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Décisions

ADLC, 25 février 2010, n° 10-DCC-17

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de la société SA Furmon par la société ITM Alimentaire Nord (groupe ITM Entreprises)

ADLC n° 10-DCC-17

25 février 2010

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 29 janvier 2010 relatif à l'acquisition de la société SA Furmon par la société ITM Alimentaire Nord, formalisée par un protocole de cession signé le 18 décembre 2009 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

A. LES ENTREPRISES CONCERNÉES

1. La société ITM Entreprises, contrôlée à 100 % par la Société civile des Mousquetaires, elle-même détenue par 1 330 personnes physiques dits " adhérents associés ", conduit et anime le réseau de commerçants indépendants connu sous le nom de " Groupement des Mousquetaires ". En sa qualité de franchiseur, la société ITM Entreprises a comme activité principale l'animation d'un réseau de points de vente, alimentaires et non alimentaires, exploités par des commerçants indépendants sous les enseignes suivantes : Intermarché, Ecomarché, Netto, Restaumarché, Bricomarché, Roady et Vêti. Cette gestion s'effectue notamment au travers de la signature et du suivi de contrats d'enseigne avec les sociétés exploitant ces points de vente. ITM Entreprises met également à la disposition de ses franchisés divers services de prospection, de conseil, de formation, etc. Enfin, ITM Entreprises offre aux franchisés la possibilité de bénéficier de conditions d'approvisionnement avantageuses auprès de ses filiales nationales et régionales mais également de fournisseurs référencés extérieurs au " Groupement des Mousquetaires ".

2. La société ITM Alimentaire Nord est une société de droit français détenue à [>50] % par la société ITM Alimentaire France et à [<50] % par la société ITM Entreprises, la société ITM Alimentaire France étant elle-même détenue par la société ITM Entreprises. La société ITM Entreprises a confié à la société ITM Alimentaire Nord l'animation et le développement du réseau de franchisés exploitant des magasins à l'enseigne Intermarché, Ecomarché et Netto, dans la région Nord de la France.

3. Le groupe ITM Entreprises a réalisé, au cours de l'exercice clos au 31 décembre 2008, un chiffre d'affaires total hors taxes de [20-30] milliards d'euro, dont [15-25] milliards en France.

4. La société SA Furmon (ci-après " Furmon ") est une société de droit français qui exploite un magasin à dominante alimentaire situé à Coudekerque-Branche (59210) sous enseigne Intermarché. Les titres de la société Furmon sont détenus [majoritairement] par les époux X et des membres de leur famille. M et Mme X sont signataires de la charte d'adhésion du groupement des Mousquetaires. Le solde du capital de la société Furmon est détenu par ITM Entreprises par le biais d'une action ne conférant pas de droits particuliers. De plus, la société Furmon a signé un contrat d'enseigne le 22 mai 1996 avec ITM Entreprises, par lequel l'utilisation de l'enseigne Intermarché lui est concédée pour l'exploitation de son fonds de commerce. Le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé par la société Furmon en 2008, dernier exercice clos, s'élève à 17,6 millions d'euro exclusivement en France.

5. ITM Alimentaire Nord s'est engagée par un protocole de cession et garantie de situation nette, en date du 18 décembre 2009, à acquérir la totalité des actions de la société Furmon détenues par les époux X et leur famille.

6. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de la société Furmon par le groupe ITM Entreprises, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

7. Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises concernées, elle ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au point II de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

8. Selon la pratique constante des autorités nationale et communautaire de la concurrence (1), deux catégories de marchés peuvent être délimitées (2) dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire. Il s'agit, d'une part, des marchés " aval ", de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs pour la vente de biens de consommation et, d'autre part, des marchés " amont " de l'approvisionnement des entreprises de commerce de détail en biens de consommation courante, de dimension nationale.

A. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION À DOMINANTE ALIMENTAIRE

1. LES MARCHÉS DE SERVICES

9. En ce qui concerne la vente au détail des biens de consommation courante, les autorités de concurrence, tant communautaire que nationales (3), ont distingué six catégories de commerce en utilisant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l'ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés, (ii) les supermarchés, (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail, (v) les maxi discompteurs, (vi) la vente par correspondance.

10. Les supermarchés sont usuellement définis comme des magasins à dominante alimentaire d'une surface de vente inférieure à 2 500 m2 et supérieure à 400 m2. Il convient cependant de rappeler que ces seuils doivent être utilisés avec précaution, et peuvent être adaptés au cas d'espèce, des magasins dont la surface est située à proximité d'un seuil, soit en-dessous, soit au-dessus, pouvant se trouver en concurrence directe dans les faits (4).

11. En l'espèce, le magasin racheté occupe aujourd'hui une surface de vente de 1 200 m2. Ce magasin rentre donc dans la catégorie des supermarchés.

2. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

12. Dans ses décisions récentes (5) relatives à des opérations concernant des hypermarchés ou des supermarchés à dominante alimentaire, l'Autorité de la concurrence a rappelé qu'en fonction de la taille des magasins concernés, les conditions de la concurrence devaient s'apprécier sur deux zones différentes :

- une première zone où se rencontrent la demande des consommateurs et l'offre des hypermarchés auxquels ils ont accès en moins de 30 minutes de déplacement en voiture et qui sont, de leur point de vue, substituables entre eux ;

- une seconde zone où se rencontrent la demande des consommateurs et l'offre des supermarchés et autres formes de commerce équivalentes situées à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture. Ces dernières formes de commerce peuvent comprendre, outre les supermarchés, les hypermarchés et les magasins discompteurs.

13. D'autres critères peuvent néanmoins être pris en compte pour évaluer l'impact d'une concentration sur la situation de la concurrence sur les marchés de la distribution de détail, ce qui peut conduire à affiner, au cas d'espèce, les délimitations usuelles présentées ci-dessus.

14. Au cas d'espèce, le magasin concerné par l'opération occupant une surface de vente inférieure à 2 500 m2 et rentrant dans la catégorie des supermarchés, l'analyse concurrentielle ne portera que sur le second marché, soit sur le marché incluant l'ensemble des hypermarchés, supermarchés et maxi-discompteurs localisés sur une zone de chalandise de 15 minutes en voiture autour de Coudekerque-Branche.

B. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT

15. En ce qui concerne les marchés de l'approvisionnement, la Commission européenne (6) a retenu l'existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits, délimitation suivie par les autorités nationales (7).

16. Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l'occasion de la présente opération.

III. Analyse concurrentielle

17. Sur le marché aval, comprenant les supermarchés, les hypermarchés et les magasins discompteurs situés dans une zone de chalandise de 15 minutes autour de Coudekerque-Branche, l'Intermarché de Coudekerque-Branche détenu par la société Furmon représente 2,14 % des parts de marché exprimées en surfaces de vente (1 200 m² sur un total de 55 985 m²).

18. En plus du supermarché de Coudekerque-Branche sont présents sur cette zone deux autres magasins exploités sous enseigne du groupe ITM Entreprises et qui représentent respectivement 4,20 % et 3,54 % des parts de marché.

19. Les magasins exploités sous enseigne appartenant au groupe ITM Entreprises détiennent donc, avant comme après l'opération, une part de marché inférieure à 10 % sur la zone considérée.

20. De plus, ils font face à plus de 20 magasins concurrents exploités sous des enseignes appartenant au groupe Carrefour (29 % de parts de marché), ou à d'autres concurrents tels qu'Auchan, Leclerc, Lidl ou Aldi.

21. En ce qui concerne les marchés amont de l'approvisionnement, l'opération, limitée à un magasin, n'est pas susceptible de renforcer significativement la puissance d'achat du groupe ITM Entreprises, tous produits confondus comme par grands groupes de produits. Le renforcement est d'autant plus mineur que, préalablement à l'opération, le point de vente objet de l'opération s'approvisionnait déjà [majoritairement] par l'intermédiaire de filiales d'ITM Entreprises.

22. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés amont ou aval de la distribution à dominante alimentaire.

Décide

Article unique : l'opération notifiée sous le numéro 10-0009 est autorisée.

Notes

1 Voir notamment les décisions de la commission M.946 Intermarché/Spar du 30 juin 1997, M.991 Promodès/Casino du 30 octobre 1997 et M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000. Voir également l'arrêté ministériel du 5 juillet 2000 dans l'opération Carrefour/Promodès et les avis du Conseil de la concurrence n° 97-A-14 du 1er juillet 1997, dans l'affaire Carrefour/Cora, n° 98-A-06 du 5 mai 1998, dans l'affaire Casino Franprix/Leader Price, et n° 00-A-06 du 3 mai 2000, dans l'affaire Carrefour/Promodès.

2 Décisions de la Commission dans les affaires M.1221 Rewe/Meinl du 3 février 1999, M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000 et M.2115 Carrefour/GB du 28 septembre 2000. Voir également la décision C 2005-98 Carrefour/Penny Market du 10 novembre 2005.

3 Décisions C 2008-32 Amidis SAGC du 9 juillet 2008, C 2007-172 Carrefour Plane Plamidis, du 13 février 2008, C 2007-154 Système U Vergali du 3 décembre 2007, C 2007-05 Carrefour Sofodis du 26 mars 2007, C 2006-15 Amidis Hamon du 14 avril 2006, C 2005-98 Carrefour Penny Market du 10 novembre 2005.

4 Voir notamment l'avis n°00-A-06 du Conseil du 3 mai 2000 relatif à l'acquisition par la société Carrefour de la société Promodès.

5 Décisions 09-DCC-24 du 23 juillet 2009 Floritine/C SF ; 09-DCC- du 28 mai 2009 Frandis/Financière Perdis ; 09-DCC-06 du 20 mai 2009 Evolis/ITM ; 09-DCC-04 du 29 avril 2009 Carrefour/Noukat,

6 Voir les décisions de la Commission M. 1221 Rewe/Meinl du 3 février 1999, M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000 et M. 2115 Carrefour/GB du 28 septembre 2000.

7 Voir notamment les décisions du ministre dans le secteur, C2005-98, Carrefour/Penny Market du 10 novembre 2005, C2006-15 Carrefour/Groupe Hamon du 14 avril 2006, C2007-172 relatif à la création de l'entreprise commune Plamidis du 13 février 2008 et C2008-32 Carrefour/SAGC du 9 juillet 2008.