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Décisions

CA Lyon, 3e ch. civ. A, 12 janvier 2010, n° 08-07764

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

France Scan (SA), Sapin (ès qual.), Noiraix Pey (ès qual.)

Défendeur :

Marcatech (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvet

Conseillers :

Mme Clozel-Truche, M. Maunier

Avoués :

SCP Baufume-Sourbe, SCP Brondel-Tudela

Avocats :

SCP Colbert, Me Barret

T. com. Villefranche-Tarare, du 11 sept.…

11 septembre 2008

Exposé du litige

Aux termes d'un contrat d'agent commercial signé le 03/02/2003, la société Marcatech s'est vu confier par la société Scan France la commercialisation de ses produits dans l'Ouest de la France.

Par lettre du 24/03/06, la société Marcatech a mis en demeure son mandant de lui payer la somme de 14 339,74 euro représentant le solde de commissions lui restant dû selon factures des :

• 23/09/2004, d'un montant de 6 888,96 euro, pour une affaire conclue avec la société Jean Floch,

• 30/12/2004, d'un montant de 3 695,64 euro, pour une affaire conclue avec la Fromagerie de Thiviers,

• 30/12/2004, d'un montant de 7 510,74 euro, pour une affaire conclue avec la Société Industrielle Laitière de Léon,

déduction faite d'un avoir de 3 755,14 euro émis le 15/12/2004 sur la troisième facture.

Elle devait recevoir un paiement de la somme de 5 877,01 euro que la société France Scan a reconnu lui devoir.

Après avoir poursuivi vainement, par assignation du 24/07/2006 devant le juge des référés, le recouvrement de sa créance, par assignation délivrée le 05/01/2007, elle a poursuivi devant le Tribunal de commerce de Lyon, outre le recouvrement du solde de sa créance, le paiement d'une indemnité de brusque rupture du contrat. A la suite de l'ouverture du redressement judiciaire de la société Scan France le 14/07/2007, elle a appelé en cause l'administrateur judiciaire, Maître Sapin, et le mandataire judiciaire, Maître Noiraix Pey.

Par jugement du 11/09/2008, le Tribunal de commerce de Villefranche-Tarare a :

• débouté la société France Scan de l'ensemble de ses conclusions reconventionnelles

• prononcé aux torts de la société France Scan la résiliation du contrat d'agent commercial signé le 03/02/2003

• fixé la créance de la société Marcatech sur la société France Scan à 38 550,44 euro se décomposant comme suit :

- 8 462,73 euro au titre du solde de commissions

- 27 587,71 euro à titre d'indemnité de rupture de contrat

- 2 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société France Scan et les mandataires judiciaires ont interjeté appel le 12/11/2008.

Aux termes de leurs dernières conclusions, expressément visées par la cour, Maître Sapin intervenant comme commissaire à l'exécution du plan, ils sollicitent l'infirmation du jugement du 11/09/2008, le rejet de prétentions de la société Marcatech et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile en leur faveur. A titre subsidiaire, si des sommes sont dues par la société France Scan, ils demandent à la cour de dire qu'elles seront soumises au plan de continuation adopté le 12/06/2008, modifié par jugement du 11/09/2008.

En premier lieu, ils soutiennent que la société Marcatech est redevable envers la société France Scan d'une facture d'un montant de 1 573,77 euro correspondant à des frais de participation au salon CFIA 2004, selon facture du 05/01/2005, non contestée en temps utile.

En deuxième lieu, rappelant qu'aux termes du contrat, l'absence de règlement de sa facture par le client fait obstacle au droit à commission de l'agent, ils contestent le droit à commission de la société Marcatech au titre du marché de la société Jean Floch, qui ne s'est pas acquittée du prix de vente, au motif d'un défaut de la marchandise, ce qui a justifié l'émission d'un avoir pour solder le litige. Ils contestent le reproche adressé à cette dernière de n'avoir rien fait pour recouvrer sa créance.

En troisième lieu, ils contestent l'indemnité de rupture réclamée, d'abord comme étant irrecevable du fait que la commande a été formulée plus d'un an après la cessation du contrat, ensuite comme étant non fondée, celle-ci étant intervenue d'un commun accord.

Aux termes de ses dernières écritures, expressément visées par la cour, la société Marcatech conclut à la confirmation du jugement entrepris, et à l'allocation à son profit d'une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle conteste être redevable d'une quelconque somme au titre de frais de participation à un salon CFIA, où elle n'était pas présente.

Sur la commission Jean Floch, elle estime que la commission lui est due, faisant valoir que :

- ce n'est que deux ans après la vente que la société France Scan a invoqué le non-fonctionnement du matériel livré à la société Le Floch;

- la société France Scan ne rapporte la preuve d'aucune démarche auprès du fabriquant du matériel pour obtenir une mise en adéquation du matériel ou son remplacement, ni d'aucune diligence pour recouvrer la facture;

- l'avoir dont se prévaut la société France Scan n'a été établi que le 02/06/2009, et ne constitue qu'un avoir partiel.

Elle réclame une indemnité de fin de contrat, dont la réclamation est recevable, aucune résiliation n'étant intervenue avant qu'elle soit formulée. Elle conteste que le départ de Monsieur Hariveau ait pu être une cause de fin du contrat, du fait que le second dirigeant Monsieur Guerin à l'époque de la signature est toujours en fonction. Enfin, elle indique qu'aux termes du contrat la non-réalisation des objectifs de vente par le mandataire autorisait le mandant à réduire le secteur géographique ou à supprimer l'exclusivité.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 03/11/2009.

Sur ce,

Sur les frais de participation au salon CFIA 2004

La société France Scan ne verse aux débats ni la facture du 05/01/2005 qui fonde sa demande au titre du salon CFIA 2004, que la société Marcatech nie avoir reçue, ni aucune lettre de réclamation avant le 03/04/2006. Elle ne justifie pas de l'obligation de cette dernière au paiement des frais litigieux.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Scan France à ce titre.

Sur le solde de commissions

En ce qui concerne le marché Jean Floch, qui a fait l'objet d'une facture du 29/04/2004, la société France Scan produit un avoir consenti à l'acheteur en date du 16/05/2009, d'un montant de 21 434,78 euro HT, justifié selon la lettre du 02/06/2009, versée aux débats, par l'insatisfaction du client qui n'aurait plus eu confiance dans les qualités de détection du matériel.

La société France Scan ne justifie pas des doléances du client, ni des diligences accomplies depuis 2004 pour recouvrer sa facture. De ce fait et en raison du caractère tardif de l'établissement de l'avoir, consenti cinq ans après la facture, le droit à commission de l'agent est acquis. De surcroît, l'avoir n'était que partiel et ne correspondait qu'à un solde de la facture que la société Jean Floch aurait refusé de régler ; il n'aurait pu justifier le refus de paiement de l'intégralité de la commission de 10 % convenue.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de la société Marcatech au titre du solde des commissions.

Sur l'indemnité de rupture

En application de l'article L. 134-12, alinéa 1 et 2, du Code de commerce:

"En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat qu'il entend faire valoir ses droits".

En l'espèce, le contrat signé le 03/02/2003 pour une durée indéterminée prévoyait une faculté de dénonciation à tout moment par lettre recommandée avec avis de réception, devant respecter un préavis de un mois la première année, de deux mois la deuxième année et de trois mois ensuite. Par ailleurs, il stipulait en son article 2.5 que, conclu "eu égard à la structure sociale et à la personnalité des dirigeants et salariés de l'agent, savoir notamment Monsieur Pascal Hariveau", "tout changement dans ... la personnalité du dirigeant ... ou le fait pour Monsieur Hariveau de ne plus faire partie de l'Agent constituera un juste motif de résiliation anticipée pour France Scan".

En l'espèce, il est constant que Monsieur Hariveau a quitté la société Marcatech en septembre 2005. Cependant, cet événement an lui-même n'a pas mis fin au contrat. Il donnait seulement la possibilité à la société Scan France de résilier, ce dont il n'est pas justifié.

Le fait que la société Marcatech ne justifie d'aucune diligence dans l'exécution du contrat courant 2005, et n'a adressé aucune réclamation à la société Scan France au titre de l'indemnité de rupture dans les lettres de mise en demeure qu'elle lui a envoyées courant 2005, n'établit pas une renonciation à l'exécution du contrat et à son droit à indemnité après rupture.

En toute hypothèse, la société Scan France, à qui incombe la preuve de la déchéance, ne démontre pas que le contrat avait pris fin plus d'une année avant la demande en paiement contenue dans l'assignation du 05/01/2007. La demande est donc recevable.

Sur le préjudice, il ressort des éléments au dossier que sur trois années d'exécution du contrat, en 2003, 2004 et 2005, la société Marcatech n'a perçu des commissions qu'en 2004, pour un montant global de 34 599 euro HT. Elle n'a donc réalisé aucune vente en 2003 et en 2005.

Dès lors, il lui sera alloué une indemnité d'un montant de 11 533,32 euro HT, soit 13 793,85 euro TTC, correspondant à une année de commissions calculée sur la moyenne des trois exercices.

Le jugement déféré sera donc infirmé quant au montant de la créance.

Il n'y a pas lieu de dire que la créance de la société Marcatech sera soumise au plan de continuation, ce qui n'ajouterait rien aux droits et obligations des parties.

Sur les demandes accessoires

Il n'y a pas lieu d'allouer à la société Marcatech une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les appelants seront déboutés de leur demande à ce titre.

Les parties garderont à leur charge les dépens qu'elles ont exposés.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé à 27 587,71 euro l'indemnité de rupture. Statuant à nouveau de ce chef, Dit que la créance de la société Marcatech sur la société Scan France au titre de l'indemnité de rupture est fixée à 13 793,85 euro TTC, Déboute la société Marcatech du surplus de sa demande au titre de l'indemnité de rupture, Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Dit que les parties garderont à leur charge les dépens qu'elles ont exposés en instance d'appel.