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Décisions

Cass. 2e civ., 20 mai 2010, n° 09-14.111

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

AACAB

Défendeur :

Caisse régionale de crédit maritime mutuel du Morbihan et de la Loire Atlantique

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Loriferne

Avocats :

Me Le Prado, SCP Boré, Salve de Bruneton

Rennes, du 24 fév. 2009

24 février 2009

LA COUR : - Donne acte à l'Association d'aide contre les abus bancaires, du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre M. X ; - Attendu, selon arrêt attaqué (Rennes, 24 février 2009), que la Caisse régionale de crédit maritime mutuel du Morbihan et de la Loire Atlantique (le Crédit maritime), estimant être victime d'une campagne de dénigrement du fait de la parution d'une page sur un site Internet " http://exactions.bancaires.free.fr ", de la diffusion de tracts portant le logo Crédit maritime, intitulés " appel à témoins ", et de l'envoi d'un document à des professionnels du monde maritime pour les inviter à dénoncer les pratiques de la banque, a assigné l'Association d'aide contre les abus bancaires (l'AACAB) devant un juge des référés en cessation de trouble manifestement illicite et allocation d'une provision ;

Sur le premier moyen : - Attendu que l'AACAB fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance lui ayant fait interdiction d'exploiter tous sites similaires à l'ancien site http://exactions.bancaires.free.fr, de diffuser les tracts portant le logo du Crédit maritime intitulés " appel à témoins " et de réitérer tout nouveau mailing analogue à celui visé dans l'assignation au préjudice du Crédit maritime sous différentes astreintes, alors, selon le moyen : 1°) que le juge des référés peut ordonner toutes mesures provisoires relatives aux faits qui sont l'objet de poursuites devant la juridiction répressive lorsque l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que l'AACAB invoquait, dans ses conclusions d'appel, que les faits de diffamation objet des poursuites et invoqués au soutien de l'action en référé se heurtaient à l'exception de bonne foi qui constitue une cause exonératoire de responsabilité du chef de ce délit ; qu'en ordonnant des mesures provisoires tendant à faire cesser le trouble résultant des faits de diffamation dénoncés par le Crédit maritime invoqués au soutien de l'assignation en référé sans se prononcer, comme cela lui était expressément demandé, sur le caractère sérieusement contestable de l'obligation de l'AACAB qui invoquait le bénéfice de la bonne foi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 5-1 du Code de procédure pénale et 29 de la loi du 29 juillet 1881 ; 2°) que la condamnation à faire cesser un trouble manifestement illicite occasionné par le contenu d'un site Internet ne peut être prononcée contre le titulaire d'un autre site auquel un lien, introduit à son insu, renvoie ; que l'AACAB faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, qu'elle n'était pas titulaire du site Internet http://extractions.bancaires.free.fr et qu'un lien avait été introduit sur cette page en direction de son propre site sans qu'elle en soit informée ; qu'en condamnant l'AACAB sous astreinte de 1 000 euro par infraction constatée, à l'interdiction d'exploiter tous sites similaires à l'ancien site http://extractions.bancaires.free.fr au motif que le lien vers son propre site caractérisait une implication dans la campagne engagée contre le Crédit maritime sans rechercher, comme cela lui était demandé, si le lien vers le site de l'AACAB n'avait pas été introduit à son insu en sorte que le trouble occasionné au Crédit maritime ne pouvait lui être imputé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 5-1 du Code de procédure pénale et 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la connexion du site litigieux renvoyait à l'AACAB dont il était donné l'adresse, que le tract " appel à témoins " mentionnait le numéro de téléphone de l'AACAB et précisait que cet appel était réalisé en partenariat avec l'AACAB, que les termes employés jetaient la suspicion sur le Crédit maritime et que les courriers n'étaient pas de simples réponses apportées à des demandes de clients du Crédit maritime, puis retenu que tous ces éléments révélaient une campagne de dénigrement impliquant l'AACAB et que les méthodes employées dépassaient manifestement la nécessité d'information du public que l'AACAB estimait de son devoir de donner, la cour d'appel a pu en déduire sans avoir à se prononcer sur l'existence d'une contestation sérieuse, qu'il existait un trouble manifestement illicite auquel il convenait de mettre fin ;

Et attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la mesure propre à mettre fin au trouble qu'elle constatait, que la cour d'appel, qui n'a pas condamné l'AACAB à faire cesser un trouble sur un site dont elle n'était pas titulaire, a statué comme elle l'a fait ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe : - Attendu que l'AACAB fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme à titre de provision ;

Mais attendu que l'arrêt, qui énumère les différentes méthodes employées par l'AACAB dont il retient qu'elles constituent un dénigrement évident du Crédit maritime et dépassent manifestement la nécessité d'information du public, caractérise ainsi suffisamment le comportement fautif de l'AACAB et l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de réparation du préjudice ainsi causé au Crédit maritime ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.