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Décisions

ADLC, 18 mars 2010, n° 10-DCC-27

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de la société SAS Copra par la société ITM Alimentaire Sud Ouest (groupe ITM Entreprises)

ADLC n° 10-DCC-27

18 mars 2010

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 15 février 2010, relatif à l'acquisition de la majorité des titres de la société Copra SAS par la société ITM Entreprises, formalisée par un protocole d'accord signé le 25 janvier 2010. Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération.

1. La société ITM Entreprises, contrôlée à 100 % par la Société civile des Mousquetaires, elle-même détenue par 1 330 personnes physiques dits " adhérents associés ", conduit et anime le réseau de commerçants indépendants connu sous le nom de " Groupement des Mousquetaires ". En sa qualité de franchiseur, la société ITM Entreprises a comme activité principale l'animation d'un réseau de points de vente, alimentaires et non alimentaires, exploités par des commerçants indépendants sous les enseignes suivantes : Intermarché, Ecomarché, Netto, Restaumarché, Bricomarché, Roady et Vêti. Cette gestion s'effectue notamment au travers de la signature et du suivi de contrats d'enseigne avec les sociétés exploitant ces points de vente. ITM Entreprises met également à la disposition de ses franchisés divers services de prospection, de conseil, de formation, etc. Enfin, ITM Entreprises offre aux franchisés la possibilité de bénéficier de conditions d'approvisionnement avantageuses auprès de ses filiales nationales et régionales mais également de fournisseurs référencés extérieurs au " Groupement des Mousquetaires ". Le groupe ITM Entreprises a réalisé au cours du dernier exercice clos au 31 décembre 2008, un chiffre d'affaires total hors taxes de [20-30] milliards d'euro, dont [15-25] milliards en France.

2. La société ITM Alimentaire Sud Ouest est une société de droit français détenue à [>50] % par la Société ITM Alimentaire France, elle-même détenue par la société ITM Entreprises, et à [<50] % par la société ITM Entreprises.

3. La société SAS Copra (ci-après " Copra"), est une société de droit français qui a pour objet l'exploitation d'un magasin à dominante alimentaire situé à Hagetmau (40) sous enseigne Intermarché. Les titres de la société Copra sont détenus [majoritairement] en pleine propriété par les époux X. La société ITM Entreprises est titulaire d'une action de préférence détenue en pleine propriété. Les statuts de la société Copra confèrent à ITM Entreprises, pendant une durée [>10] ans, la possibilité de bloquer tout changement d'enseigne, de s'opposer à toute mutation d'actions et d'obliger les actionnaires majoritaires à céder le fond de commerce dès l'instant où ils exploiteraient un fond de commerce similaire sous une enseigne concurrente. Au-delà de cette période, ITM Entreprises conserve un droit de préférence sur toute vente de titres pendant [une durée supplémentaire >2] ans. Il ressort de ce qui précède, qu'avant l'opération, ITM Entreprises, exerçait déjà conjointement avec les époux X, le contrôle de la société Copra. Le chiffre d'affaires total mondial hors taxes consolidé réalisé par la société Copra en 2008, dernier exercice clos, s'élève à 26,3 millions d'euro exclusivement en France.

4. La société ITM Alimentaire Sud Ouest s'est engagée par un protocole d'accord signé le 25 janvier 2010 à acquérir les titres de la société Copra SAS détenus par les époux X. Elle déclare qu'il s'agit d'une acquisition à titre provisoire et que les titres acquis devraient être rétrocédés dans les meilleurs délais à un nouvel exploitant indépendant.

5. L'opération s'analyse donc comme le passage d'un contrôle conjoint d'ITM Entreprises et des époux X, à un contrôle exclusif d'ITM Entreprises via sa filiale ITM Alimentaire Sud Ouest sur la société Copra. Elle constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises concernées, elle ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au point II de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

6. Selon la pratique constante des autorités nationale et communautaire de la concurrence (1), deux catégories de marchés peuvent être délimitées (2) dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire. Il s'agit, d'une part, des marchés " aval ", de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs pour la vente de biens de consommation et, d'autre part, des marchés " amont " de l'approvisionnement des entreprises de commerce de détail en biens de consommation courante, de dimension nationale.

A. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION

1. LES MARCHÉS DE SERVICE

7. En ce qui concerne la vente au détail des biens de consommation courante, les autorités de concurrence, tant communautaire que nationales (3), ont distingué six catégories de commerce en utilisant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l'ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés, (ii) les supermarchés, (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail, (v) les maxi discompteurs, (vi) la vente par correspondance.

8. Les supermarchés sont usuellement définis comme des magasins à dominante alimentaire d'une surface de vente inférieure à 2 500 m2 et supérieure à 400 m2. Il convient cependant de rappeler que ces seuils doivent être utilisés avec précaution, et peuvent être adaptés au cas d'espèce, compte-tenu que des magasins dont la surface est située à proximité d'un seuil, soit en-dessous, soit au-dessus, peuvent se trouver en concurrence directe dans les faits (4).

9. En l'espèce, le magasin racheté occupe aujourd'hui une surface de vente de 2 880 m2. Ce magasin rentre donc dans la catégorie des hypermarchés.

2. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

10. Dans ses décisions récentes (5) relatives à des opérations concernant des hypermarchés ou des supermarchés, l'Autorité de la concurrence a rappelé qu'en fonction de la taille des magasins concernés, les conditions de la concurrence devaient s'apprécier sur deux zones différentes:

- une première zone où se rencontrent la demande des consommateurs d'une zone et l'offre des hypermarchés auxquels ils ont accès en moins de 30 minutes de déplacement en voiture et qui sont, de leur point de vue, substituables entre eux ;

- une seconde zone où se rencontrent la demande de consommateurs et l'offre des supermarchés et autres formes de commerce équivalentes, situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture. Ces dernières formes de commerce peuvent comprendre, outre les supermarchés, les hypermarchés et les magasins discompteurs.

11. D'autres critères peuvent néanmoins être pris en compte pour évaluer l'impact d'une concentration sur la situation de la concurrence sur les marchés de la distribution de détail, ce qui peut conduire à affiner, au cas d'espèce, les délimitations usuelles présentées ci-dessus.

B. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT

12. En ce qui concerne les marchés de l'approvisionnement, la Commission européenne (6) a retenu l'existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits, délimitation suivie par les autorités nationales (7).

13. Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l'occasion de la présente opération.

III. Analyse concurrentielle

1. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION A DOMINANTE ALIMENTAIRE

14. Sur le marché comprenant les hypermarchés situés dans une zone de chalandise de 30 minutes autour d'Hagetmau, l'Intermarché de Hagetmau exploité par la société Copra représente 23 % des parts de marché exprimées en surfaces de vente (2 880 m² sur un total de 12 409 m²). Est également présent en bordure de zone à Orthez un autre hypermarché Intermarché occupant une surface de 3 490 m² (28 % de parts de marché). La part de marché des magasins exploités sous une enseigne du groupe ITM Entreprises n'est pas modifiée par la présente opération : elle s'élève, avant comme après l'opération, à 51 %. De plus, comme mentionné ci-dessus, la partie notifiante déclare effectuer l'acquisition des titres de la société Copra à titre provisoire, en vue de leur rétrocession à un exploitant indépendant. Ces magasins font face à la concurrence d'un hypermarché exploité sous enseigne E. Leclerc occupant une surface de vente de 6 039 m² (49 % de parts de marché). A proximité immédiate de la bordure de zone se trouve de plus la ville de Mont-de-Marsan avec plusieurs hypermarchés concurrents.

15. Sur le marché comprenant les supermarchés et autres formes de commerce équivalentes, situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture autour de Hagetmau, l'Intermarché exploité par la société Copra représente 45 % des surfaces de vente (2880 m² sur un total de 6390 m²). Sont également présents sur la zone un Carrefour de 2057 m², soit 32% des surfaces, et un Lidl de 803 m², soit 13 %. Enfin, l'extension prévue de la surface du Netto de Hagetmau à 650 m² doit être prise en compte, ce qui porterait la part des magasins exploités sous une enseigne du groupe ITM Entreprises dans le total des surfaces de vente à 55%. L'opération notifiée ne modifie cependant pas la part de marché contrôlée par le groupe.

16. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés en cause.

2. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT

17. En ce qui concerne les marchés amont de l'approvisionnement, l'opération, qui ne concerne qu'un seul magasin, n'est pas susceptible de renforcer significativement la puissance d'achat du groupe ITM Entreprises, tous produits confondus comme par grands groupes de produits. Le renforcement est d'autant plus mineur que, préalablement à l'opération, l'entreprise cible s'approvisionnait déjà pour 64 % par l'intermédiaire de filiales d'ITM Entreprises.

Décide

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 10-0014 est autorisée.

Notes :

1 Voir notamment les décisions de la commission M.946 Intermarché/Spar du 30 juin 1997, M.991 Promodès/Casino du 30 octobre 1997 et M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000. Voir également l'arrêté ministériel du 5 juillet 2000 dans l'opération Carrefour/Promodès et les avis du Conseil de la concurrence n° 97-A-14 du 1er juillet 1997, dans l'affaire Carrefour/Cora, n° 98-A-06 du 5 mai 1998, dans l'affaire Casino Franprix/Leader Price, et n° 00-A-06 du 3 mai 2000, dans l'affaire Carrefour/Promodès.

2 Décisions de la Commission dans les affaires M.1221 Rewe/Meinl du 3 février 1999, M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000 et M.2115 Carrefour/GB du 28 septembre 2000. Voir également la décision C 2005-98 Carrefour/Penny Market du 10 novembre 2005.

3 Décisions C 2008-32 Amidis SAGC du 9 juillet 2008, C 2007-172 Carrefour Plane Plamidis, du 13 février 2008, C 2007-154 Système U Vergali du 3 décembre 2007, C 2007-05 Carrefour Sofodis du 26 mars 2007, C 2006-15 Amidis Hamon du 14 avril 2006, C 2005-98 Carrefour Penny Market du 10 novembre 2005.

4 Voir notamment l'avis n° 00-A-06 du Conseil du 3 mai 2000 relatif à l'acquisition par la société Carrefour de la société Promodès.

5 Décisions 09-DCC-24 du 23 juillet 2009 Floritine/C S.F ; 09-DCC- du 28 mai 2009 Frandis/Financière Perdis ; 09-DCC-06 du 20 mai 2009 Evolis/ITM ; 09-DCC-04 du 29 avril 2009 Carrefour/Noukat,

6 Voir les décisions de la Commission M.1684 Carrefour/Promodès du 25 janvier 2000 et M. 2115 Carrefour/GB du 28 septembre 2000.

7 Voir notamment les décisions du ministre dans le secteur, C2005-98, Carrefour/Penny Market du 10 novembre 2005, C2006-15 Carrefour/Groupe Hamon du 14 avril 2006, C2007-172 relatif à la création de l'entreprise commune Plamidis du 13 février 2008 et C2008-32 Carrefour/SAGC du 9 juillet 2008.