédéric Magnien du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le GFA Vignoble Bernard Bourée ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 24 février 2009), que la société Pierre Bourée Fils, qui exploite à Gevrey Chambertin (Côte d'Or) une parcelle de terre au lieudit "la Justice" donnée à bail par le GFA Vignoble Bernard Bourée et qui commercialise des bouteilles de vin portant la mention " Clos de la Justice ", est titulaire d'une marque figurative comportant notamment la dénomination " Clos de la Justice " pour désigner en classe 33 les vins AOC Gevrey Chambertin provenant exclusivement du " Clos de la Justice " ; qu'ayant découvert que l'EURL Frédéric Magnien commercialisait des bouteilles de vin sous la dénomination " Clos de la Justice ", la société Pierre Bourée Fils et le GFA Vignoble Pierre Bourée ont sollicité sa condamnation pour contrefaçon de marque et actes de parasitisme ;
Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche : - Vu les articles L. 713-2 et L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle ; - Attendu que pour accueillir l'action en contrefaçon de marque, la cour d'appel retient que la société Frédéric Magnien a utilisé la dénomination " Clos de la Justice ", marque protégée conformément à l'article L. 713-1 du Code de la propriété intellectuelle, pour commercialiser des vins élaborés à partir de raisins provenant de la propriété jouxtant l'exploitation de la société Pierre Bourée fils et du GFA Vignoble Bernard Bourée et qui ne pouvaient donc prétendre qu'à l'appellation " Gevrey Chambertin " ou à la dénomination de " Gevrey Chambertin la Justice " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans procéder à une analyse comparative de la marque opposée et de l'étiquette incriminée alors que celles-ci n'étaient pas constituées de la seule dénomination " Clos de la Justice " mais comportaient d'autres éléments et sans rechercher si l'impression d'ensemble produite par les signes en présence étaient susceptibles de générer, pour le consommateur d'attention moyenne, un risque de confusion quant à l'origine des produits, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur la troisième branche du moyen : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour accueillir l'action en concurrence déloyale et agissements parasitaires, l'arrêt retient qu'en ayant imité servilement la dénomination " Clos de la Justice ", pour étiqueter et commercialiser des bouteilles de vin élaboré à partir de raisins acquis auprès de la SCEA Domaine Chazans louant une parcelle cadastrée A1 280 au lieu-dit "la Justice" alors que la dénomination " Clos de la Justice " incarnait la singularité des bouteilles de vin produites par la société Pierre Bourée fils, la société Frédéric Magnien a commis une faute consistant à vouloir profiter sans frais du travail réalisé par son concurrent durant des décennies pour faire connaître sa production viticole ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser des faits distincts de ceux à raison desquels elle prononçait condamnation au titre de la contrefaçon, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 février 2009, entre les parties, par la Cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Besançon.