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Décisions

CA Toulouse, 2e ch. sect. 1, 19 mai 2010, n° 08-05575

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Jean-Louis Boyer Immobilier (SARL), Boyer

Défendeur :

Roge

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lagriffoul

Conseillers :

MM. Belières, Roger

Avoués :

SCP Nidecker Prieu-Philippot Jeusset, SCP Château

Avocats :

Me Lagrange, SCP Bugis Pères Ballin Renier Alran

T. com. Castres, du 13 oct. 2008

13 octobre 2008

Faits et procédure

Selon acte sous seing privé du 22 novembre 2005, l'Agence immobilière Jean-Louis Boyer Immobilier a consenti à M. Gerald Roge un mandat d'agent commercial dans les conditions de la loi du 2 janvier 1970. Il a été mis fin à ce contrat dans le courant de l'année 2006. M. Roge a déposé une requête en injonction de payer pour obtenir paiement de 1 604 euro au titre de commissions dues sur la vente faite à Mme Dos Santos. Le Président du tribunal de commerce a rendu une ordonnance faisant droit à cette demande.

La société Jean-Louis Boyer Immobilier a fait opposition à cette ordonnance. M. Jean-Louis Boyer qui a fait apport de son fonds à la société éponyme est intervenu à l'instance. M. Roge a sollicité par voie de conclusions une deuxième commission de 5 750 euro sur la vente conclue avec M. Grillères, soit au total, la somme de 7 354 euro.

Par jugement en date du 13 octobre 2008, le Tribunal de commerce de Castres a confirmé l'ordonnance d'injonction de payer rendue contre la société Jean-Louis Boyer Immobilier à la demande de M. Roge et a fait droit aux prétentions de M. Roge.

La société Jean-Louis Boyer Immobilier et M. Jean-Louis Boyer ont interjeté appel le 5 novembre 2008.

Prétentions et moyens des parties

La société Jean-Louis Boyer Immobilier et M. Jean-Louis Boyer s'opposent aux demandes en invoquant le fait que M. Roge n'était pas inscrit sur le registre spécial des agents immobiliers et que, de ce fait, son activité serait illicite et de nullité absolue.

Dans le cas où la cour passerait outre à la nullité du contrat, ils soutiennent que M. Roge n'aurait pas droit aux commissions. Pour la vente Dos Santos, parce que Mme Dos Santos était une cliente antérieure de la SARL Jean-Louis Boyer Immobilier et que M. Jean-Louis Boyer s'était occupé de son dossier, s'agissant de la vente Grillères parce que le mandat de vente conclu le 3 avril 2006 par l'entremise de M. Grillères a été suivi d'un nouveau mandat conclu avec la société ABC Immobilier le 16 octobre 2006, toujours par l'entremise de M. Roge mais après sa révocation, puis remplacé par un mandat avec l'Agence Boyer le 8 décembre 2006.

La société Jean-Louis Boyer Immobilier et M. Jean-Louis Boyer demandent à la cour de :

- Dire Jean-Louis Boyer personnellement hors de cause,

- Dire nul et de nul effet le contrat en date du 22 novembre 2007 avec toutes conséquences de droit emportant le débouté des demandes de M. Roge,

A titre subsidiaire,

- Dire que M. Roge ne peut prétendre à commissions sur les ventes Dos Santos et Grillères, ce après avoir constaté que les transactions ont été menées par la SARL Jean-Louis Boyer Immobilier.

- Condamner M. Roge au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à payer la somme de 2 500 euro.

- Le condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Nidecker & Prieu Philippot & Jeusset.

M. Gérald Roge soutient que, ne réalisant pas de transactions, il n'était pas tenu de s'inscrire sur le registre des agents commerciaux et qu'en tout cas, il est en droit de réclamer ses commissions à M. Boyer. Il estime qu'il prouve qu'il a bien amené les acquéreurs, Mme Dos Santos et M. Grillères, ce qui suffit à ouvrir son droit à commission à hauteur de 50 % conformément au contrat d'agent commercial.

M. Roge demande à la cour de confirmer le jugement dont appel et condamner solidairement M. Boyer et la SARL Jean-Louis Boyer Immobilier à payer la somme de 1 794 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Château.

Motifs de l'arrêt

Sur la mise hors de cause de M. Boyer.

M. Boyer a fait apport de son fonds de commerce à l'EURL Jean-Louis Boyer Immobilier immatriculée le 1er août 2007, postérieurement au contrat d'agence commerciale et aux mandats de vente invoqués par M. Roge. M. Boyer qui était débiteur des commissions au moment où le droit de créance a pris naissance ne peut donc solliciter sa mise hors de cause.

Sur la validité du contrat d'agent commercial.

M. Boyer qui a conclu le contrat d'agent commercial avec M. Roge et lui a délivré l'attestation rédigée dans les termes de l'article IV de la loi du 2 janvier 1970 le 24 novembre 2005 accuse curieusement son agent commercial d'exercer une activité illicite. Il n'est cependant pas interdit à un agent immobilier de s'attacher la collaboration d'un agent commercial lequel n'est pas soumis à la réglementation des agents immobiliers pourvu qu'il n'effectue pas directement les transactions. De même, l'absence d'inscription au registre spécial des agents commerciaux prévu à l'article R. 134-6 du Code du commerce, qui n'est qu'une simple mesure de police professionnelle ne rend pas nul le contrat et ne prive pas l'agent commercial de son droit à commission.

M. Boyer invoque certes la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle la réglementation n'interdit pas aux parties de subordonner la prise d'effet du contrat d'agent commercial à l'immatriculation de l'agent sur le registre spécial (Cass. Com. 8 juillet 2003) mais il n'apporte pas la preuve d'une telle stipulation alors qu'au contraire, il a délivré la carte professionnelle et exécuté le contrat pendant une année jusqu'à la rupture de celui-ci.

Le contrat d'agent commercial sera donc reconnu valide.

Sur le droit à commissions.

Il résulte de l'article V du contrat d'agent commercial que M. Roge devait percevoir "une commission dont le taux est fixé à 50 % pour la prise du mandat et 20 % supplémentaire pour la vente, du montant des factures d'honoraires TTC. Ces commissions seront payées le jour de la signature de l'acte authentique, majorées des jours nécessaires à l'encaissement des paiements".

Vente "Dos Santos"

Il résulte des attestations de Mme Dos Santos que M. Roge, après plusieurs contacts téléphoniques, lui a proposé et présenté sur plan des terrains à la vente sis lotissement Puech, après quoi elle a décidé d'acheter un terrain. Elle a appelé M. Roge qui lui a demandé de se mettre en relation avec M. Boyer avec lequel elle a signé l'acte sous seing privé.

Le fait que la vente des terrains était confiée à M. Boyer n'enlève pas à M. Roge son droit à commission selon les dispositions contractuelles puisque c'est lui qui a amené le client à l'Agence immobilière. Ce n'est pas parce que l'agent immobilier a également eu des contacts avec le client que l'agent commercial qui a conclu le mandat n'a pas droit à sa commission qui ne représente qu'une partie de la commission de l'agence immobilière.

Il sera donc fait droit à la demande de commission de M. Roge.

Vente "Grillères"

Le mandat de vente en date du 3 avril 2006, entre M. Grillères et l'Agence Jean-Louis Immobilier est entièrement rédigé de la main de M. Roge. Ce mandat a été apporté par M. Roge comme en fait foi la rédaction de l'acte de mandat. Le fait que M. Boyer ait ensuite "remplacé" ce mandat par un mandat postérieur à la révocation de M. Roge est tout à fait indifférent, le client ayant déjà été amené. On pourrait même éventuellement, apprécier ce "remplacement" comme une manœuvre pour priver l'agent commercial de sa commission.

Le fait que M. Roge lui-même ait fait signer à M. Grillères un autre mandat avec un autre agent immobilier est également indifférent dès lors que la vente a été passée par l'agence Boyer.

M. Boyer conteste encore le droit à commission de M. Roge au motif que la vente n'aurait pas été passée dans l'année de validité du mandat de vente.

M. Roge affirme, lui, que la vente a été passée en janvier 2007, ce qui est confirmé par l'acte sous seing privé signé le 16 janvier 2007. M. Boyer réplique que la vente a été réalisée en mai 2007 mais il fait référence à l'acte authentique, qui fixe le moment du paiement de la commission mais non la date de naissance du droit à commission, lequel apparaît, aux termes de l'article L. 134-6 du Code du commerce, lors de la conclusion de l'opération commerciale, soit, en l'espèce, le jour de l'acte de vente sous seing privé.

C'est donc à bon droit que le premier juge a reconnu le droit à commission de M. Roge pour les deux ventes contestées. Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Le demandeur n'établit pas en quoi le droit de se défendre en justice aurait dégénéré en abus du droit et causé un préjudice particulier. Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

L'équité commande l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile à l'intimé contraint d'exposer des frais devant la cour.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions, y ajoutant, Condamne solidairement M. Boyer et la SARL Jean-Louis Boyer Immobilier à payer la somme de 1 794 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Château.