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Décisions

ADLC, 1 juillet 2010, n° 10-DCC-69

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Lettre

Au conseil de la société Le Carbone Lorraine relative à une montée dans le capital de la société Boostec

ADLC n° 10-DCC-69

1 juillet 2010

Maîtres,

Vous avez adressé un dossier de notification au service des concentrations le 10 mai 2010, déclaré complet le 28 mai 2010, relatif à l'acquisition de [>50 %] du capital et des droits de vote de la société Boostec par la société Le Carbone Lorraine, le solde du capital restant détenu par la société Astrium. Cette opération a été formalisée par un protocole de cession d'actions, un protocole d'accord conclu entre Boostec et Astrium en présence de Le Carbone Lorraine et un pacte d'actionnaire, en date du 2 avril 2010.

Astrium est une société de droit français, détenue directement et indirectement à 100% par EADS N.V. Astrium est active dans le secteur de l'industrie spatiale : conception, fabrication et fourniture de satellites, de sous-systèmes et équipements de satellites, de lanceurs spatiaux, d'engins spatiaux, de composants pour infrastructures orbitales et d'instruments spatiaux. Elle est présente en Allemagne, en France, en Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. EADS a réalisé en 2009 un chiffre d'affaires total hors taxes de 42,8 milliards d'euro, dont [>150 millions] d'euro en France.

Le Carbone Lorraine est une société anonyme qui développe des applications industrielles de haute technologie utilisant du carbone et du graphite. Le Carbone Lorraine est coté en Bourse à Euronext Paris et son actionnariat est dispersé, ses principaux actionnaires étant des institutionnels français (38,5 %), des actionnaires individuels (21,1 %), des salariés (1,4 %) et des institutionnels étrangers (38,8 %). Le Carbone Lorraine a réalisé un chiffre d'affaires total hors taxes de 587,3 millions d'euro, dont [>50] millions d'euro en France.

Boostec est une société par actions simplifiée spécialisée dans la fabrication de systèmes et composants de haute performance en carbure de silicium, utilisés principalement dans le secteur de l'instrumentation pour l'optique spatiale (caméras et télescopes embarqués sur satellites, engins spatiaux et/ou aéronefs ainsi que l'instrumentation optique au sol). Avant l'opération, son capital est détenu à [<50 %] par Astrium, [<50 %] par l'Institut Régional de Développement Industriel de Midi-Pyrénées (ci-après l' " IRDI ") et à [>50 %] par la société anonyme FIBA SA (détenue principalement par deux personnes physiques). Boostec a réalisé en 2009 un chiffre d'affaires total hors taxes de [<50] millions d'euro, dont [<50] millions d'euro en France.

L'opération consiste en l'acquisition par Le Carbone Lorraine de [>50 %] du capital et des droits de vote de Boostec auprès de FIBA et de l'IRDI. Astrium continuera à détenir [<50 %] du capital et des droits de vote.

L'opération notifiée soulève plusieurs questions. Ainsi, la question se pose de la nature du contrôle exercé sur Boostec : soit la participation minoritaire d'Astrium au capital de Boostec, aux termes des divers accords et protocoles conclus entre eux, ne lui donne pas une influence déterminante sur cette société, qui est alors contrôlée exclusivement par Le Carbone Lorraine ; soit Astrium dispose d'une influence déterminante sur Boostec qui est alors contrôlée conjointement par Astrium et Le Carbone Lorraine.

Dans le premier cas, l'opération ne peut faire l'objet du contrôle prévu aux articles L. 430-3 du Code de commerce et suivants, dans la mesure où les chiffres d'affaires à prendre en compte sont ceux de Le Carbone Lorraine et de Boostec et qu'ils ne franchissent pas les seuils de chiffres d'affaires prévus à l'article L. 430-2.

Dans le second cas, l'opération n'est pas, non plus, contrôlable. En effet, le II de l'article L. 430-1 du Code de commerce dispose que " la création d'une entreprise commune accomplissant de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome constitue une concentration au sens du présent article ". L'autonomie de l'entreprise commune par rapport à ses maisons mères s'apprécie en premier lieu en vérifiant qu'elle dispose " de ressources suffisantes pour opérer de façon indépendante sur un marché et notamment de tous les éléments structurels nécessaires au fonctionnement de sociétés autonomes (ressources humaines, budget, responsabilité commerciale) " (1). Par ailleurs, la structure doit être " une entreprise accomplissant toutes les fonctions d'une entité économique autonome [...] ce qui signifie qu'elle opère sur un marché, en y accomplissant les fonctions qui sont normalement exercées par les autres entreprises présentes sur ce marché " (2).

En l'espèce, le chiffre d'affaires actuel de Boostec est constitué [secret d'affaires] de ses ventes auprès d'Astrium dans le domaine de l'instrumentation optique spatiale. De plus, une [secret d'affaires] partie de son activité actuelle est directement dépendante [secret d'affaires]. Il est certes prévu qu'à terme, Boostec développe des produits dans d'autres domaines que l'instrumentation spatiale pour le compte de Le Carbone Lorraine, mais ces nouvelles activités sont hypothétiques et ne devraient pas générer de chiffre d'affaires significatif à court terme. De plus, le projet notifié prévoit que ces nouveaux produits viendront compléter la gamme offerte par Le Carbone Lorraine, qui en commercialisera la très grande majorité.

De l'ensemble de ces éléments, il ressort que la société restera trop dépendante de ses sociétés mères dans son fonctionnement pour pouvoir considérer qu'il s'agit d'une entreprise de plein exercice.

Ainsi, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le point de savoir si Astrium exerce une influence déterminante sur Boostec, il y a lieu de constater que cette opération ne constitue pas une concentration au sens de l'article L. 430-1.

Par conséquent, je vous informe que l'opération notifiée n'est pas soumise au contrôle des concentrations prévu aux articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce.

Notes

1 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, § 54.

2 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, § 55.